Manchester by the sea (id.) – de Kenneth Lonergan – 2016
Il y a quelques jours, j’écrivais tout le mal que je pensais de l’Oscar attribué à Leonardo Di Caprio en 2016. Eh bien son successeur a droit, lui, à toute mon admiration (il doit être heureux, ça vaut un Oscar, ça). Casey Affleck, donc, acteur constamment formidable depuis L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford (Robert Ford, c’était lui), un peu l’antithèse de son frangin Ben (qui l’a d’ailleurs fort bien dirigé dans Gone Baby Gone), qui réussit là l’une des compositions les plus intenses et les plus bouleversantes de ces dernières années.
Pas facile, pourtant, ce personnage qui ne se dévoile que par bribes et lentement au cours du film. Un personnage solitaire et fermé aux autres, cassant et bagarreur, incapable de se lier, incapable même de pleurer la mort d’un frère… Un type pas aimable, pas causant, pas agréable à regarder. Et il faut du temps pour pénétrer cette armure. Non pas qu’il baisse la garde, mais le réalisateur nous en livre les clés avec parcimonie, révélant peu à peu des torrents de douleur.
Manchester by the Sea est un vrai mélo, dont je ne livrerai aucune clé ici : c’est avec l’esprit vierge qu’il faut s’abandonner à cette dérive magnifique, à cet impossible retour à la vie, aux tentatives courageuses et désespérées d’être là. Pour mieux être submergé par l’émotion qui arrive par vagues (de vrais tsunamis, même), pour ne plus jamais se retirer. Et quand je dis jamais… J’écris ces lignes bien 10 jours après avoir vu le film, et l’émotion est toujours là, profondément ancrée.
Ce n’est pas quelque chose que j’écris souvent pour des films récents, mais Manchester by the Sea est un chef d’œuvre. Kenneth Lonergan réussit un pari fort : nous plonger dans l’état d’esprit de cet homme dont, au départ, on ne sait rien. Nous faire ressentir cette douloureuse langueur, et ces fulgurants accès de pure émotion, comme lors de cette rencontre entre Casey et son ex jouée par Michelle Williams, l’un des moments les plus déchirants de ces… allez, 20 dernières années.
Et puis je m’arrête là parce que rien qu’à imaginer cette scène, l’émotion revient en trombes. C’est malin tient…