Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour mars, 2014

12 years a slave (id.) – de Steve McQueen – 2013

Posté : 28 mars, 2014 @ 4:10 dans 2010-2019, McQUEEN Steve | Pas de commentaires »

12 years a slave

Solomon Northup a vraiment existé. Ce Noir Américain né libre dans le Nord des Etats-Unis au début du 19ème siècle travaillait, était marié, avec deux enfants, lorsqu’il a été enlevé en plein Washington, pour être vendu à des esclavagistes. Pendant douze ans, sa famille n’a plus entendu parler de lui. Réduit à l’esclavage, privé de tous ses droits d’homme libre, Solomon est devenu Platt, son nom d’esclave.

A plusieurs reprise, il a tenté de s’échapper, ou d’écrire aux siens. En vain pendant douze ans. Puis, une rencontre miraculeuse, la délivrance, et Solomon est devenu un symbole, participant au combat pour l’abolitionnisme, écrivant ses mémoires dans un livre qu’a adapté le Britannique Steve McQueen.

12 years a slave est un film d’une force incroyable, qui aborde avec un réalisme fou l’horreur de l’esclavage. Mais McQueen évite parfaitement le « film-thèse ». S’il dénonce sans détour les « péchés » de l’esclavage, il le fait avec un œil de cinéaste, et des parti-pris qui servent constamment son sujet.

En ne quittant jamais Solomon/Platt, McQueen choisit de ne pas tout montrer, mais de nous faire partager les sentiments et sensations de son personnage. La caméra se déplace à hauteur d’hommes dans des champs de cotons ou des plantations de canne à sucre, et on ressent la douleur de ce travail inhumain. Solomon assiste sans mot dire aux horreurs que l’on fait subir à ses semblables, et c’est à nous mêmes que vient la nausée…

Fort et bouleversant, le film n’est pas pour autant larmoyant. Et là encore, les choix du cinéaste nous glissent dans la peau de Solomon. Cette longue attente, ces années d’acceptation muette, cette volonté de ne pas s’apitoyer sur son sort… Comme lui, on voudrait que l’esclave Eliza se taise lorsqu’elle pleure ses enfants arrachés à elle. Comme lui, on voudrait que la colère du maître s’abatte sur un autre…

Et puis comme lui, on finit par ne plus en pouvoir, par être exsangue face à tant d’horreurs, tant de haine. Et lorsque la délivrance arrive. Enfin, l’émotion est foudroyante.

Je découvre le cinéma de Steve McQueen avec cette merveille. Et la découverte est de taille : avec ce film, le cinéaste dresse un pont entre le cinéma classique hollywoodien et un cinéma plus personnel, plus expérimental même. Comme une synthèse entre Anthony Minghella (pour le souffle romanesque), Terrence Malick (pour l’immersion dans une nature sublimée) et Bela Tarr (pour l’approche rude et terrienne). Etrange mélange, mais sublime mise en scène.

La narration est chronologique, mais multiplie les flashs du passé pour mieux faire ressentir l’insoutenable absurdité de la situation, et l’ampleur de ce que le personnage a laissé derrière lui. McQueen multiplie ainsi les images inoubliables (qui ont d’autant plus de force qu’elles sont mises en parallèle avec un passé heureux qui semble déjà appartenir à une autre vie) : ce plan qui nous dévoile que la première prison de Solomon est située au cœur de Washington ; ou beaucoup plus tard le long plan fixe sur le visage de Solomon, dont on devine l’effroi intérieur.

Dans le rôle principal, Chiwetel Ejiofor est exceptionnel, entouré de formidables seconds rôles, en particulier Michael Fassbender dans la peau d’un esclavagiste dont la cruauté sans borne cache de troublantes fêlures. Quant à Brad Pitt, producteur du film, il se réserve le beau (petit) rôle : celui de l’homme par qui le miracle arrive. L’ultime pouvoir d’une star d’Hollywood…

88 minutes (id.) – de Jon Avnet – 2007

Posté : 28 mars, 2014 @ 4:05 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, AVNET Jon, PACINO Al | Pas de commentaires »

88 minutes

Pas si mal, ce thriller dont j’avais gardé un souvenir assez médiocre. Bien meilleur, en tout cas, que La Loi et l’ordre, navrant polar également réalisé par Jon Avnet (l’anagramme de « navet », remember ?) avec Pacino, et DeNiro.

