Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour mai, 2016

Broadchurch (id.) – saison 2 – créée par Chris Chibnall – 2014

Posté : 31 mai, 2016 @ 8:00 dans * Polars européens, 2010-2019, BARKER Mike, CHIBNALL Chris, HOBBS Jessica, STRONG James, TÉLÉVISION, TEPLITZKY Jonathan | Pas de commentaires »

Broadchurch saison 2

La première saison était formidablement addictive. Cette deuxième mouture n’est sans doute pas tout à fait à la hauteur, mais quand même, difficile de lâcher avant la fin, tant les personnages déjà bien posés dans la première saison passionnent et émeuvent, et tant la série est basée sur un sens incroyable du rythme et du rebondissement.

La première saison se suffisait à elle seule : le meurtre d’enfant était résolu, et les parts d’ombre des personnages, qui rythmaient chaque épisode, étaient à peu près toutes mises en lumière. Cette deuxième saison part d’un double postulat. D’une part, disséquer les effets du meurtre (et de l’identité du meurtrier) sur la population, à l’occasion du procès qui s’ouvre. D’autre part, confronter le flic obsessionnel et malade Alec Hardy (David Tennant) aux fantômes de l’enquête ratée qui le mine depuis si longtemps.

Avec son ancienne co-équipière Ellie Miller (Olivia Colman), elle-même confrontée à des démons aussi violents qu’inattendus, il rouvre l’enquête… tout en affrontant les remous eux aussi inattendus du procès. Autant dire qu’avec cette double intrigue, les scénaristes ont de quoi jouer avec les nerfs des téléspectateurs, avec ce goût déjà très prononcé pour les fausses pistes et les rebondissements.

Contre toute attente, cette deuxième saison joue moins sur ces ficelles, privilégiant d’avantage encore la psychologie des personnages. D’ailleurs, l’enquête rouverte est l’aspect le moins convaincant de ces huit épisodes. On sent bien, d’emblée, que les fausses pistes ne mènent nulle part et que la première impression est, peut-être bien, la bonne… L’empreinte de la saison 1 est telle que ce sont les personnages que l’on connaît déjà qui fascinent le plus, même si les secrets ont déjà été dévoilés.

Comment se reconstruire après un tel drame ? Comment vivre dans cette communauté qui a été à ce point balayée par les doutes et la suspicion généralisée ? Ce sont ces questions d’habitude jamais abordées à l’écran (puisqu’elles apparaissent lorsque l’intrigue principale est bouclée) qui dont de cette saison 2 une nouvelle grande réussite. Plus que le procès lui-même et ses rebondissements, même si l’affrontement entre les avocates jouées par Charlotte Rampling et Marianne Jean-Baptiste est assez formidable.

Et jusqu’à un dénouement totalement inattendu, à la fois audacieux et d’une immense sensibilité. La marque de fabrique de cette série dont une troisième saison (la dernière) est annoncée.

Kung Fu Panda 3 (id.) – de Jennifer Yuh et Alessandro Carloni – 2016

Posté : 30 mai, 2016 @ 5:42 dans 2010-2019, CARLONI Alessandro, DESSINS ANIMÉS, YUH Jennifer | Pas de commentaires »

Kung Fu Panda 3

Visuellement ce troisième Kung Fu Panda est une belle réussite, chiadée et joliment ambitieuse. Dans les thèmes abordés abordés aussi, cette grosse production au succès d’emblée assuré tire le genre vers le haut. On y brasse en vrac la question de sa place dans la société, la question de la paternité, les notions de bien et de mal, et tout et tout.

Vous sentez venir le « mais » ? Ben oui, il y a un « mais »… Mais toutes ces qualités s’appliquent à, disons, 80% des dessins animés récents. Alors oui, les auteurs ont trouvé le truc pour séduire aussi bien les tout petits que les ados ou leurs parents : les uns adorent les scènes d’actions, les autres l’humour très accessible (et effectivement très efficace), d’autres encore se disent que, quand même, ça fait réfléchir…

Et puis il y a ceux qui se disent que, quand même, tout ça ressemble tellement au dernier dessin animé vu en salles. Ou à celui d’avant. Ou… Bref, une agaçante impression de déjà-vu. L’impression aussi que, si tu remplaces le panda par une voiture de course ou par un ogre vert, ça devrait coller tout aussi bien.

