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Archive pour juillet, 2021

Godless (id.) – mini-série de Scott Franck – 2017

Posté : 6 juillet, 2021 @ 8:00 dans 2010-2019, FRANK Scott, TÉLÉVISION, WESTERNS | Pas de commentaires »

Godless

Godless ne révolutionne pas le western, et ce n’est pas une critique. Scott Franck, créateur de la mini-série et réalisateur des sept épisodes, aime visiblement le genre, pour sa simplicité et son intensité. L’une des constantes du western, c’est la coexistence des grands espaces vierges et somptueux, et d’une violence constamment tapie, toujours prête à exploser. C’est exactement ce qui est au cœur de Godless.

Le contexte, quand même, est très original : l’essentiel de l’action se déroule à La Belle, petite ville minière au nom prémonitoire, dont tous les hommes valides ont été tués dans une explosion deux ans plus tôt. Ne restent plus qu’une poignée de vieillards, les enfants, et surtout les femmes qui découvrent qu’elles sont capables de vivre par elles-mêmes. Tout un symbole féministe, bien sûr, dont Scott Franck fait le décor plus que le sujet de Godless.

L’histoire, elle, est à la fois simple et dépouillée. Un chef de bande écume le pays avec sa horde franchement sauvage pour retrouver celui qu’il considérait comme son fils et qui l’a trahit : Roy Goode, jeune homme ballotté par le destin, écœuré par les crimes de son « père » de substitution, étonnant Jeff Daniels.

Godless laisse le sentiment d’une violence extrême, notamment parce que l’ultime épisode réserve un carnage plus terrible encore que La Horde sauvage, justement. Pourtant, elle est relativement rare, la violence. Rare et expéditive, toujours percutante, et souvent inattendue. Les coups de feu sont percutants, les impacts font mal, les têtes explosent, les membres sont arrachés… Du genre qui marque et qui fait mal.

Cette violence frappe les esprits, durablement. Mais Godless est aussi une série qui sait prendre son temps, et adopter le tempo de cet Ouest encore sauvage, qui vit au gré de la nature et des saisons. Cette nature omniprésente, parfois dangereuse, souvent belle. On y vit, on s’y délasse, on y communie, et on y crève aussi, durement et salement.

On y parle peu, et lentement, et chaque parole compte. Ni vraiment contemplatif, ni enragé, Godless est une série profondément humaine, qui ne parle en fait que de désir et de frustration. Il y a là des tas de couples qui tentent difficilement de se former, constamment troublées par l’ordre établi, même dans ces terres encore sauvages : deux femmes qui peinent à se dire qu’elles s’aiment, un jeune blanc amoureux d’une noire, une immigrée séduite par le détective qui la recherchait…

Ce pourrait faire l’effet d’un étalage, d’une espèce de liste des couples impossibles. Mais non, et c’est peut-être là que Godless est finalement le plus réussi, dans la vérité qui se dégage de ces personnages, nombreux et tous également passionnants. C’est beau, parce que Scott Franck sait capter les regards, les gestes retenus, les phrases tues. Entre Roy, l’homme traqué, et Alice, la rescapée, rien ou presque ne se passe. Mais ce rien, par l’élégant classicisme et le souffle discret de la mise en scène (et la musique, magnifique), a des allures de passion folle.

Le Juge et l’assassin – de Bertrand Tavernier – 1976

Posté : 5 juillet, 2021 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1970-1979, TAVERNIER Bertrand | Pas de commentaires »

Le Juge et l'assassin

A la fin du XIXe siècle, dans le Sud-Est de la France, un ancien soldat assassine jeunes filles et jeunes garçons au hasard de ses voyages sur les chemins. C’est un authentique fait divers qui est à l’origine du troisième long métrage de Bertrand Tavernier, mais l’ambition du jeune cinéaste est déjà bien ailleurs. Certes, il est question d’un tueur en série, de sa traque et de son jugement. Mais ces crimes ne sont pour Tavernier que le prétexte à un portrait acide et dérangeant de cette France là, autoritaire, colonialiste, antisémite.

L’œuvre de Tavernier est, peut-être plus encore que celle de Spielberg pour les Etats-Unis, une sorte de comédie humaine consacrée à l’histoire moderne de la France. Ses films sont bien souvent des plongées d’une vérité troublante dans une époque malade, avec ses dérives, ses tares, ses grandeurs parfois (mais pas souvent) : de la cour de Philippe d’Orléans dans Que la fête commence aux coulisses du Quai d’Orsay, en passant par les cadavres de la bataille de Verdun de La Vie et rien d’autre ou par le Paris de l’occupation de Laissez-passer.

