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Archive pour la catégorie 'CARRADINE John'

Peggy Sue s’est mariée (Peggy Sue got married) – de Francis Ford Coppola – 1986

Posté : 4 mars, 2021 @ 8:00 dans 1980-1989, CARRADINE John, COPPOLA Francis Ford, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Peggy Sue s'est mariée

Le film ne peut pas ne pas être une réponse à Retour vers le Futur, sorti un an plus tôt. Une réaction, plutôt, comme si Coppola voulait s’approprier de la manière la plus intime qui soit cette histoire, qu’il n’a pourtant pas écrite (c’est une commande, qui n’était même pas faite pour lui), mais dont il tire un film que l’on sent totalement personnel.

Comme beaucoup de ses films des années 80, il y a le rapport à son propre passé, à la nostalgie d’une époque heureuse et fondatrice. Contrairement au film de Zemeckis, ce n’est pas un ado qui retourne dans le passé pour découvrir la jeunesse de ses parents, mais une femme mûre, qui se confronte à sa propre jeunesse.

Et contrairement à Zemeckis, Coppola n’a pas besoin d’une DeLorean pour réussir ce voyage vers autrefois. Il suffit d’exacerber l’émotion, dans une séquence d’une intensité folle, sorte de condensé magique de ce que représente la force du cinéma : Peggy Sue est sacrée reine de la promo vingt-cinq ans plus tard lors d’une soirée avec ses anciens camarades de lycée, où le passé est omniprésent, avec les expériences souvent douloureuses et le poids des années en plus. Elle est sur le point de divorcer de celui avec qui elle elle formait un couple si magique, Crazy Charlie, à qui Nicolas Cage apporte un décalage plein de force.

Il y a dans Peggy Sue s’est mariée une simplicité, une pureté même, qui bouleverse. Peggy Sue, le rôle de sa vie pour Kathleen Turner, est à un tournant de sa vie d’adulte, où ses rêves de jeunesse semblent tous envolés. Revivre cette période déterminante est l’occasion de réparer les erreurs commises… « Si j’avais su alors ce que je sais aujourd’hui, j’aurais fait bien des choses autrement. »… Hmm… Mais Peggy Sue s’est mariée, c’est un fait établi, presque historique.

Confronter la femme riche de son expérience à son univers d’adolescente donne beaucoup de moments légers, d’autres graves, mais surtout une émotion constante qui nous ramène à notre propre nostalgie. Peggy Sue incapable de parler à cette grand-mère qu’elle aimait tant (Maureen O’Sullivan), ou retrouvant la jeunesse oubliée de sa mère… Des moments simples, mais d’une beauté foudroyante.

C’est aussi un film sur la perception, sur ce qu’on fait de ses souvenirs. Deux plans étranges le soulignent au début et à la fin. Deux plans où la caméra fait face à un miroir, qui n’est pas vraiment là : les reflets sont remplacés par des doublures de dos, dont les mouvements ne sont pas absolument synchronisés. La vérité n’est pas toujours exactement telle qu’on se l’imagine. Les sentiments et l’émotion, eux, ne mentent pas. C’est très beau.

La Dernière Fanfare (The Last Hurrah) – de John Ford – 1958

Posté : 14 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, CARRADINE John, FORD John | Pas de commentaires »

La dernière Fanfare

Un vieux politicien se lance dans une campagne pour sa réélection au poste de maire. Sa dernière campagne, qui sonne aussi, il le sait, comme la fin d’une époque, balayée par l’irruption de la télévision et de la radio. Ford, une nouvelle fois, s’intéresse au temps qui passe, aux révolutions, et aux traces que laisse le passé. Comme dans tant d’autres chefs d’œuvre, aussi différents que Qu’elle était verte ma vallée ou L’Homme qui tua Liberty Valance. Il le fait ici en filmant les coulisses d’une campagne électorale, et c’est à la fois passionnant et bouleversant.

