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Archive pour la catégorie 'LUMET Sidney'

12 hommes en colère (Twelve angry men) – de Sidney Lumet – 1957

Posté : 8 janvier, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

12 hommes en colère

Voilà le genre de classiques qu’on peut voir et revoir à tous les âges, sans jamais se lasser, et en découvrant à chaque nouveau visionnage de merveilleux détails encore jamais vus. 12 hommes en colère est un film formidable, et ce n’était pas gagné, tant le projet pouvait sembler piégeux : l’adaptation d’une pièce de théâtre à succès, dont le procédé même était éminemment théâtral, et absolument pas cinématographique.

Unité de lieu : la salle de délibération d’un jury de procès, dont on ne sort que dans les deux premières minutes et les trente dernières secondes. Unité de temps : celui de la délibération, filmé en temps réel et sans coupure. Un nombre de personnages limité : douze. On fait plus facile, particulièrement pour un premier film. Mais Lumet, cinéaste débutant, donc, signe un film d’une densité et d’une fluidité exceptionnelles.

Sa mise en scène paraît très classique, sans aucun effet facile, presque effacée. Elle est en fait d’une précision extrême, effaçant avec évidence les contraintes liées à un espace confiné, et à un scénario bâti sur des répétitions : les mêmes faits que l’on ressasse constamment, les efforts faits pour convaincre, et les votes qui reviennent tout au long du film, jamais filmés de la même manière, avec des détails qui, subrepticement, modifient le rapport de force et influent sur le ton.

Avec ces douze jurés qui refont entre eux le procès d’un jeune homme accusé d’avoir tué son père, Lumet semble mine de rien concentrer l’humanité dans ce qu’elle a de plus diverse. L’Amérique en tout cas, avec toute sa complexité. D’un côté, le juré n°8 : Henry Fonda, incarnation parfaite de l’individu prêt à affronter la masse pour faire triompher la justice, même si elle ne se base que sur le doute. De l’autre, le juré n°10 : Ed Begley, symbole de l’intolérance raciste et aveugle. Entre les deux, dix nuances d’Américains…

Chacun des jurés représente en effet un type de personnages. Mais loin d’être caricatural, ce choix donne un aspect universel à cette longue conversation souvent tendue, parfois borderline, toujours humaine. Lumet caractérise chacun de ces personnages avec une précision extrême, s’attachant à l’humanité de chacun d’entre eux dans toute sa complexité, et tirant le meilleur de chacun des acteurs : Jack Warden, E.G. Marshall, Martin Balsam… Coup de cœur particulier pour Lee J. Cobb, extraordinaire grande gueule gorgée de haine.

La réussite du film tient aux personnages bien sûr, mais aussi à la tension que Lumet réussit à insuffler, à son sens du cadrage, à sa manière de rapprocher ou d’éloigner les jurés par la caméra, de faire ressentir la chaleur étouffante de cette soirée d’été. Tout ça tient dans les détails donc, dans cette lumière qui baisse régulièrement tout au long du film, dans la sueur qui coule sur un front, dans la longueur des silences. La naissance, passionnante, d’un grand cinéaste.

Un après-midi de chien (Dog Day Afternoon) – de Sidney Lumet – 1975

Posté : 19 février, 2021 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1970-1979, LUMET Sidney, PACINO Al | Pas de commentaires »

Un après-midi de chien

Bon sang le sentiment de solitude qui se dégage de ce dernier plan. Le regard de Pacino, rempli d’une panique qu’on sent prête à éclater… Le film est comme une cocotte minute dont la pression ne cesserait d’augmenter, mais qui n’explose jamais vraiment. Une tension incroyable, une attente interminable, et un grand film d’une intensité folle signé Sidney Lumet, au sommet.

Un après-midi de chien est inspiré d’une histoire vraie : celle de deux braqueurs improvisés qui doirent tout ce qu’ils entreprennent et qui se retrouvent à prendre en otage les neuf employés d’une banque. Al Pacino et John Cazale, de nouveau réunis après Le Parrain et sa suite, immenses tous les deux. Cazale en paumé intégrale et perdu d’avance. Pacino en petite tête qui, le temps d’un fiasco, semble trouver un sens à sa vie. Une place dans une société pour laquelle il paraît inadapté.

