J’ai tué Jesse James (I shot Jesse James) – de Samuel Fuller – 1949
Scénariste sous contrat, Fuller passe derrière la caméra avec ce western, nouvelle variation autour de l’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford (pour reprendre le titre du beau film d’Andrew Dominik, bien plus tard). Dès ce premier film, Fuller marque sa singularité, en faisant de ce film de genre le portrait d’un type plutôt névrosé.
Comme le titre le laisse entendre, le film commence (presque) par là où la plupart des autres se terminent : par la mort du célèbre bandit, tué dans le dos par un ami en qui il avait toute confiance, chez lui, alors qu’il remettait d’aplomb un tableau accroché au mur. Ce geste, Ford l’a fait ni par haine, ni pour l’appât du gain, mais pour retrouver sa liberté, et pouvoir épouser la femme qu’il aime.
Sauf que cet assassinat va tout changer pour lui. Lâche, névrosé… et naïf : Ford ne comprend pas le poids de son acte, sur tous ceux qui l’entourent, y compris cette femme qu’il pense épouser. John Ireland, pour une fois dans un premier rôle, est étonnant dans ce rôle trouble et complexe.
Fuller met en scène bien d’autres personnages, mais c’est lui qui le fascine, sans aucun doute possible. Sans oublier de glisser quelques bagarres joliment filmées, très percutantes, le jeune réalisateur privilégie la psychologie, les gros plans du visage de plus en plus torturé de Ireland. Il y a notamment un passage très fort, lorsque Ford monte sur scène pour rejouer devant les spectateurs l’acte terrible qui l’a rendu célèbre. Une scène pivot saisissante, qui révèle déjà la patte d’un grand cinéaste.