Le Juge et l’assassin est une étape importante dans cette démarche, parce que le film est une merveille, totalement en dehors du temps. Tavernier nous plonge dans cette France de la fin du siècle d’avant, il s’y plonge lui-même, avec une force rare. Cela passe par les paysages grandioses de l’Ardèche, qui ont rarement été aussi cinégéniques qu’ici. Cela passe par les tensions dreyfusardes que l’on ressent constamment. Cela passe par les costumes, le langage, étonnants de vérité. Cela passe aussi par ces chansons signées (et chantées) par Jean-Roger Caussimon, complaintes fascinantes qui semblent avoir traversé le temps, mais qui ont bel et bien été écrites pour le film.

Michel Galabru trouve le rôle de sa vie bien sûr. C’est même tellement une évidence que revoir le film pointe une nouvelle fois du doigt le gaspillage de son talent. Pourquoi donc n’a-t-il jamais retrouvé un rôle d’une telle ampleur que ce tueur, dont Tavernier fait une sorte de symbole de ce que cette société peut engendrer de pire. Une victime, en fait, sorte de double de Monsieur Verdoux. L’exergue que Tavernier place à la fin de son film renvoie directement au plaidoyer de Chaplin au pied de l’échafaud : Bouvier a tué douze enfants entre 1893 et 1898. « Durant la même période, plus de 2500 enfants de moins de 15 ans périrent dans les mines et les usines à soie, assassinés ! »

Bouvier/Galabru est un assassin ? Oui, inquiétant et pathétique. Mais une victime aussi, sans doute violé dans son enfance au sein de cette église si puissante, rejeté par toutes les institutions, et manipulé par ce juge cynique et ambitieux, grand rôle pour Philippe Noiret, magnifique dans la mesquinerie, symbole de cette société des injustices dont Isabelle Huppert, elle aussi superbe, représente l’autre pan. Qui finira par se dresser en héritière de la Commune dans une dernière scène puissante et belle.

Un, deux, trois, soleil – de Bertrand Blier – 1993

Posté : 4 juillet, 2021 @ 8:00 dans 1990-1999, BLIER Bertrand | Pas de commentaires »

Un deux trois soleil

Dans une banlieue triste et grise, la vie sans horizon d’une jeune fille, entourée par une mère envahissante et un père alcoolique. Elle perd son pucelage dès l’école avec plusieurs loubards dans une carcasse de bagnole, découvre l’amour avec un jeune homme qui perdra la vie dans un cambriolage, grandira pleine de colère et de rancœur, avant de se marier sans amour avec un homme qui ne la fera pas rêver…

Vingt ans après Les Valseuses, la banlieue n’est pas plus sexy pour Blier, mais elle est tout aussi inspirante. D’avantage, même : Blier n’a rien abdiqué de sa liberté, mais a beaucoup gagné en maîtrise de son art. Et après une première partie qui laisse dubitatif, avec une Anouk Grinberg qui surjoue la petite écolière à grand renfort de minauderies prépubères, il se passe une sorte de petit miracle dans ce film.

Le déclic semble impulser par l’apparition d’un Jean-Pierre Marielle extraordinaire en vieil homme avide d’échanger avec ses jeunes cambrioleurs. Après ces premières minutes qui laissaient un sentiment pour le moins mitigé, son apparition le temps d’une unique séquence apporte une vérité qui ne disparaîtra plus. Ses dialogues face caméra donnent alors du corps aux parti-pris audacieux de Blier, à son récit totalement déstructuré où les époques se croisent, où les morts et les vivants se rencontrent, où les souvenirs et les espoirs prennent corps…

La séquence de Marielle est magnifique, avec ces images obscures et ces cadres dans le cadre qui soulignent la solitude du gars. Celle qui suit, avec un Claude Brasseur odieux, est tout aussi forte, dans ce qu’elle donne à voir de cette France évoquée par Blier. Sous les attraits d’une fable folle, c’est une société étouffante qui se dessine, avec des douleurs terribles. Un, deux, trois, soleil est un film qui ressemble à un cri suspendu, à des larmes qui refusent de couler.

Par moments, quand même, les cris retentissent, et les larmes coulent. La mort du père (Marcello Mastroianni, magnifique), les espoirs touchants du mari (Jean-Michel Noirey), la triste résignation d’Anouk Grinberg, surtout, qui laisse partir ses fantômes. Et la musique, signée Khaled, magnifique et bouleversante. Le condensé sensible, poétique et douloureux d’une jeunesse perdue.

Entre onze heures et minuit – de Henri Decoin – 1948

Posté : 3 juillet, 2021 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1940-1949, DECOIN Henri | Pas de commentaires »

Entre onze heures et minuit

Un policier enquête sur un meurtre quand il découvre une seconde victime : le cadavre d’un homme qui était son sosie parfait. Le flic prend alors la place du mort, pour tenter de démasquer le coupable, et tombe amoureux de la petite amie de ce dernier.