Sa vie : tiraillé entre une mère et une femme également castratrices, mais aussi entre une femme et un amant qui a besoin d’argent pour une opération de changement de sexe. Totalement paumé, tiraillé ou rejeté, hésitant constamment sur l’identité de sa femme (elle ou lui ?)… Le symbole d’une Amérique en quête d’identité, ou de modèle.

D’ailleurs, il suffit qu’il tienne tête à la police et fasse référence à la tuerie d’Attica pour qu’il devienne une sorte de rock star aux yeux des badauds venus assister au drame. Et lui y trouve quelque chose comme un aboutissement personnel. Lumet invente au passage la téléréalité, décortique une société qui va mal, pointe du doigt la rupture brutale entre la population et les forces de l’ordre…

Un après-midi de chien a la force du cinéma noir des années 1970, mais il fait aussi écho cruellement à l’époque actuelle, avec une acuité étonnante. Un grand film intemporel, cruel mais plein d’une empathie belle et douloureuse.

MI5 demande protection (The Deadly Affair) – de Sidney Lumet – 1966

Posté : 29 septembre, 2018 @ 8:00 dans * Espionnage, 1960-1969, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

MI5 demande protection

Décidément plein de bonnes choses à découvrir, dans la filmographie très éclectique de Lumet : des pépites oubliées, souvent, dont cette adaptation d’un roman de John Le Carré fait clairement partie. Le Carré-Lumet : la rencontre entre ces deux-là donne un film sombre et brillamment retors.

Lumet fait sien le style du romancier. La complexité de l’intrigue est donc un prétexte pour plonger de plus en plus profondément dans la noirceur des personnages, pour se confronter à leurs démons et à leurs tourments, mais aussi pour découvrir le vide abyssal de leurs existences, enfermées par l’absurdité de ce monde de l’espionnage, loin, très loin des exploits des espions de cinéma.

Dans le genre, le personnage joué par James Mason est pas mal. « Maître espion » vivant sur le souvenir de ses glorieuses années de guerre (durant lesquelles ses actions avaient un sens évident et tangible), et transformé depuis en fonctionnaire sans cause à défendre. Sans même mentionner sa vie personnelle, tourmenté par une femme aimante mais volage (Harriet Anderson).

L’image monochrome, grise et froide, souligne parfaitement ces vies sans joies, sans espoirs et sans sens, sentiment renforcé par des cadrages serrés, donnant une impression constante d’étouffement.

Et ce ne sont pas les rencontres de Mason qui vont changer la donne : un ex flic vivant seul entouré d’animaux, une veuve rescapée des camps et abîmée par la vie (Simone Signoret, dans un très beau rôle), ou encore un père bigame et alcoolique… Il y a bien ce personnage d’espion très tactile qui appelle James Mason « dear », créant une fausse proximité qui ne fait que rajouter au trouble.

Le Crime de l’Orient-Express (Murder on the Orient-Express) – de Sidney Lumet – 1974

Posté : 31 janvier, 2018 @ 8:00 dans * Polars européens, 1970-1979, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

Le Crime de l'Orient Express 74

Peut-être LE fleuron du film agathachristien. Un genre en soi, auquel le film de Lumet donne des codes toujours en vigueur quarante ans plus tard, comme le prouve le tout récent remake signé Kenneth Branagh : un lieu clos (en l’occurrence un train luxueux coincé au-milieu de nulle part par la neige), un meurtre mystérieux (un sale type interprété par Richard Widmark), des personnages interprétés par des stars souvent sur le retour qui sont tous des suspects potentiels, et un enquêteur (Hercle Poirot) qui finira par dévoiler la vérité en réunissant tout ce petit monde…

Le film commence par l’enlèvement et la mort d’une fillette. Une séquence tout en sépia entrecoupée de coupures de presse qui évoque clairement, mais en changeant les noms, l’affaire Lindberg. Une tragédie qui pèsera sur tout le film, et c’est la première bonne idée : en invoquant un faits divers connu de tous, Agatha Christie (et Lumet) implique immédiatement le lecteur/spectateur, dans un crime où les suspects sont tous plus aimables que la victime.

