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Archive pour janvier, 2025

Lost Highway (id.) – de David Lynch – 1997

Posté : 24 janvier, 2025 @ 10:10 dans 1990-1999, LYNCH David, POLARS/NOIRS | Pas de commentaires »

Lost Highway

Décidément, je ne me remets pas de la mort de David Lynch. Après m’être replongé dans les méandres de Twin Peaks et de Mulholland Drive, il était temps d’ajouter une entrée supplémentaire à ce blog, en revoyant ce Lost Highway qui reste l’une des expériences les plus absolues, les plus marquantes, de ma vie de cinéphile. A vrai dire, il m’a fallu attendre… le retour de Twin Peaks pour ressentir quelque chose de semblable.

C’est dire l’importance que revêt David Lynch, et le vide sidéral que sa mort laisse, dans un cinéma américain au-delà de moribond. Penser qu’on ne verra jamais de onzième long métrage de Lynch, alors qu’on n’est pas à l’abri d’un seizième (j’ai compté) film de Michael Bay a quelque chose de profondément déprimant. C’est bien simple : c’est déprimé que je m’installe et lance le blu ray de Lost Highway.

Et là, la magie opère. Il ne faut pas longtemps pour retrouver les sensations éprouvées au cinéma il y a vingt-huit ans. La fascination exercée par les lignes jaunes de la route qui défilent dans la nuit au son de David Bowie. De tous les trips cinématographiques, celui-ci est peut-être le plus radical. La plongée est en tout cas profonde, brutale, et traumatisante.

On a souvent dit de Lost Highway qu’il était une sorte de brouillon pour Mulholland Drive, qui lui serait supérieur en tous points. Comme Les Affranchis par rapport à Casino, disons. Mais chez Lynch comme chez Scorsese, le brouillon a un caractère brut et une urgence que je place au-dessus de tout. Et Lost Highway est un chef d’œuvre, finalement moins opaque qu’exceptionnellement conscient. Je m’explique…

A-t-on suffisamment dit que Lost Highway était (je m’avance) le plus grand film du monde sur les violences faites aux femmes ? Deux décennies avant me-too, et alors que l’expression « crime passionnel » était encore en vigueur, David Lynch nous plonge avec ce film dans l’esprit d’un homme qui a tué sa femme. Et qui, dans le couloir de la mort, se projette dans une version fantasmée de ce qu’il a vécu, de son point de vue malade : la femme est le danger.

Et ce danger, Lynch le filme avec fièvre et avec une gravité stupéfiante, dans une première partie qui flirte avec le film d’horreur, sans jamais s’éloigner de son vrai sujet : la terreur qui s’installe dans un couple, avec des scènes « conjugales » parmi les plus effrayantes qu’on n’ait pu voir. Cette première partie est parfaitement linéaire et compréhensible, jusqu’au basculement, radical, comme Lynch en a le secret.

Là, c’est une hallucinante plongée dans l’esprit de cet homme qui se poste en victime que filme Lynch, nous emmenant très loin dans ce cauchemar éveillé, multipliant les images inoubliables. Au cœur de ce trip traumatisant, Patricia Arquette trouve le rôle de sa vie, troublante et bouleversante dans le double-rôle de la femme martyr et d’une vamp fantasmée. A l’inverse, il faut deux acteurs pour projeter l’homme et son double : Bill Pullman (qui sortait d’Independance day, c’est dire le chemin) et Balthazar Getty.

La distribution est incroyable (de Richard Pryor à Marylin Manson en passant par Robert Blake, Gay Busey, Robert Loggia ou le fidèle Jack Nance), la musique est carrément dingue, et le film est un chef d’œuvre, l’un des sommets (le sommet?) de David Lynch, cinéaste immense pour l’éternité.

