Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour mars, 2016

Shutter Island (id.) – de Martin Scorsese – 2010

Posté : 31 mars, 2016 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, SCORSESE Martin | Pas de commentaires »

Shutter Island

Grand fan de Dennis Lehane, je dois avouer que Shutter Island est à peu près le seul de ses romans à m’être tombé des mains. Pas pour le style, impeccable, mais pour le fameux rebondissement final, très à la mode à l’époque après le succès de Sixième Sens (celui très oubliable de M. Night Shyamalan), le genre de trucs renversant qui doit t’arriver comme une claque, et que en l’occurrence j’avais senti dès la page 30.

Bref, un peu agacé d’emblée, l’adaptation qu’en avait signé Scorsese m’avait fait à peu près le même effet lors de sa sortie en salles. Le revoir quelques années après, en ayant bien assimilé le procédé narratif, m’oblige à revoir le jugement que j’en faisais. Justement parce que Scorsese, contrairement à Lehane, ne joue pas sur cette révélation finale. Son film, fascinant, est un voyage mental aux tréfonds de la folie. Un trip hallucinant et visuellement splendide.

J’essaye de ne point trop spoiler le film, qui est de ceux dont il est difficile de parler sans en dire trop, justement. Disons simplement que la première scène nous montre un bateau sortir de la brume. A son bord, le marshall Teddy Daniels et son nouveau partenaire, qui arrivent sur une île isolée sur laquelle est construit un asile qui abrite de dangereux pensionnaires instables. L’une de ces pensionnaires a disparu mystérieusement. Les deux flics enquêtent.

D’emblée, le comportement de Daniels est étrange : un homme dont la femme est morte et qui semble constamment sur le fil, au bord de la rupture. Soupçonnant tout le monde, doutant de tout. Leonardo DiCaprio est exceptionnel, d’une intensité ahurissante. Sa prestation ne trompe jamais le spectateur ; elle l’entraîne avec lui dans sa terrible descente aux enfers.

Tourné comme un film noir, truffé de costumes et de répliques trop clichés pour être honnêtes, Shutter Island est pur objet cinématographique. Scorsese y glisse des indices troublants et souvent à peine perceptibles, qui incitent à revoir et revoir le film, et qui laissent une sensation troublante. Le même trouble provient de la beauté des images, qui nous entraîne dans une contrée étrange entre réalisme et onirisme. Avec Shutter Island, Scorsese s’autorise un authentique exercice de style. Brillant, inquiétant et bouleversant.

Mains armées – de Pierre Jolivet – 2012

Posté : 30 mars, 2016 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2010-2019, JOLIVET Pierre | Pas de commentaires »

Mains armées

La mâchoire serrée, le regard d’acier, le sourire rare (absent, d’ailleurs, totalement), Roshdy Zem s’inscrit d’emblée dans la grande lignée des héros de films noirs, flic hanté par son passé, et habité par son job, qui ne laisse de place à rien d’autres dans sa vie.

Pourtant, il y a autre chose, dans cette vie qui n’en est pas une : une ex-femme qu’il a abandonnée il y a bien longtemps, et une fille qu’il n’a jamais voulu élever, et qui, tu parles d’un hasard, est justement entrée dans la police. Comme ce père qui l’a fuie dès sa naissance, absence qui semble l’avoir privée de tout horizon. C’est Leïla Bekhti, splendide et aussi sombre que Roshdy Zem.

Lui est le patron de la brigade marseillaise de luttre contre le trafic d’armes. Elle est une jeune flic des stups à Paris. Une enquête va leur permettre de se revoir, à défaut de se retrouver : entre eux deux, le malaise est aussi abyssal que le désir… La relation entre ces deux-là est bouleversante de non-dits, et d’incapacité à aller vers l’autre. Les scènes de « retrouvailles », aussi brèves qu’absurdes, sont magnifiques

Pierre Jolivet (qui co-signe le scénario avec l’ancien policier Simon Michael) s’avère aussi un réalisateur très efficace en matière de thriller policier. Quelques scènes d’action sont particulièrement réussies, d’une violence sèche très impressionnante. Mais l’enquête policière n’apporte pas grand-chose au genre, prenant trop souvent le pas sur cette passionnante relation père-fille. Finalement, il faut attendre le superbe final pour que le film de genre et l’émotion se rejoignent enfin.

