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Archive pour la catégorie 'McDONAGH Martin'

Three Billboards, les panneaux de la vengeance (Three Billboards outside Ebbing, Missouri) – de Martin McDonagh – 2017

Posté : 7 décembre, 2024 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, McDONAGH Martin | Pas de commentaires »

Three Billboards

On pense aux frères Coen, bien sûr, devant ce film noir de l’Amérique rurale. A Fargo, en particulier, avec ses personnages bas du front, cette distinction traînante des coins les plus reculés, et la présence de Frances McDormand, là aussi récompensée par un Oscar (un troisième suivra, pour Nomadland).

On n’y pense, en fait, que durant les premières minutes. Parce que très vite, c’est un autre ton qui s’impose : celui, pas loin d’être aussi singulier, de Martin McDonagh, qui impose film après film une singularité passionnante, une manière finalement très élégante d’évoquer les sujets les plus sombres, de filmer les personnages les plus fracassés, sous un vernis cocasse qui retient constamment l’émotion.

Non pas qu’elle ne soit pas là, l’émotion. Elle est même bien présente, fichée au creux de l’estomac de la première minute. Mais en s’attardant au grotesque des situations, aux expressions souvent ahuries de ses anti-héros, McDonagh contient cette émotion dans son cocon, laissant au final un sentiment profond, et multiple.

Une sorte de bien-être, presque, l’impression d’avoir assisté à la naissance de quelque chose, à la fin d’un film où il n’est pourtant question que de morts, de déchirements, de renoncements, de haines refoulées… Frances McDormand en est le cœur à peine vibrant : une mère pleine de colère depuis que sa fille a été assassinée, quittée par son mari, méprisée par son fils, délaissée par la police locale…

C’est à elle, la police, qu’elle s’en prend lorsque commence le film : en louant trois immenses panneaux publicitaires dénonçant l’inefficacité des enquêteurs, accusant nommément le chef de la police dont elle sait pourtant qu’il est mourant. Pas facile d’aimer cette femme, symbole de la mère courage mais souvent aveuglée par sa colère. Surtout que le chef de la police est un type plutôt attachant, bon mari, bon père de famille, joué par un Woody Harrelson tout en sensibilité.

Il n’aurait pas volé un Oscar du second rôle, le Woody. Pas de bol pour lui : c’est Sam Rockwell qui l’a décroché, toujours pour 3 billboards. Ce qui est, aussi, amplement mérité (on donnerait bien des récompenses à tout le monde, c’est ce qu’on appelle la pédagogie positive) : hallucinant dans le rôle d’un flic raciste et violent, totalement étouffé par une mère castratrice, mais qui révèle tardivement une humanité inattendue, et bouleversante.

C’est toute la force du cinéma de Martin McDonagh : jouer avec la complexité de personnages borderline, sous le couvert du drame, de la comédie et du film de genre. Et mine de rien, la peinture qu’il livre de cette Amérique rurale profonde est d’une richesse étonnante, déjouant tous les stéréotypes, et toutes les facilités.

Les Banshees d’Inisherin (The Banshees of Inisherin) – de Martin McDonagh – 2022

Posté : 4 février, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, McDONAGH Martin | Pas de commentaires »

Les Banshees d'Inisherin

Mais pourquoi donc Colm a-t-il décidé de ne plus adresser la parole à Padraic, son ami de toujours ? Ils ne se sont pas disputé pourtant. Mais simplement… « I don’t like you no more », lâche Colm, les yeux rivés dans ceux de son ancien ami. Qui ne comprend pas. Et pour qui ce rejet soudain constitue un séisme dans une vie jusqu’ici parfaitement harmonieuse : chaque après-midi, direction le pub avec son ami, avant de s’y retrouver le soir.

C’est que sur Inisherin, une île isolée au large de l’Irlande, la vie s’écoule lentement, sans heurt, loin de cette guerre civile dont on parle vaguement sans la comprendre, et dont on entend quelques éclats de loin en loin, de l’autre côté du bras de mer (on est en 1923). Il ne s’y passe rien, ou si peu, au grand dam de l’affreuse épicière qui se plaint que ses taiseux de clients ne lui apportent jamais aucune nouvelle.

Martin McDonagh, au scénario et à la caméra, peuple son microcosme de personnages flirtant avec la caricature, comme son ton flirte avec la comédie. Pourtant, il se dégage de cet univers un peu excessif une vérité qui prend aux tripes. Parce que derrière la trop douce sœur de Padraic, derrière le regard demeuré de l’idiot de l’île, derrière la gentillesse obstinée de Padraic et le silence tout aussi obstiné de Colm, McDonagh capte le malaise, la douleur sourde, la solitude écrasante d’un havre coupé des remous du vrai monde.

On sourit, plus qu’on ne rit franchement : l’émotion est toujours là, tapie et prête à surgir, avec l’innocence et la simplicité d’une fable. McDonagh, après le triomphe de Three Billboards, reforme son duo de Bons baisers de Bruges : Brendan Gleeson, intense en colosse fragile et jusqu’au boutiste, et Colin Farrell, formidable en brave type qui se demande s’il ne serait pas, quand même, un peu idiot sur les bords. Farrell a d’ailleurs reçu le prix d’interprétation à Venise pour ce rôle.

Et puis il y a l’île elle-même, superbement filmée (dans les îles d’Aran). McDonagh capte la beauté spectaculaire de son décor tout en en saisissant le caractère hors du temps, coupé du monde. La belle musique de Carter Burwell (le compositeur quasi-attitré des frères Coen, et fidèle de McDonagh depuis son premier film) souligne cette beauté sauvage et quasi-mystique, qui ressemble à une plongée dans les affres de l’âme humaine.

Une tragi-comédie aux portes de la folie et du désespoir… Une fable autour du sens de la vie… Voilà un voyage beau, triste et plein de vie qui risque bien de me hanter longtemps.

 

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