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Archive pour la catégorie 'GREVILLE Edmond T.'

Remous – d’Edmond T. Gréville – 1935

Posté : 8 février, 2023 @ 8:00 dans 1930-1939, GREVILLE Edmond T. | Pas de commentaires »

Remous

Le désir est un thème qui réussit bien à Gréville, à qui on devra le très bon Port du Désir avec Gabin, ou le formidable Le Diable souffle, que Remous annonce à bien des égards. Formellement, on retrouve la même ambition, la même volonté d’utiliser toute la force du cinéma, avec une narration avant tout basée sur les silences, les regards, le mouvement, les ellipses (superbes et lancinantes, les ellipses).

Du grand cinéma, sur un sujet fort et audacieux : l’impuissance d’un homme, sorti diminué d’un accident de la route durant son voyage de noces, et la frustration de plus en plus difficile à gérer de sa jeune et belle épouse, qui l’aime sincèrement mais se retrouve face aux réalités de son corps et de ses désirs. Tout ça est bien plus que suggéré dans ce film à la fois direct et délicat.

Gréville, par successions d’épisodes entrecoupés par des plans d’eaux en furie (tout un symbole), filme ce couple si beau dont la perfection se fissure au fur et à mesure que le quotidien s’impose, un peu comme un barrage qui se remplirait peu à peu jusqu’à… jusqu’à quoi au fait ? Qu’il n’explose, ou qu’au contraire les eaux s’apaisent et se reposent ? Comme un symbole, encore : le mari, architecte, est justement en train de construire un barrage.

Surtout, Remous est un film de regards, croisés ou évités. On n’y parle pas beaucoup, et les paroles sont le plus souvent noyées sous une musique très présente, très puissante. Un peu gênante d’abord, et puis on réalise la futilité des rares paroles, et la force des images. Gréville revendiquait lui-même cette volonté de raconter par l’image, en digne héritier des réalisateurs du muet. Aux dialogues, il préfère l’évocation symbolique, multipliant les gros plans évocateurs qui disent plus que de longs discours sur l’état d’esprit des personnages.

Direct et délicat, inspiré et audacieux, Remous est un film puissant et profond, et très émouvant ce qui ne gâche rien.

Le Port du Désir – d’Edmond T. Gréville – 1955

Posté : 26 octobre, 2020 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1950-1959, GABIN Jean, GREVILLE Edmond T. | Pas de commentaires »

Le Port du Désir

Gabin sort de sa période creuse d’après-guerre (pas honteuse non plus) quand il tourne ce film noir sur le port de Marseille. Gréville n’est pas exactement au sommet, lui non plus. Ensemble, ils tournent un film qui leur ressemble. En mode mineur.

Très mineur, même, par moments, lorsque le montage semble aléatoire, l’intrigue cousue de fil blanc, et le rythme un peu mollasson. Et puis à d’autres, on retrouve la patte de Gréville, lorsque sa caméra se même à la foule du vieux port grouillant de vie. Plus en tout cas que quand il s’essaie maladroitement au suspense sur un terrain vague platement filmé.

Gabin, lui, est formidable, d’une justesse absolue en commandant de bateau entre deux âges qui semble revenu de tout. Il est souvent en second plan, mais sa présence dégage un naturel et une évidence qui sont l’apanage des très grands. Sans surjouer, sans faire le malin, il domine de la tête et des épaules une distribution pas super excitante.

Andrée Debar surtout, en jeune femme recherchant sa sœur disparue dans les bouges de Marseille, n’est pas une actrice éblouissante, encore moins inoubliable.

Quand même… Le film surprend par son atmosphère rude et désenchantée, par la manière dont Gréville filme les prostituées et suggère la sexualité. Les hommes sont des salauds, lance Gabin. Les femmes ne sont guère plus reluisantes, pour le coup, entre la danseuse prête à tout pour l’argent et la tenancière manipulatrice. Sombre, sombre.

