Play it again, Sam

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Archive pour novembre, 2013

La Divorcée (The Divorcee) – de Robert Z. Leonard – 1930

Posté : 29 novembre, 2013 @ 3:48 dans 1930-1939, LEONARD Robert Z. | Pas de commentaires »

La Divorcée

Il y a une belle liberté de ton dans ce drame de mœurs, assez typique de la production hollywoodienne du début des années 30. Pas vraiment réputé pour son sens du rythme (et ici, la bande son particulièrement pauvre n’aide pas), Robert Z. Leonard signe pourtant un film réellement passionnant, portrait d’une génération qui semble hésiter constamment entre des plaisirs immédiats et vains, et des rapports aux autres plus profonds et plus sincères.

C’est très américain, bien sûr, avec une morale finalement impeccable. Mais sans faux-culterie non plus : Leonard réussit un beau portrait de couple, sur un ton remarquablement juste. La passion des premiers jours, les habitudes qui s’installent, les tromperies, la défiance, la colère, les regrets… On a déjà vu ça cent fois, mais qu’importe : Chester Morris est parfait dans le rôle du mari volage incapable d’accepter que sa femme lui rende la pareil, réjouissant symbole de l’hypocrisie des hommes. Quant à Norma Shearer, protégée d’Irving Thalberg et grande star de l’époque, elle est magnifique, trouvant le parfait équilibre entre les aspirations égalitaristes de cette femme qui fait « un métier d’homme » (un aspect pas assez développé, hélas), et son amour total pour son mari. Elle a d’ailleurs décroché le troisième Oscar de la meilleure actrice pour ce rôle.

La même justesse de ton entoure les autres personnages de cette « bande » d’amis dont l’unité vole en éclats au fur et à mesure que les couples se forment et que les drames s’enchaînent. Ainsi, celui de l’amoureux transi de Norma Shearer, contraint d’épouser une jeune femme folle de lui, mais défigurée lors d’un accident qu’il a provoqué alors qu’il était ivre. Il y a une scène bouleversante et pudique à la fois, où cette dernière le supplie de ne pas le quitter.

Chaque personnage a sa fêlure, y compris celui du « meilleur copain » qui affiche une décontraction à toute épreuve, mais qui sera pourtant celui par qui le drame va arriver. Dans ce rôle tout en légèreté apparente, Robert Montgomery cabotine gentiment, et dévore l’écran. Parfaitement aimable à première vue, mais bien plus complexe qu’il n’y paraît. Comme le film, en fait…

• Le film figure sur le volume 2 de la collection Forbidden Hollywood, consacrée aux films pre-code. Ce coffret zone 1 (avec des sous-titres français) contient d’autres pépites, notamment 3 on a match de Mervyn LeRoy et Night Nurse de William Wellman.

Le Samouraï – de Jean-Pierre Melville – 1967

Posté : 29 novembre, 2013 @ 3:40 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, MELVILLE Jean-Pierre | Pas de commentaires »

Le Samouraï

A la jeune génération qui ne voit en Alain Delon que l’incarnation du vieux réac odieux et imbus de lui-même (on se demande d’où vient cette image qui lui colle à la peau), à ceux qui se demandent comment une telle aura peut entourer l’interprète de Jules César dans un pathétique Astérix… A tous ceux-là, une vision du Samouraï s’impose. Avec ce personnage de tueur solitaire et taiseux (et avec une poignée d’autres, dont Plein Soleil et Rocco et ses frères), Delon est entré dans la légende.

Quarante-cinq ans après, on est toujours saisi par la présence sidérante de l’acteur, bloc de marbre dont le verbe est rare, mais dont le regard dit tellement sur la profonde solitude. La première séquence est inoubliable. Une chambre à peine meublée, Delon attendant allongé sur son lit, un moineau qui piaffe dans sa cage, rien d’autre qui puisse évoquer une quelconque attache… Ce Jeff Costello est une ombre, un fantôme. Un tueur à gages dont on ne saura rien du passé, des doutes ou des rêves.

Melville le filme comme un cadavre en marché. Raide, blafard, résigné. Un être tragique que la mort entoure, et qui n’essaye même pas de se raccrocher aux dernières beautés qui l’entourent : une « fiancée » prête à tout pour lui (Nathalie Delon, dans son rôle le plus marquant), et une pianiste de jazz au comportement trouble, qui a été témoin de son crime mais le couvre devant les policiers.