X-Files, aux frontières du réel (The X-Files) – saison 9 – créée par Chris Carter – 2001-2002

Posté : 29 mars, 2016 @ 8:00 dans 2000-2009, BOLE Cliff, CARTER Chris, DUCHOVNY David, FANTASTIQUE/SF, GILLIGAN Vince, LITTLE Dwight H., MacLAREN Michelle, MANNERS Kim, SHIBAN John, SPOTNITZ Frank, TÉLÉVISION, WHARMBY Tony, X-Files | Pas de commentaires »

X-Files, saison 9

A la fin de la saison 8, on avait laissé Scully et Mulder en couple, tandis que les affaires non classées était officiellement reprises par Monica Reyes et John Doggett. Bref, la possibilité d’une jolie conclusion, ou d’un nouveau départ pour X-Files. Duchovny, lui, en avait (à peu près) définitivement terminé, et quoi qu’il en soit, ne reviendrait pas pour une neuvième saison. Alors, nouveau départ ?

Eh bien toujours pas. Il est vite apparu que cette saison 9 serait la dernière, et Duchovny a accepté de revenir pour l’ultime épisode (d’une heure trente) qui devait préparer une suite sur grand écran. Résultat : comme dans la saison précédente, Mulder n’est plus là, mais semble omniprésent.

Toute la mythologie, recentrée sur les « supersoldiers » invincibles et mystérieux, repose ainsi sur l’absence de Mulder, qui a donc fui à la demande de Scully, parce que sa vie était en danger. Un départ qui est le cœur de cette saison, mais qu’on a un peu de mal à prendre au sérieux. Du coup, les épisodes purement mythologiques sont loin d’être les plus convaincants : même si les diptyques Nouvelle génération (épisodes 1 et 2) et La prophétie (épisodes 9 et 10) n’apportent pas grand-chose à la gloire d’X-Files.

Plus passionnants, parce que beaucoup plus originaux, deux épisodes tournent entièrement autour de la présence (ou pas) de Mulder, sans que Duchovny ne revienne pour autant. Ne faites confiance à personne (épisode 6) est un chassé-croisé haletant et très émouvant autour des retrouvailles annoncées entre Mulder et Scully. Gillian Andersonn est magnifique, laissant transparaître les doutes et le manque de Scully.

Le même ton est au cœur de William (épisode 16), le bouleversant segment réalisé par David Duchovny : le plus audacieux, le plus surprenant, le plus émouvant, et sans doute le plus réussi de cette neuvième saison. Construire tout un épisode autour du doute qui s’immisce en Scully, face à cet homme au visage détruit (est-il Mulder ?) est une idée géniale, et parfaitement aboutie.

Autre grande réussite : l’incroyable épisode décalé réalisé par Chris Carter, Improbable (épisode 13)… qui porte parfaitement son titre. Burt Reynolds en… Dieu ? Des coïncidentes totalement improbables (donc). D’étranges chansons en français et en italiens. Une atmosphère inqualifiable et totalement fascinante… Carter se lâche totalement ici, et ça marche !

Cette saison confirme aussi que Doggett est un personnage passionnant, et que Robert Patrick a trouvé là le rôle de sa vie. Toujours dans l’ombre de Mulder hélas, mais il a droit à une poignée d’épisodes qui lui rendent enfin justice : Amnésie (épisode 7), où Doggett amnésique ne retrouve la mémoire que pour réapprendre la mort de son fils ; ou 4-D (épisode 5), troublante histoire de réalité alternative au final particulièrement gonflé, qui donne le beau rôle à Monica Reyes et aux sentiments qui auraient pu naître entre ces deux-là. Annabeth Gish aussi aurait mérité de ne pas rester à l’arrière plan.

Fin de série oblige, Carter apporte plusieurs conclusions. Pour le meilleur en ce qui concerne la mort du fils de Doggett dans Clairvoyance (épisode 17), bouleversant. Pour le nettement moins bon en ce qui concerne les Lone Gunmen, dont la série dérivée venait d’être annulée, et qui font leurs adieux dans le discutable N’abandonnez jamais (épisode 15).

Notons encore quelques loners réussis : Une vue de l’esprit (épisode 14) autour des peurs enfantines ; le très violent et traumatisant Ecorchés (épisode 8) ; Audrey Pauley (épisode 11) qui plonge Monica Reyes dans une maison de poupée ; et surtout le très étonnante et très nostalgique Irréfutable (épisode 18), ultime loner de la série avant son retour, une petite merveille d’émotion, écrite par Vince Gilligan.

