Le Convoi héroïque / L’Attaque de la caravane (Fighting Caravans) – d’Otto Brower et David Burton – 1931
Typique d’une époque (les premières années du parlant), ce western s’inscrit clairement dans la lignée de The Big Trail de Raoul Walsh, tourné l’année précédente. A l’aube d’une décennie qui ne sera guère brillante pour le genre, jusqu’à la résurrection de 1939 (avec des chefs d’oeuvre comme Stagecoach), le western mise encore sur les grands espaces et le spectaculaire, avec une production qui, par son ambition et son gigantisme, n’a pas grand-chose à envier à Walsh.
A un détail près : Brower et Burton ont beau s’y être mis à deux, ils n’ont pas le quart du talent de Walsh. Brower deviendra un réalisateur de seconde équipe réputé, et on n’a pas de peine à l’imaginer : ce qu’il y a de plus réussi dans Fighting Caravans, ce sont les scènes de mouvements, ces beaux plans où la caravane se met en marche dans des paysages gigantesques, cette arrivée du convoi au fort sous une pluie battante, ou encore l’impressionnante attaque des Indiens.
De bons faiseurs d’image, donc. Mais il manque au film un vrai grand réalisateur, qui saurait donner une couleur au film, un mouvement continu, une atmosphère. Dès que la caméra se rapproche des comédiens, on sent que l’image se fige. Le scénario, adapté d’un roman de Zane Grey (une référence pour le western de cette époque), est réussi et plutôt original, privilégiant les interrogations d’éclaireurs qui voient leur mode de vie disparaître, et les rapports humains parfois tendus entre ces voyageurs confrontés à de rudes conditions.
De fait, le film est très bavard (même si les dialogues sont assez efficaces), une tendance habituelle du cinéma de ces années 1930-1931 qui se découvrait une voix. Mais Brower et Burton n’ont visiblement pas le moindre talent pour filmer des dialogues, dont la plupart tombent à plat et tuent le rythme. Le sentiment de maladresse s’installe dès que l’action se pose, un sentiment renforcé encore par une musique qui n’est utilisée que comme un arrière-plan sonore continu.
Mais il y a Gary Cooper, tout jeunôt et très pataud, charmant dans son idylle avec Lili Damita (la future Mme Errol Flynn). Pas encore l’icône et l’immense comédien qu’il deviendra, mais cette année 1931 est celle de l’explosion pour lui : c’est aussi celle de Morocco.
* DVD chez Sidonis/Calysta dans la collection Westerns de Légende, avec des présentations par Patrick Brion et Yves Boisset (qui profite du film pour parler du fils que Lili Damita aura avec Errol Flynn, Sean, qu’il a connu personnellement).