C’est (avec L’Armée des ombres) le chef d’œuvre de Melville. Une marche funèbre dépouillée et fascinante, qui inspirera des tas d’autres cinéastes, et tout particulièrement à Hong Kong : John Woo n’a jamais caché son admiration pour Melville, et s’inspirera du personnage de Delon pour le tueur de The Killer (qui s’appelle même Jeff) ; plus récemment, Johnnie To avait proposé à Delon le personnage principal de Vengeance (hélas interprété par Johnny), lui aussi très inspiré de Jeff Costello.

Unstoppable (id.) – de Tony Scott – 2010

Posté : 29 novembre, 2013 @ 3:37 dans 2010-2019, SCOTT Tony | Pas de commentaires »

Unstoppable

Ils sont forts ces Américains : réussir à tenir un suspense impeccable pendant deux heures avec une histoire de train incontrôlable particulièrement pauvre en rebondissements. L’histoire est vraie : un mécano a laissé filer un train chargé de matières hautement explosives, sans conducteur, qui s’est dirigé à toute allure vers une région très peuplée… Deux mécanos dont le train de marchandise se trouvait sur la ligne ont décidé de braver les ordres pour arrêter le train fou.

Mis à part une tentative malheureuse, et le dénouement, il n’y a rien de vraiment spectaculaire ici. Mais Tony Scott a un vrai talent pour filmer la moindre scène de dialogue comme une séquence d’explosion. D’où l’impression d’assister à l’un de ces films d’action non-stop, alors qu’Unstoppable vaut surtout pour son décor et ses personnages : des mécaniciens ferroviaires aux vies modestes et difficiles.

Mais qu’il filme ces gens simples (Denzel Washington et Chris Pine, impeccables mais sans surprise) confrontés à une situation exceptionnelle, ou qu’il plonge dans les affres de l’espionnage (Spy Games, son meilleur film), Tony Scott adopte toujours le même style visuel, montage syncopé et couleurs saturées. C’est à la fois la force et la limite du film : son efficacité et son manque d’originalité.

Stardust Memories (id.) – de Woody Allen – 1980

Posté : 28 novembre, 2013 @ 1:17 dans 1980-1989, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Stardust Memories

En une seule scène, muette, Woody Allen pose les bases de ce film étonnant et déroutant. Il se met en scène dans un wagon peuplé d’hommes et de femmes aux gueules improbables, êtres lugubres et angoissants qui l’oppressent tandis qu’il observe par la fenêtre les occupants d’un autre train, beaux et joyeux, mais inaccessibles (parmi lesquels une blonde apparition : Sharon Stone dans l’un de ses premiers rôles).

Avec cette première séquence, Woody Allen surprend parce que pour la première fois, il se met en scène sur un ton grave. Jusqu’à présent, même si Annie Hall et Manhattan avaient révélé la profondeur et la brillance du type, il y avait toujours en lui cet humour qui habillait tout. Ici aussi, comme dans ses deux précédents chef d’œuvre, Allen joue avec son propre passé, sa propre expérience : celle d’un artiste comique qui aspire à autre chose.

Mais cette fois, c’est un homme oppressé par sa propre vie qu’il interprète, et qu’il présente avec ces premières minutes fascinantes, sorte de cauchemar projeté sur un grand écran. Un cinéaste qui amorce un tournant psychologique pas toujours compris, encore marqué par son passé de pur comique, et entouré de fans hystériques, d’admirateurs étouffants, de cinéphiles insupportables.

Un homme qui aspire à autre chose, mais qui ne sait pas quel chemin prendre. Comme dans Manhattan, les interrogations de Sandy le cinéaste sont cristallisées autour de plusieurs femmes qu’il croit aimer : cette actrice avec qui il a eu une liaison passionnée et dont l’image le hante (Charlotte Rampling), cette mère de famille simple et posée (Marie-Christine Barrault) ou cette jeune admiratrice belle mais dominée par ses démons.

Mais cette fois, le ton est radicalement différent. Woody Allen renoue avec le noir et blanc, mais avec une image beaucoup plus âpre et granuleuse. L’humour, même s’il n’est pas totalement absent comme dans Intérieurs, n’est plus qu’une façade à laquelle même le personnage d’Allen semble ne plus croire.