Et quels suspects ! Ingrid Bergman (un peu cabote quand même, dans un personnage totalement privé de glamour), Lauren Bacall, Anthony Perkins, Vanessa Redgrave, John Gielgud, Sean Connery, et les frenchy Jacqueline Bisset et Jean-Pierre Cassel, sans compter Martin Balsam en patron de l’Orient-Express. Un casting impeccable, même si tous sont réduits aux seconds rôles.

Car les deux stars du film, ce sont l’Orient-Express, filmé avec des couleurs saturées voire vaporeuses qui renforcent son aspect mythique, et surtout le détective lui-même, Hercule Poirot, dans la plus célèbre de ses incarnations. A revoir le film, le mystère n’existant plus, on réalise à quel point le film repose sur la prestation d’Albert Finney, que ce soit dans le rythme ou dans le ton. Le personnage est cérébral et exubérant ? Finney réussit une interprétation tout en finesse, tout en en faisant des tonnes. Poirot, c’est définitivement lui.

Le Gang Anderson / Le Dossier Anderson (The Anderson Tapes) – de Sidney Lumet – 1971

Posté : 26 août, 2017 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1970-1979, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

Le Gang Anderson

Un voleur sort de prison, décide de réaliser un dernier « coup », réunit son équipe, prépare le cambriolage, et passe à l’acte… Lumet respecte scrupuleusement la construction habituelle du « film de braquage », genre en soi particulièrement florissant. En faisant de Sean Connery son chef de gang, le cinéaste répond à une autre exigence du genre : une tête d’affiche, alors en pleine gloire James Bond (il s’apprêtait à retrouver le rôle une presque dernière fois, après l’avoir abandonné le temps d’un film à George Lazenby), pour mener une équipe hétéroclite, qui va du tout jeunot Christopher Walken au vétéran Martin Balsam (dans un rôle d’homo très efféminé).

Rien que de très classique, donc. Ben non. Et la particularité du film apparaît dès le tout premier plan : un écran de télévision diffusant un film dans lequel notre héros, en prison, se confie sur son rapport avec le vol. Suit une sorte de thérapie par la confession filmée et enregistrée, comme si le monde moderne, que Sean s’apprête à retrouver après dix ans derrière les barreaux, n’existait plus qu’à travers les écrans et les micros.

Et c’est bien de cela qu’il s’agit dans ce film faussement classique. Car tandis que les voleurs préparent leur casse avec confiance, et même la superbe de ceux qui ne peuvent pas échouer, leurs faits et gestes sont constamment filmés, et leurs paroles constamment écoutées : par un amant jaloux, par le FBI, par les services du Trésor… Pas le moindre geste n’échappe à ce Big Brother omniscient que cette Amérique semble être devenue. Le film en dit beaucoup sur cette Amérique-là, qui n’a pas encore découvert l’affaire du Watergate.

Sean Connery fait du coup ce que peu de stars de son acabit acceptent : en jouant sur le décalage entre la superbe qu’il affiche et la déconfiture annoncée de son projet, il apparaît comme un homme dépassé par le monde qui l’entoure, tellement aveugle aux évolutions qu’il n’a pas accompagné qu’il sombre dans une sorte de posture ridicule, d’autant plus qu’il inspire la confiance à tous ceux qu’il entraîne dans sa chute.

Cynique et ironique, Lumet filme des losers magnifiques, dont Connery est l’incarnation ultime. Un type qui semble filmé par l’Amérique entière, alors que lui-même n’intéresse personne. Un voleur « de génie » qui, au lieu de s’attaquer à une banque ou un casino, décide de cambrioler un immeuble d’habitation entier. A cette époque, c’est à Lumet que l’acteur doit quelques-uns de ses rôles les plus marquants. Celui-ci en fait partie.

Serpico (id.) – de Sidney Lumet – 1973

Posté : 19 novembre, 2016 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1970-1979, LUMET Sidney, PACINO Al | Pas de commentaires »

Serpico

Inspiré d’une histoire authentique, Serpico n’est pas à proprement parler un film policier. Pas de véritable intrigue, pas même de grands méchants si ce n’est le système policier et judiciaire lui-même, gangrené par la corruption et la violence. Le film de Lumet est un pamphlet d’une grande puissance dénonçant une société où tout ou presque semble totalement pourri.

