Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour la catégorie 'DAVES Delmer'

La Montagne des neuf Spencer (Spencer’s mountain) – de Delmer Daves – 1963

Posté : 8 février, 2021 @ 8:00 dans 1960-1969, DAVES Delmer, O'HARA Maureen | Pas de commentaires »

La Montagne des Neuf Spencer

La fin de carrière de Delmer Daves n’est pas la plus réputée de ses périodes, souvent oubliée au profit de ses glorieuses années 50, marquées par une belle série de grands westerns. On y trouve pourtant quelques perles, comme cette Montagne des neuf Spencer.

On est d’abord frappé par les superbes décors naturels, vastes plaines entourées de montagnes spectaculaires qui dominent chaque plan, comme des ombres protectrices, mais aussi comme une barrière que beaucoup de franchiront jamais. C’est là que vivent les Spencer depuis plusieurs générations, dans une communauté de travailleurs qui mènent une vie simple et harmonieuse.

La génération actuelle, c’est huit enfants autour des parents, Maureen O’Hara et Henry Fonda. Huit enfants dont l’aîné (James McArthur) a une chance de devenir le premier Spencer à quitter la vallée pour aller à l’université. C’est toute l’histoire de ce film qui frappe aussi, et surtout, par l’extrême bonté qui s’en dégage.

C’est le quotidien, l’entraide, l’amour, l’affection que filme Delmer Daves. Sans jamais tomber dans une quelconque mièvrerie, ou dans des drames trop faciles, il filme l’empathie, la bonté, sans animosité, sans méchant. Uniquement des personnes attachants, profondément humains et sympathiques jusque dans leurs défauts (si ce n’est une petite garce, plus paumée que vraiment machiavélique).

Maureen O’Hara et Henry Fonda forment un couple superbe, heureux de ce qu’il a. Dans cette communauté très religieuse, Fonda le jouisseur pourrait être une brebis galeuse. C’est juste un homme qui a trouvé son paradis sur terre, et qui vit son bonheur avec une générosité de chaque instant. Me voilà ému aux larmes devant tant de simplicité et de bonté. Daves a simplement signé un beau film.

La Maison rouge (The Red House) – de Delmer Daves – 1947

Posté : 14 août, 2018 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, DAVES Delmer | Pas de commentaires »

La Maison rouge

De Delmer Daves, on retient surtout ses formidables westerns, ainsi que son étrange Dark Passage avec un Bogart au visage bandé pendant une bonne partie du film. En oubliant d’autres pépites comme ce Red House aux images envoûtantes, quelque part entre Rebecca et Moonfleet.

Sans atteindre la réussite de ces deux classiques, le film de Daves s’inscrit dans une même thématique : comment mettre en images la perte de l’innocence. Cette question pourrait se résumer à une scène, superbe et terrifiante : la jeune Meg (Allene Roberts), visage de la pureté et de l’innocence baigné de lumière, qui nage vers Edward G. Robinson, silhouette massive et visage fermé, comme hanté par ses propres démons.

Daves filme merveilleusement les mystères qui entourent cette ferme perdue au milieu de la campagne, dans une imagerie digne de Mark Twain : un bois touffu et effrayant, un secret bien gardé, une orpheline qui ignore tout de ses origines, et un jeune homme qui débarque là et perd peu à peu ses illusions.

Il offre à Robinson l’un de ses grands rôles torturés, dont il se faisait une spécialité à l’époque (notamment chez Lang). Mais même en terrain connu, il est formidable. L’image de l’acteur se précipitant dans la nuit et la tempête, hurlant au jeune homme de ne pas traverser le bois, est tout simplement inoubliable.

Et si les autres acteurs n’ont clairement pas son charisme (à l’exception peut-être de Judith Anderson, un peu sous-utilisée hélas), Daves tire le meilleur de la jeunesse de Lon McAllister et de la pureté de Allene Roberts, comme de la beauté un peu hautaine de Julie London, la « mauvaise fille » de l’histoire.

