Ben-Hur (id.) – de William Wyler – 1959
Soirée grand classique, avec cette giga-production qui reste le recordman du nombre d’Oscars (avec Titanic et Le Seigneur des Anneaux)… et dont les séquences d’action restent autrement plus impressionnantes que celles du Retour du Roi, étouffées par les effets numériques. En 1959, bien sûr, chaque figurant à l’écran est véritablement un figurant sur le plateau. Et pour certaines scènes, ça devait faire un sacré plateau.
Surtout, il y a cette fameuse course de chars, si souvent copiée (jusque dans Star Wars I), long moment de bravoure qui est l’un des points de convergences du film (l’autre étant le chemin de croix de Jésus). Comment qualifier cette scène des chars?… En un mot, disons : incroyable. Pour elle seule, la vision de ce film-fleuve de plus de 3h30 se justifierait, tant elle est impressionnante.
On ne peut qu’imaginer la vision et le travail de préparation qu’il a fallut pour réussir une séquence aussi longue, aussi spectaculaire, et aussi dense émotionnellement. Et elle reste, 65 ans après, un chef d’œuvre d’intensité, avec une caméra virtuose mais jamais gratuitement, qui filme à la fois la puissance des chars et des chevaux qui les tirent, et les visages des acteurs au cœur de l’action.
Cette séquence est la partie immergée d’un immense iceberg (encore que dans la chaleur étouffante de la Judée, l’image n’est peut-être pas la plus judicieuse). Parce que Ben-Hur est un film particulièrement touffu, et ambitieux, qui raconte dans le même mouvement l’affrontement de deux amis d’enfance devenus ennemis farouches, et l’opposition du peuple juif et de l’oppresseur romain, à l’époque de Jésus.
Le roman de Lewis Wallace dont le film est l’adaptation s’appelle d’ailleurs Ben-Hur : a tale of the Christ. Ce qui peut faire craindre aux indécrottables athées comme moi une grosse production prosélyte comme Hollywood a su en faire. On n’en est pas loin à de brefs moments (la scène d’ouverture avec l’étoile du berger qui s’allume comme un phare, ou le miracle final). Mais pour l’essentiel, le film évite habilement toute religiosité pour dépeindre un pays oppressé, qui trouve l’espoir dans la parole d’un prêcheur très convaincant.
Mieux que ça : le propos de Ben-Hur reste terriblement d’actualité, à plus d’un titre, dressant le constat d’une humanité qui est quand même rudement douée pour gâcher les belles choses. Comme les amitiés fraternelles, en l’occurrence, le cœur du film : cet affrontement si terrible et absurde entre Ben-Hur et Messala, Charlton Heston (dans son rôle le plus iconique) et Stephen Boyd (dans son rôle le plus célèbre), deux amis d’enfance si proches séparés par la marche du monde.
Ben-Hur reste un film parfaitement efficace, et souvent très beau. Il y a bien quelques moments pesants, dus pour l’essentiel à une volonté d’étaler à l’écran les gigantesques moyens à disposition, et qui auraient gagnés à être plus resserrés, plus modestes. Mais Wyler sait tirer de beaux moments intimes des innombrables morceaux de bravoure, ne s’éloignant jamais de ce qui est au cœur du film : l’humanité.