Le tout dernier épisode, de 90 minutes, La Vérité (épisode 19), alterne le poussif (le procès) et l’enthousiasmant. Les retrouvailles entre Scully et Mulder, sous le regard de Skinner, justifient à elles seules l’existence de cet épisode fourre-tout. Qui se termine presque comme tout avait commencé, neuf ans plus tôt : avec Scully et Mulder dans une chambre de motel. Le poids de leurs drames, et une lueur d’espoir quant à l’avenir…

* Voir aussi la saison 1, la saison 2, la saison 3, la saison 4, la saison 5, le premier film, la saison 6, la saison 7, la saison 8, le second film, la saison 10 et la saison 11.

Le Masque d’Or (The Mask of Fu Manchu) – de Charles Vidor et Charles Brabin – 1932

Posté : 28 mars, 2016 @ 8:00 dans 1930-1939, BRABIN Charles, FANTASTIQUE/SF, VIDOR Charles | Pas de commentaires »

Le Masque d'Or

Les Chinoiseries ont la côte dans le Hollywood de ces années 30, qui fera de Mr Wong, Mr Moto ou Charlie Chan des personnages très populaires. Sans oublier Fu Manchu bien sûr, génie du mal qui représente parfaitement la vision que ce cinéma-là avait des mystères asiatiques: l’imagerie des méchants bridés mangeurs d’enfants dont l’histoire s’est arrêtée avec la mort de Genghis Khan n’est pas loin…

Il y a de cette condescendance, voire de ce mépris dans ce Mask of Fu Manchu qu’il vaut mieux ne pas trop prendre au sérieux. D’abord parce qu’il ne l’est pas. Ensuite parce que, comme on dit de Tintin au Congo, faut remettre dans le contexte. Enfin parce que je suis toujours à me demander à quel degré le film a effectivement été tourné…

Une chose est sûre: les « héros », chargés par la couronne britannique de retrouver le tombeau de Genghis Khan avant le cruel Fu Manchu, ne sont guère sympathiques. Du genre à se moquer des vieilles croyances de ces pays de sauvages, qu’ils observent de leur piédestal de colons.

Face à eux, Fu Manchu a beau être un authentique sadique, adepte de la torture et des morts sophistiquées (c’est qu’il a de l’imagination, du plancher escamotable qui laisse apparaître des crocodiles à la cloche qui vous vrille les tympans…), il a le mérite d’être franc et droit dans ses bottes. On aurait presque de la sympathie pour lui et sa fille aussi belle que mystérieuse, et dont on sent qu’elle manque cruellement d’amour, au point de droguer le fiancé d’une autre pour vivre le grand frisson avec lui. Une variation sous acide de la vamp, en quelque sorte.

Bien sûr, pas question de confier ces personnages à des comédiens asiatiques, ou même vaguement bridés. Traditionnellement, à cette époque, ce sont de bons blancs qui interprètent les Asiatiques (comme les Noirs d’ailleurs). Et Boris Karloff, déjà expert es-maquillage, est plutôt très bien dans ce rôle foncièrement outré.

Plus surprenant peut-être: la prestation très sobre, voire effacée de Myrna Loy, qui sera nettement plus enthousiasmante dans The Thin Man, deux ans plus tard.
Tout cela étant dit, The Mask of Fu Manchu est un film très efficace. Irrégulier (le changement de réalisateur y est sans doute pour quelque chose, Charles Vidor quittant le tournage au bout de quelques jours), mais avec quelques moments d’anthologie, de belles séquences nocturnes, un vrai suspense, et un ton étonnamment brutal et cruel.

Les Aventuriers du Désert (The Walking Hills) – de John Sturges – 1949

Posté : 27 mars, 2016 @ 6:15 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, STURGES John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Les Aventuriers du Désert

L’affiche, le titre (en VF et en VO), l’histoire… Pas de doute, Les Aventuriers du Désert est un vrai western, qui plus est réalisé par un habitué du genre (John Sturges) et interprété par l’une des grandes figures westerniennes (Randolph Scott). Mais, surprise : le film se déroule dans les années 1940, et commence comme un film noir, dans un décor qui évoque La Soif du Mal : une ville-frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, où se croisent des aventuriers, des voyageurs, ou encore un détective privé.

