Play it again, Sam

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Archive pour août, 2013

L’Homme qui n’a pas d’étoile (The Man without a star) – de King Vidor – 1955

Posté : 30 août, 2013 @ 4:35 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, VIDOR King, WESTERNS | Pas de commentaires »

L’Homme qui n’a pas d’étoile (The Man without a star) - de King Vidor - 1955 dans 1950-1959 lhomme-qui-na-pas-detoile

De ce chef d’œuvre du western, vu il y a bien quinze ans, je me souvenais de la chanson-titre, interprétée par Frankie Laine : l’une des chansons les plus marquantes de toute l’histoire du genre (avec « My darling Clementine » et une poignée d’autres). A le revoir, ce qui marque le plus, c’est de constater avec quelle perfection et quelle évidence le film combine des éléments inoubliables, et une grande simplicité.

Le scénario, signé Borden Chase (quelle carrière, quand même, allez donc jeter un œil à sa filmographie) et D.D. Beauchamps (qui a travaillé sur Le Barrage de Burlington), est d’une rare intelligence, et va bien au-delà du simple postulat de base, hyper classique.

C’est l’histoire d’un cow-boy sans le sou qui se retrouve au cœur d’un affrontement entre gros et petits éleveurs. Un thème récurrent dans l’histoire du western, qui évoque l’arrivée des barbelés dans les « open ranges » : la fin de l’Ouest sauvage et des grands espaces ouverts, et l’arrivée du capitalisme, d’une économie de plus en plus organisée. La lutte entre les puissants et les modestes ne se règle plus uniquement à coups de revolvers, mais aussi par une guerre économique.

Une mise en scène formidablement fluide, un montage au cordeau (pas un plan superflu, pas une minute inutile), une manière presque unique d’intégrer la musique (et notamment la chanson de Laine) à l’histoire jusque dans la bouche des personnages… Vidor signe l’un des plus grands westerns de la décennie, malgré un tournage chaotique, marqué par des affrontements constants entre le cinéaste et sa star, Kirk Douglas.

L’acteur entendait bien imposer sa vision du film. Difficile d’affirmer ce que l’on doit vraiment à l’un, et ce que l’on doit à l’autre, mais une chose est sûre : Douglas appose sa marque. Son interprétation, toute en énergie explosive (impressionnant lorsqu’il passe d’un rictus de tueur à un large sourire de fêtard), donne un ton à peu près unique et un rythme exceptionnel au film.

L’Homme qui n’a pas d’étoile est totalement à l’image de son interprétation : enlevé, souvent très léger (Douglas discute tranquillement à table tandis qu’on entend son jeune partenaire se battre dehors, hors champs), mais pourtant complexe et d’une grande profondeur, et bouleversant. Car ce type avide de liberté, qui apprend malgré tout à composer avec des règles de plus en plus contraignantes, surmonte toutes les épreuves mais arrive à une triste conclusion : il n’a plus sa place dans ce monde en mutation.

Le Médaillon (The Locket) – de John Brahm – 1946

Posté : 28 août, 2013 @ 10:21 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, BRAHM John, MITCHUM Robert | Pas de commentaires »

Le Médaillon (The Locket) - de John Brahm - 1946 dans * Films noirs (1935-1959) le-medaillon

John Brahm délaisse les ambiances nocturnes et brumeuses de l’Angleterre victorienne qui l’ont révélé (avec ses deux chefs d’œuvre, The Lodger et Hangover Square), pour cette production ambitieuse avec laquelle la RKO souhaitait visiblement renouer avec la grandeur qui était la sienne au moment de Citizen Kane ou de La Splendeur des Amberson. On y retrouve les jeux sur l’ombre et la lumière, l’importance des gros plans ou encore le génie la puissance du montage qui faisaient la force des deux premiers films d’Orson Welles.