Le film souffre quand même par moments du manque d’inspiration du réalisateur, qui fait des purs moments de suspense (la séquence d’ouverture, ou une autre scène dans un appartement dont on se demande s’il est vide ou non) d’interminables accumulations de clichés qui faisaient les belles heures des séries policières des années 70 et 80 style Starsky et Hutch.

Avnet est loin d’éviter tous les clichés. La fin est ainsi tellement attendue qu’elle en devient pénible. Les fausses pistes qui émaillent le film peuvent-elles encore tromper qui que ce soit, alors que le scénario, et la mise en scène, recyclent des recettes éprouvées depuis des décennies ? Par moments, quand même, Avnet dépasse les bornes.

Mais il y a, à côté de ça, des tas de belles idées originales et pertinentes, qui sortent 88 minutes du tout-venant du thriller hollywoodien. Pas le compte-à-rebours, vieux truc rabâché depuis toujours, mais le fait que le héros, Al Pacino, passe une bonne moitié du film l’oreille collée à son téléphone portable. Peu d’action physique, finalement, mais un suspense efficace qui passe essentiellement par ces appels que le psychologue, interprété par Pacino, reçoit à longueur de métrages.

Les « 88 » minutes du titre, c’est le temps qu’il lui reste à vivre, selon les dires d’un mystérieux interlocuteur. Une affirmation, ou une menace, qui pousse Pacino à se méfier de tous, à décortiquer ce qui est sa vie, et à se méfier des multiples femmes qui la peuplent : toutes celles qu’il baise sans vraiment s’en soucier. C’est aussi une particularité du film : faire du héros un queutard vieillissant qui collectionne les conquêtes féminines mais réalise, face à la crise, qu’il ne connaît réellement aucune des personnes qui l’entourent.

Dans le rôle, Pacino n’est pas étonnant comme il peut l’être dans ses grands jours. Mais, même en mode mineur, il est parfait et sort le film de l’anonymat.

La Danse de mort – de Maurice Cravenne – 1946

Posté : 28 mars, 2014 @ 4:01 dans * Polars/noirs France, 1940-1949, CRAVENNE Maurice | Pas de commentaires »

La Danse de mort

Resté célèbre pour avoir été l’un des grands réalisateurs de la télévision naissance, Maurice Cravenne a aussi été un éphémère cinéaste, dont l’expérience la plus marquante reste sa collaboration avec Erich Von Stroheim, acteur et co-scénariste de cette Danse de mort pour laquelle il s’est beaucoup investi, comme pour peu d’autres films depuis la fin de sa carrière de réalisateur.

Le film porte effectivement la signature de Stroheim : on y retrouve la violence et la cruauté de ses grandes œuvres muettes, mais aussi les rapports conjugaux basés sur la domination, l’humiliation et la souffrance. Stroheim incarne lui-même l’officier en charge d’une prison-forteresse perdue sur une île, où il vit depuis 25 ans avec sa femme, avec laquelle il entretient une étrange relation de haine et de dépendance.

Cette dernière est interprétée par Denise Vernac, qui était l’épouse à la ville de Von Stroheim. Un détail qui rajoute au malaise dégagé par ce couple odieux, dont on sent qu’ils se haïssent (jusqu’à se cracher au visage avec une cruauté rare), sans pouvoir se quitter vraiment. « Ne va-t-il donc jamais mourir ? » se lamente la femme, réalisant qu’elle ne pourra pas partir d’elle-même.

Le couple n’est pas tout à fait seul dans cette prison qui est le symbole de l’impasse dans laquelle s’est dirigée leur propre vie, et dont ils tentent vainement de sortir. Il y a leur fille, qui commet le sacrilège ultime de tomber amoureuse d’un prisonnier. Il y a aussi un amour de jeunesse de l’épouse (Jean Servais), qui réapparaît après 25 ans, et ne servira au final qu’à mieux révéler le caractère sombre et machiavélique de l’une comme de l’autre.

