Tension à Rock City (Tension at Table Rock) – de Charles Marquis Warren – 1956
Charles Marquis Warren, créateur et auteur de la série Rawhide qui révéla un certain Clint Eastwood, a aussi à son actif quelques westerns pour le cinéma. Celui-ci ne paye pas de mine, à première vue. Petit budget (même pour la RKO), pas de grandes vedettes (Richard Egan, Cameron Mitchell, Dorothy Malone, et une toute jeune Angie Dickinson), une intrigue minimaliste, et un décor de petite ville de l’Ouest qu’on nous ressort film après film.
Petit film, mais loin d’être inintéressant. Parce que sous ses faux airs de Rio Bravo avant l’heure (une horde menaçante veut tirer de prison l’un des siens), ce western adopte une intimité étonnante, pas loin de la psychanalyse. Il y a bien des méchants, oui, mais qui n’ont qu’un rôle purement fonctionnel dans l’histoire : leur disparition n’a d’intérêt que pour l’impact qu’elles ont sur les personnages.
Richard Egan, ex bandit qui fuit la réputation honteuse qui le suit, et qui ne cesse de le rattraper par l’intermédiaire d’une chanson populaire qu’un type de passage a toujours la bonne idée de fredonner dans les saloons. Cameron Mitchell en shérif apeuré, hanté par un épisode violent et humiliant dont on ne saura rien. Entre eux, un gamin, Billy Chapin, tout juste sorti de La Nuit du Chasseur. Et une femme belle à damner, mais douce : Dorothy Malone, la formidable Dorothy Malone, incarnation de ce que chacun a à gagner, ou à perdre.
Dans ce western là, l’action est rare, et concise. L’affrontement le plus rude n’est pas celui des héros face aux bandits armés, mais les héros face à eux-mêmes, à leurs tourments intérieurs. Ce n’est pas tout à fait nouveau, mais c’est assez justement mis en image ici, avec une économie de moyens qui frappe juste. Les sentiments ne sont jamais exubérants, mais ils sont forts, et jamais pris à la légère.
Cela donne quelques belles scènes d’amitié taiseuse, et un duel à la fois classique dans sa forme (deux gars face à face dans la rue) et unique dans sa manière de confronter deux hommes dont on sent qu’ils s’aiment et se respectent.