Une pluie sans fin (Bàoxuě jiāng zhì) – de Dong Yue – 2017
Un agent de sécurité d’une usine en fin de vie est obnubilé par l’idée de démasquer un tueur en série qui a déjà trucidé quatre jeunes femmes de la région… Un polar obsessionnel de plus ? Dans un sens, on peut dire que ce premier film de Dong Yue n’invente rien : dans le genre, David Fincher (Zodiac et Seven sont clairement cités) et Bong Joon-ho (Memories of Murder) ont déjà posé des jalons majeurs.
Mais tout en s’inscrivant ouvertement dans cette filiation, tout en recyclant des images qui semblent sortir du cinéma de l’Américain Fincher (la poursuite sous la pluie) ou du Coréen Bong (le coup de folie dans les herbes hautes), Dong Yue s’impose comme un cinéaste à suivre, notamment pour sa capacité à créer une atmosphère, bien glauque et bien oppressante.
Sans illusion, non plus : il choisit comme décor la Chine de 1997, année charnière de la rétrocession de Hong-Kong, et il choisit un décor sans joie, sans beauté et sans avenir, celui d’une région qui se désindustrialise à toute vitesse, ne laissant que misère, terrains vagues et dépression. Et Dong Yue filme ce décor, et ses personnages fracassés, avec un sens du plan exceptionnel, qui fait beaucoup pour la fascination qu’exerce le film.
Surtout, la singularité de ce polar tient au doute qu’il distille mine de rien. La neige qui se met à tomber lors d’une cérémonie de remise de médailles ; une petite amie dont la beauté et la lumière semblent décalées dans la grisaille ambiante ; Yu, le héros qui veut à tout prix passer le millénaire la tête haute n’est-il pas l’objet de fantasmes… Un trouble qui finit par nous laisser sidérés.