C’est de l’introspection, et une réflexion cynique et grave sur la création et le monde du cinéma. Des thèmes loin d’être uniques dans la filmographie de Woody Allen.

Quai d’Orsay – de Bertrand Tavernier – 2013

Posté : 28 novembre, 2013 @ 1:13 dans 2010-2019, TAVERNIER Bertrand | Pas de commentaires »

Quai d'Orsay

Thierry Lhermitte en ministre des Affaires étrangères inspiré de Villepin, personnage un peu grotesque et caricatural, vieux beau qui brasse de l’air au point de provoquer des tornades dès qu’il ouvre une porte… La première impression est pour le moins mitigée : l’humour est un peu lourd et franchement pas très drôle.

Mais rapidement, il se passe quelque chose d’assez magique : Tavernier réussit à imposer une atmosphère, une ambiance, et un ton. Au final, sa première vraie comédie (depuis Que la fête commence en tout cas) est une bulle de légèreté qui trouve l’équilibre parfait entre le comique et l’intelligence. Ses personnages sont grotesques ? Ils gagnent vraiment à être connus, et révèlent une profondeur et une aura qu’on ne leur soupçonnait pas.

Lhermitte en premier, double pour de rire mais génial de Villepin, qui trouve son meilleur rôle depuis dix ans. Et rappelle en passant que sa carrière est quand même majoritairement un vaste gâchis : bien dirigé, l’ex-Splendid est un comédien formidable, capable d’incarner le privé cynique et tragique d’Une affaire privée, aussi bien que de donner une vraie dimension à cette curieuse bête politique.

Tavernier est toujours impeccable quand il s’agit de diriger des comédiens. Autour de Lhermitte et de Raphaël Personnaz, les seconds rôles sont épatants, à commencer par Niels Arestrup, en éminence grise d’un calme absolu, qui gère les plus grandes crises, pique des micro-siestes, et s’amuse des manies de son ministre de patron.

Adapté d’une bande dessinée à succès, le film part du fameux discours de Villepin à l’ONU, sommet de sa carrière et de sa gloire dont le scénario fait le point de mire de toute cette histoire. Ce Villepin d’opérette au nom impossible (Alexandre Taillard de Worms) n’est que le symbole visible du ministère des Affaires étrangères, étrange jungle où se côtoient conseillers, directeur et chef de cabinet, et des dizaines de personnes qui se renvoient la balle à longueur de journée. Une sorte de dédale kafakaesque absurde et incompréhensible, que le héros, jeune homme plein de talent engagé pour « s’occuper du langage », découvre ce fourmillement avec un regard d’abord incrédule.

La force du film est d’adopter le point de vue de ce néophyte de l’ombre. Pas strictement en le mettant constamment au centre de l’action (le ministre interprété par Lhermitte est le vrai cœur de l’histoire), mais en variant le ton du film au fur et à mesure qu’Arthur trouve ses marques dans ce microcosme étonnant.

Le résultat est un film léger et intelligent, qui joue habilement avec l’image que l’on a de la politique et de l’incompétence présumée de ceux qui nous dirigent, avec ce que l’on sait de Villepin et de son expérience au quai d’Orsay, et avec les codes de la bande dessinée. Assez brillant, en fait.

Manhattan (id.) – de Woody Allen – 1979

Posté : 27 novembre, 2013 @ 8:40 dans 1970-1979, ALLEN Woody | 1 commentaire »

Manhattan

Isaac, 42 ans, a deux ex-femmes, un gamin élevé par un couple de femmes, une maîtresse de 17 ans, et un meilleur ami à la femme parfaite, qui entretient une liaison avec une jeune femme dont Isaac a une première impression catastrophique… Isaac est surtout un New-Yorkais totalement incapable de vivre ailleurs que dans cette ville qu’il aime, et pour qui la seule idée d’ailleurs représente une rupture inimaginable.

Deux ans après Annie Hall, Woody Allen retrouve un esprit similaire (mais dans un noir et blanc amoureux), mélange d’humour et d’introspection parsemé de clins d’oeils et de références à ses modèles que sont Ingmar Bergman, Groucho Marx ou W.C. Fields. Manhattan est souvent considéré comme le sommet du cinéma allenien. C’est en tout cas un chef d’œuvre absolu.

