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Archive pour la catégorie 'FARROW John'

Un pacte avec le diable (Alias Nick Beal) – de John Farrow – 1949

Posté : 23 juillet, 2020 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, FANTASTIQUE/SF, FARROW John | Pas de commentaires »

Un pacte avec le diable

Un film noir qui s’annonce comme relativement classique, et qui glisse lentement vers le fantastique, devant une sorte de version moderne du mythe de Faust… Pas si courant, et en l’occurrence enthousiasmant, pour la manière dont John Farrow s’approprie ce double genre du film noir et du pacte avec le diable.

Farrow… Grand réalisateur mésestimé dont chaque découverte depuis The Big Clock confirme qu’il est un cinéaste majeur. Et méconnu, donc. C’est flagrant dans Alias Nick Beal, où il crée une tension énorme, dans des séquences hyper stylisées et en même temps totalement ancrées dans une réalité parfois poisseuse.

Les scènes qui se déroulent sur les docks, surtout, décors minimalistes et miséreux baignés de brume, que Farrow filme avec une caméra légèrement penchée, sont de grands moments où l’extrême réalisme et le mystère le plus déstabilisant sont intimement liés. Toutes les figures habituelles du film noir sont là : corruption, femme fatale, suspense, rachat… La manière dont Farrow y insuffle une touche de fantastique est d’une précision et d’une efficacité totales.

Thomas Mitchell est parfait en procureur intègre qui accepte une petite compromission, qui ouvre la porte à d’autres, symbole qui pourrait être caricatural de l’homme détruit par l’ambition. Mais non, rien de caricatural. Au contraire, il y a dans ce film une justesse totale, à la fois dans les relations de Mitchell avec sa femme, ou dans le portrait de cette jeune paumée tentée par le luxe facile, que joue Audrey Totter.

Le personnage joué par Ray Milland, le fameux « alias Nick Beal », est forcément plus casse-gueule. Il est glaçant ! Le jeu légèrement outré de Milland, ses apparitions systématiquement fantomatiques (sortant de l’ombre d’un autre personnage, d’un rideau, d’un recoin…), sont inoubliables. Parti pris assez audacieux pour un très grand acteur.

Sorority House (id.) – de John Farrow – 1939

Posté : 11 novembre, 2018 @ 8:00 dans 1930-1939, FARROW John, LAKE Veronica | Pas de commentaires »

Sorority House

Sororité, en bon français, signifie quelque chose comme « communauté de femmes », ou « solidarité entre femmes ». Merci Google. En anglais, c’est donc la même chose, et le savoir permet de comprendre que le titre, étrange, a un rapport très direct avec ce qui se passe à l’écran.

C’est donc l’histoire d’une jeune fille qui part à l’université grâce aux sacrifices financiers de son père, brave épicier dans une petite ville tranquille. Arrivée à la fac, elle découvre une micro-société qui entièrement autour des clubs d’étudiantes, les « sorority houses » du titre, donc. Elle découvre aussi l’obsession des nouvelles arrivantes pour y être admises.

C’est une petite chose, qui flirte souvent avec un sujet plus grave : on se dit qu’à force de se sacrifier pour sa fille, il va lui arriver des malheurs, à ce brave père veuf et aimant. Mais non : Sorority House reste léger et optimiste, une petite chose fort sympathique, à laquelle le bon John Farrow donne le rythme qu’il faut. Sans faire partie des grands piliers du cinéma hollywoodien de l’époque, Farrow déçoit quand même rarement.

Et il fallait bien un cinéaste aussi talentueux que lui pour donner du relief à cette histoire cousue de fil blanc, et pleine de bons sentiments : une fois convenu que rien de dramatique ne va se produire (il y a pourtant quelques occasions), on voit bien où tout ça nous mène. Mais on a beau ne jamais être surpris par quoi que ce soit, on a beau trouver la morale du bon papa très… américaine, eh bien on fond quand même devant cette jolie histoire d’apprentissage.

Du bon sentiment ? Des beaux sentiments en tout cas, et une bienveillance parfaitement charmante, et séduisante. Et puis il y a quand même quelques moments mémorables de pure mise en scène, à commencer par la première rencontre entre la jeune héroïne et le beau gosse du campus, avec des trouvailles visuelles autour d’une échelle rétractable que n’auraient pas reniées les grands du cinéma muet.