Mais Le Médaillon n’est pas une vaine tentative de renouer avec une gloire déjà passée pour le studio. Et John Brahm est bien plus qu’un ersatz de Welles. Même si la filiation est évidente, Brahm est un cinéaste totalement au service de son histoire et de l’atmosphère qu’il crée. Le malaise qui ressort de son film est ainsi de plus en plus palpable, jusqu’à la dernière image.

La construction du film est un modèle encore inégalé (même si Christopher Nolan s’en est vraisemblablement inspiré pour son Inception, aussi complexe mais nettement plus tape-à-l’œil) : une série de flash-backs qui ne se succèdent pas, mais qui s’imbriquent les uns dans les autres.

Tout commence à quelques heures d’un mariage. Un étranger raconte au futur marié que celle qu’il va épouser n’est pas celle qu’elle prétend, qu’elle est malade, menteuse, voleuse… pire peut-être. Il raconte, et dans le flash-back, lui-même rencontrait un autre homme qui racontait… et ainsi sur quatre niveaux, qui nous plonge jusqu’à la source de tous les maux, jusqu’à ce moment où, alors qu’elle n’était qu’une enfant, la jeune femme a vécu ce traumatisme à l’origine de tout.

Le mouvement du film est une merveille absolue : une lente et vertigineuse plongée dans les tréfonds du passé (et de l’âme du personnage), suivie d’une toute aussi lente remontée vers le présent. Avec toutes les fêlures, tous les doutes, toutes les souffrances que cette remontée implique. Tous les espoirs, aussi. Comme le laisse penser l’un des personnages principaux, psychanalyste, Le Médaillon est un film qui, sous des allures de film noir classieux, ne parle que de psychanalyse : les flash-backs successifs permettent d’ouvrir de plus en plus de portes, et de plonger de plus en plus profond pour découvrir le traumatisme originel…

C’est brillamment réalisé, d’une grande intelligence, et toujours formidablement modeste dans le ton que Brahm adopte, jamais professoral, toujours plus proche du film de série que du film à thème.

Dans le rôle principal, Laraine Day est très belle et troublante. Elle ne fait rien pour cela, d’ailleurs, mais c’est justement cette manière de ne rien jouer qui rend son personnage si trouble. Brian Aherne est aussi parfait dans le rôle du psy, mais c’est un jeune acteur qui monte qui dévore l’écran. Robert Mitchum, alors en pleine éclosion, et qui allait enchaîner avec quelques-uns des plus grands films noirs : Crossfire, Out of the past… Il a déjà ce jeu faussement nonchalant et ce charme trouble qui seront sa marque.

• La collection consacrée à la RKO, chez les Editions Montparnasse, vient de s’enrichir de sept nouveaux titres, des DVD à petits prix (10 euros) avec comme unique bonus une présentation de Serge Bromberg, qui contextualise chaque film avec sa passion bien connue. Au programme, outre Le Médaillon : Double chance de Lewis Milestone, L’Autre de John Cromwell, La Femme la plus riche du monde de William A. Seiter, Haute Société de George Cukor et deux classiques de Jacques Tourneur, Vaudou et L’Homme-léopard.

Other men’s women (id.) – de William A. Wellman – 1931

Posté : 27 août, 2013 @ 2:51 dans 1930-1939, CAGNEY James, WELLMAN William A. | Pas de commentaires »

Other men's women (id.) - de William A. Wellman - 1931 dans 1930-1939 other-mens-women

Typique de la période pre-code, cette petite production Vitaphone d’à peine plus d’une heure est basée sur des éléments que l’on retrouve dans d’innombrables films de l’époque : une jeunesse insouciante et fêtarde, des relations adultères, et les drames qui mettent soudain un terme à l’innocence.

Même avant la mise en place du code Hayes, on reste relativement sobre côté sexe, ne montrant clairement pas grand-chose de licencieux. N’empêche : il est clair que le héros, interprété par l’impeccable Grand Withers, est un queutard qui couche avec toutes celles qu’il croise lors de ses journées et de ses soirées très dissolues. Quitte à leur promettre le mariage sans y penser une seconde, ou à cocufier le premier mari venu.