Vingt Dieux – de Louise Courvoisier – 2024

Posté : 14 janvier, 2025 @ 8:56 dans 2020-2029, COURVOISIER Louise | Pas de commentaires »

Vingt Dieux

Il y a un charme fou, et une délicatesse mine de rien infinie dans ce premier film enthousiasmant, à l’histoire improbable : un très jeune Jurassien qui se retrouve seul avec sa petite sœur après la mort de leur père, et qui décide de fabriquer le meilleur fromage du coin pour gagner l’argent qui leur permettra de s’en sortir.

C’est plein de charme, parce qu’il y a une vraie candeur dans la manière de filmer ce jeune gars pas encore totalement sorti de l’adolescence, brut de décoffrage, un peu bagarreur, grossier, magouilleur, mais en même temps tellement sincère. Un gamin, confronté à des responsabilités de grands.

Louise Courvoisier, trentenaire qui n’avait que deux courts métrages à son actif, trouve la parfaite distance pour filmer l’humanité de cette forte tête qui refuse de montrer ses sentiments. Flirtant avec la comédie et la tragédie, elle flirte constamment avec ces deux extrêmes, tirant de larges sourires et nouant le ventre dans le même mouvement.

Outre l’authentique délicatesse de sa mise en scène, à ne pas sous-estimer (une cinéaste à suivre, assurément), l’un de ses tours de force est d’avoir dénicher l’interprète de « Totone » : Clément Faveau, débutant de 19 ans dont il est difficile de parler sans tomber dans les clichés. Alors allons y : il crève l’écran, il est bluffant de vérité, il est d’une justesse absolue, il a un sourire qui emporte tout, et un regard tellement profond…

Et en plus, c’est drôle. Vingt Dieux domine de trois têtes la vague actuelle du cinéma « régionaliste ». Il a séduit public et critique, et c’est une sacrément bonne nouvelle, et une belle manière de terminer 2024 (oui, j’ai un peu de retard), chouette année de cinéma.

Grand Tour (id.) – de Miguel Gomes – 2024

Posté : 11 janvier, 2025 @ 8:00 dans 2020-2029, GOMES Miguel | Pas de commentaires »

Grand Tour

Dans la Birmanie de 1918, un fonctionnaire de l’Empire britannique prend subitement la fuite, alors que sa fiancée s’apprête à le rejoindre après des années de séparation. Cette dernière part à sa recherche, et suit sa trace étape par étape, à travers toute l’Asie…

C’est presque une histoire de vaudeville : un homme effrayé par l’engagement d’un mariage, une femme pleine de vie qui lui court après. Mais c’est tout à fait autre chose que filme Miguel Gomes : un double voyage dans des contrées inconnues, qui est tout à la fois une découverte qu’une manière de se perdre, dans tous les sens du terme.

Grand Tour ne ressemble à rien d’autre, et c’est un immense compliment fait à Miguel Gomes, qui ose faire ce que peu d’autres cinéastes ont osé depuis des décennies : réinventer une forme de cinéma, s’inscrivant ainsi dans la lignée des grands formalistes des origines, qui avaient tout à créer. Le résultat est une merveille, qui tient tout à la fois de la grande fresque romanesque que du film expérimental.

Intime et grandiose, narratif et introspectif, linéaire et nébuleux. Une véritable expérience de cinéma que nous offre Gomes, absolument fascinante. C’est l’histoire d’un homme et d’une femme, mais ce sont aussi les rencontres, qui comptent, avec des personnages étonnants, grotesques ou touchants, et avec des paysages, qui prennent souvent le pas sur les êtres.

Les personnages, d’ailleurs, disparaissent parfois durant de longues minutes, laissant place aux villes qu’ils découvrent, à leurs habitants si éloignés d’eux. Le voyage et la découverte deviennent alors les personnages principaux de ce film fascinant et magnifique. Où le fait de ne plus voir les personnages à l’écran nous les rend plus intimes encore.