Surtout, c’est le portrait d’un flic obsédé par l’envie de bien faire. Pas un chevalier blanc, ni un héros décidé à faire le ménage, mais un simple flic écœuré par la corruption qui l’entoure. Il n’a aucune envie de combattre la corruption, ni même de dénoncer les ordures qui l’entourent au quotidien. Mais il ne demande qu’à faire son boulot à la manière qu’il croit juste.

Ce personnage, auquel Al Pacino apporte une intensité hallucinante, est devenu une sorte de mythe. Un repère en tout cas, dans l’histoire du polar américain, qui donnera lieu à des tas de dérivés dans les décennies qui suivent, mais rarement avec cette radicalité là. La plongée de Pacino dans la violence de ce New York d’avant les années 80 n’a jamais rien d’héroïque. Mais c’est aussi une plongée en obsession, glaçante et sans retour.

Pacino, habité, est absolument formidable. Pas encore cabot comme il le deviendra trop souvent plus tard, il trouve l’un de ses très grands rôles, un an après Le Parrain (et vingt ans avant L’Impasse, dont la scène d’ouverture ressemblera étrangement à celle de Serpico).

Tout n’est pas parfait dans Serpico. La musique, étonnante, est ainsi omniprésente et finit par agacer. Mais Lumet change pour de bon l’image du polar new-yorkais, qui ne sera jamais plus vraiment le même.

L’Avocat du diable (Guilty as sin) – de Sidney Lumet – 1993

Posté : 12 juin, 2014 @ 2:29 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

L'Avocat du diable

Retour au prétoire pour Lumet, dont la filmographie est décidément parsemée de ces « films de procès », genre à part entière auquel il a donné quelques-unes de ses plus belles perles. Le cinéaste a toujours su trouver cette approche originale qui a fait de ses films, malgré leur décor semblable, des œuvres à part. Dans 12 hommes en colère, son premier film, il nous plongeait au cœur des délibérations d’un jury d’assises. Dans Verdict, il suivait le parcours d’un avocat hanté par ses propres démons.

La salle du tribunal est un lieu où se jouent des vies, où la frontière entre le bien et le mal est souvent une question de point de vue, où chacun joue un rôle… Bref, un microcosme hors du temps où, malgré les faux semblants et les mensonges omniprésents, se révèlent les vraies personnalités. C’est sans doute ce qui a à ce point fasciné Lumet tout au long de sa carrière, pendant plus d’un demi-siècle.

Cet Avocat du diable n’échappe pas à la règle. Certes mineur par rapport aux deux films déjà cités, ce nouveau film de procès repose une nouvelle fois sur une idée particulièrement forte : une avocate accepte de défendre un playboy accusé du meurtre de sa femme, et réalise bientôt que non seulement son client est coupable et monstrueux, mais aussi qu’elle n’a plus d’autre choix que de le défendre malgré tout…

Formellement parlant, L’Avocat du diable est assez pauvre, au regard des grands films de Lumet. Les scènes de prétoire, notamment, sont filmées d’une manière assez froide, presque clinique. Seules quelques courtes séquences annexes parviennent à créer cette intimité qui faisait la force de Verdict notamment. Et particulièrement les scènes avec l’excellent Jack Warden, dans un rôle proche (en un poil moins cynique) de celui qu’il tenait dans le précédent film.

Mais cette esthétique froide et presque déshumanisée souligne l’engrenage dans lequel se retrouve l’avocate (Rebecca de Mornay), forcée de respecter les règles absolues de son métier, en laissant de côté toute notion de bien ou de mal. Dans le rôle du « diable », Don Johnson est flippant. Il est alors au sommet de sa carrière cinématographique, après avoir tourné notamment pour Dennis Hopper (Hot Spot) et John Frankenheimer (Dead Bang). Plus dure sera la chute…

Le Verdict (The Verdict) – de Sidney Lumet – 1982

Posté : 7 août, 2013 @ 3:28 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, LUMET Sidney, NEWMAN Paul | Pas de commentaires »

Le Verdict (The Verdict) – de Sidney Lumet – 1982 dans * Thrillers US (1980-…) le-verdict

La justice est omniprésente dans l’œuvre de Lumet, qui a réussi tout au long de sa carrière à revenir régulièrement dans les salles d’audience tout en se renouvelant constamment. Loin du huis-clos de son premier film, 12 hommes en colère (deux des jurés, Jack Warden et Ed Binns, font d’ailleurs partie de la distribution de The Verdict), tourné vingt-cinq ans plus tôt, ce film passionnant co-écrit par David Mamet est le portrait d’un avocat raté et alcoolique qui semble tout droit sorti d’un roman noir.