Seules les scènes avec Rory Calhoun, acteur dont j’ai pourtant toujours apprécié la présence, déçoivent. Ses apparitions, coiffure impeccable et luisante, dans le bois, toujours aux aguets, toujours en attente, sonnent faux et ne convainquent jamais. Pour le reste, c’est que du bonheur, comme dirait l’autre.

Les Passagers de la nuit (Dark Passage) – de Delmer Daves – 1947

Posté : 1 février, 2018 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, BOGART Humphrey, DAVES Delmer | Pas de commentaires »

Les Passagers de la nuit

Troisième des quatre films tournés par le couple Bogart-Bacall, Les Passagers de la Nuit est le seul bancal dans le lot, loin en tout cas de l’aspect mythique des trois autres. Il ne manque pas de qualités ce film, il est même formidable par moments. Mais il y a une poignée de « mais » qui suivent, et qui pour la plupart repose sur un problème central.

Ce gros problème, c’est toute cette première partie filmée en caméra subjective, procédé qui n’a à peu près jamais vraiment fonctionné. Robert Montgomery l’utilisera pour filmer intégralement sa Dame du Lac cette même année, offrant une expérience tantôt fascinante tantôt pénible au spectateur. Delmer Daves ne l’utilise ici que partiellement, et pour une raison inhérente au scénario : Bogart y est un évadé qui va changer de visage pour passer inaperçu ; impossible donc de montrer son ancien visage.

Pourquoi pas, donc, surtout que Daves soigne ses cadrages subjectifs et n’envahit pas son film avec le procédé, qu’il n’utilise jamais de manière systématique. Mais on le sent contraint par ce choix esthétique, qui le prive en partie de la présence de Bogart. D’ailleurs, même lorsque Daves abandonne la caméra subjective, Bogart apparaît encore le visage couvert de bandelettes. Il faut à peu près une heure pour qu’enfin l’acteur soit réellement visible.

Et là, le film prend une nouvelle dimension. Qu’il ne tient d’ailleurs pas totalement sur la longueur. Le film est magnifique quand Bogart et Bacall sont face à face. Il y a alors une tendresse, un espoir qui domine la noirceur ambiante, et que l’on retrouve aussi avec quelques seconds rôles qui traversent le film : le chauffeur de taxi bien sûr, véritable ange gardien pour Bogart, mais aussi ce couple qui se forme dans le bus que veut prendre le héros vers la liberté.

Mais ces moments sont finalement assez rares. Le scénario emprunte des raccourcis qui font quand même tiquer un peu, et c’est le style de Daves qui permet de rattraper les errements de l’histoire avec un suspense fort bien maîtrisé, et ces rencontres fortuites et bienveillantes, inattendues dans le genre, qui sont clairement la signature du cinéaste.

Surtout, il y a le visage de Bogart, enfin visible, bouleversant comme jamais, parce qu’il est loin de ses habituels rôles de dur : c’est un homme qui semble laisser apparaître son amour. Et c’est très beau. Ce n’est clairement pas le plus grand Daves, ni le plus grand Bogart-Bacall. Mais c’est quand même franchement bien !

La Dernière Caravane (The Last Wagon) – de Delmer Daves – 1956

Posté : 22 mars, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Dernière Caravane

Daves est un cinéaste génial, et le western lui va comme un gant. Cela saute aux yeux dès les premières minutes de ce Last Wagon, nouveau chef d’oeuvre à mettre au crédit de l’auteur de La Flèche brisée et de 3h10 pour Yuma. En une série de plans sans dialogues, deux constats se font…

D’abord, Daves utilise merveilleusement le Cinemascope dans ce film tourné exclusivement en décors naturels (à l’exception d’une courte séquence de tribunal, à la toute fin du film). Privilégiant les plans larges qui placent l’homme au cœur de la nature gigantesque, et les discrets mouvements de caméras qui dramatisent cet environnement à la fois splendide et plein de dangers, Daves fait de chaque image un tableau grandiose et dramatique, à couper le souffle.