Et, au passage, un couple de cinéma sans aspérité, mais tout mignon : Anne Sirley, une ancienne enfant star qui fut l’une des Alice de Disney, et que l’on a quand même vue dans City Girl de Murnau, Liliom de Borzage ou Steamboat round the bend de Ford… tout ça avant ses 17 ans ; et James Ellison, le Buffalo Bill qui n’était qu’un second rôle dans Une aventure de Buffalo Bill de De Mille.

Montagne rouge (Red Mountain) – de William Dieterle (et John Farrow) – 1951

Posté : 1 mars, 2018 @ 8:00 dans 1950-1959, DIETERLE William, FARROW John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Montagne rouge

Des tas de bonnes idées, quelques très beaux moments, un scénario bancal et des dialogues impossibles. Ce western imparfait a au moins le mérite de l’originalité. Pas dans les dialogues, donc, qui accumulent les poncifs et les grandes tirades patriotiques. Pas non plus pour la psychologie des personnages, franchement discutables. Mais pour les situations inattendues et une certaine ambition dans la mise en scène.

Le film renouvelle ainsi le thème éternel de la rivalité amoureuse. Lisbeth Scott est ainsi ballottée entre son fiancé Arthur Kennedy et celui qui est à la source de leurs ennuis : Alan Ladd. Ce dernier brouille les pistes, dans la première partie. Après avoir sauvé Kennedy du lynchage, on découvre qu’il est le responsable du meurtre pour lequel son nouveau compagnon a été condamné sans procès. Avant d’apprendre qu’il est un soldat sudiste sur le point de rejoindre la bande sanguinaire de Quantrill (joué par John Ireland).

Toujours impec, Ladd forme un beau duo antagoniste avec Arthur Kennedy (acteur parfait), constamment sur le point de s’entre-tuer, mais dont on devine l’amitié qui aurait pu les lier s’il n’y avait cette violence omniprésente… et la belle Lisbeth entre eux. Toute la première partie joue constamment sur le renversement des situations : l’un passe de sauveur à geôlier, l’autre de la reconnaissance à la haine… Et puis il y a Lisbeth Scott, donc, femme forte qui a bien des égards domine l’action, loin des personnages habituels de femmes dans les westerns.

Hondo, l’homme du désert (Hondo) – de John Farrow – 1953

Posté : 6 novembre, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, BOND Ward, FARROW John, WAYNE John, WESTERNS | Pas de commentaires »

Hondo

Plein de belles idées dans ce western porté par un Duke hyper charismatique, à commencer par un ton : une sorte de nostalgie, mais sans la moindre once de contemplation. La dernière réplique du film résume bien cette approche : « C’est la fin d’un mode de vie. – Oui, et c’est dommage, c’était un beau mode de vie. » prononcé par un John Wayne qui ne prend pas même le temps de s’arrêter pour y repenser. Il est temps de regarder droit devant…

Il y a des blancs, des Indiens, des affrontements sanglants. Mais pourtant, il y a une vraie bienveillance dans ce film qui, à l’image du personnage métis de Wayne, respecte et admire même les deux modes de vie, celui des Indiens et celui des blancs, renvoyés dos à dos pour la violence de leurs luttes respectives.

Film engagé ? Non, mais regard lucide d’un cinéaste qui préfère les zones troubles à un manichéisme de parti-pris… Un cinéaste qui filme la violence sans complaisance, mais avec un vrai sens du spectaculaire : l’efficacité purement hollywoodienne n’est en rien sacrifiée à l’intelligence du regard.

Mais le plus réussi, ce sont les séquences intimes. Et elles sont nombreuses, en particulier dans le premier tiers du film, qui se résume à une sorte de huis-clos dans un ranch à la frontière du désert, avec uniquement trois personnages. Étonnant, et d’une grande justesse, d’autant plus que les personnages sont atypique.

L’apparition de John Wayne d’abord, l’air hagard et dangereux, laisse planer le doute sur la nature du personnage. Surtout, sa relation avec la débutante Géraldine Page, dont le physique loin des canons de beauté hollywoodien apporte une troublante vérité, est magnifique.