Le Diable souffle – d’Edmond T. Gréville – 1947

Posté : 23 octobre, 2020 @ 8:00 dans 1940-1949, GREVILLE Edmond T., VANEL Charles | Pas de commentaires »

Le Diable souffle

Un homme trop seul, une femme trop belle, un deuxième homme trop jeune… Combinaison typique d’un film noir à l’américaine, que Gréville s’approprie totalement. Son principal apport, c’est le vent, ce vent présenté dès la belle introduction comme le personnage principal du drame. Un vent qui souffle constamment sur cette petite maison isolée du monde, sur une île entre deux pays, la France et l’Espagne. Un vent qui pèse sur les humeurs, qui isole, qui exacerbe les sentiments, qui rend fou…

Gréville flirte avec les codes du film noir. Il fait de Charles Vanel (immense, mais comme toujours finalement) un bon type asocial, qui tombe amoureux d’une jeune femme (Héléna Bossis) dont on sent bien qu’elle n’est pas pour lui : une citadine habituée à la vie nocturne, qu’il rencontre alors qu’elle a tout perdu, avant de l’emmener dans son île si proche, mais si loin de tout. Et puis ce troisième personnage (Jean Chevrier), dont on sent aussi qu’il amène le drame malgré lui, chirurgien madrilène condamné à mort dans son pays.

Un canevas si classique, pour un film si singulier. La justesse exceptionnelle des personnages (cette ultime main tendue entre Vanel et Héléna Bossis, d’une beauté renversante), et le choc esthétique que procure à peu près chaque plan… La pluie lourde et les barres verticales qui soulignent le poids qui pèse sur la jeune femme au début du film, dans des décors poisseux impressionnants… Des éléments de décors qui isolent l’un ou l’autre des acteurs… Ce vent qui ploie les roseaux ou souligne la sensualité brûlante d’Héléna Bossis…

Gréville est un très grand cinéaste méconnu, qui n’occupe pas la place qu’il mérite dans l’histoire du cinéma. Ce film majeur en est une preuve éclatante.

L’Envers du paradis – d’Edmond T. Gréville – 1953

Posté : 14 septembre, 2017 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1950-1959, GREVILLE Edmond T. | Pas de commentaires »

L'Envers du Paradis

Un véritable décor de carte postale, ce Ségnac, petit village perché dans les hauteurs de l’arrière-pays provencal. Le genre d’endroit que l’on estampille facilement « plus beau village de France », et où les artistes aiment se retirer et se laisser imprégner par l’atmosphère des lieux. Sur une porte, d’ailleurs, Jean Cocteau a laissé un dessin. Les gens d’ici affirment aussi que Picasso a passé quelques temps ici. Greta Garbo aussi, dans un autre domaine. Forcément, de tels visiteurs en font venir beaucoup d’autres, souvent moins talentueux, mais avec beaucoup de temps, et d’argent, à dépenser.

Ce n’est pourtant pas avec l’un de ces riches oisifs que l’on entre dans Ségnac (un nom d’emprunt à propos, le film ayant été intégralement tourné au Haut-de-Cagnes), mais avec un peintre venu de Paris. Un commissaire de la judiciaire, comme on l’apprendra bien plus tard, fuyant la capitale pour profiter de quelques jours de vacances, et attiré par ce décor de carte postale.

C’est lui qui nous sert de guide pour entrer dans la vieille ville, et pour rencontrer ses habitants d’un jour ou de toujours. Formidable construction, typique du style Gréville, qui nous plonge de plus en plus intimement et de plus en plus profondément dans le quotidien et les secrets plus ou moins bien cachés du village. Avant de reprendre une place centrale dans la dernière partie, le policier s’efface d’ailleurs presque totalement, comme si son rôle était terminé après avoir fait les présentations… Jusqu’au drame final, en tout cas.

Treize ans après Menaces, Gréville retrouve Erich Von Stroheim, très émouvant en homme solitaire et vieillissant fuyant un mystérieux passé, et cherchant un ultime rayon de soleil avec cette jeune fille à peine sortie de l’enfance, et dont il sait ce qu’elle-même ignore : qu’elle est condamnée par la maladie. C’est elle qui est au cœur de l’intrigue, et qui révèle ce qu’il y a de plus beau, ou de plus laid, chez les habitants du village.

Dans Menaces, Gréville révélait l’envers du décor d’un immeuble. Ici, c’est l’envers du décor d’un village entier qu’il présente, village dont sa caméra semble explorer le moindre recoin, avec virtuosité et une certaine fascination. Le contraste entre la beauté des lieux et ce qui s’y joue est troublant. Et le film est une réussite.

 

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