Alors oui, Kung Fu Panda 3 est réussi. Il faut juste avoir le sentiment d’être la cible. Pour info, j’étais passé à côté des deux premiers…

Allô, brigade spéciale (Experiment in Terror) – de Blake Edwards – 1962

Posté : 23 mai, 2016 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1960-1969, EDWARDS Blake | Pas de commentaires »

Allô brigade spéciale

La première séquence, absolument scotchante, révèle les secrets du titre (originale) : cette expérience de la terreur, c’est Lee Remick qui va la vivre. Mais c’est aussi le spectateur. Comme Jacques Tourneur vingt ans avant lui (dans L’Homme léopard, notamment), on sent bien que c’est cette volonté de filmer la peur qui a attiré Blake Edwards, qui venait de tourner un Breakfast at Tiffany’s nettement plus conforme à l’idée qu’on se fait de son cinéma, dans ce thriller.

Cette première scène résume à elle seule tous les principes et les qualités du film. Un noir et blanc magnifique, une musique (signée Henry Mancini) sobre qui distille l’angoisse, des personnages à la limite de l’abstraction, et une caméra dont les mouvements (rares) et les cadrages (sobres, à quelques exceptions près) sont d’une efficacité implacable.

Le postulat de départ est simple : une jeune femme rentre chez elle dans la nuit ; à peine sa voiture garée, la porte se referme derrière elle, la laissant dans l’obscurité et le silence, silence bientôt brisé par une lourde respiration… Cette scène garde, 50 ans après, une puissance terrifiante remarquable. Des moments de terreur, il y en a d’autres dans ce film. Mais Edwards (comme Tourneur) a l’intelligence de systématiquement se renouveler. Pas toujours avec la même puissance, mais en tout cas avec une efficacité constante.

On pourrait critiquer la vision un peu idéaliste du FBI : cette manière un peu simpliste avec laquelle Lee Remick, après avoir été menacée par ce mystérieux agresseur (Ross Martin, le sidekick des Mystères de l’Ouest, formidable), tombe dès le premier coup de téléphone sur un super-agent (Glenn Ford, d’une grande justesse) qui comprend immédiatement qu’il a affaire à une menace sérieuse…

Mais cette facilité scénaristique, qui se répète d’ailleurs à plusieurs reprises, est effacée par la manière dont le travail des enquêteurs est filmée. A l’opposée de l’héroïsme individualiste habituel, mais comme un travail de fourmis, qui nécessite des dizaines d’hommes, et d’interminables surveillances.

Dans la manière d’aborder le polar, dans cette manière de filmer l’angoisse… le film de Blake Edwards a quelque chose de résolument nouveau en 1962. C’est pourtant, aussi, un film de cinéphile, qui évoque à la fois Tourneur donc, mais aussi les films noirs réalistes de Mann ou Hathaway, et s’inscrit clairement dans la mouvance de Psychose. La terrifiante scène des toilettes résonne d’ailleurs comme un clin d’œil au film d’Hitchcock.

Experiment in Terror est aussi un film dont les parti-pris assez radicaux inspireront à leur tour d’autres cinéaste. En premier lieu Don Siegel, dont le Dirty Harry reprendra plusieurs idées fortes du film (avec une vision toutefois nettement plus cynique du travail de la police). Jusqu’à reprendre quasiment telle quelle l’ultime scène dans le stade, reprenant à l’identique ces impressionnants plans d’hélicoptère. Un sacré hommage…

* Le film vient de sortir dans la nouvelle collection « Films noirs, femmes en danger » chez Sidonis/Calysta, avec des présentations par Bertrand Tavernier, Patrick Brion et François Guérif.

Secret State (id) – mini-série créée par Robert Jones et réalisée par Ed Fraiman – 2012

Posté : 22 mai, 2016 @ 8:00 dans * Polars européens, 2010-2019, FRAIMAN Ed, JONES Robert, TÉLÉVISION | Pas de commentaires »

Secret State

De Borgen à House of Cards, la série télé politique a le vent en poupe. Secret State, mini-série british en quatre épisodes, entre clairement dans cette catégorie, en associant une forme ouvertement moderne (caméra à l’épaule, couleurs saturées…) et des ficelles qui ont fait leur preuve depuis longtemps.
En vrac : des industriels véreux, une finance toute puissante, des politiciens englués dans leurs ambitions personnelles, une machination mystérieuse, des meurtres déguisés en suicide, des services secrets qui surveillent tout le monde… et un chevalier blanc, devenu premier ministre contre toute attente, après la mort suspecte de son prédécesseur.

Ce chevalier blanc, c’est Gabriel Byrne, l’une des raisons qui font de Secret State une grande réussite. Il a un charisme fou, et cette manière si particulière de sembler ne rien faire avec profondeur. Impassible, la plupart du temps, mais en donnant pourtant à son personnage une belle complexité. Pas facile, pourtant, de faire exister un personnage aussi ouvertement et unilatéralement bon.

