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Archive pour la catégorie 'CLAIR René'

La Proie du vent – de René Clair – 1926

Posté : 8 novembre, 2023 @ 8:00 dans 1920-1929, CLAIR René, FILMS MUETS, VANEL Charles | Pas de commentaires »

La Proie du vent

Voilà un film parfait pour illustrer la manière dont la mise en scène peut transcender un sujet. Celui de La Proie du vent aurait pu accoucher d’une petite chose anodine et sans grande conséquence. René Clair en fait un modèle de virtuosité, un film profondément immersif qui fait de la vitesse et de l’action les motifs principaux.

Le film intrigue dès les premières minutes, qui narrent deux histoires sans rapport apparent en séquences parallèles. D’une part, les voyages d’un aviateur à qui est confié le soin d’ouvrir une nouvelle ligne commerciale. D’autre part, le désespoir d’une jeune femme jetée au fond d’un cachot avec sa mère mourante, dans un pays d’Europe de l’Est en pleine révolution. Ce n’est pas la Russie mais un pays imaginaire du nom de « Libanie », mais l’ombre de la Révolution de 1917 plane : le film est produit par Albatros, la compagnie des Russes blancs installés à Paris.

Bref. Comment donc ces deux intrigues vont-elles se rencontrer ? Par le biais d’un atterrissage forcé dans le parc d’un château au cœur d’une immense forêt, épisode trop beau pour être vraiment vrai, surtout que l’aviateur (Charles Vanel, la gueule d’un mec sur le point de faire de grosses bêtises) tombe amoureux de la maîtresse des lieux, amour qui semble réciproque, et lui aussi trop beau pour être vrai.

Ce qui compte, ce n’est pas tant l’histoire, dont on voit arriver le rebondissement gros comme une maison mais ce que fait René Clair des séquences de suspense, ou d’action. Les scènes aérienne d’abord, réalisées avec l’aide d’Albert Préjean, qui se contente de jouer les figurants entre deux réglages de séquences spectaculaires vues du ciel. Et plus encore les moments de doutes et de tensions, dont Clair fait des morceaux de bravoure qui nous plongent dans les interrogations de son héros.

Une scène, notamment, impressionne. Celle où Vanel observe derrière sa fenêtre le rai de lumière de la chambre d’en face, derrière lequel son cerveau rongé par la jalousie imagine le pire des scénarios. Ou cette pseudo-course poursuite d’une virtuosité assez dingue, où tout est vitesse et intensité. C’est brillant, jamais gratuit, toujours au service non de l’intrigue, mais de l’impression : avec ce film, René Clair semble déjà avoir tout compris au langage cinématographique, comme art de créer de la sensation.

C’est arrivé demain (It happened tomorrow) – de René Clair – 1944

Posté : 18 juin, 2022 @ 8:00 dans 1940-1949, CLAIR René, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

C'est arrivé demain

Alors qu’il s’apprête à fêter ses Noces d’Or, un vieux couple se remémore les événements incroyables qui leur sont arrivés bien des années plus tôt. Lui n’était qu’un tout jeune journaliste en ce XIXe siècle qui tirait à sa fin… Un jour, devant un vieil archiviste un peu étrange, il émit le rêve de connaître d’avance ce qu’il allait survenir. Le lendemain matin, il découvrit dans sa poche le journal du lendemain…

De cette histoire assez géniale, René Clair a tiré un petit bijou, plein de vie et de dynamisme. Un modèle de rythme et d’inventivité, qui trouve son apogée lorsque le héros lit dans le journal sa propre mort dans un hôtel. Dick Powell (formidable) déploie alors des tonnes d’énergie pour ne pas être là où il doit mourir. Sûr d’être invincible tant qu’il n’est pas dans cet hôtel, il se lance dans une course-poursuite extraordinaire, dans les rues, sur les toits… puis dans le hall de l’hôtel. C’est drôle, filant de gentils frissons amusés.