Il y a aussi, au milieu d’une mise en scène parfois un peu anonyme, quelques plans splendides. Parfois très fugitifs, comme ce gros plan de Wayne se découpant dans la nuit, avec une lumière chaleureuse qui prend, quelques secondes durant, des allures très fordiennes.

Le Saint contre-attaque (The Saint strikes back) – de John Farrow – 1939

Posté : 17 février, 2016 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1930-1939, FARROW John | Pas de commentaires »

Le Saint contre-attaque

Deuxième « Saint » de la série produite par la RKO, et déjà le héros imaginé par Leslie Charteris change de visage. Après Louis Hayward, qui campait un Simon Templar ténébreux et inquiétant dans Le Saint à New York, c’est George Sanders qui enfile le costume de l’aventurier, ce qu’il fera dans quatre autres films jusqu’en 1941 (les deux derniers films de la série étant interprétés par Hugh Sinclair).

Aux antipodes de Hayward, Georges Sanders… fait du George Sanders. Suave et débonnaire, perpétuellement détendu et élégant, l’accent aristocratique et l’humour british, Templar n’est plus tout à fait le tueur implacable qu’il était dans le précédent film, même s’il conserve une aura de danger : Sanders rend palpable la menace derrière ses manières distinguées.

Le ton du film est à l’avenant. Nettement moins violent et sombre que le premier film, The Saint strikes back se résume pour l’essentiel à un savant jeu du chat et de la souris entre Simon Templar, la police, les vrais méchants et les faux méchants… Avec surtout de réjouissants face à face entre le héros et son éternel ami-adversaire, l’inspecteur Fernack, toujours interprété par John Hale.

La présence derrière la caméra de John Farrow, réalisateur de l’excellent La Grande Horloge, laissait espérer le meilleur pour ce deuxième film. Mais sa mise en scène ne fait pas vraiment d’éclat, si ce n’est dans la séquence d’ouverture, modèle de suspense et d’efficacité dans un dancing bondé où l’action se met en place quasiment sans un mot. La suite, qui se voit avec un certain plaisir, est plus anodine…

La Grande horloge (The Big Clock) – de John Farrow – 1948

Posté : 10 novembre, 2015 @ 6:59 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, FARROW John | Pas de commentaires »

La Grande horloge

Un reporter spécialiste des faits divers est chargé par son patron d’enquêter sur la mort d’une jeune femme. Mais le tout puissant patron, qui était l’amant de la victime, est le meurtrier, et entend bien faire porter le chapeau à un autre: un mystérieux inconnu qui a rencontré la jeune femme quelques heures avant sa mort. Ce qu’il ignore, c’est que cet inconnu n’est autre que le journaliste lui-même, forcé de donner le change au fur et à mesure que sa propre enquête resserre l’étau autour de lui…

Quarante ans plus tard, un remake plutôt pas mal transposera cette histoire assez fidèlement dans le décor du Pentagone (Sens unique, avec Kevin Costner et Gene Hackman). Mais sans égaler ce chef d’oeuvre de suspense, aussi irrésistible pour son intrigue génialement retorse que pour l’élégance et l’efficacité de sa mise en scène.

Sur un scénario de John Lattimer, à qui on doit déjà le formidable La Clé de verre ainsi que Ils ne voudront pas me croire, dont le script était déjà excellent, John Farrow signe sans doute son meilleur film, une véritable merveille narrative.

Hitchcockien sur le fond, Langien sur la forme, The Big Clock est un chef d’œuvre géométrique, qui évoque constamment une sorte de spirale infernale et sans issue, et dont la mise en scène élégante semble ne rien laisser au hasard.

Rien à jeter dans ce film noir qui procure un plaisir immense vision après vision. Charles Laughton, qui en fait des tonnes comme souvent, est savoureux. Ray Milland rappelle une nouvelle fois qu’il est un acteur intense et fin. Et les seconds rôles sont excellents : Maureen O’Sullivan (Mme Farrow à la ville), le racé George Macready… et surtout l’excentrique Elsa Lanchester, l’inoubliable Fiancée de Frankenstein, inoubliable dans son rôle d’artiste peintre totalement décalée.