Son « héros », joué par Spencer Tracy (dans un rôle nettement plus consistant que dans leur première collaboration, Up the river, qui avait vu les premiers pas de l’acteur vingt-cinq ans plus tôt), n’est pas un pur à l’honnêteté irréprochable. C’est un beau parleur, un hâbleur qui sait être dur et froid, autant qu’enjôleur. Mais la sympathie de Ford ne fait aucun doute, et se résume dans ces paroles de l’homme d’église :

« Je préfère voter pour un voyou séducteur que pour un idiot total. »

Une phrase qui correspond bien à Ford, cinéaste attaché à une certaine idée de l’Amérique et de la camaraderie, bien conscient que la télévision vient remettre en question beaucoup de choses. Le film parle du temps qui passe, des révolutions. Mais Ford a une belle lucidité, particulièrement évidente dans ce film : ces révolutions ne balayent pas tout, elles s’ajoutent aux précédentes, pour fabriquer l’histoire du pays. Le symbole en est cette confrontation absurde entre les « Irlandais » et les descendants du Mayflower, ces derniers reprochant aux premiers d’avoir pris leur place…

Beau film, intense et riche, marqué par deux longues et étonnantes veillées funèbres, où la quasi-totalité des nombreux personnages se retrouvent, comme si tout ce qui s’écrivait était forcément construit sur la mort. The Last Hurrah a quelque chose du film testamentaire pour Ford.

Comme si lui-même faisait ses adieux (ce n’est évidemment pas le cas, puisqu’il tournera encore huit ans, et signera quelques grands films de plus), Ford réunit la plupart de ses acteurs habituels, de Anna Lee à Donald Crisp en passant par Jeffrey Hunter, John Carradine, Jane Darwell ou Carleton Young, y compris des acteurs qu’il n’avait plus dirigé depuis des décennies comme Wallace Ford ou Pat O’Brien. Et c’est bouleversant.

Les Raisins de la colère (The Grapes of Wrath) – de John Ford – 1940

Posté : 14 avril, 2020 @ 8:00 dans 1940-1949, BOND Ward, CARRADINE John, FORD John | Pas de commentaires »

Les Raisins de la colère

Grand livre, grand film, grand sujet, grand réalisateur, grands acteurs, grands dialogues… Que voulez-vous rajouter de plus : Les Raisins de la colère, c’est le genre de films qui font la grandeur du cinéma. A la fois une œuvre importante par sa portée sociale, et un spectacle d’une beauté stupéfiante.

Quelles images viennent immédiatement en tête quand on évoque la Grande Dépression ? Les portraits de la photographe Dorothea Lange, et la famille Joad sur la route, filmée par un John Ford au sommet de son art. C’est le Ford de la Fox, celui dont le style a été marqué par une rencontre avec Murnau, avec des images profondément stylisées. La moindre image, dans ce film, pourrait être accrochée à un mur et symboliserait à elle seule les drames humains de la Dépression.

Cinéaste humaniste, Ford s’est passionné pour l’histoire de la famille Joad, aussi parce qu’elle résonne avec celle des millions d’Irlandais forcés de quitter leurs terres quelques décennies plus tôt. Les Joad, et leur fils aîné Tom en tête, sont le symbole des laissés pour compte du capitalisme. La tirade finale de Henry Fonda a tout du plaidoyer. Celle de Jane Darwell, sa mère de cinéma, tout autant. Deux personnages universels, deux acteurs extraordinaires que Ford filme plus que comme des héros : comme des symboles, d’une humanité extraordinaire.

Visuellement, le film est une splendeur, l’un des plus beaux de Ford. Mais plus encore que sa beauté plastique, c’est son humanité qui marque les esprits. La manière dont Ford filme le moindre second rôle, avec une empathie totale. Que ce soit le révérend qui a tourné le dos à dieu (John Carradine), les grands-parents que la mort réunit, le policier forcé de faire respecter une loi à laquelle il n’adhère pas (Ward Bond), ou même le beau-frère qui fuit ses responsabilités de père… Ford aime ses personnages, tous.