Dans le même registre, Clair réussit une bien amusante séquence de courses hippiques, où le héros se désespère de gagner immanquablement, parce que ses pari infaillibles confirment l’inéluctabilité de ce qu’il lit dans le journal, donc de sa propre mort.

Le charme immense du film vient surtout de la construction en un long flash-back, qui ajoute à cette histoire qui parle du futur proche un petit sentiment paradoxal de nostalgie. Et une vraie légèreté, puisqu’on sait d’emblée que cinquante ans d’amour attendent les deux jeunes héros.

Linda Darnell est charmante (et très vite très amoureuse), Jack Oakie est joyeusement grotesque, John Phillibert est attachant en « ange gardien »… A leur image, il règne sur le film une bienveillance et une grande tendresse. Voilà ce qu’on appelle un feel-good movie.

Entr’acte – de René Clair – 1924

Posté : 20 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1920-1929, CLAIR René, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Entr'acte

Une danseuse à barbe, un canon qui se place seul, des hommes et des femmes en grands habits qui courent après un corbillard, un tir aux pigeons sur les toits de Paris, un mort qui sort de son cercueil pour faire disparaître les personnages les uns après les autres…

Les spectateurs de 1924 ont découvert René Clair avec ce court métrage tourné après Paris qui dort, mais sorti avant. Vraie curiosité, premier film à avoir été projeté dans le cadre d’un ballet, Relâche, spectacle dadaïste co-écrit par Francis Picabia, également scénariste de ce court métrage surréaliste.

Clair jour avec le pouvoir de l’image avec, déjà, une vraie maîtrise, utilisation des surimpressions, des plans renversés, des ralentis, et le montage comme l’art de confronter des images sans liens et de leur donner, si ce n’est un sens, au moins un effet.

Dans ce Paris où toutes les situations semblent sorties ou dérivées d’une fête foraine, Erik Satie (le compositeur) et Picabia bondissent (littéralement) autour d’un canon, Marcel Duchamp et Man Ray jouent aux échecs. Clair, lui, joue avec les images, avec une belle liberté.

Paris qui dort – de René Clair – 1923-1925

Posté : 19 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1920-1929, CLAIR René, FANTASTIQUE/SF, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Paris qui dort

Premier film tourné par René Clair (mais sorti après Entr’acte), Paris qui dort est à la fois une petite chose, et une merveille. Petite chose, parce que cette histoire d’un Paris plongé dans la léthargie par un mystérieux rayon n’est pas très profonde. Une merveille parce que Clair utilise ce postulat pour filmer Paris comme personne avant lui.

Paris, ville de mouvement, transformée par la magie du cinéma en un décor endormi, au charme décuplé. Surtout, Clair articule son film, et son décor, autour de la Tour Eiffel, au sommet de laquelle le personnage principal se réveille comme l’unique Parisien rescapé.

Au sommet de la Tour, Clair signe les plus belles scènes du film, faisant de cette intrigue improbable une fable autour d’une poignée de personnages, comme autant de symboles de l’humanité, tendance mesquine. Superbes images de la tour et de Paris qui l’entoure, avec ces poutres qui s’entremêlent comme les barreaux d’une cage, ou comme une aire de jeu fantasmée.

De cette fable, l’humanité ne sort pas vraiment grandie. Les « survivants » ont tout le temps et tout l’espace dont ils peuvent rêver, et en profitent pour amasser une fortune (forcément inutile), batifoler dans un bassin ou se battre, moins pour les beaux yeux de l’unique femme que par désœuvrement, ou par une sorte d’instinct masculin primaire.

Sous bien des aspects, Paris qui dort annonce Sous les toits de Paris, son premier film parlant. Ce premier film révèle en tout cas la personnalité de René Clair. Sa manière de filmer la ville, poétique et percutante, reste très moderne, et impressionnante.