Les décors de Georges Wakhevitch, dédales de couloirs et enchevêtrements d’escaliers, de soubassements et d’étroites fenêtres, soulignent constamment l’absence de perspective de ce couple qui fait passer celui du Chat de Granier-Deferre pour les plus grands des romantiques. La mise en scène de Cravenne est parfois un peu sage. Mais les décors exceptionnels, la belle lumière de Robert Le Febvre, le scénario particulièrement réussi, et l’interprétation très nuancée des comédiens, font de cette histoire de couple le portrait de deux êtres qui transforment leurs démons en haine mutuelle.

Stroheim, surtout, révèle son côté pathétique lors d’une fête d’anniversaire de mariage assez inoubliable…

Le Jour de la haine (Per 100 000 dollari t’ammazzo) – de Giovanni Fago – 1968

Posté : 28 mars, 2014 @ 3:56 dans 1960-1969, FAGO Giovanni, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Jour de la haine

Giovanni Fago, sous le pseudonyme américanisant (comme c’était la coutume dans les westerns spaghettis) de Sidney Lean, signe un film sous influence leonienne. Ce n’est d’ailleurs ni le premier, ni le dernier, dans ce genre pour le moins abondant où pullulent les blonds aux yeux bleus mal rasés, ersatz de Clint Eastwood, où la poussière, le vent et le sang sont omniprésents, et où l’alternance de très gros plans et de plans très larges, le zoom et la musique tonitruante sont les bases du langage cinématographique.

Dans le rôle principal, Gianno Garko a une vraie présence, même si ses mimiques et le plissement de ses yeux sont des copiés-collés de ceux de l’homme sans nom. Dans celui de son frère diabolique, Claudio Camaso affiche une folie empruntée au Indio de Pour une poignée de dollars. La ressemblance entre l’acteur et Gian Maria Volonte est d’ailleurs assez étonnante (renseignement pris, la ressemblance est somme toute logique, Camaso étant le petit frère de Volonte).

A défaut d’être vraiment original, Fago a quand même l’ambition de renouveler l’éternel thème westernien des frères ennemis. Le héros vient de passer 10 ans en prison à cause de son frère, et jure de se venger. Mais sa mère, sur son lit de mort, a demandé d’éviter un bain de sang. Le bon frère est donc condamné à cohabiter avec un frère foncièrement mauvais qu’il déteste par-dessus tout.

On aurait aimé un peu de mystère et de non-dits. Mais la première partie est pleine de flash-backs interminables, en ralenti et baignés par une musique sirupeuse, maladroitement inspirés des brefs rêves de Et pour quelques dollars de plus. Mais là où Leone ne faisait qu’évoquer, laissant le spectateur imaginer le passé des personnages, Fago est ici totalement explicite.

L’influence leonienne se fait aussi énormément sentir lors de la scène de l’hôpital militaire improvisé, qui rappelle l’ambition de Le Bon, la brute et le truand. A la différence que Le Jour de la haine est un petit budget, et que Fago n’a pas le talent nécessaire pour faire sentir le souffle de l’histoire, comme Leone le faisait, et de quelle manière.

Inégal, le film alterne les passages passionnants et les séquences inutilement étirées, le très sombre et le grotesque. La mort d’un enfant ou de longues séquences de tortures d’un côté ; et de l’autre des détails quasi-parodiques, des coups de feu suffisent à faire tomber des portes, des bouteilles de whisky qui font office de cocktail molotov… C’est toute l’outrance assumée du genre qui est résumée dans cette ambiguïté.

• DVD dans la collection « westerns européens » chez Artus Films, avec une présentation du film par le passionné du genre Curd Riedel, et des entretiens avec le scénariste Ernesto Gastaldi et l’acteur Gianni Garko.