C’est un rôle en or, que quelques grands noms ont pourtant refusé : Redford surtout, peu enclin à interpréter un type aussi peu séduisant que ce poivrot queutard et adepte de l’apitoiement sur soi-même. Paul Newman, son ancien complice de Butch Cassidy et de L’Arnaque, lui, n’a jamais eu peur d’abîmer son image. Et il livre ici l’une des grandes interprétations de sa carrière.

Fatigué et immature à la fois, Newman est grand, faisant de son personnage un vrai minable qui semble s’écœurer lui-même. On le découvre, avocat ayant perdu toute ambition, squattant les salons funéraires pour inciter les familles dans le deuil à l’engager pour poursuivre d’éventuels responsables. On le voit traîner sa médiocrité dans les bars, draguant et s’alcoolisant auprès de compagnons de beuverie dont il ne connaît sans doute même pas les noms.

Pour que ce type franchement méprisable se prenne enfin en main, il faudra la « rencontre » avec pire que lui : une jeune femme plongée dans un coma dont elle ne peut, elle, pas se sortir. Dès lors, le grand procès qui va suivre, où il jouera le rôle de David contre un Goliath tout puissant (l’Eglise), sera pour lui le seul chemin de la rédemption.

Jamais Lumet ne tombe dans la caricature ou dans la facilité. L’avocat joué par Newman ne devient pas un chevalier blanc, mais reste ancré dans sa solitude (malgré sa rencontre avec une charmante Charlotte Rampling) et son égoïsme. Cette croisade qu’il mène devant la justice, il l’a fait au moins autant pour lui-même que pour la victime, conscient qu’il s’agit là de sa dernière chance.

Face à lui, il retrouve un brillant avocat, à la tête d’un grand cabinet parfaitement organisé et respecté de tous. C’est James Mason (à qui il s’était déjà frotté dans Le Piège, dix ans plus tôt), l’exact inverse de ce que lui est devenu.
Lumet réussit sur tous les tableaux : dans le portrait de ce type qui s’est enfermé dans sa solitude, et dans la figure plus attendue du film de procès, genre à part entière du cinéma américain dont il respecte tous les codes avec une grande efficacité.

Un peu trop vite considéré comme un film mineur du cinéaste, Le Verdict est une grande réussite. Il vaut aussi le coup d’œil pour une curiosité : il s’agit de l’un des premiers films du jeune Bruce Willis. Pas encore révélé par la série télé Clair de Lune, l’apprenti comédien est l’un des figurants présents (longuement) dans le public de la salle de tribunal. Il n’est qu’une silhouette muette. Une quinzaine d’années plus tard, il retrouvera Newman dans Un homme presque parfait, de Robert Benton.

• Belle qualité d’image pour le blue ray « collector » édité chez Fox. Un bel objet riche en bonus (que je n’ai hélas pas pu visionner).

7h58 ce samedi-là (Before the devil knows you’re dead) – de Sidney Lumet – 2007

Posté : 13 mai, 2013 @ 1:36 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

7h58 ce samedi-là (Before the devil knows you’re dead) – de Sidney Lumet – 2007 dans * Thrillers US (1980-…) 7h58-ce-samedi-la

Cinéaste passionné par les affres de la famille, Lumet conclut sa carrière avec une pure tragédie familiale digne de Shakespeare. On a vu à peu près tout dans son œuvre, sauf peut-être des familles équilibrées et tranquilles (pas très cinégéniques, c’est vrai). Mais là, le cinéaste va loin, très loin, avec cette histoire de deux frères acculés par leurs problèmes d’argent, qui préparent le braquage de la bijouterie de leurs parents.