Le film ne personnifie jamais le Mal dont sont victimes les petites gens, qui ont tout perdu. Si le fermier que joue John Qualen est devenu fou d’avoir perdu sa terre, c’est aussi parce qu’il n’a personne vers qui se retourner. Les propriétaires ? Les banques ? Les actionnaires ? Le capitalisme, en fait. Et comment menacer le capitalisme avec un simple fusil ?

Henry Fonda était déjà le symbole d’une certaine Amérique (notamment depuis Vers sa destinée). Il devient ici celui des laissés pour compte. Il est d’autant plus impressionnant qu’il reste le plus souvent en retrait, témoin de son époque, victime qui ne se révolte que du mal que l’on fait aux autres. Un homme bien, qui devient un symbole lorsqu’il disparaît dans l’ombre. « Là où on se bat pour que des gens qui ont faim puissent manger je serai là. Là où un policier frappe un type je serai là… »

L’Etang tragique (Swamp Water) – de Jean Renoir – 1941

Posté : 11 juillet, 2019 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, BOND Ward, CARRADINE John, RENOIR Jean | Pas de commentaires »

L'Etang tragique

Il y a des réalisateurs français qui ont su s’adapter aussi bien, voire mieux que les Américains eux-même, au cinéma américain. Jean Renoir est de ceux-là, qui réussit dès son premier film en exil un grand film hollywoodien, maîtrisant d’emblée les codes, le langage, et l’atmosphère de son éphémère terre d’accueil.

L’Etang tragique n’est sans doute pas au niveau de La Bête humaine, ou de La Grande Illusion. Il n’empêche : c’est une vraie réussite, à la fois personnelle dans la manière qu’à Renoir de filmer l’homme dans son environnement, et très américain dans son utilisation des décors, dans le rythme qu’il donne au film, ou dans sa manière de filmer quelques-unes des gueules les plus passionnantes du cinéma américain de l’époque.

Walter Brennan, Walter Huston, Ward Bond, John Carradine, Eugene Pallette, Guinn Williams… Le casting du film ressemble à une liste quasi-complète des meilleurs seconds rôles hollywoodiens (tous bien servis qui plus est). S’ajoutent Anne Baxter en charmante sauvageonne, et Dana Andrews, décidément très grand, absolument formidable dans son rôle de jeune homme à peine entré dans l’âge adulte confronté pour la première fois à l’hostilité du monde.

Surtout, Renoir séduit dans sa manière d’utiliser ses incroyables décors naturels : les marais de Georgie, infestés d’alligators, de serpents et de moustiques. Ces marais hostiles tellement américains, Renoir les filme comme personne avant lui, et comme presque personne après lui : Nicholas Ray dans les Everglades peut-être (La Forêt interdite), ou Bertrand Tavernier, encore un Français, en Louisiane (Dans la brume électrique). A la rigueur Raoul Walsh dans les Everglades aussi (Les Aventures du Capitaine Wyatt).

Renoir, lui, associe assez génialement des images tournées en décors réels et d’autres filmées en studio. Sans doute moins réaliste visuellement que le Ray, son film réussit pourtant sans peine à faire ressentir le danger, la moiteur, et l’immensité désolée de ce décor hors du commun, ne serait-ce qu’à travers le visage suant de Walter Brennan, banni de la société qui vit là, seul, depuis des années, condamné à fuir les hommes qui l’ont condamné à mort.

Beau film noir, à la fois classique par son intrigue, tirée par les cheveux par son dénouement, mais puissant et passionnant du début à la fin. Aux Etats-Unis comme en France, Renoir filme les passions humaines, les soubresauts d’une micro-société. Avec ces décors-là, et avec ces acteurs-là, c’est du pur plaisir.

