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Archive pour la catégorie 'CORTI Axel'

Welcome in Vienna – Partie 3 : Welcome in Vienna (Wohin und Zurück. 3 : Welcome in Vienna) – d’Axel Corti – 1986

Posté : 12 septembre, 2012 @ 1:27 dans 1980-1989, CORTI Axel | Pas de commentaires »

Welcome in Vienna 3

« Pendant toutes ces années, c’est comme si on était loin de sa patrie, mais aussi de ses sentiments »

Suite et fin d’une trilogie indispensable, longtemps invisible chez nous. Freddy Wolff s’est engagé dans l’armée américaine et a combattu en France. Avec un seul objectif : retrouver Vienne, la ville de ses racines, là où sa vie, et celle de tant d’autres Juifs, s’est arrêtée une sombre journée de 1938. Après sept ans d’exil, enfin, il est de retour chez lui. Happy end ? Pas vraiment, non… De sa ville, objets de tous ses fantasmes depuis tant d’années, il ne retrouve qu’un tas de ruines qui abrite des êtres rongés par la guerre, la misère, la fatigue, la culpabilité, la haine, la rancœur…

Axel Corti et son scénariste Georg Stefan Troller ont signé avec cette trilogie une œuvre d’une force rare, d’autant plus puissante qu’elle nous fait ressentir mieux qu’un documentaire la réalité de ces êtres à qui ont a tout pris : les biens matériels et la dignité. Et sans concession. Comme le rêve américain explosait dans Santa Fé, le retour dans cette Europe qui a rejeté ses semblables d’un port à l’autre (voir Dieu ne croit plus en nous) balaye tous les rêves qui nourrissait Freddy dans son exil interminable. Là, il pensait retrouver ses attaches, sa dignité, un foyer… Mais là encore, il est hanté par le manque de sentiments… « Pourquoi personne ne me retient ? » clame-t-il avec un désespoir apparent. Ce manque de sentiment qui est devenu son quotidien, et qui le rend incapable de prendre à bras le corps l’amour que lui offre une jeune comédienne.

Il faut dire que le Vienne de 1945 n’a rien d’un paradis retrouvé. Ce que Freddy y rencontre, c’est le marche noir, la trahison, l’antisémitisme qui n’est pas mort avec Hitler, et même une certaine nostalgie du nazisme qui ne dit pas son nom. Et partout, un cynisme ambiant qui fait une nouvelle fois du candide Freddy un étranger parmi les siens…

Si la première partie de cette trilogie marquait la fin de l’innocence, et la deuxième l’implosion du rêve d’exil, ce troisième volet signe la mort des illusions. Avec l’Ennemi (avec une majuscule) officiellement vaincu, le sentiment qui se dégage de cette conclusion est plus confus, moins clairement tragique que dans les deux films précédents. Mais le malaise constant qui règne n’est guère plus enviable : c’est désormais un sentiment d’irréversible gâchis qui domine. A peine Corti et Troller, qui auront tenu le cap de leur œuvre jusqu’au bout, se permettent-il un ultime plan d’où renaît une (petite) lueur d’optimisme. Peut-être, sur ces ruines et ces êtres brisées, pourra-t-on reconstruire quelque chose…

• La trilogie Welcome in Vienna, présentée pour la première fois dans un circuit restreint de cinémas l’an dernier, paraît enfin en DVD. C’est chez les Editions Montparnasse, dans un coffret absolument indispensable. Avec en bonus un long entretien (chapitré par questions, excellente idée) de Georg Stefan Troller, passionnant et très émouvant.

Welcome in Vienna – Partie 2 : Santa Fé (Wohin und Zurück. 2 : Santa Fé) – d’Axel Corti – 1985

Posté : 6 septembre, 2012 @ 5:00 dans 1980-1989, CORTI Axel | Pas de commentaires »

Welcome in Vienna 2

« Ils ne nous pardonneront jamais ce qu’ils nous ont fait »

Après un interminable exil de plusieurs années à travers l’Europe, quelques Juifs d’Autriche ont réussi à s’embarquer, direction New York. Arrivés à bon port, certains sont maintenus en détention, faute de papier. D’autres, plus chanceux, sont accueillis sur le sol américain, où ils tentent de créer un semblant de vie…

Ce second volet pourrait être plus optimiste : tout commence par la découverte de la terre promise, avec des personnages qui sont des survivants, et à qui tout semble possible désormais. Mais les apparences sont trompeuses. Superbe vue de loin, la ville de New York se révèle grise et glauque au quotidien. Le romantisme du voyageur ne passe pas l’épreuve du temps… « Ici ils sont gentils, souligne un personnage : s’ils te renvoient, ils le font avec le sourire »

Loin de marquer la fin de ce long exil, loin du tumulte de la guerre en Europe et de la menace omniprésente des Nazis, l’arrivée en Amérique n’est que le prolongement de cet exode. Moins spectaculaire, mais plus pernicieux, mais le poids terrible de cette tragédie est toujours aussi présente.

L’absurdité de cette tragédie est bien là, elle aussi, et éclate de la plus inattendue des manières : dès les premières minutes du film, Ferry Tobler, le « héros » du premier volet Dieu ne croit plus en nous, survivant de tant d’horreurs, se noie bêtement dans le port de New York, à quelques mètres du quai, sans avoir pu fouler le sol américain…

Le personnage principal, ici, à qui le pauvre Ferry passe le relais dans les premières scènes, c’est Freddy Wolff, jeune homme dont on ne saura quasiment rien du passé. Qu’importe : ce survivant partage avec tous les autres Juifs d’Europe le même passé récent, la même fuite sans fin… Lui-même reconnaît qu’il se souvient à peine de sa vie d’avant, entièrement habité qu’il est par la haine, le rejet, l’incompréhension, et cette douleur d’incompréhension lorsqu’il repense à Vienne, cette ville qui est la sienne et où il sent qu’il doit retourner.