Autour de lui, pourriture et corruption. Là non plus, rien de bien surprenant donc. Sauf que, passé un premier épisode qui ne laisse guère de doute à la surprise, c’est surtout l’intelligence de l’écriture et l’efficacité de la mise en scène qui emportent l’adhésion. Plus l’intrigue avance, plus les ramifications se font complexes. Au final, l’immense machination attendue laisse plutôt la place à un portrait acide et plein de cynisme des puissants de ce monde, sans concession.

Grande fiction politique, Secret State est aussi, et c’est tant mieux, un film (pardon, une mini-série) de personnages, dont la réussite repose en grande partie sur la qualité des secons rôles. Moins ces deux aspirants-déçus-premiers ministres, assez caricaturaux et à la limite du grotesque, que les personnages qui gardent une part de mystère. Mention à Tony Fossett (Douglas Hodge), le meilleur ami qui noie les échecs de sa vie dans l’alcool. Au garde du corps aussi (Ralph Ineson), quasi-muet mais à la présence électrisante. Et bien sûr à Charles Dance, constamment en retrait mais fascinant en conseiller personnel du premier ministre.

Même si elle repose sur des ficelles éculées, cette mini-série brillante se révèle joliment addictive.

Des pas dans le brouillard (Footsteps in the fog) – d’Arthur Lubin – 1955

Posté : 21 mai, 2016 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), * Polars européens, 1950-1959, LUBIN Arthur | Pas de commentaires »

Des pas dans le brouillard

Arthur Lubin est un réalisateur qu’on aime bien pour des raisons un peu secondaires. Pas pour son ambition démesurée de cinéaste, vouée au duo comico-lourdingue Abbott et Costello et à l’inépuisable série des Francis, le mulet qui parle. Mais pour avoir été le premier à donner sa chance au jeunot Clint Eastwood, à qui il a confié quelques petits rôles anodins (Escapade au Japon) ou croquignolets (il faut voir La VRP de choc uniquement pour les sourires béats de Clint).

Bref, son cinéma est, pour être gentil, loin d’être renversant. Pesant, même, la plupart du temps. Surtout lorsqu’il se lance dans l’exotisme ou les grands espaces, aspects qui semblent immanquablement plomber son cinéma. Pourtant, un petit miracle se produit de loin en loin. On lui doit ainsi une version du Fantôme de l’Opéra à la bonne réputation, et un film noir méconnu mais fort sympathique, Impact. Des pas dans le brouillard pourrait bien être son chef d’œuvre.

C’est d’autant plus remarquable que le film est tourné entre deux Francis, à une époque où Lubin affirme clairement sa vocation de réalisateur de comédies familiales sans aspérités. Tout le contraire de ce « film noir victorien » loin d’être parfait, mais fascinant et étrangement dérangeant. Point de grands espaces ici : entre les salons feutrés du Londres des privilégiés et les rues baignés de brouillard, Lubin filme constamment en espaces clos, ce qui lui réussit particulièrement bien.

Il est aidé, il est vrai, par une photo absolument superbe (signée Christophe Challis): une image quasi-monochrome qui donne une élégance et une atmosphère mystérieuse et fascinante à cette histoire. Histoire dont on se dit d’abord, lors de cette superbe séquence d’ouverture (formidable travelling qui nous conduit au pied d’un impressionnant et dérangeant tableau), qu’elle est une sorte de variation autour du thème maintes fois emprunté de Rebecca.

Un riche veuf (Stewart Granger), sa jeune et belle gouvernante (Jean Simmons), et une épouse décédée trop présente… Le parallèle semble évident. Sauf que, très vite, le film prend une toute autre dimension. On pourrait mettre toute le crédit de la réussite du film au chef op et aux scénaristes, mais ce serait injuste : Lubin réussit parfaitement tous les moments clés du film, avec simplicité et efficacité. Un sourire de Granger en contre-champs du tableau de la défunte… Un meurtre dans la brume londonienne… Lubin installe un climat inconfortable et bouscule constamment le spectateur.

La réussite du film repose aussi sur le « couple » principal. Entre Jean Simmons et Stewart Granger (mariés à la ville, à cette époque), on ressent constamment à la fois un érotisme trouble, et un décalage brutal. Comme si le désir sexuel et celui de tuer cohabitaient… Un film victorien, sans doute, mais surtout un film noir. Très noir.

* DVD dans une nouvelle collection au titre curieux « Film noir, femme en danger », chez Sidonis/Calysta, avec des présentations passionnées de Bertrand Tavernier, François Guérif et Patrick Brion.