Le dernier des géants (The Shootist) – de Don Siegel – 1976

Posté : 8 novembre, 2018 @ 8:00 dans 1970-1979, CARRADINE John, SIEGEL Don, STEWART James, WAYNE John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Dernier des Géants

Comment voulez-vous juger objectivement un tel film ? Franchement ? OK, ce n’est ni le meilleur Siegel, ni le meilleur Wayne. Il y a certes un petit quelque chose qui cloche dans le rythme, visuellement on ne peut pas dire que ce soit enthousiasmant. Ok pour tout ça. Mais quand même : this is history. Ou plutôt, c’est à un enterrement déchirant que l’on assiste, un double enterrement, même : celui du western classique, et celui du grand Duke lui-même.

C’est donc l’ultime film de John Wayne, qui se savait condamné par cette saloperie de cancer. Et qui accepte de jouer un vieux cow-boy condamné par le cancer. Pas besoin d’aller chercher loin pour comprendre la portée du truc. Y a-t-il, dans toute l’histoire du cinéma, l’équivalent ? Et avec une légende (encore) vivante de la stature de Wayne ? Sans doute pas. De toute façon, des légendes de cette stature, il n’y en a pas eu cinquante depuis l’invention du cinéma.

Forcément, le film est émouvant. Et beau, parce que ni la mise en scène de Siegel, ni l’interprétation de Wayne n’en rajoutent dans le pathos. Le film n’est pas parfait, mais il est digne. Magnifiquement digne. En se faisant diriger par le réalisateur fétiche de Clint Eastwood, l’une des figures du nouveau western, John Wayne sait qu’il fait désormais figure de vestige d’un temps révolu. Mais un vestige qui a de la gueule, quand même, et qui n’a pas l’intention d’abdiquer avant la fin.

Il y a bien quelques regrets qui pointent dans l’histoire d’amour qui aurait pu arriver entre Wayne et Lauren Bacall, mais c’est surtout le portrait d’un homme qui aura su rester fidèle à lui-même de bout en bout. Parle-t-on de John Wayne ou de son personnage ? Il n’y a plus vraiment de différence, comme le confirme la belle ouverture du film, suite d’extraits de westerns portés par le Duke à différents âges, de Stagecoach à El Dorado en passant par Hondo ou Rio Bravo.

Quant à l’apparition de James Stewart, dans le rôle du médecin qui diagnostique le cancer, voulue par Wayne lui-même, elle semble n’être là que pour souligner encore d’avantage le poids du temps qui passe, Stewart soulignant qu’ils ne s’étaient plus vus depuis quinze ans. Quinze ans : pile la durée qui sépare The Shootish de Liberty Valance… Le regard que porte James Stewart sur son vieil ami est en tout cas bouleversant.

Avec John Wayne, c’est la mythologie de l’Ouest sauvage qui disparaît. Ce vieil homme qui chevauche difficilement à travers le pays, obligé de glisser un coussin entre sa selle et son cul fatigué, arrive dans la ville comme un intrus. Lui a vieilli, mais n’a pas vraiment changé. Mais la ville se peuple de voitures automobiles et les rues sont en voie d’être pavées. La violence qu’il amène dans cette société qui se modernise est d’autant plus frappante qu’elle n’a plus rien de naturelle.

John Wayne est formidable dans ce rôle qui aurait pu tourner à l’autocaricature larmoyante. Constamment juste, émouvant mais droit, il fait là de bien beaux adieux.

Johnny Guitare (Johnny Guitar) – de Nicholas Ray – 1954

Posté : 4 octobre, 2018 @ 8:00 dans 1950-1959, BOND Ward, CARRADINE John, RAY Nicholas, WESTERNS | Pas de commentaires »

Johnny Guitare

Un western qui commence par une longue séquence en huis-clos pour s’achever par un duel entre femmes. Forcément, Johnny Guitar est à part dans l’histoire du genre. C’est aussi un film immense, petite production transcendée par un cinéaste en état de grâce.

Tout commence donc par un étonnant huis-clos d’une bonne vingtaine de minutes, absolument sidérant de tension. Dans ce lieu fermé (un saloon-casino qui se dresse au milieu de nulle part), Ray introduit les nombreux personnages et enjeux du film, dans une série d’affrontements verbaux qui semble pouvoir exploser à tout moment. C’est une intensité folle, et brillamment mis en scène.

