Cœurs joyeux – de Hanns Schwarz et Max de Vaucorbeil – 1932
Lorsque Gabin tourne cette version française d’un film allemand, il a déjà tenu un second rôle très marquant dans le superbe Cœur de Lilas, et il vient d’avoir la vedette dans La Belle Marinière, qui sera un tournant dans sa carrière, annonçant ses grands chefs d’œuvre à venir. Mais il est encore cette vedette de music-hall dont les premiers pas devant la caméra sont une sorte de prolongement de ses années de scène.
Alors il chante, dans Cœurs joyeux. Peu, et des chansons pas inoubliables. Mais il chante, et il apparaît souriant et positif, quelle que soit la situation. Emprisonné par des gangsters armés, il garde le sourire. Arrêté par la police, il ne semble pas s’inquiéter… Tout est légèreté dans cette comédie policière et musicale.
C’est parfois un peu long, un peu vide, mais il y a de beaux moments dans ce film. Une belle scène d’ouverture, pour commencer, avec cette scène muette qui s’avère être un film projeté dans un cinéma, où Gabin est projectionniste. Une scène qui donne le ton d’un film qui semble abolir la frontière entre l’écran et la salle.
Jusqu’à la dernière image, qui répond à l’ouverture, tout le film se déroule sur une cime étroite entre fiction et réalité, avec cette histoire relativement classique que viennent troubler des moments chantés.
Deux moments étonnants, aussi. D’abord un beau travelling vertical qui accompagne la montée du couple en formation vers l’appartement au cinquième étage, qui réinvente le fameux plan de L’Heure suprême. Et puis un dialogue amoureux autour d’un ours en peluche, qui annonce en quelque sorte le superbe Le Jour se lève (« C’est vrai qu’il me ressemble »).
Cœurs joyeux n’est pas de ce niveau. Vraiment pas. Mais cette petite chose légère et souriante se voit avec un petit plaisir curieux et amusé.