Quels seront les cinq ? (Five came back) – de John Farrow – 1939

Posté : 27 août, 2012 @ 10:36 dans 1930-1939, CARRADINE John, FARROW John | Pas de commentaires »

Quels seront les cinq ? (Five came back) - de John Farrow - 1939 dans 1930-1939 quels-seront-les-cinq

Voilà un petit trésor méconnu, signé par l’excellent John Farrow, futur réal du noir La Grande horloge et de Wake Island, joyau du film de guerre. Ici, ce cinéaste touche-à-tout plonge au cœur de ce qui ressemble bien à un pur film d’aventures comme Hollywood les aime. Un avion transportant douze personnages s’écrase au cœur de la forêt amazonienne. Les rescapés s’organisent pour survivre en attendant que les réparations nécessaires au départ soient faites.

Mais le cadre du film d’aventures n’est qu’un prétexte, comme la menace sourde et invisible des Indiens coupeurs de tête qui habitent la région, et la nécessité de ne choisir que cinq passagers pour repartir, ne sont que des catalyseurs pour révéler les individus tels qu’ils sont vraiment. Dans ce Koh Lantah reconstitué en studio, les rapports de force traditionnels se retrouvent bouleversés, les conventions ne servent plus à rien, puissants et modestes se retrouvent à égalité, et les actes deviennent soudain plus importants que les origines sociales.

Pour que le thème soit le plus efficace possible, les scénaristes (dont Dalton Trumbo, bien avant la Liste Noire, et alors qu’il venait d’écrire son roman Johnny s’en va-t-en guerre, qu’il adaptera trente ans plus tard) ont choisi de réunir des types très marqués : un couple âgé, un milliardaire et sa secrétaire sur le point de se marier, une jeune femme de petite vertu, un veuf bougon, un dragueur un peu lourd, un flic colérique, un criminel repenti, un enfant de 10 ans, une petite frappe au grand cœur… Une galerie un peu caricaturale, certes, mais qui se révèle aussi attachante qu’efficace.

D’autant que Farrow filme avec pas mal de nuances et d’intelligence les changements qui s’opèrent (en bien ou en mal) dans le comportement et les rapports de ces naufragés. Cette femme peu respectable à qui on ne laisse pas même le droit de consoler l’enfant en pleur finira par être appelée « tante Peggy ». A l’inverse, ce milliardaire charmant et attentionné révélera sa médiocrité et son égoïsme dans l’adversité.

C’est d’ailleurs la partie centrale du film qui est la plus passionnante. La plus calme, aussi (après un crash un peu kitsch) : c’est le moment où tous réapprennent à vivre dans ce qui n’est pas loin de ressembler à une société idéale, débarrasser des conventions et des tracas du quotidien.

On a le droit de trouver ça naïf, mais la fin du film, brutale et cruelle, arrive pour signaler que, non, les auteurs du film ne sont pas dupes. Ce rêve de société idéale n’est qu’une chimère…

Fini de rire (His kind of woman) – de John Farrow (et Richard Fleischer) – 1951

Posté : 13 août, 2012 @ 6:31 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, FARROW John, FLEISCHER Richard, MITCHUM Robert | 2 commentaires »

Fini de rire

Curieux film noir, très réjouissant, que signe là l’excellent John Farrow (La Grande Horloge, autre très grande réussite du genre). Un film dont Richard Fleischer a signé quelques scènes, et qui, dès les premières minutes, semble bien parti pour être le parfait prototype du genre noir. Pourtant, Farrow n’arrêtera pas de prendre des chemins de traverse…

L’immense Bob Mitchum, joueur taiseux, plongé malgré lui dans une histoire cauchemardesque : voilà qui nous mène en terrain connu, tant ce personnage résume des tas d’autres vus au cours des années précédentes. Ici, il est choisi par une bande de malfrats pour servir de « modèle » à un gangster exilé (Raymond Burr), qui veut changer d’identité et de visage pour pouvoir rentrer aux Etats-Unis, où il est interdit de séjour. Mais Bob ne sait pas pourquoi on lui donne tout cet argent. Il ignore tout des noirs desseins de ses commanditaires lorsqu’il accepte d’aller attendre un mystérieux interlocuteur au Mexique.

Attendre : il passera la moitié du métrage à attendre que l’action se mette en place, tentant de comprendre ce qu’on attend de lui en côtoyant les pensionnaires du village de bungalows où on l’a amené. Une heure durant, Farrow sort de l’ornière du film noir, rompt avec la sécheresse et l’aspect brut du genre, dont les grandes figures sont pourtant respectées.