Il y a donc Johnny Guitar (Sterling Hayden, parfait), aventurier solitaire armé d’une seule guitare qu’il dégaine lorsque d’autres auraient sorti leur flingue. Il y a le Dancing Kid (Scott Brady, peut-être son meilleur rôle), dont le seul pas de danse a une bestialité et une brutalité qui ne sont pas sans effets. Il y a Vienna surtout : Joan Crawford bien sûr, dont la douce beauté de la jeunesse a laissé la place à une maturité aux contours plus brusques. Face à elle, une autre femme forte, dure et mesquine celle-là : Mercedes McCambridge, femme castratrice qui mène à la baguette les hommes de la cité, veules et pathétiques, que « mène » un formidable Ward Bond.

Ray ne sacrifie aucun de ses dix ou douze personnages majeurs. Le traditionnel rôle de l’homme à tout faire est particulièrement frappant : simple silhouette dans la plupart des films, ce personnage interprété ici par John Carradine a une profondeur étonnante, dont il est le premier surpris. « Personne ne me regarde », s’amuse-t-il d’ailleurs, avant une dernière apparition magnifique. La même attention est portée aux acolytes de Scott Brady. Royal Dano en particulier : silhouette patibulaire qui ressemble à tant d’autres, mais qui ne cesse de surprendre tout au long du film, avec son goût pour les livres et sa nostalgie à fleur de peau.

D’un western sur les temps qui changent (un thème central du genre), Ray tire un formidable film de caractères, sur le temps qui passe, les rendez-vous manqués, les opportunités et les rêves. Avec ces quelques notes de musiques envoûtantes qui reviennent régulièrement, comme la promesse d’un avenir meilleur, et d’une chanson que l’on n’entendra que sur les toutes dernières images, d’une beauté absolue. Un chef d’œuvre, oui.

L’Homme du Kentucky (The Kentuckian) – de Burt Lancaster – 1955

Posté : 3 avril, 2017 @ 8:00 dans 1950-1959, CARRADINE John, LANCASTER Burt, LANCASTER Burt, WESTERNS | Pas de commentaires »

L'Homme du Kentucky

Pour son premier film derrière la caméra, Burt Lancaster signe un western étonnant : une ode à la nature, étrangement économe en action, mais à la tension parfaitement maîtrisée. Un western sans chevaux aussi, avec ce personnage de père célibataire (qu’il interprète lui-même), qui traverse le pays sauvage à pied avec son fils et son chien, minuscule communauté en mouvement qui semble avoir trouvé un idéal dans cette vie de pionnier au contact avec la nature.

Comme souvent dans le western, le film parle de la fin d’un monde, ou plutôt de la fin d’un mode de vie. Mais le thème est particulièrement bien traité ici. L’arrivée du père et de son fils dans la « civilisation » remet en cause l’harmonie de leur relation. Elle implique l’irruption d’une femme, ou plutôt de deux femmes : la belle institutrice, symbole d’une vie sociale et de concessions visiblement tentante pour le père ; et la petite sauvageonne, plus conforme aux aspirations du fils.

A travers le choix entre ces deux femmes, toutes deux belles, aimantes et sincères, c’est de la nécessité de se plier aux règles de la société qu’il est question. Et dans sa manière d’aborder le sujet, Lancaster fait preuve d’une honnêteté absolue, ne tombant jamais dans le manichéisme, la nostalgie facile, ou la dénonciation aveugle de l’excès de règles. Son film est d’ailleurs, finalement, totalement bienveillant.

Il y a des salauds, bien sûr, à commencer par Walter Matthau, dont c’est le tout premier film, et qui se révèle d’emblée excellent en salopard intégral. Mais il y a surtout des sentiments purs, une simplicité et une sincérité qui se ressentent jusque dans la manière dont Lancaster filme les beaux décors naturels, dans la première partie. Une réussite qui fait regretter que l’acteur n’ait pas persévéré derrière la caméra : il ne récidivera que quasiment vingt ans plus tard avec Le Flic se rebiffe.