La Grande Illusion – de Jean Renoir – 1937

Posté : 26 mars, 2014 @ 3:11 dans 1930-1939, GABIN Jean, RENOIR Jean | Pas de commentaires »

La Grande Illusion

« Chacun mourrait de sa maladie de classe, si nous n’avions la guerre pour réconcilier tous les microbes »

Classique d’entre les classiques, La Grande Illusion est un monument du cinéma français d’avant-guerre. Cette grande œuvre de Jean Renoir porte en germe la crainte d’un nouveau conflit mondial qui se profile : le rôle du juif Rosenthal, joué par Dalio, n’est pas anodin, pas plus que les dialogues lourds de sens (« J’espère que c’est la dernière », lance le même Rosenthal). C’est aussi, peut-être, le film où Renoir livre avec la plus grande transparence sa vision du monde.

Où se trouvent les véritables frontières ? Sur les cartes entre les pays, ou dans la différence d’éducation et de cultures entre les différentes classes sociales ? Renoir a tranché : sa vision se rapproche de celle des grands humanistes du cinéma, Chaplin en tête. L’aristocrate français Boyeldieu (Pierre Fresnay) a bien plus de points communs avec son alter ego allemand Von Rauffenstein (Eric Von Stroheim) qu’avec son compatriote Maréchal (Jean Gabin), pur produit de la classe populaire. Deux représentants d’une classe que l’histoire est sur le point de balayer définitivement.

Mais il y a la Grande Guerre qui fait rage, et qui exacerbe l’absurdité des frontières et des affrontements entre les peuples. Et le sentiment d’absurdité a rarement été aussi flagrant que dans ce film qui parle de la guerre sans jamais rien en montrer. Les actes de bravoure (le crash de l’avion, les tentatives d’évasion), ne sont qu’évoqués, écartés de l’écran par des ellipses audacieuses.

De la guerre, on n’aura que l’esprit de corps, les bruits de botte et des affiches qui annoncent la prise successive par les deux armées d’un obscur village. Renoir, pourtant, filme la plupart du temps de grandes scènes de camaraderie : des gueuletons partagés par les prisonniers, des clowneries menées par Carette (un rien lourd), et une légèreté apparente, loin des horreurs des tranchées.

Mais la guerre est omniprésente. La soirée théâtrale qui semble coupée du monde est soudain interrompue par l’une des plus vibrantes Marseillaises jamais entendues dans un film (comparable à celle de Casablanca). Les évocations presque grivoises de souvenirs très personnels des prisonniers sont interrompues lorsque l’un d’eux s’habille en vêtements féminins, la vision de cet ersatz de femme plongeant les prisonniers dans un mutisme nostalgique, image qui aurait pu être grotesque mais qui fait ressentir le poids de cet emprisonnement comme aucun discours ne l’aurait fait.

La Grande Illusion est plein de ces non-dits, de ce qui n’est pas montré, mais qui dévore l’écran. Une amitié condamnée d’avance par l’époque entre deux hommes parfaitement semblables mais séparés par l’uniforme ; Gabin dans son cachot, sourd aux attentions amicales de son geollier ; une histoire d’amour qui n’est qu’ébauchée en attendant d’hypothétiques jours meilleurs entre Gabin et Dita Parlo…

Stroheim est touchant, Dalio et Fresnay sont parfaits, et Gabin est immense. Quant à Renoir, il tempère son fatalisme d’une discrète touche d’optimisme. Le cinéaste affiche une foi en l’humanité. Son film est hanté par l’absurdité et l’immense gâchis de la guerre. Il est aussi habité par la bonté et la bienveillance de ses personnages, qui font de La Grande Illusion l’un des plus vibrants plaidoyers pacifistes qui soit.

Dans la chaleur de la nuit (In the heat of the night) – de Norman Jewison – 1967

Posté : 26 mars, 2014 @ 3:07 dans * Polars US (1960-1979), 1960-1969, JEWISON Noman | Pas de commentaires »

Dans la chaleur de la nuit

L’un des films les plus emblématiques de cette période marquée par la lutte pour les droits civiques. Quelques mois avant l’assassinat de Martin Luther King, le racisme était alors au cœur de l’actualité. Symbole hollywoodien de la cause noire, Sidney Poitier trouve ici l’un de ses rôles qui ont fait de lui un emblème : un noir en transit dans une bourgade du Sud profond, dont la couleur de peau fait le suspect idéal d’une affaire de meurtre… jusqu’à ce que les flics locaux, heureux d’avoir trouvé un coupable désigné, découvrent que ce « nègre étranger », venu du Nord, est un policier de la criminelle.