Mais ce film noir ne tarde pas à bifurquer vers le western pur et dur, lorsqu’un groupe très disparate se forme pour partir à la recherche d’un trésor au milieu du désert : une caisse d’or que transportait un chariot qui s’est égaré un siècle plus tôt… Une sorte de plongée dans le passé le plus mythique de l’Amérique : celui des pionniers.

Tous ces aventuriers abandonnent leurs particularités pour se lancer dans cette quête improbable, creusant inlassablement ce Désert de la Mort infini, dont Sturges utilise magnifiquement les paysages mouvants, ces dunes balayées par le vent et baignées de soleil. Un décor qui donne lieu à un superbe duel… à la pelle, d’un dynamisme stupéfiant.

Autre curiosité : les séquences de chansons qui viennent rythmer le film, superbes moments qui permettent de réhabiliter Josh White, chanteur de blues très en vogue à l’époque, et totalement oublié aujourd’hui, et dont il s’agit de quelques-unes des rares prestations filmées.

Le film est aussi assez passionnant par l’utilisation systématique qu’il fait des ellipses, laissant libre-cours à l’imagination du spectateur. Un parti-pris un peu gâché par un flash-back certes joliment filmé (de beaux plants d’Ella Raines sous la pluie), mais totalement inutiles.

Mais finalement, c’est une certaine nonchalance qui domine dans ce film. A l’image de Randolph Scott, étonnamment en retrait, qui se contente la plupart du temps de rester spectateur de l’action. Son personnage, si charismatique soit-il, ne prend jamais le pas sur les autres membres du groupe (parmi lesquels Edgar Buchanan, Arthur Kennedy et John Ireland). Plus étonnant encore : il se désintéresse la plupart du temps des enjeux dramatiques du groupe, pour aller s’occuper de sa jument et de son poulain. Curieux…

* DVD dans l’incontournable collection « Westerns de Légende » chez Sidonis/Calysta, avec une présentation par Patrick Brion.

La Dernière Caravane (The Last Wagon) – de Delmer Daves – 1956

Posté : 22 mars, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Dernière Caravane

Daves est un cinéaste génial, et le western lui va comme un gant. Cela saute aux yeux dès les premières minutes de ce Last Wagon, nouveau chef d’oeuvre à mettre au crédit de l’auteur de La Flèche brisée et de 3h10 pour Yuma. En une série de plans sans dialogues, deux constats se font…

D’abord, Daves utilise merveilleusement le Cinemascope dans ce film tourné exclusivement en décors naturels (à l’exception d’une courte séquence de tribunal, à la toute fin du film). Privilégiant les plans larges qui placent l’homme au cœur de la nature gigantesque, et les discrets mouvements de caméras qui dramatisent cet environnement à la fois splendide et plein de dangers, Daves fait de chaque image un tableau grandiose et dramatique, à couper le souffle.

Dans ces premières minutes, ce qui frappe aussi, c’est la manière dont le personnage de Richard Widmark est introduit : après avoir abattu un homme sans la moindre sommation, le voilà qui prend la fuite à pied, poursuivi par d’autres hommes qu’il tuera à leur tour avec froideur. Drôle de « héros » westernien, donc, qui tue de sang froid et court à travers les grands espaces déserts…

Cinéaste cultivé et respectueux du spectateur, Daves ne mâche pas le travail à ce dernier. Widmark est-il un salaud ou un type bien ? Les premiers indices font nettement pencher vers la première hypothèse, mais qui sait… Finalement arrêté, enchaîné à la roue d’un chariot, témoin du massacre de colons par les Apaches (massacre dont on ne verra rien), le voilà seul avec trois jeunes femmes, un gamin, et deux hommes à peine sortis de l’enfance, en plein territoire indien. De quoi mettre à l’épreuve les vraies natures des uns et des autres…

The Last Wagon est un film spectaculaire… qui évite consciencieusement les effets spectaculaires. C’est moins sur la violence, finalement rare à l’image, que sur l’hostilité et la grandeur de l’environnement, que Daves base l’extrême tension du film. Une tension que le regard clair et impénétrable de Widmark, formidable, sert parfaitement.

Il est presque de toutes les scènes, grand personnage « davesien » dans la droite lignée du James Stewart de La Flèche brisée : un blanc élevé par les Comanches qui se révèle à lui seul un symbole d’ouverture et d’antiracisme. Son interprétation intense et toute en retenue fait oublier les seconds rôles un peu moins convaincants. Felicia Farr en tête, en amoureuse transie qui ne laisse pas grand-place à la nuance.

