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Archive pour la catégorie 'PAGNOL Marcel'

César – de Marcel Pagnol – 1936

Posté : 8 août, 2024 @ 8:00 dans 1930-1939, PAGNOL Marcel | Pas de commentaires »

César

Après Marius et Fanny, Pagnol clôt sa trilogie marseillaise, comme un carton l’annonce dans le générique de début, sur des images du vieux port. Cinq ans se sont passés depuis le tournage du précédent film, mais l’action, elle, se déroule presque vingt ans plus tard.

Ce saut dans le temps apporte une sorte d’apaisement au film, dont le rythme semble ralentir. Comme si, peut-être, les personnages accusaient une certaine lassitude. Pas d’amertume pour autant, en tout cas pas sans l’immense tendresse que Pagnol donne à sa trilogie depuis le premier film.

Et pas sans cette élégance de l’humour et de l’ironie qui recouvrent d’un voile pudique des sentiments à fleur de peau. La douleur d’un ami cher qui meurt : Panisse (Charpin), donc on assiste aux derniers instants dans une hallucinante séquence de confession. Ou les retrouvailles tardives de deux êtres qui s’aiment, Fanny (Orane Demazis) et Marius (Pierre Fresnay), d’un fils et de son père (César, immense Raimu). Ou, bien sûr, cette rencontre qui est au cœur du film : celle de Césariot (André Fouché) avec son père de sang…

C’est beau, profondément émouvant. Mais toujours, un mot, ou un éclat de voix, vient donner le change. C’est aussi un film étonnamment moderne. Déjà parce qu’il n’a pas vieilli malgré son grand âge. Et parce qu’il s’y dit des choses étonnantes pour l’époque. Ce monologue de Raimu s’interrogeant sur la religion, sur « notre » dieu et celui d’autres peuples d’Asie, d’Afrique… dont il parle avec un respect et une empathie tout naturels, sans aucun paternalisme.

Et puis une réaction d’un féminisme violent : le coup de gueule de Fanny contre ce fils à qui elle a tout donné, tout sacrifié, et qui lui reproche d’être ou d’avoir été une femme avec ses désirs, ses passions, ses rêves. Même si le jeu d’Orane Demazis continue à me laisse dubitatif, elle est à ce moment d’une grand justesse, vibrante et humaine, simplement.

Juste, vibrante et humaine… Tiens : comme cette trilogie merveilleuse, dont la découverte bien tardive m’enthousiasme.

Fanny – de Marc Allégret et Marcel Pagnol – 1932

Posté : 17 juillet, 2024 @ 8:00 dans 1930-1939, ALLEGRET Marc, PAGNOL Marcel | Pas de commentaires »

Fanny

Ce deuxième opus de la trilogie marseillaise commence exactement là où se terminait le premier : par le départ de Marius, qui laisse derrière lui un César éploré, et une Fanny dont il ne sait pas qu’elle attend son bébé.

A la tendresse extrême de Marius succède une sorte de désenchantement un peu cruel, mais toujours bienveillant. Il y a beaucoup de bonté dans cette histoire au fond très cruelle. Cette cruauté désenchantée se traduit par une évolution délicate mais flagrante du style même du film, dans la mise en scène cette fois confiée à Marc Allégret.

Alors que le premier ne sortait jamais de ce microcosme de quartier reconstitué en studio, comme le décor d’un bonheur à portée de main, Fanny s’ouvre sur le monde extérieur, ou plutôt laisse le monde extérieur troubler ce bel équilibre.

Les scènes en décors naturels, dont plusieurs ont probablement été tournées à l’arrache en caméra caché, viennent troubler la quiétude de ce qui était jusqu’alors un Marseille de carte postale, apportant trouble et inconfort.

Son amour parti, Fanny est confrontée aux réalités de la vie, et c’est rude. Oriane Demazis est une belle incarnation de la douleur résignée, entourée par deux figures paternelles bienveillantes : Panisse, le bon Panisse, qui épouse malgré tout (Fernand Charpin, très touchant), et César, décidément immense Raimu.

Marius – de Alexandre Korda et Marcel Pagnol – 1931

Posté : 16 juillet, 2024 @ 8:00 dans 1930-1939, KORDA Alexandre, PAGNOL Marcel | Pas de commentaires »

Marius

Fanny aime Marius. Marius aime Fanny. Mais deux choses freinent leur amour. D’abord, leur pudeur de jeunes gens. Et puis, l’appel de la mer, l’envie d’ailleurs qui ronge Marius de l’intérieur.

De cette histoire toute simple, Marcel Pagnol (véritable auteur, même si la mise en scène est assurée par Alexandre Korda) tire un film magnifique, qui réussit à tirer sourires et larmes dans le même mouvement. Un film où le verbe haut et chaud du vieux port de Marseille n’est qu’un voile pudique qui dissimule mal une immense tendresse.