Quelque part en France (Reunion in France) – de Jules Dassin – 1942

Posté : 20 février, 2017 @ 8:00 dans 1940-1949, CARRADINE John, DASSIN Jules, WAYNE John | Pas de commentaires »

Quelque part en France

A la veille de la déclaration de guerre, en France, une riche oisive regarde d’un œil amusé les « vrais gens » s’inquiéter de l’imminence du conflit, indifférente aux malheurs qui l’entoure, et lasse de voir les hommes ne plus penser qu’à leur pays et à l’armée… Mais lorsque la guerre arrive réellement, et les privations qui vont avec, la jeune femme descendue de son piédestal ouvre les yeux, et son cœur.

C’est beau comme un pur film de propagande, contribution très hollywoodienne à l’effort de guerre qui, forcément, glorifie la force de résistance du peuple français. Sorti du contexte (le film est tourné en 1942), on peut trouver ça un peu lourd, en tout cas sans nuance. Mais ce genre d’exercice a de quoi réveiller le patriote qui sommeille en tout cinéphile.

Surtout que Jules Dassin (cinéaste français qui était déjà installé aux Etats-Unis depuis longtemps, contrairement à Duvivier ou Renoir) sait donner un rythme impeccable à son récit, et que Joan Crawford est formidable. La star porte le film sur ses épaules, et son personnage est, de loin, le plus intéressant.

Un regret, quand même : plutôt que de raconter la transformation de cette femme superficielle en résistante au grand cœur, Dassin opte pour une audacieuse ellipse, qui nous prive de ce qui aurait sans doute été le plus passionnant : les premières désillusions de la riche Frenchy, sa découverte du quotidien des Français durant la débâche, les bombardements, les victimes civiles qui tombent sous ses yeux… Tout ça est résumé bien rapidement par une simple série d’images d’archives. Dommage, toute cette partie sacrifiée aurait mérité un film à elle seule. Qui aurait sans doute été bien peu stimulant pour le moral des troupes et des populations, en cette année 1942.

A la place, on a droit à une histoire sympathique mais un peu convenue d’espionnage et de résistance, un suspense très efficace avec un John Wayne encore tout jeune et un peu gauche (on est trois ans après Stagecoach, et il n’a pas encore cette stature définitive qu’il aura quelques années plus tard) en soldat américain perdu au cœur de la France occupée, et un John Carradine dans un rôle taillé sur mesure pour lui (le même, quasiment, que dans Hitler’s Madmen).

Le cahier des charges est certes strict. Mais Dassin en tire le meilleur. Son film, de pure propagande, n’en est pas moins passionnant, émaillé de rebondissements plus ou moins attendus et basé sur une belle idée plutôt bien traitée : opposer l’amour et le devoir en temps de guerre.

L’Île des péchés oubliés (Isle of forgotten sins) – de Edgar G. Ulmer – 1943

Posté : 22 février, 2016 @ 8:00 dans 1940-1949, CARRADINE John, ULMER Edgar G. | Pas de commentaires »

L'Île des péchés oubliés

Fort sympathique, ce petit nanar fauché et plutôt rigolo, une rareté que Ulmer tourne juste avant deux de ses films les plus connus, Barbe Bleue et Détour. On retrouve d’ailleurs l’acteur du premier, John Carradine, qui tient pour une fois le rôle du héros de service, un marin bagarreur qui se lance sur la piste d’un trésor enfoui au fond d’un lagon, avec son comparse et éternel adversaire.

Une chasse aux trésors, des bagarres bien viriles, des tas de jolis femmes, des îles paradisiaques… Le film est clairement à ne pas prendre au sérieux. Seul objectif de ce pur divertissement : le dépaysement. Et malgré son manque de moyens, qui limite l’effet-choc des grands moments de bravoure (comme cette séquence finale de tempête), Ulmer atteint plutôt son but.