Un détail… The Last Wagon est un très grand western, l’un de ces films qui donnent ses lettres de noblesse au Cinemascope, et l’un des chefs d’œuvre de son auteur.

* DVD dans la collection « Westerns de Légende » chez Sidonis/Calysta.

X-Files, aux frontières du réel (The X-Files) – saison 8 – créée par Chris Carter – 2000-2001

Posté : 21 mars, 2016 @ 8:00 dans 2000-2009, CARTER Chris, COMPTON Richard, FANTASTIQUE/SF, HARDY Rod, MANNERS Kim, MARKLE Peter, O'HARA Terrence, SPOTNITZ Frank, TÉLÉVISION, THOMAS Barry K., WHARMBY Tony, X-Files | Pas de commentaires »

X-Files saison 8

La série pouvait-elle survivre au départ de David Duchovny ? Difficile d’imaginer ce qui se serait passé pour la série s’il n’était pas parti… ou s’il avait totalement disparu, pour de bon, à la fin de la saison 7.

Duchovny est parti, mais pas vraiment : Mulder, enlevé par les aliens, sera de retour vers la mi-saison, dans Espérance (épisode 14) et surtout Renaissance (épisode 15), diptyque particulièrement intense qui inaugure le thème des « super-soldats » qui sera au cœur de la nouvelle mythologie jusqu’à la fin de la saison 9. Mulder revient en fait par le biais de flash-backs dès l’étonnant Dévoreur d’âmes (épisode 11), qui prépare son retour en creusant le mystère de sa maladie, qui n’avait été qu’évoquée jusqu’à présent.

Dans le diptyque inaugural, le bancal Chasse à l’homme (épisodes 1 et 2), Mulder a disparu, mais Duchovny est toujours là, incarnant une forme prise par le fameux chasseur de primes extraterrestres. Une fausse bonne idée, qui distrait inutilement du véritable enjeu de ce double-épisode : introduire le successeur de Mulder aux affaires non-classées.

Cette espèce d’entre-deux dans lequel Duchovny n’est ni vraiment là, ni vraiment absent, ne laisse pas à ce successeur, John Doggett, la place qu’il méritait. Parce que le personnage est absolument formidable, sorte de double négatif de Mulder dont il partage la passion, mais qui ne croit en rien d’autre qu’au concret et à l’action.

Il se passe une sorte de miracle avec ce personnage, qui existe dès sa toute première apparition d’une manière extraordinaire. Robert Patrick, acteur généralement pas vraiment bouleversant, est exceptionnel, imposant une présence d’une intensité rare. Aussi à l’aise dans l’action pure que dans l’émotion, il parvient à faire exister un personnage qui restera toujours dans l’ombre de Mulder, et qui aurait mérité bien mieux.

Les « monstres de la semaine » sur lesquels il enquête avec Scully ne sont pas nombreux. Mais ils sont tous passionnants : Patience (épisode 3), Un coin perdu (épisode 4), Via Negativa (épisode 7), Dur comme fer (épisode 9) ou le traumatisant A l’intérieur (épisode 10)… autant de loners traditionnels que la présence magnétique de Doggett/Robert Patrick transforme en éléments du renouveau de la série.

Son trauma (la mort de son fils, quelques années plus tôt) n’est qu’évoqué, en particulier dans Empédocles (épisode 17) ou l’excellent Combattre le passé (épisode 6, clin d’œil au film Memento), mais Patrick impose immédiatement Doggett comme un personnage passionnant. Malgré tout, et jusqu’à devenir le personnage central de la saison dans une poignée d’épisodes : l’intense Invocation (épisode 5) ou le claustrophobique Luminescence (épisode 12).

Quand même, pas facile pour lui de s’imposer entre deux enjeux majeurs : la quête de Mulder (l’accord de Duchovny de revenir à la mi-saison était un cadeau décidément empoisonné) et la grossesse mystérieuse de Scully, qui permet à Gillian Anderson de prendre un peu de recul par moments, et de donner à sa remplaçante annoncée, Monica Reyes (Annabeth Gish) un rôle de plus en plus important jusqu’au double-épisode final Essence (épisodes 20 et 21), qui associe habilement et efficacement tous les thèmes de cette saison, jusqu’à l’extraordinaire accouchement de Scully.