Mais Bill (c’est son nom) a un principe : jamais la femme d’un ami. Sauf que Jack, l’ami qui l’héberge, a une épouse à croquer : c’est Mary Astor, dix ans avant Le Faucon maltais, avec des yeux grands comme ça et une moue enfantine qui font craquer le pauvre Bill. D’abord innocemment, dans de grands jeux plein de rires et de cris. Puis comme un vrai amour d’adulte, lorsque les rires d’enfants s’éteignent et que ces deux-là ne peuvent plus jouer à faire semblant.

C’est la plus belle scène du film. Wellman, dont la caméra virevoltait jusqu’alors autour de son couple en devenir, se fait soudain plus intime, plus grave. Et c’est magnifique.

L’histoire elle-même est assez convenue, mais le grand Wellman la transcende, en particulier dans la première moitié, menée à un rythme imparable. La fin traîne un peu en longueur, mais le cinéaste utilise parfaitement le cadre de son histoire, l’univers des cheminots. A vrai dire, lui qui a décroché le premier Oscar en filmant des avions (pour Wings) semble avant tout passionné par les trains qu’il filme ici sous tous les angles, souvent en mouvement.

Un train qui défile lentement devant un restaurant pendant que son chauffeur avale quelques œufs brouillés, un train qui fonce à toute allure vers un autre convoi, un train qui avance vers un pont sur le point de s’effondrer, un train où les amis se croisent, se parlent, se fâchent… Bien plus qu’un simple décor de film.

Les acteurs sont tous parfaits (on retrouve notamment J. Farrel MacDonald, qui fut un ouvrier du rail dans Le Cheval de fer de Ford), mais il en est qui, tout en ayant un rôle bref et peu intéressant, dévore l’image : c’est James Cagney, tout jeunôt dans l’un de ses premiers rôles. En une poignée de scènes seulement, il impose sa présence et son dynamisme, et parvient même à imposer quelques pas de danse impressionnants. La même année, il retrouvera Wellman, cette fois en tête d’affiche, pour L’Ennemi public. Ce sera l’explosion, pour lui.

Other men’s women figure dans le volume 3 de la collection « Forbidden Hollywood », édité en zone 1 chez TCM Archives. Un volume indispensable, entièrement consacré à la période pre-code de William Wellman. Au menu : six films du grand Bill (dont le Night Nurse figurait déjà dans le volume 2 de la collection) : The Purchase Price, Heroes for sale, Midnight Mary, Frisco Jenny et Wild boys of the road. En bonus, des commentaires audios d’historiens, un grand documentaire consacré à Wellman, les bandes annonces des six films, une poignée de cartoons de l’époque, et quelques épisodes d’une série de courts métrages adaptés de SS Van Dine (le « père » de Philo Vance, le héros du Mystère de la chambre close), avec Donald Meek dans le rôle du Docteur Crabtree qui, comme Philo Vance, aide la police à résoudre des meurtres impossibles. Seul bémol : les sous-titres disponibles pour le film n’existent pas pour les bonus.

Jack l’Eventreur (The Lodger) – de John Brahm – 1944

Posté : 26 août, 2013 @ 5:24 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, BRAHM John | Pas de commentaires »

Jack l'Eventreur (The Lodger) - de John Brahm - 1944 dans * Films noirs (1935-1959) the-lodger

Du roman de Marie Belloc Lowndes, on connaît surtout la première adaptation, muette, qui fut aussi le premier chef d’œuvre noir d’Hitchcock. D’autres adaptations ont suivi : celle de Maurice Elvey en 1932, puis le Man in the Attic de Hugo Fregonese en 1955, et surtout cette version de 1944 signée John Brahm. Un film qui, contrairement au film d’Hithcock, évoque en la nommant la figure de Jack l’Eventreur.