Dans ces premières minutes, ce qui frappe aussi, c’est la manière dont le personnage de Richard Widmark est introduit : après avoir abattu un homme sans la moindre sommation, le voilà qui prend la fuite à pied, poursuivi par d’autres hommes qu’il tuera à leur tour avec froideur. Drôle de « héros » westernien, donc, qui tue de sang froid et court à travers les grands espaces déserts…

Cinéaste cultivé et respectueux du spectateur, Daves ne mâche pas le travail à ce dernier. Widmark est-il un salaud ou un type bien ? Les premiers indices font nettement pencher vers la première hypothèse, mais qui sait… Finalement arrêté, enchaîné à la roue d’un chariot, témoin du massacre de colons par les Apaches (massacre dont on ne verra rien), le voilà seul avec trois jeunes femmes, un gamin, et deux hommes à peine sortis de l’enfance, en plein territoire indien. De quoi mettre à l’épreuve les vraies natures des uns et des autres…

The Last Wagon est un film spectaculaire… qui évite consciencieusement les effets spectaculaires. C’est moins sur la violence, finalement rare à l’image, que sur l’hostilité et la grandeur de l’environnement, que Daves base l’extrême tension du film. Une tension que le regard clair et impénétrable de Widmark, formidable, sert parfaitement.

Il est presque de toutes les scènes, grand personnage « davesien » dans la droite lignée du James Stewart de La Flèche brisée : un blanc élevé par les Comanches qui se révèle à lui seul un symbole d’ouverture et d’antiracisme. Son interprétation intense et toute en retenue fait oublier les seconds rôles un peu moins convaincants. Felicia Farr en tête, en amoureuse transie qui ne laisse pas grand-place à la nuance.

Un détail… The Last Wagon est un très grand western, l’un de ces films qui donnent ses lettres de noblesse au Cinemascope, et l’un des chefs d’œuvre de son auteur.

* DVD dans la collection « Westerns de Légende » chez Sidonis/Calysta.

Cow-boy (Cowboy) – de Delmer Daves – 1958

Posté : 15 novembre, 2015 @ 4:46 dans 1950-1959, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

Cowboy

Un an après 3h10 pour Yuma, le grand Delmer Daves retrouve son interprète Glenn Ford pour un autre western. Pas question pour autant de se répéter: Daves prend le contre-pied de son précédent chef-d’œuvre, s’inspire d’une histoire vraie (les mémoires de Frank Harris, un authentique cow-boy), tourne en couleurs, commence son film dans le luxe d’un grand hôtel de Chicago, loin de la poussière de l’Ouest, et laisse penser que le ton est à la comédie, en donnant l’un des rôles principaux au jeune Jack Lemmon, pas encore acteur fétiche de Billy Wilder mais déjà bille de clown.

C’est dans ce décor aux antipodes des clichés du genre que débarque l’Ouest tel qu’on le connaît, en la personne d’un riche convoyeur de bêtes (Glenn Ford, donc), que le pied tendre Lemmon décide de suivre sur les pistes. Le quotidien d’un jeune citadin qui découvre les réalités de la vie d’un cow-boy ? C’est bien ce qu’est le film, mais la comédie évoquée un peu trop rapidement cède vite la place à l’âpreté d’un réalisme nettement plus sordide, où l’ennui et la mort rodent, et où la solidarité et l’héroïsme sont des notions très relatives.

Daves fut l’un des premiers à signer un western pro-indiens (La Flèche brisée). Avec Cow-boy, il est aussi l’un des premiers à confronter les mythes de l’Ouest à une réalité souvent très différente. Pour autant, Daves ne renonce pas aux fastes hollywoodiens, et signe un film visuellement splendide, aux couleurs chaudes et romantiques.

L’évolution des personnages n’est pas toujours convaincantes, comme si Daves avait dû faire des coupures un peu extrêmes dans son scénario. Mais le film reste passionnant et très original. Bien plus qu’une curiosité, une perle méconnue d’un cinéaste majeur.