C’est bien Mulder qui, jusque dans ses absences, reste l’âme de cette saison, et visiblement son moteur premier. Son retour est ainsi mis en scène comme une résurrection au sens premier du terme (Renaissance, épisode, 15). Sa cohabitation forcée avec Doggett, et la méfiance qui s’instaure d’emblée entre eux, aurait pu donner une nouvelle direction, passionnante, à la série. Elle est au cœur de quelques épisodes au ton particulier : le mythologique Confiance (épisode 16) ou le loner Vienen (épisode 18).

La mythologie ouvre quelques portes, notamment dans le réussi Per Manum (épisode 13), et la succession des affaires non classées se peaufine, dans Seul (épisode 19) et surtout dans le double-épisode final. Mais on sent bien que l’avenir de X-Files, pour la première fois peut-être, est incertain. Tout est en place pour un nouveau départ, mais Chris Carter offre un final sans cliffhanger, qui aurait pu conclure (fort bien d’ailleurs) la série.

* Voir aussi la saison 1, la saison 2, la saison 3, la saison 4, la saison 5, le premier film, la saison 6, la saison 7, la saison 9, le second film, la saison 10 et la saison 11.

Berlin Express (id.) – de Jacques Tourneur – 1949

Posté : 20 mars, 2016 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, RYAN Robert, TOURNEUR Jacques | Pas de commentaires »

Berlin Express

C’est le premier film tourné dans l’Allemagne d’après la guerre, et ce n’est pas anodin. La vision des ruines de Francfort et Berlin est impressionnante et apporte une dimension dramatique fascinante à ce film noir qui ne ressemble à aucun autre.

L’intrigue est pourtant assez classique, sorte de variation autour d’Une femme disparaît, l’un des derniers films anglais d’Hitchcock. Un train qui entre en pays (plus tout à fait) ennemi, un homme qui disparaît, et des passagers qui semblent les seuls à s’inquiéter de cette disparition. Un brillant mélange de suspense et d’espionnage, intensément divertissant mais qui en dit long sur son époque.

Jacques Tourneur ne sacrifie aucun de ces aspects. Son film est une passionnante enquête pleine de rebondissements feuilletonnants, et le cinéaste de La Féline sait y faire lorsqu’il s’agit de faire naître la peur d’un décor. Mais c’est le contexte, inédit, qui donne une grande partie de sa force au film: les ruines fantomatiques d’une Allemagne vaincue peuplée d’êtres en errance, de familles à la recherche de leurs proches, de gens que la folie de leurs dirigeants et l’humiliation de la défaite ont obligé à vivre dans la marge, privés pour certains de leur humanité.

Berlin Express est un portrait d’une force sidérante de cette Allemagne-là, dans laquelle il est difficile de tirer un trait sur ces années de Nazisme : à la fois pour les étrangers encore habités par la guerre, et pour ces Allemands confrontés au manque. C’est aussi un film qui oscille entre cynisme et espoir : autour de la jeune Allemande interprétée par Merle Oberon, le groupe qui se forme pour enquêter est constitué d’un Américain (Robert Ryan, formidable comme toujours), d’un Français, d’un Anglais et d’un Soviétique.

Les quatre vainqueurs, qui se sont partagés l’Allemagne dans cet immédiat après-guerre, poussés à unir leurs forces et à fraterniser… Le conflit mondial à peine terminé, et alors que la guerre froide n’en était pas encore une, Berlin Express est un film d’une grande lucidité, qui se permet une (petite) note d’optimisme. Nouveau chef d’œuvre, pour Tourneur.

La Porte du Paradis (Heaven’s Gate) – de Michael Cimino – 1980

Posté : 19 mars, 2016 @ 8:00 dans 1980-1989, CIMINO Michael, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Porte du Paradis

L’échec de La Porte du Paradis était-il prévisible ? Sans doute. Cimino, visiblement galvanisé par son ambition et par le triomphe de Voyage au bout de l’enfer, va clairement au bout de ses obsessions et ne fait rien pour aller chercher le public. La première partie de ce western à grand spectacle, impressionnant et violent, est ainsi aux antipodes de ce que l’on attend du genre : on est alors à Harvard, lors d’une cérémonie de fin d’études.