Cette troisième adaptation est l’œuvre d’un cinéphile passionné, visiblement inspiré par l’esthétique expressionniste de Citizen Kane, dont il reprend les contre-plongées, les jeux d’ombres et le mariage des gros plans et des plans larges. Brahm cite aussi subrepticement, mais clairement, le film d’Hitchcock : dans la première séquence, les badauds attroupés derrière une grille évoquent la fameuse scène où Ivor Novello, sur le point d’être lynché par la foule, est accroché à une grille par des menottes.

Mais le film est aussi l’œuvre d’un grand cinéaste formel, qui magnifie les ruelles sombres, humides et brumeuses de White Chapel pour en faire le théâtre absolu de grands moments de frayeurs. Des films qui utilisent ces ruelles si inquiétantes pour filer la frousse au spectateur, il y en a eu des dizaines. Mais rares sont ceux qui ont su allier l’efficacité (on a vraiment peur), le mythe (il y a un côté presque onirique à ces scènes tournées en studio), et un étonnant réalisme.

Trop méconnu aujourd’hui, John Brahm fait des merveilles, avec de magnifiques travellings dans ces ruelles d’habitudes désertes, mais ici grouillantes d’agitation : c’est la vie du Londres du début des années 1890, trépidante, pleine de poivrots, de chanteurs et de musiciens. Un lieu où la vie extravagante dissimule des blessures profondes, que les regards et les visages âbimés laissent entrapercevoir.

La faune qu’on y croise est bien plus fascinante que le personnage de l’inspecteur de Scotland Yard, joué impeccablement mais sans grande surprise par un George Sanders épris de la belle Merle Oberson. Ce couple romanesque (le flic et la danseuse) se voit volé la vedette par les gueules de White Chapell, comme Jenny, la vieille accordéoniste qui joue dans les bouges en échange d’un verre ; ou comme Mary, l’ancienne artiste qui a laissé passer depuis bien longtemps sa chance d’accéder à la gloire.

Ce sont ces seconds rôles, parfois très furtifs, qui font le poids de ce film, et qui rendent si vivant le fog londonien, qui dépasse pour une fois le simple élément de décor et de trouille. C’est aussi, bien sûr, Laird Cregar, énorme dans tous les sens du terme, qui fait d’ailleurs curieusement penser au jeune Orson Welles de Kane, engoncé dans sa rectitude et dans ses prothèses. Impressionnant, pathétique et effrayant, il a droit à de nombreux gros plans terrifiants qui créent le malaise : ce type adipeux est-il Jack l’Eventreur, ou n’est-il qu’une victime en quête de vengeance ?

L’acteur devait mourir subitement quelques mois plus tard, après avoir tourné un ultime film, Hangover Square, autre film brumeux et angoissant, toujours sous la direction de John Brahm.

Dangereuse mission (Wyoming Mail) – de Reginald LeBorg – 1950

Posté : 23 août, 2013 @ 12:11 dans 1950-1959, LeBORG Reginald, WESTERNS | Pas de commentaires »

Dangereuse mission (Wyoming Mail) - de Reginald LeBorg - 1950 dans 1950-1959 dangereuse-mission

Encore un petit western très original, que l’on doit cette fois à un réalisateur qui n’a pas laissé une trace mémorable dans l’histoire du cinéma. A peine se souvient-on de lui pour une série de films d’horreur à petits budgets, tournés pour la Universal dans les années 40. La découverte, avec ce Wyoming Mail, est plutôt agréable, même si le film manque de rythme.

Mais LeBorg aborde le genre, visiblement, avec un regard de non spécialiste du western : l’intrigue évoque davantage les ficelles du film à suspense (avec l’identité, gardée secrète jusqu’au bout, du chef de gang que recherche le héros), et les décors sont parfois proches du cinéma d’horreur, notamment avec cette planque troglodyte à flanc de montagne, totalement inattendue dans un western.