La tendresse d’un père et de son fils, César et Marius, immense Raimu face à un Pierre Fresnay particulièrement intense. On la sent constamment, cette tendresse, jusque dans la violence feinte de leurs engueulades. Mais quand ils baissent la garde et qu’ils s’avouent des maladroits « je t’aime bien » entrecoupés de longs silences et de regards étonnés, l’émotion est immense, et le moment est magique.

C’est la même tendresse qui se cache (mal) derrière la mère si exubérante (Alida Rouffe), ou derrière le voisin si soupe au lait, Panisse (Charpin). Dans ce petit bout de quartier dont on ne sort jamais, c’est un microcosme plein de vie que filment Pagnol et Korda (l’un aux commandes, l’autre à la pure mise en scène), avec les petites mesquineries et les grands sacrifices dont sont capables les hommes.

C’est presque une version condensée de la condition humaine, avec fort accent marseillais (à peine pesant les premières minutes), soleil écrasant, et voiles qui bouchent l’horizon.

Le film est beau, parce que les acteurs sont formidables. Il ne faut pas oublier Oriane Demazis, en grande amoureuse sacrificielle, dont le jeu est un peu plus daté que celui de ses camarades, mais bien émouvante tout de même. Il est beau aussi parce qu’il y a dans la simplicité du procédé une intensité et un rythme exceptionnels.

Pagnol, d’ailleurs, n’a pas besoin de se départir du dispositif théâtral original, avec personnages qui entrent et sortent des différents plateaux. Nul besoin de rajouter des extérieurs inutiles. Grand dramaturge, il est aussi un grand cinéaste, et son œuvre parfaitement cinématographique. Et bouleversante.

La femme du boulanger – de Marcel Pagnol – 1938

Posté : 26 octobre, 2022 @ 8:00 dans 1930-1939, PAGNOL Marcel | Pas de commentaires »

La Femme du boulanger

Pour Orson Welles, Raimu était le plus grand acteur du monde. Et c’est en grande partie grâce à La femme du boulanger que le réalisateur de Citizen Kane avait cet avis très tranché. Autant dire qu’il tenait en haute estime cette chronique méridioniale si anodine dans le propos, et si vive dans la forme.

Sur le fond, c’est une histoire d’une simplicité extrême : dans un petit village de Provence, le nouveau boulanger s’installe avec sa jeune et jolie épouse. A peine sont-ils arrivés que la belle s’enfuie avec un berger aussi jeune et beau qu’elle. Quand son mari comprend qu’il est cocu (et il lui faut du temps), il perd le goût de tout, y compris de faire du pain. Les villageois se mobilisent alors pour retrouver la femme du boulanger… et le pain par la même occasion.

Ce qui est surtout marquant dans ce film, c’est la vie qu’insuffle Pagnol dans ce microcosme où tout le monde se connaît, et où la camaraderie et les vieilles rancœurs sont également fortes. Ce qui est marquant aussi, c’est à quel point la drôlerie est intimement liée à la tristesse, et même à une certaine forme de cruauté.

La dernière séquence, la plus célèbre, illustre bien cette frontière si ténue entre légèreté et gravité : le boulanger, Raimu, invectivant la chatte qui avait disparu au début du film, abandonnant le chat de la boulangerie. « Garce, salope, ordure ! C’est maintenant que tu reviens ! » lance Raimu, sa femme retrouvée assise à côté de lui. Et lui, si tendre et naïf jusqu’à présent, qui baisse la garde et se livre pleinement sans y paraître, avec une rudesse qu’on ne lui avait pas vu venir.

Elle est forte cette scène. Un rien misogyne aussi, et un rien raciste lorsqu’il évoque les Chinois ou les Noirs, qui se ressemblent tous (c’était le bon temps des colonies, comme chantera l’autre). Mais elle bouscule, parce que mine de rien, elle nous montre le personnage de Raimu sans ce masque de bonté dont il ne s’est pas départi depuis le début du film.

Beau personnage, à la mesure de l’immense Raimu tour à tour drôle, gouailleur, pathétique et révolté. Autour de lui, Pagnol (sur un scénario inspiré de Giono) filme une galerie de seconds rôles attachants et finalement bien peu charitables, comme ce Marquis jouisseur que campe un Fernand Charpin haut en couleur, joyeusement cynique et politiquement très incorrect. A travers ce personnage (et celui du prêtre), Pagnol se moque ouvertement de la bienséance et de la religion.

Le ton, en tout cas, n’est jamais à la grande rigolade. Raimu adopte les attraits et les postures de Chaplin par moments (dont Les Temps modernes est encore tout frais dans les esprits), mais l’humour qui se dégage de son personnage et du film tout entier est constamment teinté d’une certaine amertume. Sous le soleil, plein de nuages.

 

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