Mad Dog and Glory (id.) – de John McNaughton – 1993
Mad Dog and Glory fait partie de ces films qui, sur le papier, ne frappent pas vraiment l’esprit, mais pour lesquels une sorte de miracle s’est produit. Tout, absolument tout, fonctionne parfaitement dans cet OVNI qui n’est ni vraiment un polar, ni totalement une comédie, qui fait passer en trois secondes du rire le plus franc aux larmes les plus… humides.
DeNiro en flic… Rien de bien original a priori. Mais ce flic-là est un type transparent, un homme sans envergure, conscient de sa médiocrité, qui rêve à sa fenêtre du grand amour et regrette de ne pas être le grand flic héroïque et burné qu’il fantasme devant sa télé. Un solitaire qui passe à côté de sa vie et s’en rend parfaitement compte. Jusqu’à ce qu’il rencontre un faux comique mais vrai parrain de la mafia (Bill Murray, formidable) à qui il sauve la vie et qui lui offre la compagnie d’une jeune femme qu’il a sous sa coupe, Uma Thurman…
On n’attendait pas John McNaughton dans un tel registre : le réalisateur venait de se faire remarquer avec le fameux Henry, portrait of a serial killer, plongée glauque et hyper réaliste dans le mental d’un tueur en série. Le ton, ici, est radicalement différent. Pas vraiment léger : les trois personnages principaux sont tous confrontés à la brutalité et à l’hostilité du monde qui les entoure (chacun à sa manière), et la violence est bien réelle, dès la séquence d’ouverture. Mais on a là d’authentique innocents plongés dans un univers qui ne leur correspond pas. Même Bill Murray, finalement, qui finit par lancer un « regarde qui sont mes associés ! » qui en dit long sur sa propre solitude…
Surtout, perdus au beau milieu d’une faune de machos trop virils (voir la bagarre d’anthologie entre David Caruso et Mike Starr – « attention à la fenêtre en verre ! »), le couple Uma Thurman – Bob De Niro est absolument irrésistible. Et McNaughton parvient à saisir l’incroyable alchimie entre ces deux solitudes, notamment lors d’une séquence d’une fraîcheur bouleversante, celle de la première étreinte. D’abord gênée (« j’ai besoin de faire de l’exercice – Maintenant ? – Non, en général »), puis simplement maladroite. Mais d’une beauté réellement rare, bouleversant…