En trois films seulement, Woody Allen est devenu un immense cinéaste. L’ancien gagman qui avait fait ses armes sur grand écran avec des comédies marquées par un humour à sketchs souvent irrésistible, mais limité sur le plan cinématographique, s’est mué en un réalisateur délicat et profond, sans rien perdre de sa personnalité et de son humour.

Woody Allen semble se livrer comme jamais dans ce film qui reprend pourtant les mêmes recettes que celles d’Annie Hall. Mais cette fois, l’humour est un peu en retrait au profit d’une authenticité et d’une émotion aussi discrète que profonde. On rit, souvent : le dialoguiste Woody Allen est toujours aussi inspiré (notamment lorsqu’il s’inquiète parce que ses couples « ne durent jamais plus longtemps que celui d’Adolf Hitler et Eva Braun »). Son personnage ne change pas. Mais cette fois, le sujet est moins sa manière de tourner en dérision ses névroses et ses angoisses, que sa fascination et son amour pour cette ville gigantesque qu’il filme comme un décor familier : le théâtre de sa vie.

Il y a bien sûr ce plan, le plus célèbre de tout son cinéma, montrant Woody Allen et Diane Keaton sur un banc sous le pont de l’East River Mais ce n’est qu’une vision parmi d’autres, peut-être la plus stéréotypée (même si magnifique). Central Park, les musées, les bars, le vin, les rues trop fréquentées, les appartements trop bruyants, les rencontres au squash… Manhattan est un chant d’amour à New York Chant, peut-être le plus bel hommage d’un cinéaste à « sa » ville. New York a pourtant été filmée plus souvent qu’aucune autre. Mais jamais comme ici, jamais avec le même regard, avec la même ferveur, la même intimité. Une ville magique ? Un film magique et indispensable, en tout cas.

World War Z (id.) – de Marc Forster – 2013

Posté : 27 novembre, 2013 @ 8:37 dans 2010-2019, FANTASTIQUE/SF, FORSTER Marc | Pas de commentaires »

World War Z

Enorme succès de cet été (un peu surprise, la production du film ayant été cahotique), World War Z est, devinez quoi : un film apocalyptique. Pas bien étonnant dans le climat hollywoodien actuel où, quand on ne décline pas son manuel du super-héros à toutes les sauces, on détruit le monde. La recette est éprouvée, et donne encore lieu à de belles surprises : il y a quelques mois seulement, Tom Cruise était ainsi le héros d’un Oblivion très réjouissant.

Adaptation d’un roman graphique à succès, World War Z s’inscrit dans une autre mouvance : celle du film de destruction massive, dont le fleuron reste un autre film avec Tom Cruise, l’extraordinaire La Guerre des Mondes. Tout ça pour dire que le principal reproche qu’on peut faire au film repose sur l’inévitable comparaison avec le chef d’œuvre absolu de Spielberg.

La première partie, surtout, est rigoureusement identique. Brad Pitt (dont c’est le plus gros succès à ce jour) est un père de famille qui assiste au déclenchement de l’apocalypse, et ne pense qu’à la survie des siens. Cette fois, pas de tripodes, ni d’invasion extraterrestre, de rayons mortels ; mais un virus qui se répand d’homme à homme comme l’éclair, transformant les victimes en morts vivants. En quelques jours, le monde entier est touché, la plupart des grandes villes sont mortes, et les survivants, de plus en plus rares, se regroupent dans des camps de réfugiés très vulnérables. Seuls les plus indispensables d’entre eux trouvent une place sur les navires de guerre qui deviennent le nouveau centre du monde libre…

C’est peut-être le plus réussi dans ce film : la manière dont il met en scène le cynisme de ce monde libre, et de montrer comment les talents deviennent des pions entre les mains des dirigeants. Le personnage de Brad Pitt est de ceux-là. Contrairement à Tom Cruise dans La Guerre des mondes, il n’est pas qu’un simple père ballotté par les événements, mais un ancien baroudeur de l’ONU que l’on force à reprendre du service.