L’enquête qui suit est un prétexte, pour amener le chef de cette police locale gangrenée par un racisme ordinaire et « culturel », à collaborer avec cet homme de couleur dont il doit bien reconnaître qu’il est nettement plus doué et intelligent que lui. Sidney Poitier est excellent. Ses belles manières, son beau costume, son assurance, et même son argent, marquent la réussite sociale de cet homme qui découvre, dans ce Sud où la ségrégation n’appartient pas encore à l’histoire, le sort qui aurait été le sien s’il était né à une autre époque, ou dans un autre endroit.

Des formidables dialogues, crus et cruels, une réplique résonne particulièrement fort : alors que Poitier et le chef de la police (Rod Steiger) traversent un champ de cotons où suent des dizaines d’employés, tous noirs : « Pas de ça pour vous, hein Virgil ? ». Le silence de Virgil/ Poitier qui suit est glaçant.

On sent Norman Jewison totalement centré sur ce contexte social et racial, au détriment de l’aspect polar du film peut-être, qui passe franchement au second plan, et auquel on ne s’intéresse pas vraiment. Au détriment aussi, parfois, de l’aspect purement cinématographique : Jewison passe d’ailleurs à côté de son sujet lorsqu’il essaie, en vain, de faire ressentir la chaleur et la moiteur de ces nuits, censés troubler les personnages et altérer leurs sens.

Mais le film évite habilement toute facilité, repoussant toute tentation de diabolisation. Le personnage du chef de la police, surtout, est particulièrement ambigu : affichant un racisme ordinaire et une arrogance très colonialiste, il paraît aussi écoeuré par le comportement de ses propres concitoyens, et par lui-même. Un homme pathétique qui semble tiraillé entre ses traditions et sa conscience, auquel Rod Steiger apporte une profondeur exceptionnelle.

Le rôle lui a d’ailleurs valu l’Oscar du meilleur acteur (Sidney Poitier ayant été nominé la même année pour Devine qui vient dîner ?, autre film antiraciste emblématique), tandis que le film recevrait la statuette du meilleur film de l’année.

• Un beau coffret DVD / blue ray, avec livret, vient d’être édité chez Fox, avec un commentaire audio et quelques bonus intéressants, hélas sans sous-titres.

Le Signe des renégats (Mark of the renegade) – de Hugo Fregonese – 1951

Posté : 26 mars, 2014 @ 2:55 dans 1950-1959, FREGONESE Hugo | Pas de commentaires »

Le Signe des renégats

La Californie des années 1820 est le théâtre de ce film d’aventures méconnu mais particulièrement réjouissant, qui s’inscrit dans la lignée du Signe de Zorro (le film est d’ailleurs adapté de l’œuvre de Johnston McCulley, le créateur du cavalier masqué). Léger comme une bulle de champagne, et parfois proche d’un esprit cartoonesque, le film flirte allégrement avec la comédie, et ne se prend jamais au sérieux.

Dans le rôle du héros, hors-la-loi qui porte sur le front une marque qui le condamne à mort, Ricardo Montalban n’a pas la présence magnétique de Tyrone Power ou d’Errol Flynn. Mais il affiche ici une jeunesse presque arrogante qui colle parfaitement à l’esprit de ce film bondissant, qui laisse peu de place à la psychologie des personnages.

Qu’importe le contexte historique, qu’importe le passé ou les doutes des personnages… Qu’importe aussi finalement cette marque que Don Marcos, alias Montalban, dissimule constamment sous un foulard qui est comme une ombre jetée sur l’insouciance du héros : cette tâche sera balayée d’un simple revers de main.