* Blue ray chez Carlotta, avec une image magnifique, et de passionnants bonus.

3h10 pour Yuma (3:10 to Yuma) – de Delmer Daves – 1957

Posté : 15 juin, 2015 @ 4:07 dans 1950-1959, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

3h10 pour Yuma

Le film commence par l’attaque d’une diligence. Une scène de western on ne peut plus classique, sauf que celle-ci est totalement dépouillée de tout semblant de spectaculaire: la diligence arrête sa course parce qu’elle est bloquée par un troupeau de bétail, et les voleurs sont là, immobiles, à peine menaçants. Simplement là. A leur tête : Glenn Ford, étonnamment calme, presque las. Non loin de là, un fermier sans histoire observe la scène avec ses enfants sans même faire mine d’intervenir, ou de se cacher : c’est Van Heflin, dont on devine qu’il est le « héros » de ce western au rythme déroutant.

Las : c’est le sentiment que donnent les deux protagonistes dans ce face-à-face à l’intrigue proche d’autres grands classiques du genre. On pense au Train sifflera trois fois bien sûr. Mais avec une différence de taille : la manière dont le temps est perçu. Ici, il s’écoule lentement, minant le moral de personnages qui, tous, rêvent d’autres choses. La richesse et la superbe du bandit pour Van Heflin le fermier honnête mais pauvre. La douceur du foyer pour Glenn Ford le tueur calme mais fatigué.

Ces deux-là sont forcés de cohabiter après que Van Heflin a accepté d’escorter Ford jusqu’au train le plus proche en dépit du danger que représentent ses complices. Parce que la prime qu’il touchera peut lui permettre de sauver sa ferme. Mais surtout parce que tenir son rôle d’homme intègre lui permettra de sauver l’image que ses enfants et sa femme ont de lui. Entre eux, une sorte de respect mutuel, presque de l’admiration, mais toujours teintée de lassitude: tenté par la vie de l’autre, chacun sait qu’il est trop tard pour changer de voie.

3h10 pour Yuma, tourné dans un noir et blanc admirable (signé Charles Lawton Jr) qui joue constamment sur les longues ombres portées pour souligner le poids du temps, est un chef d’œuvre, un de plus pour Daves qui aura décidément marqué l’histoire du western. N’ayant pas lu le roman d’Elmore Leonard dont le film est adapté, impossible de dire si le ton adopté par Daves doit quelque chose à l’écrivain ou non. Mais ce ton, le rythme lent, presque pesant font du film un western unique en son genre.

La tension monte, jusqu’à la haletante séquence finale. Mais Daves évite jusqu’au bout tout sensationnalisme. Son suspense repose sur l’irruption de la violence dans des situations quotidiennes, chez des hommes et des femmes qui n’ont rien de tueurs ou d’aventuriers. Des êtres incroyablement normaux, confrontés à l’échec et à la peur. Les acteurs sont tous formidables: Van Heflin confronté au doute et à l’effroi face à sa propre impuissance, Glenn Ford dont la superbe se fissure lentement et presque imperceptiblement.

Et quel final! Sans jamais perdre son cap, Daves fait encore monter la tension et nous offre l’affrontement tant attendu sans rien sacrifier de ses ambitions, pur concentré de suspense et d’émotion. C’est absolument magnifique.

* Carlotta a édité deux westerns de Daves avec Glenn Ford, dans de belles éditions blue ray : 3h10 pour Yuma et le plus méconnu Cow-boy, avec des bonus passionnants, notamment une évocation (en deux parties) de la carrière de Daves par son fils Michael.