Difficile alors d’imaginer la fureur et la violence qui marqueront deux de ces étudiants, fils de bonne famille promis à un brillant avenir, que la vie séparera mais qui se retrouveront dans un contexte très, très différent. Pourtant, le souvenir de cette longue première partie, comme la séquence de chasse dans The Deer Hunter, hantera les personnages et les spectateurs durant tout le film, créant une atmosphère bouleversante de paradis perdu, que l’on retrouvera jusqu’à la conclusion, déchirante.

L’échec historique du film (faut-il rappeler qu’il est à l’origine de la faillite de United Artists ?) a eu un double effet négatif. D’abord, La Porte du paradis n’a longtemps existé que dans une version tronquée (Cimino a réalisé récemment un nouveau montage de 3h30, édité chez Carlotta) ; et on n’a souvent retenu que la démesure du projet, ses décors grandioses et ses milliers de figurants qui rappellent les immenses productions des années 20.

Et c’est vrai que Cimino ne se refuse rien, recréant pour une seule scène une ville de l’Ouest à la fin du 19ème siècle, grouillante de monde, dont on sent l’odeur et l’humidité de la boue omniprésente ; faisant appel à un nombre de figurants qui ne sera sans doute plus jamais égalé. Car l’échec du film a clairement marqué la fin d’une époque, ouvrant la porte des années 80, et la séparation qui sera de plus en plus claire entre le cinéma d’auteur et les grosses productions.

Visuellement, le film est splendide. Le goût de Cimino pour les grands espaces américains n’a peut-être jamais été aussi flagrant. Comme sa manière de confronter la beauté de cette nature à l’horreur imposée par les actions des hommes. Inspiré d’une histoire vraie, le film raconte ainsi le massacre programmé d’immigrants européens venus cultiver la terre, par un syndicat de tout puissants éleveurs.

Il y a le gigantisme de la production, mais il y aussi et surtout les destins d’une poignée d’hommes, tous prisonniers à leur manière de leur condition, et dont les efforts plus ou moins appuyés pour y échapper n’y pourront rien. Malgré leurs rêves de vie meilleure, Isabelle Huppert, Christopher Walken, Jeff Bridges et les autres semblent condamnés par la violence de cette époque qu’ils n’ont pas choisie. John Hurt, lui, est hanté par la violence de ses semblables, se dressant au milieu d’un massacre en regrettant la douceur de sa jeunesse et d’un séjour à Paris.

Quant à Kris Kristofferson, qui trouve là le rôle de sa vie, il symbolise à lui seul toute l’atmosphère du film : riche privilégié qui s’offre une vie loin de son monde, rêvant d’améliorer les choses et de trouver le bonheur, mais condamné à rester un spectateur impuissant de son époque… avant de retrouver son point de départ, bouclant ainsi la boucle.

La figure de la boucle n’est pas un hasard. La ronde lors de la fête d’Harvard (qui marque la fin d’une époque, celle des rêves de jeunesse), le cercle que les assaillants forment lors de l’ultime massacre (la fin d’une autre époque, et d’autres espoirs)… Cimino laisse clairement penser que tout espoir d’échapper à son destin est vain. La Porte du Paradis n’est pas exactement un film optimisme. Mais c’est magnifique.

* La version « réalisateur » est éditée chez Carlotta.

Les Berceaux – de Jean Epstein – 1931

Posté : 18 mars, 2016 @ 8:00 dans 1930-1939, COURTS MÉTRAGES, EPSTEIN Jean, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Les Berceaux

Jean Epstein a tourné des clips ? Si, si… En 1931, le cinéaste est engagé par la firme Synchro Ciné pour mettre en images une chanson, célèbre alors si l’on en croit le générique: Les Berceaux, un poème de Sully Prudhomme mis en musique par Gabriel Fauré, et interprété pour l’occasion par Louis Gaudin (« de l’Opéra Comique »).

Une curiosité, donc, mais pas si étrange que cela : Les Berceaux, chanson de marin joliment mélancolique, permet à Epstein de s’inscrire dans la lignée de ses « poèmes bretons », initiés avec Finis Terrae. Le petit film qu’il réalise porte clairement sa marque, avec quelques expérimentations visuelles, des plans très composés, et l’omniprésence de la nature.

Le film, ancêtre des clips que l’on connaît aujourd’hui, fait coller les images avec les paroles de la chanson. Un exercice de style intéressant et fort sympathique, à défaut d’être follement personnel.

Le film figure dans le coffret DVD consacré à Epstein chez Potemkine.

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