Le film est aussi un jeu constant sur la tromperie et la dissimulation. Le héros, interprété par un excellent Stephen McNally (qui était la même année à l’affiche de Winchester 73) est un agent secret, infiltré autant par goût de l’action que par sens du devoir. En tentant de mettre à jour le gang qui attaque les trains postaux, menaçant ainsi la pérennité de ces trains, et l’unification même de cette Amérique à peine sortie de la guerre civile, notre aventurier croise des agents doubles, voire triples. Un vrai film d’espionnage, parfois léger comme un 007, parfois franchement sombre et paranoïaque, comme lors de cette longue séquence dans la prison dirigée par le toujours infâme Ed Begley…

Mais le plus original, et le plus séduisant dans ce western fort sympathique, c’est l’omniprésence des trains (comme dans Other men’s women de Wellman, tiens, dans un tout autre registre et vingt ans plus tôt : la chronique arrive très prochainement), qui donnent corps  au film comme ils donnent une cohésion à ces terres immenses. Filmés avec une belle inspiration, ce sont ces trains qui sont au cœur des plus beaux moments du film.

• Le film fait partie des nouveautés de la collection Westerns de Légende, chez Sidonis, avec une présentation par l’incontournable Patrick Brion.

L’Or du Hollandais (The Badlanders) – de Delmer Daves – 1958

Posté : 22 août, 2013 @ 7:02 dans 1950-1959, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

L’Or du Hollandais (The Badlanders) – de Delmer Daves – 1958 dans 1950-1959 lor-du-hollandais

Evidemment, à côté de La Flèche brisée et autres sommets du genre, L’Or du Hollandais fait figure d’aimable curiosité dans la filmographie du grand Delmer Daves. Mais ce curieux western mériterait bien d’être redécouvert. Parce que derrière une histoire a priori très classique (deux anciens bagnards préparent le vol d’une fortune en or), Daves signe un western qui ne ressemble à aucun autre, et une œuvre très personnelle.

Comme dans ses chefs d’œuvre, le cinéaste aborde des thèmes qui lui sont chers : le racisme, le respect de l’autre, et la place de l’homme dans une société trop violente qui ne lui ressemble pas. Comme James Stewart dans Broken Arrow, Alan Ladd et Ernest Borgnine, duo improbable et attachant, finissent par refuser les règles de cette société dont ils sont désormais des parias. Ladd remplace même le traditionnel pistolet dans son étui par un marteau de mineur…

Quant au gros Borgnine, il tombe amoureux d’une Mexicaine près de laquelle il trouve un inattendu havre de paix, variation à peine déguisée de Stewart chez les Indiens. On sent bien que la sympathie de Delmer Daves va moins au personnage secret d’Alan Ladd qu’à ce couple de bannis (la Mexicaine et l’ancien prisonnier).

L’enchaînement de deux courtes scènes sans conséquence sur l’intrigue est parlant. Dans la première, Ladd, cynique, lance à une belle intrigante : « Un homme doit être riche comme une femme doit être jolie. » Daves enchaîne aussitôt avec une jolie scène sans parole, du nouveau couple qui s’émerveille de la naissance d’un bébé.  La rupture de ton entre ces deux scènes est nette, et presque naïve. Mais l’innocence retrouvée du patibulaire Borgnine est très émouvante.

Au passage, Daves égratigne un peu plus encore l’image de cette Amérique des pionniers, dont l’héroïsme en prend un sacré coup. Nos deux héros eux-mêmes, et même s’ils ne sont pas manchots lorsqu’il s’agit de dégainer ou de donner du poing (ce qu’ils font), passent plus de temps à casser des cailloux et à descendre au fond de la mine où l’or les attend, qu’à affronter les méchants.

La grande fusillade finale est peut-être moins impressionnante que celle de La Flèche brisée, et le ton est un peu moins sombre. Mais il y a quelque chose de profondément désabusé, là. Daves ne signe pas un film majeur, mais L’Or du Hollandais est une pièce de son œuvre qu’il ne faut pas négliger.