Mitchum parle peu, ne pose pas de question, mais il observe. Ces vacanciers aux petits secrets sans gravité, ces hommes d’affaire qui semblent louchent, mais qui se contentent de s’ennuyer. Il tombe amoureux aussi, de Jane Russell (on le comprend : c’est la femme du producteur Howard Hughes, et elle est à tomber), chanteuse au passé plein de mystères venue là pour rejoindre son acteur hollywoodien d’amant.

L’acteur, c’est Vincent Price, génial dans un rôle à contre-emploi et totalement inattendu dans un tel film. Son personnage fait glisser le film noir vers la comédie la plus débridée. Bientôt, le couple Jane Russell / Robert Mitchum (pourtant les deux grandes stars de la RKO à l’époque) passent au second plan. Le vrai héros du film, c’est Price, héros de pacotille qui rêve de tomber le masque et de devenir un héros pour de bon.

Au-delà de la caricature, il ira au bout de ses rêves dans un triomphe irrésistible (dans tous les sens du terme), devant un Mitchum rigolard et une Jane Russell au sourire ravageur, qui semblent autant que nous s’amuser de la prestation de Price.

Voyage sans retour (Where danger lives) – de John Farrow – 1950

Posté : 23 avril, 2012 @ 9:38 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, FARROW John, MITCHUM Robert | Pas de commentaires »

Voyage sans retour

Après des chef d’œuvre comme Feux croisés (Edward Dmytryk) ou La Griffe du passé (Jacques Tourneur), ce Voyage sans retour fait figure d’œuvre mineure dans la longue liste des films noirs interprétés par Bob Mitchum. Et c’est vrai qu’on est loin de la mécanique diabolique du film de Dmytryk ou du pouvoir de fascination absolu de celui de Tourneur. Pourtant, on prend un plaisir fou à voir ce petit film de genre pas franchement crédible (Mitchum en chirurgien ? mouais…), mais diablement bien réalisé par un John Farrow à qui on doit quelques grandes réussites du genre (La Grande Horloge, chef d’œuvre avec Ray Milland, ou Fini de rire pour lequel il retrouvera Mitchum l’année suivante).

C’est du pur film noir, et Mitchum est l’anti-héros type : un jeune chirurgien fiancé avec une infirmière douce et aimante (Maureen O’Sullivan, la Jane de Tarzan, la femme de Farrow, et la mère de Mia), qui se laisse prendre au piège d’une de ses patientes, une jeune femme bien belle (Faith Domergue), mais visiblement dérangée. Il la rencontre alors qu’elle a essayé de se suicider ; il comprend trop tard que celui qu’elle présente comme son père (Claude Rains, dans son éternel emploi de cocu digne) est en fait son mari ; ce dernier meurt alors que Bob vient de le laisser seul avec son épouse… Mais non, notre héros n’imagine pas que sa belle a peut-être un grain. Pire, il se laisse persuader que c’est lui qui a causé la mort de Rains…

Alors les voilà tous deux sur les routes, persuadés d’être poursuivis par toutes les polices. Mitchum, l’homme fort et viril par excellence, est la victime de cette vamp aux yeux renversants. Plus surprenant : il est une victime incroyablement passive. Il suffirait d’un rien  de jugeotte pour qu’il se sauve de ce piège, mais non, il plonge. Comme s’il fuyait inconsciemment cette vie bien rangée et toute tracée qui l’attendait, cette fiancée trop gentille, tellement gentille qu’elle lui pardonnera tout sans la moindre scène, alors qu’il mérite au moins une bonne trempe…

Le fameux art de ne rien faire de Mitchum trouve ici une logique toute nouvelle : ce personnage en apparence typique du genre révèle en effet peu à peu une absence de personnalité que la passivité de l’acteur rend fascinante. Embarqué par la belle, ballotté par les hasards des rencontres, Bob traverse de nombreuses petites épreuves qui nous plongent au cœur de l’Amérique profonde, des garagistes roublards, des shérifs trop contents d’avoir une « affaire » à régler, des communautés trop entreprenantes… Ce voyage sans retour est une véritable odyssée américaine.

 

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