Dès la première scène, le ton est donné. Montalban est pur héros hollywoodien : le verbe fort, les pectoraux saillants, et l’assurance jamais mise à mal. Autour de lui, des « méchants » proches du grand guignol : un pirate grande gueule et un rien grotesque, un homme de main à la sensibilité à fleur de peau, et un conspirateur qui se rêve en empereur… Difficile de prendre cette étrange galerie au sérieux, et on aurait bien tort de le faire : seul compte le plaisir, simple et sans arrière-pensée.

Duels et bagarres se succèdent, plutôt bien filmées par un Hugo Fregonese très inspiré. Mais c’est surtout cette longue danse de séduction qui marque les esprits. Point d’orgue du film, cette chorégraphie troublante et fascinante semble n’être là que pour mettre en valeur les talents de Cyd Charisse. Et l’apparition de ses jambes, qui se dévoilent sous une robe longue qui tourbillonne, reste l’image la plus marquante de ce film plein de vie.

• Le film vient d’être édité chez Sidonis, avec une présentation par Patrick Brion.

RoboCop (id.) – de Paul Verhoeven – 1987

Posté : 26 mars, 2014 @ 2:50 dans 1980-1989, FANTASTIQUE/SF, VERHOEVEN Paul | Pas de commentaires »

Robocop

Plus de vingt-cinq ans après, et après deux suites indignes, une série télé grotesque, et un tout récent remake pas vu, ce RoboCop premier du nom a formidablement bien passé l’épreuve du temps. OK, l’aspect technologique a vieilli, forcément : ordinateurs et écrans appartiennent à un futur qui appartient au passé. Mais à part ces détails inhérents au genre, le premier grand succès américain du Hollandais Paul Verhoeven a gardé toute sa force et tout son impact.

Le cinéaste inaugure avec RoboCop une recette qu’il reprendra, en allant plus loin encore, dans Total Recall et surtout Starship Troopers, ses deux autres films de SF : un mélange de satire, de violence et de critique sociale ; et une manière unique d’utiliser les codes de la science fiction, d’y insuffler un étrange second degré, et d’en faire une charge contre le totalitarisme, le capitalisme et toutes les dérives des sociétés modernes.

Les films dérivés de ce petit classique n’en reprendront généralement que la trame : ce flic laissé pour mort qu’une société privée utilise pour le transformer en superflic, mi-homme, mi-machine, censé être dépourvu de toute émotion humaine et de tout souvenir de sa vie d’avant. Et surtout les possibilités spectaculaires d’un tel personnage.

Verhoeven, lui, privilégie la satire donc, en livrant une vision particulièrement sombre d’un Detroit qui n’a pourtant rien d’une cité du futur : une ville familière, glauque et rongée par la violence, mais sans les atours habituels de la SF. L’anticipation repose plus sur le modèle de société : la police a été confiée à une société privée qui brasse des sommes gigantesques qui lui donnent un pouvoir infini.

La satire est parfois proche de la caricature : les dirigeants de la société sont eux-mêmes des stéréotypes illustrant la dérive capitalise, et les extraits de journaux télévisés que l’on voit régulièrement (comme dans les deux autres films de SF de Verhoeven) ne font pas vraiment dans la dentelle.

Mais Verhoeven signe aussi un film intime : à la surenchère (le film est plutôt économe en rebondissements, et en action superflue), le cinéaste privilégie le portrait intime de ce flic normal à qui on a effacé toute identité, et qui se rebelle peu à peu contre cette hyper autorité aliénante. Il y a comme ça de beaux passages très émouvants : celle, surtout, où RoboCop tombe le masque et redevient Alex Murphy.

Mais la grande force du film, c’est cette manière d’associer l’intime, le spectaculaire et la grande violence. La mise en scène souligne constamment l’environnement menaçant dans lequel les personnages évoluent. Et la fameuse scène de l’exécution de Murphy est un passage traumatisant qui n’a rien perdu de sa force.

• A l’occasion de la sortie du remake, le RoboCop de Verhoeven vient d’être édité chez Fox dans un beau blue ray en coffret métal, riche en suppléments.

 

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