G.I. Joe : Conspiration (G.I. Joe : Retaliation) – de Jon M. Chu – 2013

Posté : 19 août, 2013 @ 7:50 dans 2010-2019, CHU Jon M., FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

G.I. Joe : Conspiration (G.I. Joe : Retaliation) - de Jon M. Chu - 2013 dans 2010-2019 g.i.-joe-conspiration
J’avoue : la perspective de retrouver Bruce Willis dans un film d’action réveille toujours en moi les plaisirs de l’ado qui découvrait les premiers Die Hard. Mais à force d’enchaîner les merdes et les films sans originalité (la liste de ses derniers films est édifiante : Die Hard 5, GI Joe 2, Red 2 et Sin City 2… wouah, ça c’est de la prise de risque), Willis est devenu la caricature de lui-même, et son capital de sympathie est en train de fondre à toute vitesse. Même son vieux pote Stallone l’a mis à la porte du prochain Expendables (le privant ainsi d’une cinquième suite d’affilée) pour cause de « fainéantise » et de « cupidité ».

Rassurons quand même les fans : Bruce n’est pas responsable du nanar qu’est ce deuxième GI Joe. Il n’en est même pas une grande victime, puisqu’il n’apparaît qu’à la moitié du métrage, et se contente d’une poignée de scènes (grotesques, certes) avec gros plans sur les tristes restes de son rictus ironique et sur ses mâchoires crispées. Dommage, son personnage, le « Joe » historique, était le plus intéressant sur le papier, et aurait pu lui permettre un sympathique clin d’œil à sa propre légende d’action hero.

Mais la vague ironie du premier film (qui était aussi sauvé par une chouette poursuite dans les rues de Paris) disparaît corps et âmes en même temps que son héros, Channing Tatum, éliminé après une dizaine de minutes seulement.

Qu’est-ce qu’il reste ? Des scènes d’action filmées sans une once de talent et montées par un épileptique qui interdit à l’œil la moindre possibilité de s’accrocher à quelque chose, Londres qui explose dans une séquence de grand n’importe quoi même pas impressionnante, des rebondissements assez incompréhensibles pour ceux qui ne connaissent pas par cœur les personnages d’Hasbro, et le gentillet Dwayne Johnson, sorte de Schwarzie pour enfants avec sourire de surfeur. C’est peu ? Oui. C’est nul ? Oui. C’est long ? Ouuuiiii…

Feux croisés (Crossfire) – d’Edward Dmytryk – 1947

Posté : 18 août, 2013 @ 4:29 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, DMYTRYK Edward, MITCHUM Robert, Palmes d'Or, RYAN Robert | Pas de commentaires »

Feux croisés (Crossfire) – d’Edward Dmytryk – 1947 dans * Films noirs (1935-1959) feux-croises

Ça commence comme un film noir très classique : dans une pièce plongée dans l’obscurité, des ombres se battent. On n’en voit quasiment rien, mais la violence de la scène est perceptible. Finalement, deux hommes portant uniforme laissent derrière eux un civil sans vie… Puis l’entrée en scène d’un flic revenu de tout, joué par l’excellent Robert Young, très « Maigret-esque », qui va tenter de reconstituer les dernières heures de la victime, un brave type qui a croisé la route de trois soldats fraîchement démobilisés dans un bar.

L’affiche elle-même constitue une sorte de sommet du film noir de l’époque : les trois Robert Mitchum, Ryan et Young réunis dans un même film… il y a de quoi faire saliver tous les amateurs du genre. Mais très rapidement, le film s’éloigne de l’intrigue pure. L’identité du coupable est révélée, et ce n’est pas une surprise : c’est Robert Ryan, habitué aux rôles de grands malades et de désaxés, qui interprète ici un vétéran débordant de haine contre les juifs.