Aucun risque, juré : les deux frangins connaissent parfaitement les lieux et les systèmes de sécurité, savent que leurs vieux parents seront couverts par l’assurance, et que l’argent qu’ils en tireront leur offrira une nouvelle chance… Devinez quoi : ce coup sans risque va tourner au cauchemar. Un comparse chargé à la coke, un échange de coups de feu… et cette arnaque provoque la mort de la vieille maman, et le chagrin abyssal du père, magnifique Albert Finney.

C’est beaucoup ? Ce n’est pourtant que le début. Dans la grande tradition du film noir, Lumet s’intéresse aux conséquences de ce drame, à la descente aux enfers inexorables des deux frères, au sentiment de panique, de désespoir et de douleur auxquels ils réagissent très différemment. L’un dévoré par ses remords (Ethan Hawke, toujours très intense), l’autre laissant sa part monstrueuse prendre le dessus (Philip Seymour Hoffman, immense) et se coupant de tout et tous : son père, son frère, et sa femme (Marisa Tomei, qui n’a jamais été aussi belle et émouvante).

C’est du très grand film noir, qui excelle à faire ressentir la spirale infernale dans laquelle ces deux paumés sont plongés. Et la construction en puzzle, faite d’allers et retour incessants entre le braquage, les préparatifs et les conséquences, peut sembler artificielle, mais elle renforce le sentiment de tragédie et de piège inexorable.

En signant son film le plus fort depuis des lustres, Lumet tire sa révérence de la plus belle manière, avec un chef d’œuvre qui fait oublier les déceptions des dernières années.

Contre-enquête (Q & A) – de Sidney Lumet – 1990

Posté : 3 avril, 2013 @ 12:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, LUMET Sidney | Pas de commentaires »

Contre-enquête (Q & A) – de Sidney Lumet – 1990 dans * Thrillers US (1980-…) contre-enquete

Un tout jeune juge d’instruction, fils d’un héros de la police new-yorkaise, est chargée de rédiger le procès verbal d’une affaire toute simple : un autre héros du NYPD a tué en état de légitime défense un petit malfrat. C’est du tout cuit, lui assure le chef de la police : il suffit de recueillir les témoignages unanimes (les Q & A du titre : les questions and answers de la déposition) et de rédiger un rapport qui sera bien classé et vite oublié.

Sauf que le jeunôt n’est pas aussi niais que son costume bien repassé et le sourire ultrabright de Timothy Hutton (qui avait un grand avenir à l’époque) peuvent le laisser penser. Bien décidé à faire son travail jusqu’au bout, il interroge, contre-interroge, confronte, et finit par entrevoir la vérité à laquelle le spectateur a assisté dès le début du film : le grand flic, interprété par un Nick Nolte immense, a abattu le malfrat de sang-froid, lui tendant un piège mortel.

Lumet poursuit son exploration de la justice américaine, de sa grandeur et de ses limites, qui sont souvent intimement liées dans son œuvre : de 12 hommes en colère à The Offence en passant par Serpico. Et Q & A est une nouvelle réussite majeure pour le cinéaste, qui réussit aussi à marier ce thème à celui de la filiation, également important dans son œuvre (A bout de course, Family Business…) : le jeune juriste est bien le fils spirituel du grand boss, qui le traite comme tel. Mais pour se révéler, il devra couper le cordon et tuer le père, au moins symboliquement.

Rompre avec sa famille : c’est bien le thème au cœur de ce film noir et violent. Car la police est bel et bien filmée comme une famille, dont Timothy Hutton fait indéniablement parti. Son père en étant l’un des membres les plus éminents, et ses propres débuts sous l’uniforme font que les plus coriaces voient en lui un frère de sang. Mais ces liens indéfectibles sont bien ténus, et cachent une réalité bien plus glauque.

Le personnage de Timothy Hutton refuse de se laisser enfermer par ces liens. Mais Lumet ne se fait guère d’illusion dans ce film, profondément pessimiste.  la manière d’un livre de James Ellroy, auquel on pense forcément même si le film est adapté d’un autre auteur : Edwin Torres, juge de la Cour suprême reconverti en écrivain et dont l’œuvre sera de nouveau adaptée au cinéma. Ce sera pour L’Impasse, le chef d’œuvre de Brian De Palma.

 

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