Le film est coupé en deux parties à peu près égales, qui racontent le même voyage, plongée de plus en plus profonde au cœur d’une culture de plus en plus opaque. D’abord l’homme, Edward (joué par Gonçalo Waddington), qui fuit pour se perdre, comme étranger à lui-même, suivant le premier venu comme si sa vie en dépendait. Ensuite la femme, Molly, débordante de vie et de dynamisme, qui avance parce que c’est ce qu’elle a décidé…

Elle est jouée par Crista Alfaiate, actrice rayonnante dont le visage dans Grand Tour pourrait illustrer le mot « solaire » dans le dictionnaire. Magnifique personnage, qui se perd peu à peu à mesure qu’elle se rapproche de celui qu’elle a décidé d’épouser. Son apparition à mi-film donne littéralement un coup de fouet au spectateur, jusque là happé par l’apathie de son fiancé.

Sous le charme de Crista Alfaiate, sous le charme de ce film merveilleux, sous le charme des images hypnotiques de Miguel Gomes, fer de lance du nouveau cinéma portugais, dont je n’avais pas vu les films précédents. Celui-ci donne une furieuse envie de s’y plonger.

Here – les plus belles années de notre vie (Here) – de Robert Zemeckis – 2024

Posté : 10 janvier, 2025 @ 8:00 dans 2020-2029, ZEMECKIS Robert | Pas de commentaires »

Here

On a envie de les aimer passionnément, les films de Zemeckis. On a envie de les aimer, et d’accompagner ce réalisateur qui, quarante ans après ses premiers succès, a gardé le même enthousiasme, la même envie de relever des défis, ces défis qui semblent bien souvent être la raison d’être de ses films.

Mais il faut bien se faire une raison : derrière la gageure technique de ses films, il manque bien souvent ce petit supplément d’âme qui faisait la différence avec Retour vers le Futur, voire avec Qui veut la peau de Roger Rabbit ?, Forrest Gump et quelques autres. Here ne fait pas exception : d’un parti-pris casse-gueule, Zemeckis tire un film assez passionnant, sans temps mort, mais où l’émotion reste largement à la porte. Hélas.

Le parti-pris, donc, est le même que celui de la bande dessinée dont le film est adapté (par Zemeckis et Eric Roth, son co-scénariste de Forrest Gump). Une caméra fixe dans une maison, où nous assistons aux vies de plusieurs générations successives d’habitants : les arrivées, les départs, les naissances, les morts, les rêves, les engueulades, les regrets… Bref, un procédé original pour filmer le temps qui passe, les générations qui se succèdent, et ce depuis… l’extinction des dinosaures. Zemeckis aurait d’ailleurs pu se passer des quelques minutes d’introduction, qui n’apportent pas grand-chose d’autre que la mention « a filmé des dinosaures » sur le CV du cinéaste.

Pour le reste, le parti-pris de mise-en-scène (aucun mouvement de caméra, donc, et uniquement des plans séquences), aussi restrictif soit-il, est parfaitement tenu par Zemeckis, qui utilise très habilement les cadres dans le cadre pour passer d’une période à une autre dans un constant va-et-vient plein de rythme, qui donne un vrai coup de neuf à la notion même de montage.

Zemeckis reste donc un réalisateur habilement novateur. Mais comme souvent, disais-je, l’émotion n’est pas au rendez-vous, ou si peu. Peut-être est-ce dû, justement, au parti-pris trop réducteur. Ou aux effets spéciaux désormais si courant du de-aging, qui permet de retrouver la jeunesse de Robin Wright et Tom Hanks (autre parenté avec Forrest Gump), mais avec un lissage numérique qui nuit à l’intensité de leur jeu.

Disons que Zemeckis est toujours un réalisateur intéressant. Mais qu’il gagnerait peut-être à délaisser les technologies les plus pointues pour revenir à un cinéma plus bricolo et plus humain. Mais n’est-ce pas une phrase qu’on peut appliquer à l’immense majorité des blockbusters hollywoodiens ?

 

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