Dmytryk, qui sera quelques mois après le tournage le seul réalisateur des « 10 d’Hollywood » (des professionnels du cinéma blacklistés pour avoir refusé de coopérer avec la tristement fameuse commission McCarthy), signe peut-être le premier film qui dénonce ouvertement d’antisémitisme non pas comme l’un des moteurs du nazisme, mais comme une menace intérieure réelle.

Ryan n’y est pas un psychopathe assoiffé de sang : c’est un « antisémite ordinaire » (comme on parle aujourd’hui de racisme ordinaire) qui, vraisemblablement, rejette sur les Juifs, et particulièrement sur cet homme si compréhensif et si serein qu’il rencontre au hasard d’une soirée, la responsabilité des horreurs auxquelles il a dû prendre part durant la guerre, et la mort de soldats qu’il a connus. Un type plein de haine et de morgue qui finit par déraper.

C’est la grande force du film, au-delà du récit plein de suspense : faire ressentir la triste banalité de ces destins brisés. Le flic, d’âge mur, est revenu de tout. Mais les jeunes soldats sur lesquels il enquête semblent, eux, ne pas savoir comment retrouver une vie normale après ces années de guerre.

Robert Mitchum, qui fait en quelque sorte le lien entre tous les personnages, a le rôle le moins intéressant à jouer. Il ne prend d’ailleurs qu’une part marginale dans le déroulement de l’action. Mais la présence de l’acteur, qui n’a pas encore tourné ses grands chefs d’œuvre, est déjà magnétique. Sa force tranquille, ses paupières lourdes, sa diction de trois heures du matin, habitent déjà ce film fort et intelligent, qui réussit à faire le trait d’union entre film de genre et film engagé. Pas de quoi rassurer McCarthy…

• Le DVD du film fait partie de la très riche (et très abordable) collection bleue « RKO » des Editions Montparnasse.

Piranhas (Piranha) – de Joe Dante – 1978

Posté : 14 août, 2013 @ 2:22 dans 1970-1979, DANTE Joe, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Piranhas (Piranha) - de Joe Dante - 1978 dans 1970-1979 piranhas

Des petites bestioles (très) carnivores dévorent les touristes d’un fleuve et d’une base nautique que des promoteurs sans scrupules veulent préserver à tout prix de tout scandale… L’inspiration de Joe Dante est évidente : avec Piranhas, il signe le plus réjouissant des nombreux films inspirés des Dents de la Mer. Un film qui, pourtant, porte la marque de Dante : celle d’un cinéaste cinéphile qui n’a jamais eu la prétention de se comparer à ses maîtres, signant des films passionnés (et souvent passionnants) habités par sa cinéphilie dévorante.

Dès le générique, et après une baignade nocturne franchement flippante qui rappelle une autre ouverture célèb, le ton est donné. « Réalisé par Joe Dante » apparaît sur un jeu vidéo dérivé de Jaws. Le message est clair : le cinéaste entend bien s’amuser avec les images déjà mythiques du film de Spielberg.

Comme pour son autre grand succès, Gremlins, Dante trouve le bel équilibre entre citations, parodie et horreur. Piranhas remplit son contrat dans le domaine de l’horreur, avec quelques séquences de carnage sanglantes aux effets gores assumés. Mais Dante ne se prend jamais au sérieux, se permettant même quelques effets totalement inutiles, comme l’apparition de ces bestioles mutantes dans le laboratoire (hommage totalement gratuit aux créations de Ray Harrihausen), qui évoquent curieusement les dinosaures que Spielberg filmera quinze ans plus tard dans Jurassic Park. Difficile aussi de ne pas voir un réjouissant second degré dans le choix des comédiens, dont l’interprétation est souvent franchement limites, et qui semblent souvent sortir de la plus cheap des séries Z.

Les thèmes sont les mêmes que ceux de Spielberg : la peur de l’eau, le cynisme des autorités, la paranoïa et la manipulation. Mais Dante les traite avec une ironie clairement assumée, une sorte de regard rigolard qui lui permet de multiplier les citations cinéphiliques (L’Etrange créature du Lac noir, bien sûr, mais aussi la pancarte « Défense d’entrer » de Citizen Kane qui ouvre le film, les morsures des poissons filmées comme les attaques des Oiseaux d’Hitchcock…) avec humour, passion et recul.