Elles ont de la gueule, ces maquettes balottées par le vent. Et le cinéaste filme joliement ces scènes de nuit noire, dont la raison d’être est d’économiser sur les décors, mais qui créent une ambiance bien sympathique. Ulmer, qui a dû se contenter de budgets ridicules pour la majorité de ses films, en a toujours tiré le meilleur. C’est une nouvelle fois le cas ici…

A deux ou trois réserves près, quand même. Les effets caléidoscopiques des nuages sont assez étranges. Et la marionnette qui remplace John Carradine lors de ses descentes de scaphandrier a l’air… eh bien d’une marionnette vaguement articulée dont les mouvements de bras rappellent le Guignol de notre enfance. C’est charmant et assez drôle. Pas exactement l’effet voulu…

* Le film, très rare, est édité chez Artus Films, avec une qualité d’image pour le moins inégale: quelques plans semblent tirés d’une vieille VHS, tandis que d’autres ne sont disponibles qu’en VF. Quelques répliques en français viennent ainsi se glisser dans les dialogues originaux. Aucun bonus, si ce n’est des extraits ou bandes annonces des quatre films de la collection « Grands Classiques Hollywoodiens » (un titre un peu exagéré).

L’Aigle des frontières (Frontier Marshall) – de Allan Dwan – 1939

Posté : 27 mai, 2015 @ 5:55 dans 1930-1939, BOND Ward, CARRADINE John, DWAN Allan, WESTERNS, Wyatt Earp / Doc Holiday | Pas de commentaires »

L'Aigle des frontières

En l’espace d’à peine douze ans, le livre de Stuart N. Lake évoquant la rencontre de Wyatt Earp et Doc Holiday, et le fameux duel à O.K. Corral a été adapté trois fois : en 1934 par Lewis Seiler, en 1939 par Allan Dwan, et bien sûr en 1946 par John Ford avec le mythique My Darling Clementine. Si le film de Ford est incontestablement au-dessus du lot, celui de Dwan est plutôt pas mal non plus.

A l’exception notable de quelques scènes de dialogues particulièrement raides et manquant singulièrement de conviction, ce Frontier Marshall deuxième du nom est même une petite merveille de concision au rythme parfait. L’éternelle question de la véracité des faits qui nous sont présentés a peu d’importance : les innombrables films évoquant le parcours de Wyatt Earp adoptent à peu près tous des vérités différentes. Mais le mythe Earp est bien là, tout comme son amitié dangereuse avec Holiday, interprété ici avec sobriété par César Romero.

Difficile quand même de ne pas penser au film de Ford : ce dernier s’est visiblement inspiré de pans entiers du film de Dwan, en particulier dans la première moitié. Cela donne d’ailleurs quelques scènes passionnantes au regard du film de 1946, les deux s’enrichissant mutuellement : voir par exemple le rôle plus important donné ici à Indian Charlie, l’ivrogne que Earp met hors d’état de nuire au début du film et qui l’amène à devenir shérif, qui n’apparaîtra que brièvement chez Ford, mais qui a ici un rôle nettement plus conséquent. Il s’agit d’ailleurs du même acteur dans les deux films, Charles Stevens.

Un autre acteur apparaît dans les deux films (ainsi que dans celui de Lewis Seiler), mais dans des rôles différents : le fordien Ward Bond, qui se contente ici d’une apparition. Autre figure fordienne : John Carradine, évidemment en bad guy.

Quant à Randolph Scott, dans le rôle de Earp, il est aux antipodes des fêlures de Henry Fonda. Raide et sûr de lui, souriant et visiblement sans démon, pas vraiment du genre à se coucher face aux coups de feu. Il reste droit sans chercher à esquiver les balles dans des scènes de fusillade, souvent nocturnes, sèches et brutales. Étonnantes et remarquables.

* DVD dans la collection Westerns de Légende chez Sidonis-Calysta, avec les présentations habituelles par Patrick Brion et Yves Boisset.

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