Détective privé (Harper) – de Jack Smight – 1966

Posté : 20 mai, 2016 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1960-1969, NEWMAN Paul, SMIGHT Jack | Pas de commentaires »

Détective privé

Il en fait des tonnes, Paul Newman, surjouant sa cool attitude, cette non-chalance travaillée qui fait son incroyable charme. D’un autre acteur, ce serait insupportable. Mais lui a cette classe folle et une ironie teintée d’autodérision qui emportent l’adhésion. Et tout spécialement dans ce film noir qui sonne très sixties, mais dont le scénario semble tiré d’une armoire laissée fermée pendant vingt ans…

Plus que l’intrigue gentiment tarabiscotée, ses faux-semblants et ses innombrables rebondissements, c’est cette impression que Jack Smight filme un scénario de la grande époque du noir qui fascine et séduit. Sur le papier, Harper, adaptation d’un roman de Ross MacDonald, aurait pu être une sorte de double du Grand Sommeil. A l’écran, le résultat est pourtant radicalement différent. Et dans cette différence, c’est toute l’évolution du cinéma de genre américain qui apparaît.

Pas forcément toujours pour le meilleur : il manque au film de Smight la suprême atmosphère de celui de Hawks. Mais la référence est flagrante, jusqu’à la participation de Lauren Bacall, flanquée d’une jeune femme un rien névrosée (sa belle-fille ici, et plus sa sœur). Quant à Newman, il est une sorte de version années 60 du privé à la Bogart. Donc très différent : filmé dans son terne quotidien (la scène d’ouverture), prêt à implorer sa femme (Janet Leigh) de ne pas le quitter, et passant le plus clair du film à se prendre des coups…

La comparaison pourrait être écrasante, mais Smight a l’intelligence de faire le film à sa manière. Avec un grand sens du rythme et de la dérision, et même une certaine élégance. A tel point qu’on aurait presque souhaiter voir Newman et Smight s’atteler réellement à un remake du Grand Sommeil. Un remake qui sera bel et bien réalisé quelques années plus tard, mais par un tâcheron et sans éclair de génie. Quant à Newman, il retrouvera le rôle de Harper neuf ans plus tard dans La Toile d’araignée qui, non, n’est pas le remake du film noir homonyme des années 50… avec Lauren Bacall.

Du Sang dans la Sierra (Relentless) – de George Sherman – 1948

Posté : 19 mai, 2016 @ 1:26 dans 1940-1949, SHERMAN George, WESTERNS | Pas de commentaires »

Du sang dans la sierra

Dès la toute première scène, on sent que Sherman est dans une bonne veine avec ce western tourné non pas pour la Universal, mais pour la Columbia. Les premières images montrent une petite ville de l’Ouest comme tant d’autres, mais plongée dans la nuit, et balayée par une pluie battante. Que Sherman filme avec le sens du cadre et du rythme qu’il a dans ses meilleurs films.

Outre la météo, ce qui frappe aussi d’emblée, c’est la bienveillance des habitants que l’on retrouve dans un saloon chaleureux, et qui saluent avec joie la bonne chance de deux d’entre eux, qui viennent fêter (au champagne s’il vous plaît) la fortune qui vient de leur sourire dans la mine qu’ils exploitent dans un coin tenu secret… On sent venir la suite, et on n’y coupe pas : parmi ces habitants bienveillants, il en est un qui l’est nettement moins.

C’est un peu la limite du film : on sent constamment venir la suite. On la voit même arriver avec l’assurance de celui qui ne fera rien pour éviter les clichés. Mais la mise en scène de Sherman compense les facilités scénaristiques, et la minceur des personnages. On s’attend donc à ce que les deux mineurs fortunés se fassent dessouder, mais la scène où cela se produit effectivement est assez remarquable. Du meurtre, on n’aperçoit que les silhouettes des tueurs à travers la fenêtre salle d’une cabane.

Ce parti-pris, Sherman l’adopte à d’autres reprises dans ce western, décalant l’action hors caméra pour ne plus filmer que les ombres des protagonistes projetées sur un mur. L’effet n’est pas neuf (ah ! ce duel dans Les Aventures de Robin des Bois !), mais donne un vrai style à ce western plutôt sympathique, ou les belles idées inattendues compensent la pauvreté de la psychologie.

Le rôle central joué par le poulain est pour le moins original, et fonctionne parfaitement bien, donnant toutefois au film des airs de conte pour enfant, ce qu’il n’est pas foncièrement. En témoigne la sécheresse de la violence, et cet affrontement plus psychologique que physique pour le coup, à la fin du film.