Sous les toits de Paris – de René Clair – 1930

Posté : 5 mars, 2020 @ 8:00 dans 1930-1939, CLAIR René | Pas de commentaires »

Sous les toits de Paris

Trois hommes se disputent les faveurs d’une jeune paumée dans un quartier populaire de Paris… Pour son premier film parlant, René Clair fait le choix de la simplicité et de la sobriété côté histoire : pas de grande intrigue, pas non plus de grands enjeux, juste des rencontres, des attirances, des affrontements…

On est en 1930, année où le cinéma français hésite souvent entre muet tardif et parlant trop parlant. Clair, lui, fait le pari d’éviter soigneusement tous les pièges de cette nouvelle technologie encore bafouillante. Loin du théâtre filmé, il privilégie au contraire les grands mouvements de caméra qui mettent en valeur de spectaculaires décors, et la verticalité des lieux.

Dès le premier plan, et jusqu’au tout dernier, Clair s’attache à filmer la ville aussi bien horizontalement, avec les dédales des ruelles, que verticalement, avec ces façades et ces escaliers qui, toujours, témoignent d’une vie sur plusieurs étages. Des mouvements de caméra qui tranchent radicalement avec la simplicité du propos.

Clair choisit aussi de privilégier la musique aux dialogues. Ce sont les chansons que l’on chante dans les rues, ou les musiques que l’on passe sur des tourne-disques dans les appartements, qui font avancer l’histoire. Le personnage principal, joué par Albert Préjean, est d’ailleurs un chanteur de rues que l’on découvre chantant « Sous les toits de Paris » au cœur de ce quartier qui sera le lieu principal de l’histoire.

Clair filme longuement ces chansons, alors qu’il expédie les dialogues, la plupart étant même muets (sans cartons). Choix audacieux qui concentre toute l’attention sur l’aspect visuel du film. Une réussite.

Dans ce film qui oscille constamment entre gravité et légèreté, il y a notamment une scène de bagarre nocturne particulièrement saisissante, où la brutalité du moment est soulignée par la présence d’un train dont on ne perçoit que le bruit assourdissant et la lumière aveuglante, mais qu’on ne voit jamais vraiment. Une belle démonstration de la manière dont René Clair maîtrise le langage cinématographique. Toute la réussite du film réside dans cette maîtrise.

Le Silence est d’or – de René Clair – 1947

Posté : 29 juin, 2013 @ 8:17 dans 1940-1949, CLAIR René | Pas de commentaires »

Le Silence est d’or – de René Clair – 1947 dans 1940-1949 le-silence-est-dor

En adaptant (très librement) L’Ecole des femmes, René Clair signe un charmant chant d’amour à un cinéma disparu, autant qu’à une époque révolue. Mieux, tourné au lendemain de la guerre (c’est son premier film en France après son retour des Etats-Unis), le film évoque avec tendresse et passion un Paris encore innocent, où tout n’est que légèreté, pas encore abîmé par l’occupation. On est alors dans les premiers temps du cinéma, avant même la Grande Guerre…

Maurice Chevalier, formidable et débarrassé de ses tics habituels, est un réalisateur qui enchaîne les tournages… et les conquêtes féminines. Vieillissant, il vit la même vie qu’à 20 ans, jusqu’à sa rencontre avec la fille de celle qui fut son seul authentique amour, dont il tombe amoureux.

Seul problème (si on excepte le fait qu’elle pourrait être sa fille naturelle) : la jeune femme est séduite par le jeune protégé du réalisateur (joué par un tout jeune François Périer), tiraillé entre son amour pour la fraîche provinciale et sa loyauté pour celui à qui il doit tout, et qui le considère comme un fils de substitution.

Le triangle amoureux est ici d’une belle complexité, contrarié par de potentiels rapports parent-enfant qui renforce l’amertume de cette lourde sensation du temps qui passe. Comédie légère et enlevée, Le Silence est d’or est aussi un film marqué par le poids du temps, de la nostalgie, et des rendez-vous manqués.