Marc Forster (le réalisateur du James Bond le plus mal aimé de ces dernières années, Quantum of Solace) a multiplié les conflits avec les producteurs durant le tournage (il ne sera d’ailleurs pas aux manettes des deux suites déjà annoncées). Il réussit en tout cas quelques grands moments de cinéma où suspense et émotions sont étroitement liés : une course nocturne et effrénée sur un tarmac d’aéroport ; Brad Pitt marchant tranquillement au milieu d’une horde de zombies ; un avion en vol qui semble être un éphémère havre de paix, mais où les zombies apparaissent soudainement…

Mais à côté de ça, il massacre à peu près toutes les grandes scènes démesurées. Et c’est là que la comparaison avec le film de Spielberg est la plus cruelle : jamais Forster ne parvient à faire ressentir la cruauté de cette irruption de la violence et de la mort dans le quotidien. Quant aux morts-vivants en marche, ils évoquent d’avantage les armées maléfiques du Retour du Roi que des corps humains dévorés par la rage.

World War Z est à certains moments un film fort et réussi, et à d’autres un gros machin boursouflé. Mais ce premier volet de ce qu’on annonce déjà comme une trilogie pose des bases pleines de promesses. A condition que le successeur de Marc Forster ait une autre envergure.

• Le DVD du film vient de sortir chez Paramount.

Intérieurs (Interiors) – de Woody Allen – 1978

Posté : 27 novembre, 2013 @ 8:31 dans 1970-1979, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Intérieurs

Dans Annie Hall, son film précédent, Woody Allen assumait enfin sa vraie personnalité de cinéaste, et posait les bases de toute son œuvre à venir. Comme si cette révélation lui donnait une confiance nouvelle, Allen délaisse pour la première fois la comédie, pour un homme appuyé à l’un de ses maîtres, le grand Ingmar Bergman. Le résultat est surprenant : pas le moindre humour dans ce film parfois pesant, où les lieux (appartements de ville ou villa en bord de mer) semblent peser sur les personnages par tout ce qu’ils représentent de souvenirs.

Pour la première fois aussi, Woody Allen l’acteur s’éclipse, au profit de comédiens moins marqués par la comédie. Mais la marque du cinéaste est bien là : son goût pour l’introspection, et pour ces histoires de couples forcément éphémères.

Mais cette fois, c’est sur le mode sérieux, avec un rythme volontairement languide, qu’Allen aborde ces thèmes. L’histoire est bergmanienne en diable : trois jeunes femmes, trois sœurs qui tentent de trouver leur place (dans la culture, pour toutes : la comédie pour l’une, la poésie pour la deuxième, la photographie pour la troisième) et d’assumer leur propre vie, alors que leur mère est en pleine dépression depuis que leur père l’a quittée.

Le thème est bergmanien, mais il y a dans le personnage de la mère, interprétée par une vaporeuse Geraldine Page, quelque chose de la future Cate Blanchett de Blue Jasmine : même incapacité, pathétique et déchirante, d’affronter la solitude et la séparation.

C’est aussi un film sur le deuil de l’enfance. Le mariage du père (E.G. Marshall) avec sa nouvelle compagne, ressemble à l’enterrement des derniers vestiges de l’enfance et de son innocence. Avec une image presque caricaturale : celle où la belle-mère insuffle littéralement la vie à l’une des filles, tandis que la mère disparaît. Pas hyper délicat, mais très émouvant.

Qu’importe l’imagerie, à la limite de la parodie bergmanienne (curieusement, les vraies parodies du cinéma de Bergman reprendront souvent les cadres imaginés par Woody Allen) : avec ce film étonnamment austère, mais d’où émane une émotion déchirante

Gravity (id.) – d’Alfonso Cuaron – 2013

Posté : 27 novembre, 2013 @ 1:05 dans 2010-2019, CUARON Alfonso | Pas de commentaires »

Gravity

Bon, alors ? ça donne quoi, le film événement de cette fin d’année, celui devant lequel se pâme toute la critique américaine ? Sur le fond, pas grand-chose : le film est un survival assez classique dans sa manière d’enchaîner les rebondissements et de faire se succéder des étapes bien définies. Grosso modo : les passages successifs d’une station spatiale à l’autre… Remplacez l’espace par une jungle ou tout autre environnement hostile, et vous aurez une histoire déjà vu des tas de fois au cinéma.