Encore une histoire de sosie pour Louis Jouvet ? Oui, mais bien différente de celle de Copie conforme, gros succès qui fait figure d’aimable divertissement à côté du film de Decoin. Decoin qui s’amuse joyeusement de cette parenté dans un prologue réjouissant : voix off qui évoque avec dérision les facilités du cinéma, son appétence pour les sosies, tout à la fois le Edward G. Robinson de Toute la ville en parle, le Chaplin du Dictateur… et le Jouvet de Copie conforme !

Le procédé ici est différent, nettement plus subtil. D’abord, Jouvet ne joue pas vraiment deux rôles. Si ce n’est sur une photo, jamais on ne voit vraiment le visage du mort. Mais le film met en scène ce flic qui semble se dissoudre dans la vie de cet alter ego qui n’a rien d’aimable, mais dont l’existence tangible le fascine.

Un trouble qui prend l’apparence de la maîtresse, jouée par Madeleine Robinson, qui semble elle découvrir l’homme qu’elle aimait tel qu’elle l’a toujours rêvé. Pour la première fois. Bien plus que Copie conforme, dont l’intérêt reposait avant tout sur les trucages et la confrontation de deux Jouvet à l’écran, le film de Decoin aborde avec intelligence et force la question de l’identité, à travers l’existence de deux hommes physiquement interchangeables.

Decoin emballe ça dans une mise en scène magnifique de film noir, avec jeux d’ombres et reflets dans les miroirs. Une imagerie fascinante qui donne encore plus de poids à cette thématique du double, beau film de genre, belle réflexion sur l’identité, et beau portrait d’un homme qui se découvre, superbe Louis Jouvet.

La Chevauchée de la vengeance (Ride Lonesome) – de Budd Boetticher – 1959

Posté : 2 juillet, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, BOETTICHER Budd, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Chevauchée de la vengeance

Une première scène, admirable de tension : affrontement simple et frontal de deux hommes dans un paysage de roches où la menace invisible est palpable, omniprésente, petit chef d’œuvre d’introduction, d’une efficacité absolue.

Une dernière image, superbe et apocalyptique, d’un homme seul devant un arbre en feu, au cœur d’une clairière vers laquelle toute l’action se dirigeait. L’image, dramatique et visuellement somptueuse, d’un destin qui s’accomplit…

Entre ces deux grands moments, à peine 1h10 d’un western épuré et radical, l’un des sommets de la collaboration entre Randolph Scott et Budd Boetticher. Scott tel qu’en lui-même, minéral et déterminé, hanté – encore – par la mort de son épouse des années plus tôt.

Une histoire de vengeance, donc, une nouvelle fois, qui vient troubler un schéma westernien que l’on croît connaître par cœur : celui du chasseur de prime traqué par le frère de sa proie, qui fait alliance de circonstance avec un rival qui finira par se retourner contre lui.

Schéma classique, mais western constamment surprenant, et étrangement apaisé, bienveillant, et optimiste malgré la noirceur et la violence du propos. Boetticher utilise ces personnages archétypaux et ces paysages si typiques du genre pour détourner les poncifs du western.

L’histoire de vengeance devient celle d’accomplissements personnels, un western humain, original, et passionnant.

Victor – de Claude Heymann – 1951

Posté : 1 juillet, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, GABIN Jean, HEYMANN Claude | Pas de commentaires »

Victor

Pas le plus prestigieux des films de Gabin, pas le meilleur non plus, loin de là. Ce Victor est même l’un des plus approximatifs de ces années d’après-guerre, par ailleurs nettement plus intéressantes que ce que l’acteur lui-même en disait.

Il fait d’ailleurs ce qu’il peut, Gabin, pour donner du poids à ce personnage qui en manque cruellement. Victor, brave homme qui sort de prison où il a purgé un an à la place de celui qu’il considère comme son meilleur ami, qui vit avec celle dont il croit être amoureux.

Ces deux là forment la seule originalité du film : Françoise Christophe (et sa voix à la Michèle Morgan) et Jacques Castellot, couple libre, voire libertin, dont l’avidité et la mesquinerie affichée cachent une vérité plus complexe.

La principale limite, c’est Claude Heymann, réalisateur et scénariste, qui adapte une pièce d’Henry Bernstein (l’auteur du Bonheur, de Samson ou du Messager) avec une nonchalance assez rare.

Les dialogues, notamment, sont d’une maladresse confondante, Gabin lui-même semblant mal à l’aise, surjouant parfois pour tenter de donner du naturel à des situations qui manquent.

Mal construit, le film manque d’intensité. Heymann foire les grands moments dramatiques, utilise maladroitement les ellipses, et fait de Brigitte Auber une sorte de potiche sans grand-chose à jouer.

Pas désagréable pour autant, Victor est une curiosité. Entre la douceur assez convenue de Brigitte Auber et la liberté très moderne d’une Françoise Christophe nettement plus complexe, le film est constamment le cul entre deux chaises.

En demi-teinte donc, ce Victor pas désagréable, une curiosité et un rôle plutôt attachant pour Gabin, dont la réplique finale (« C’est comme ça ! ») est assez réjouissante.

 

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