Une autre surprise, c’est la présence dans le rôle principal de Robert Young, acteur que l’on a plus l’habitude de voir dans des drames urbains ou dans des comédies. Son sourire un poil trop blanc fait d’ailleurs craindre le pire dans les premières minutes. Mais l’acteur, à défaut d’être renversant, est sympathique et s’avère très à l’aise pour donner de la gravité à son personnage, accusé de meurtres qu’il n’a pas commis.

On peut ajouter de beaux extérieurs qui inspirent particulièrement Sherman, un passage inattendu (et assez déroutant) dans la neige, et un plan unique mais très beau d’un coucher de soleil magnifié par le très beau Technicolor. Un western mineur, certes, mais plein de petites pépites éparses.

* DVD dans l’incontournable collection Westerns de Légende, avec des présentations par Patrick Brion et Bertrand Tavernier, ce dernier se montrant étonnamment sévère avec le film.

La Vengeance de l’Indien / Le Sang de l’Indien (Reprisal !) – de George Sherman – 1956

Posté : 1 mai, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, SHERMAN George, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Sang de l'Indien

71 minutes, pas une de plus… George Sherman, cinéaste inégal capable du meilleur (Le formidable Vengeance à l’aube) comme du pire (Le Grand Chef, assez ennuyeux) signe un petit western admirablement tendu et loin d’être aussi anodin que son format et l’absence de vedette pouvaient laisser penser.

Souvent oublié dans l’histoire du western, Sherman n’a certes pas la carrure des grands maîtres comme Ford, Hawks, Wellman, Daves ou d’autres. Et il lui arrive plus souvent qu’à son tour de céder à une sorte de nonchalance routinière qui nuit à certains de ses films. Mais quand il est inspiré, il peut livrer d’excellents films, passionnants et gorgés de belles idées narratives.

C’est clairement le cas de ce Reprisal !, qui fait partie des très grandes réussites de Sherman. Dès la séquence d’ouverture, on est frappé par la manière dont le film introduit les personnages. L’arrivée d’un étranger en ville, entrée en matière on ne peut plus classique, se heurte ici à une porte fermée… L’action se déplace alors dans le traditionnel saloon, transformé ce jour-là en tribunal où sont jugés trois frères accusés d’avoir lyncher deux Indiens, et dont la culpabilité ne fait d’emblée aucun doute. Sauf que le jury les innocente en une poignée de secondes…

Reprisal ! fait partie de cette grande vague de westerns pro-Indiens. Rien de totalement neuf sous le soleil de l’Oklahoma, donc. Sauf que la manière dont Sherman aborde cette question du racisme renvoie clairement à la situation contemporaine des Etats-Unis, confrontées à des problèmes similaires dans les états du Sud. Les opprimés ici sont les Indiens, mais il paraît évident que l’action pourrait être transposée avec n’importe quelle minorité opprimée, à n’importe quelle époque (d’ailleurs, le scénario s’inspire d’un roman évoquant le racisme envers les noirs).

Inattendu aussi : le fait que le héros soit à moitié-Indien. Ce qui ne saute pas aux yeux, vu qu’il est interprété par le très blond Guy Madison, mais que Sherman dévoile assez vite lors d’un formidable dialogue avec un vieil Indien. On sent bien que ce sujet est cher au cinéaste, qui donne un magnifique rôle de squaw en mal de reconnaissance à Kathryn Grant (une vraie blanche, certes), et fait de l’impossible réconciliation entre les peuples le vrai sujet de son film.

La mise en scène est souvent aussi forte que ce sujet. Il y a même plusieurs scènes qui nous scotchent littéralement au fauteuil : le duel avorté et incroyablement tendu entre Madison et le plus jeune des frères Shipley ; ou le quasi-lynchage du héros, impressionnant, scène qui justifie à elle seule l’inspiration de Sherman, dont la caméra se plaque au sol pour mieux faire ressentir la puissance de la foule en colère, ou s’élève soudain en une vertigineuse plongée pour souligner le soudain isolement du héros…

Sherman donne un tel rythme à son film que Guy Madison, acteur plutôt transparent, semble dégager une grande intensité. Mais il faut dire qu’il est bien entouré, notamment par Felicia Farr (une habituée des westerns de Daves), dans un rôle pas si lisse qu’il n’y paraît au premier abord. Et c’est bien l’une des forces du film, qui ne cède jamais à la facilité du manichéisme. Un petit film, oui, mais un petit bijou.

* DVD dans la collection « Westerns de Légende » de Sidonis/Calysta, avec des présentations par Bertrand Tavernier et Patrick Brion.

 

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