La Colline des potences (The Hanging Tree) – de Delmer Daves – 1959

Posté : 2 mai, 2014 @ 2:40 dans 1950-1959, COOPER Gary, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Colline des potences

Curieux western que signe l’immense Delmer Daves, loin, très loin des lieux communs du genre, et absolument sublime. L’auteur de La Flèche brisée a un culot monstre. Il ose faire de Gary Cooper un manipulateur séduisant mais capable du comportement le plus odieux. Il ose aussi consacrer toute la première moitié de son film à la convalescence d’une jeune femme grièvement blessée, temporairement aveugle, que le « docteur » Gary Cooper soigne seul. Un quasi huis-clos à la fois romantique et étouffant, émouvant et terrifiant…

C’est un rôle exceptionnel qu’a trouvé là Gary Cooper. L’un des plus beaux de sa riche carrière, peut-être. Son interprétation toute en nuance souffle le froid et le chaud. Le caractère magnifique de la star, l’aura qu’il dégage constamment, font du personnage l’une de ces figures mythiques, héroïques et romantiques. Mais il est aussi un grand manipulateur qui étouffe tous ceux qui l’entourent, jusqu’aux pires extrémités, et totalement incapable de se laisser aller à ses sentiments. Un homme dont les actions de pure générosité peuvent être suivies de terribles accès de violence…

Cinéaste d’une délicatesse infinie, Daves filme une bouleversante histoire d’amour dans un univers où l’humanité semble avoir déserté : les hommes, comme les rares femmes qui vivent dans ce « village » qui n’est en fait qu’un éphémère camp de chercheurs d’or, sont capables d’actes monstrueux, guidés par l’appât de cet or tout puissant. Symbole de cette mesquinerie et de cette folie des hommes Karl Malden est lui aussi extraordinaire, plus veule et minable que jamais…

Le génie du cinéaste est d’avoir su insuffler une douceur hallucinante dans ce décor dépourvu d’humanité. D’avoir su associer la sécheresse de cette société sans loi et sans morale (avec quelques éclats de mise en scène impressionnants, comme l’attaque de la dilligence, filmée  uniquement par une série de très gros plans ou de plans très larges), avec une délicatesse inouïe. Quelques regards échangés, une accolade évitée, ou le magnifique dernier plan composé comme un tableau impressionniste… C’est d’une beauté sidérante.

L’Or du Hollandais (The Badlanders) – de Delmer Daves – 1958

Posté : 22 août, 2013 @ 7:02 dans 1950-1959, DAVES Delmer, WESTERNS | Pas de commentaires »

L’Or du Hollandais (The Badlanders) – de Delmer Daves – 1958 dans 1950-1959 lor-du-hollandais

Evidemment, à côté de La Flèche brisée et autres sommets du genre, L’Or du Hollandais fait figure d’aimable curiosité dans la filmographie du grand Delmer Daves. Mais ce curieux western mériterait bien d’être redécouvert. Parce que derrière une histoire a priori très classique (deux anciens bagnards préparent le vol d’une fortune en or), Daves signe un western qui ne ressemble à aucun autre, et une œuvre très personnelle.

Comme dans ses chefs d’œuvre, le cinéaste aborde des thèmes qui lui sont chers : le racisme, le respect de l’autre, et la place de l’homme dans une société trop violente qui ne lui ressemble pas. Comme James Stewart dans Broken Arrow, Alan Ladd et Ernest Borgnine, duo improbable et attachant, finissent par refuser les règles de cette société dont ils sont désormais des parias. Ladd remplace même le traditionnel pistolet dans son étui par un marteau de mineur…

Quant au gros Borgnine, il tombe amoureux d’une Mexicaine près de laquelle il trouve un inattendu havre de paix, variation à peine déguisée de Stewart chez les Indiens. On sent bien que la sympathie de Delmer Daves va moins au personnage secret d’Alan Ladd qu’à ce couple de bannis (la Mexicaine et l’ancien prisonnier).

L’enchaînement de deux courtes scènes sans conséquence sur l’intrigue est parlant. Dans la première, Ladd, cynique, lance à une belle intrigante : « Un homme doit être riche comme une femme doit être jolie. » Daves enchaîne aussitôt avec une jolie scène sans parole, du nouveau couple qui s’émerveille de la naissance d’un bébé.  La rupture de ton entre ces deux scènes est nette, et presque naïve. Mais l’innocence retrouvée du patibulaire Borgnine est très émouvante.