Il y a là une superbe reconstitution d’une époque disparue (et des plateaux effervescents du cinéma primitif), où la légèreté et la nostalgie ne sont jamais loin. Le ton est celui d’une comédie, et on rit franchement devant la gaieté apparente des personnages, et grâce aux effets inattendus de l’amour naissant sur les tournages et l’harmonie de ce microcosme.

Mais il y a dans le regard de Chevalier, vieux beau attachant, un début de nostalgie très émouvant : ce type vieillissant qui réalise peu à peu que sa jeunesse est derrière lui, est franchement touchant. D’autant plus qu’on imagine facilement le parallèle que fait René Clair avec le cinéma de sa propre jeunesse

Mais la jeunesse est un état d’esprit : le personnage de Maurice Chevalier s’en convaincra après s’être pris une belle claque. Comme Clair qui commence avec ce film une nouvelle carrière à succès en France. Nostalgique et tourné vers le passé, Le Silence est d’or est aussi une œuvre ouverte sur l’avenir…

La Belle ensorceleuse (The Flame of New Orleans) – de René Clair – 1941

Posté : 19 janvier, 2012 @ 7:06 dans 1940-1949, CLAIR René, DIETRICH Marlene | Pas de commentaires »

La belle ensorceleuse

Premier film américain de René Clair (après un passage en Angleterre où il a notamment réalisé l’excellent Fantômes à vendre), The Flame of New Orleans est une légèreté enthousiasmante, qui s’apparente à une savoureuse bulle de bière (comme les films de Lubitsch ressemblent à des bulles de champagne). Un film qui affiche clairement la couleur dès la première scène, avec une voix off qui enlève d’emblée toute velléité de se prendre au sérieux. C’est un pur spectacle que Clair signe avec sa première réalisation hollywoodienne, et l’unique recherché est le plaisir du spectateur.

Pari totalement réussi : on prend un plaisir fou à suivre les aventures de cette fausse comtesse qui tente de se faire épouser par un riche homme d’affaires (Roland Young) dans la Nouvelle Orléans du milieu du XIXème siècle, tout en tombant amoureuse d’un aventurier sans le sou (Bruce Cabot, le héros de King Kong). Parce que Clair donne à son film un souffle d’insouciance qui n’est pas si courant, et qui fait mouche. Et parce que la belle ensorceleuse qui donne son titre français au film est interprétée par Marlene Dietrich, qui se fait visiblement elle-même plaisir avec ce rôle de manipulatrice qui tombe dans le piège du romantisme.

Le film est parfois émouvant (lorsque l’aventurier nettoie son bateau pour accueillir la belle dont il est tombé amoureux), parfois impressionnant (le « duel » qui se termine bien entre les deux prétendants), parfois à suspense (la filature dans la nuit)… Mais c’est toujours une grande légèreté qui domine, et un humour ravageur qui fonctionne parfaitement bien. Il ne faut pas s’attendre à être surpris par l’histoire : les personnages sont très classiques, et on sait d’emblée comment le film se terminera. Mais on s’en moque bien : seul compte le plaisir de cette bluette réjouissante.

Il y a, quand même, une belle idée de scénario : pour ne pas que son « fiancé » découvre son passé trouble (ce n’est pas dit clairement, bien sûr, mais elle a sans doute vendu ses charmes en Russie), la belle s’invente une cousine qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau (forcément) mais qui traîne dans les bouges les plus mal famés… L’occasion pour Marlene de livrer une interprétation mémorable, souvent proche de la caricature mais toujours dans le ton du film.

Dès ses premiers pas, René Clair tire le meilleur du système hollywoodien. Tournant intégralement en studio (dans de très beaux décors d’intérieurs, et surtout de rues), avec des acteurs habitués des productions américaines (notamment d’excellents seconds rôles, comme le fordien Andy Devine), Clair pose son empreinte sur chaque plan de cette petite fantaisie sans prétention, mais tellement plaisante…

 

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