Le Gentleman d’Epsom – de Gilles Grangier – 1962
Grangier, Gabin… L’association des deux a donné quelques belles réussites. Mais pas que. Eh ! Tout n’est pas à jeter dans Le Gentleman d’Epsom, qui se regarde avec un plaisir distendu, mais parfois bien réel. Mais quand même : entre un Gabin qui gabinise en roue libre, et un Michel Audiard qui s’écoute écrire des dialogues qui la ramènent, c’est un film estampillé « cinéma à papa », très anodin.
C’est d’ailleurs assez remarquable de constater que le film se termine comme il a commencé, avec des personnages qui n’ont pas changé d’un iota en cours de route, qui n’ont ni avancé, ni reculé. Le mot « fin » apparaîtrait cinq, dix, ou quinze minutes plus tôt que, franchement, ça ne ferait pas une grande différence.
Grangier, qu’on a connu nettement plus inspiré (Le Rouge est mis), se contente d’une mise en scène purement fonctionnelle, totalement au service de sa star, qu’il ne dirige pas. Mais c’est Gabin. Alors il a beau cabotiner à mort, eh bien c’est Gabin, et il assure le spectacle, dodeline en déclamant, avec une diction et une démarche nonchalantes qui donnent son rythme au film.
Et puis, peut-être parce qu’on guette, on se surprend à le trouver émouvant dans la séquence centrale avec Madeleine Robinson (très bien), grande dame et ancien amour, pour qui il joue les rupins alors qu’il vit d’escroqueries et de frimes. Soudain, face à cette incarnation d’une jeunesse disparue, un peu de fragilité apparaît, et c’est assez beau.
Beau, et furtif. Le film se concentre nettement plus sur les champs de course où sévit le « gentleman », et où le béotien peut ne pas vibrer. On se rattrape sur les seconds rôles, sympas (Paul Frankeur, Jean Lefebvre…), sur quelques moments plutôt marrants, et on oublie au passage les grimaces insupportables d’un De Funès que le film résume à une caricature de lui-même, bruitages compris dans sa première scène. Le film, de toute façon, ne vaut que par et pour Gabin.