Egalement scénariste, Cuaron ajoute aussi une réflexion sur le deuil pas très convaincante, mais aussi sur la volonté de vivre plus forte que tout. L’évocation de cette fille disparue n’apporte pas grand-chose d’autre qu’un supplément de larmes faciles.

Mais la forme, elle, est à tomber par terre. La virtuosité de Cuaron, qui avait déjà fait de ses Fils de l’homme le meilleur film de science-fiction de la décennie précédente, est ici le sujet-même de Gravity : sa raison d’être et son principal enjeu. Cuaron a d’ailleurs consacré plus de quatre ans à la préparation de ce film, pour trouver de nouvelles manières de filmer l’espace et l’apesanteur.

Le résultat est bluffant et inédit, et pas seulement en 3D (j’ai vu le film en 2D). La sensation d’être soi-même en apesanteur est totale, grâce aux mouvements d’une caméra qui semble elle-même n’être tributaire d’aucun effet de pesanteur.

Les images sont absolument sublimes, et le rythme parfait : pas une seconde de baisse de régime ne vient apporter une quelconque trêve au spectateur, qui vit une expérience de cinéma totale et sans précédent, perdant ses repères, retenant son souffle, se lançant dans une valse désespérée avec George Clooney (très bien) et Sandra Bullock, qui trouve, sans mal, son rôle le plus fort à ce jour.

Evasion (Escape Plan) – de Mikael Hafström – 2013

Posté : 27 novembre, 2013 @ 1:02 dans 2010-2019, HAFSTRÖM Mikael, STALLONE Sylvester | Pas de commentaires »

Evasion

Cette rencontre, les ados des années 80 et 90 l’attendaient depuis longtemps. Stallone et Schwarzenegger, les deux messieurs muscles de notre jeunesse, ceux qu’on ne cessait d’opposer dans les cours de récré, dont on comparait les styles et les carrières. Moi, j’ai toujours eu un faible pour le créateur de Rocky qui, dans ses meilleurs films, a toujours su insuffler un petit parfum de nostalgie. Mais j’aimais aussi l’interprète de Predator et de Total Recall, fantasme absolu du cinéma d’action, avec son corps de bande dessinée…

Alors ne comptez pas sur moi pour évaluer Evasion sur des bases objectives, comme s’il était interprété par, disons Vin Diesel et Jason Statham. Si ça avait été le cas, j’aurais sans doute écrit qu’Evasion est un film d’évasion qui rappelle tous les films d’évasion (Stallone lui-même a déjà donné dans le genre, avec Haute Sécurité et Tango et Cash), un gros machin plutôt efficace mais qui ne trouve jamais son originalité, ou sa raison d’être.

Mais voilà, ce ne sont pas n’importes quelles stars : Sly et Schwarzie, qui se sont déjà croisés sur les deux premiers Expendables où ce dernier faisait quelques apparitions clin d’œil, mais qui partagent pour la première fois la tête d’affiche. A vrai dire, Stallone est toujours la vraie star du film : Arnold n’apparaît qu’après un bon quart d’heure, et disparaît avant la fin du film. Mais ces deux-là sont la principale (la seule ?) raison d’être de ce film dont ils sont aussi les meilleurs atouts.

Même si la prison dont ils doivent s’évader est high tech (assez laide), même si l’histoire se complique avec une sombre machination (dont on se moque totalement), et même si on croise quelques seconds rôles prestigieux (Sam Neill, Jim Caviezel, Vincent d’Onofrio, ou le rappeur 50 Cent), le film n’existe que pour les face-à-face entre les deux stars. Celles-ci tiennent plutôt leurs promesses, chacun jouant sa partition avec un plaisir apparent de se donner la réplique.

Les deux s’échangent des vannes un peu lourdes et pas très drôles. Schwarzenegger séduit avec son habituelle auto-dérision, qui a toujours compensé son jeu très limité. Il prend aussi brièvement une autre dimension, et dévoile une personnalité qu’on ne lui connaissait pas, lorsqu’il feint la folie en hurlant en allemand… Stallone, lui, joue beaucoup plus « premier degré », serrant les mâchoires et encaissant les coups.

Ce serait hypocrite de dire qu’on est déçu par cette première rencontre au sommet, dont on n’attendait pas mieux. On imagine seulement ce que cela aurait pu donner vingt ans plus tôt, avec un autre réalisateur…

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