Tourné en même temps que Les Dents de la Mer 2, Piranhas (dont la suite sera la première réalisation de James Cameron) est, aujourd’hui encore, le rejeton le plus honorable du chef-d’œuvre de Spielberg.

• Sorti au tout début de cet été, le DVD édité par Carlotta propose de beaux suppléments : une dizaine de minutes de rushes muettes (plutôt sympathique de découvrir l’ambiance du tournage), une bande annonce d’époque, et surtout un entretien de 40 minutes avec Joe Dante, qui revient longuement sur la genèse du film. Ironique, passionné, cinéphile, le réalisateur ne manie pas la langue de bois et s’amuse du culte qui entoure son premier succès populaire. L’écouter se révèle aussi passionnant que regarder son film…

Vacances à Venise (Summertime) – de David Lean – 1955

Posté : 13 août, 2013 @ 12:52 dans 1950-1959, LEAN David | Pas de commentaires »

Vacances à Venise (Summertime) – de David Lean – 1955 dans 1950-1959 vacances-a-venise

Le grand Lean disait de Summertime que c’était son film favori. C’est en tout cas une œuvre charnière dans sa carrière, une production britannico-américaine qui fait le trait d’union entre les films anglais du cinéaste et ses grands films américains à venir. Après avoir élevé le tournage en studios au rang de grand art, c’est aussi avec ce film qu’il plonge pour la première fois au cœur de son décor naturel, comme il le fera avec le désert de Lawrence d’Arabie ou avec les paysages russes du Docteur Jivago.

Ce film-ci est d’une grande simplicité. Katherine Hepburn, Américaine vieillissante, tente de rompre sa solitude en passant quelques jours de vacances à Venise. Elle est heureuse comme tout de découvrir la sérénissime. Un peu exubérante, elle arpente les ruelles et les canaux avec émerveillement. Les premières minutes du film sont déconcertantes : une espèce de carte postale aux couleurs vives, une ville pleine de clichés que Hepburn découvre comme la touriste qu’elle est, passant d’ailleurs son temps à filmer ce qu’elle voit.

Et puis une rupture, a priori sans importance : alors que la touriste s’émerveille de ce qu’elle voit, du calme et de la pureté de la ville, la surface du canal est troublée par des détritus jetés par une fenêtre. Ce n’est rien, mais ce simple geste vient bouleverser le ton du film, cassant l’image d’Epinal et fragilisant le sourire presque béat d’Hepburn.

L’actrice est filmée comme Venise : avec amour, mais avec ses contradictions. Le romantisme de la ville se révèle terrible pour cette femme seule qui, alors qu’elle est assise sur une terrasse de la place Saint-Marc, prend soudain conscience de sa profonde solitude, et s’invente maladroitement un compagnon.

La caméra de Lean plonge dans le cœur de Venise, comme dans celui de l’actrice. Et le fossé entre l’image que l’une et l’autre veulent bien donner, et leur réalité profonde, est abyssal. Rien ni personne n’est aussi pur et simple que l’image qu’il donne. Le beau prince n’est finalement qu’un homme avec ses contradictions. Le romantisme désespéré de Brève rencontre, autre liaison extraconjugale filmée dix ans plus tôt par Lean, a des allures bien différentes ici.

Katherine Hepburn est formidable, parce qu’elle donne vie à la lutte intérieure à laquelle se livre cette Américaine pleine des beaux principes et de la fierté de son pays qui, peu à peu, accepte de laisser éclater son humanité, ses désirs et ses fêlures.

• Souvent exigeant dans le choix de ses bonus (et de ses films), Carlotta joue la sobriété avec le DVD édité en 2011. Au menu : la bande annonce, et une courte présentation par le toujours passionnant Pierre Berthomieu.

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