Ingeborg Holm (id.) – de Victor Sjöström – 1913
Rude et cruel, le destin de cette mère martyr, contrainte de vivre en foyer et d’accepter que ses enfants soient placés en familles d’accueil après que son mari est mort, malade et criblé de dettes. Un destin comme le cinéma du monde entier en a raconté beaucoup : des personnages de femmes balayées par une société patriarcale et un sort qui s’acharne.
Bonne nouvelle : c’est Victor Sjöström qui écrite et réalise cette adaptation d’une pièce de théâtre. Et on retrouve dès cette œuvre de jeunesse ce qui fait la grandeur de son cinéma : un sens du détail vrai, une empathie pour ceux que la vie n’épargne pas, et une intensité folle, qui fait oublier le côté un peu statique de certaines scènes, et les longueurs.
Ce n’est que le huitième film de Sjöström, réalisateur depuis l’année précédente seulement. Et il est encore loin d’aller à l’essentiel. La première partie, surtout, est un peu plombée par cette tendance à filmer le moindre mouvement, si anodin soit-il, dans sa longueur. D’où l’impression première de voir un film d’à peine 1h15 qui semble pourtant deux fois trop longs.
Mais cette impression s’estompe, au fur et à mesure que le mélo va plus loin. Rien n’épargne la pauvre Ingeborg Holm, qui se résout à faire les choix les plus cruels pour une mère, mais pour qui le pure est toujours à venir. Ce pourrait être trop pesant, trop ampoulé. Mais il y a cette intensité de la mise en scène, et le fait que, même quand c’est too much, eh bien c’est beau, et l’émotion vous prend aux tripes.
C’est une œuvre de jeunesse, et du cinéma encore un peu primitif. Mais Ingerborg Holm laisse apercevoir le regard d’un grand cinéaste encore en devenir. Beau mélo, belle curiosité.