Au passage, Daves égratigne un peu plus encore l’image de cette Amérique des pionniers, dont l’héroïsme en prend un sacré coup. Nos deux héros eux-mêmes, et même s’ils ne sont pas manchots lorsqu’il s’agit de dégainer ou de donner du poing (ce qu’ils font), passent plus de temps à casser des cailloux et à descendre au fond de la mine où l’or les attend, qu’à affronter les méchants.

La grande fusillade finale est peut-être moins impressionnante que celle de La Flèche brisée, et le ton est un peu moins sombre. Mais il y a quelque chose de profondément désabusé, là. Daves ne signe pas un film majeur, mais L’Or du Hollandais est une pièce de son œuvre qu’il ne faut pas négliger.

La Flèche brisée (Broken Arrow) – de Delmer Daves – 1950

Posté : 22 août, 2012 @ 4:09 dans 1950-1959, DAVES Delmer, STEWART James, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Flèche brisée

« Funny, it never stroke me an Apache woman would cry her son like any other woman »

Pour la 500ème chronique de Playitagain, pas question de voir n’importe quoi… C’est du grand, du très grand western que je vous propose. Et pour Delmer Daves et James Stewart, avoir cet insigne honneur est le couronnement de toute une carrière ! Si, si…

Le film commence par une voix off qui s’excuse presque : « la seule liberté prise avec la liberté est que les Apaches parlent en anglais ». Cet aveu même confirme que La Flèche brisée est une date importante dans l’histoire des Indiens au cinéma : pour la première fois ou presque, un film hollywoodien prend fait et cause pour la nation indienne, en la filmant comme une vraie nation, et pas comme des sauvages à peine humains.

Et cette petite révolution se fait tout à fait consciemment : le personnage principal interprété par James Stewart est, au début du film, animé par les mêmes préjugés qui habitent le cinéma hollywoodien depuis un demi-siècle : « Je n’avais jamais pensé qu’une mère Apache puisse pleurer ses fils » lance-t-il, toujours en voix off. Cette révélation résume bien l’âme de ce film magnifique, le sommet de la filmographie inégale de Delmer Daves.

Tout sonne juste dans ce western, plus peut-être que dans aucun autre western avant, et même depuis. Une scène pour exemple : celle du « saloon », lieu qui mérite des guillemets tant il semble éloigné des habituels lieux de perdition de cow-boys vidant whiskys sur whiskys. Ici, le saloon ressemble bien plus à une pension tranquille qui sent l’ennui, loin des musiques trépidantes, des filles faciles et des champions de poker qui peuplent les saloons dans des centaines de westerns. Il y a même des mouches qui volent dans ce lieu ni lugubre, ni excitant, juste banal.

Pas d’angélisme, non plus : les Indiens peuvent réellement être sanguinaires et sans pitié. Mais le film de Daves remet les événements dans leur contexte : les atrocités des Apaches répondent à ce qui est bien plus qu’une « simple » invasion, les bons blancs traitant les Indiens comme des animaux sauvages qu’il faut abattre.

Dans ce contexte, le personnage de Jefford (Stewart), éclaireur parfaitement intégré aux Américains blancs, ne va pas tarder à faire figure de pestiféré (comme le John Dunbar de Danse Avec les Loups, cinquante ans plus tard), lui qui a sauver de la mort un jeune Indien blessé, s’attirant l’amitié d’Apaches dont il deviendra le porte-parole.

Mais le poids de l’histoire pèse sur ce film magnifique, passionnant et tragique, l’un des plus beaux westerns du monde.

 

Kiefer Sutherland Filmographie |
LE PIANO un film de Lévon ... |
Twilight, The vampire diari... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | CABINE OF THE DEAD
| film streaming
| inderalfr