A New York, Freddy, comme beaucoup d’autres Juifs, trouve un emploi (dur), un logement (miteux), des amis (tous Juifs exilés). Mais comme beaucoup d’autres, il ne défait pas sa valise. Lui et les autres font bonne figure, affichant un optimiste de rigueur. Freddy rêve même de partir vers l’Ouest, à Santa Fé, loin de cette zone de transit qu’est New York. Là, sûr, une nouvelle vie l’attend, il pourra tourner la page.

Sauf que cet optimisme ne trompe personne. Ni les spectateurs, ni les personnages, qui possèdent tous des fêlures grandes comme le Mississipi. Chacun s’invente un présent glorieux, ou un futur réjouissant, sachant bien que personne n’est dupe. Tous jouent le jeu, conscients que ces masques leur permettent de survivre tant bien que mal.

Freddy réussit son intégration aussi bien que possible. Mais il n’a qu’une obsession : le rejet dont il fait l’objet par son propre peuple. « Ils ne nous pardonneront jamais ce qu’ils nous ont fait », lance un vieil écrivain juif conscient qu’un retour au pays n’est pas envisageable. Ce retour, Freddy sait pourtant qu’il ne peut en faire l’économie. Dans ce deuxième volet aussi beau et cruel que le premier, Axel Corti ne montre aucune image de l’Europe et de la guerre, mais on ne voit que ça dans les regards de ces êtres en transit. Le retour au pays sera au cœur du troisième volet, Welcome in Vienna, de cette trilogie décidément sublime et indispensable.

Welcome in Vienna – Partie 1 : Dieu ne croit plus en nous (Wohin und Zurück. 1 : An Uns glaubt Gott nicht mehr) – d’Axel Corti – 1982

Posté : 4 septembre, 2012 @ 2:35 dans 1980-1989, CORTI Axel | Pas de commentaires »

Welcome in Vienna 1

A Vienne, en 1938, un adolescent juif, Ferry Tobler, parvient à échapper aux rafles de la Nuit de Cristal, mais doit fuir l’Autriche. Il commence alors un long périple au côté de milliers d’autres Juifs qui, comme lui, sont rejetés par ceux-là même qui partageaient leur quotidien il n’y a pas si longtemps…

Avec ce premier volet d’une trilogie consacrée au destin des Juifs autrichiens (dont je vais m’empresser de découvrir les deux autres volets, Santa Fe et Welcome in Vienna), Axel Corti signe un pur chef d’œuvre. Esthétiquement d’abord, le film est une immense réussite. La mise en scène sobre et efficace, le noir et blanc au grain épais, la reconstitution de l’Europe des années 1938 à 1941… Visuellement splendide, d’un réalisme troublant, parce qu’il évoque ces films d’archive qu’on a tous en mémoire, et qui illustrent les grandes dates historiques de cette histoire.

Surtout, Corti propose une vision totalement antispectaculaire de cette période trouble. Plutôt que de chercher à illustrer un épisode tragique de notre histoire récente, plutôt que d’émailler son film de rebondissements spectaculaires et dramatiques, Corti choisit le strict point de vue de ces Juifs forcés de renoncer au monde tel qu’ils l’ont toujours connu, victimes d’une menace et d’une haine aussi absurdes qu’omniprésentes…

De fait, on ne voit que peu de violence physique dans ce film. Mais le regard de l’autre, le rejet systématique que rencontrent ces émigrants malgré eux, suffit à installer le drame, terrible. Le film s’attache au destin d’un petit groupe de personnages (en particulier Ferry, un « père d’adoption », résistant allemand et goy joué par un grand Armin Mueller-Stahl, et une veuve juive qui représente tout à la fois l’image de la mère et de la maîtresse, troublante famille reconstituée, cocon fragile dans un monde hostile), mais c’est le destin tragique de tous ces Juifs européens que l’on ressent dans ce long exode.

Vienne, Prague, Paris, Orléans, Marseille… Chaque étape se prolonge des mois durant, et à chaque fois un semblant de vie se met en place avec les mêmes êtres qui se croisent et se recroisent, avant que les exilés soient de nouveau obligés de reprendre la route.

Dans ce long et terrible exil communautaire, Corti filme des amitié, des inimités, des attirances, des colères, mais toujours avec un sentiment de fraternité exacerbé. Il filme des destins brisés, avec une pudeur parfaite. Il filme aussi la fin de l’innocence, avec cette pathétique arrestation de « Gandhi » (Muller Stahl) par une bande de gamins français charmants et bien sous tous rapports.

Les exilés se croisent au gré de leur voyage sans fin, comme si leur destin commun les menait tous au même endroit (d’ailleurs…). Ils réapparaissent, mais disparaissent aussi pour certains, sans que l’on sache vraiment ce qui leur est arrivé : en n’adoptant que le point de vue de ces « héros » ballottés par l’histoire, Corti nous plonge dans la même confusion qu’eux.

Mais le réalisateur ne laisse planer aucun espoir, aucun optimisme forcé. Lui-même enfant autrichien durant la guerre, il a sillonné les routes d’Europe avant 1945, où il a probablement assisté à des scènes telles que celles qu’il filme ici. Il sait le poids de l’histoire en marche. Son film est bien plus qu’un documentaire. C’est le portrait d’hommes et de femmes sacrifiés par une époque folle et haineuse. Et c’est tout à la fois d’une simplicité et d’une force assez incroyables.

 

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