Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour février, 2013

Les Affameurs (Bend of the River) – d’Anthony Mann – 1952

Posté : 28 février, 2013 @ 4:20 dans 1950-1959, MANN Anthony, STEWART James, WESTERNS | Pas de commentaires »

Les Affameurs (Bend of the River) - d'Anthony Mann - 1952 dans 1950-1959 les-affameurs

Encore une merveille signée Anthony Mann. Ce western à la fois intime et à grand spectacle résume admirablement tout ce qu’a apporté le cinéaste à un genre qui lui a bien réussi, de Winchester 73 à La Ruée vers l’Ouest en passant par quelques chefs d’œuvre.

Dans Les Affameurs, on retrouve James Stewart bien sûr, une nouvelle fois admirable en cow-boy au passé trouble, tiraillé entre ses démons et ses idéaux. On retrouve aussi l’utilisation exceptionnellement précise des décors (naturels) : comme dans L’Appât, chaque élément du décor semble avoir une utilité, chaque caillou, chaque souche, chaque colline. La nature, omniprésente, est un personnage à part entière de l’histoire, à la fois accueillante (le fleuve qui offre un réconfort bienvenu à la troupe) et menaçante (la montagne qui domine constamment l’action, promesse d’une rencontre à hauts risques au sommet)…

Stewart est un ancien pillard qui ne rêve que d’une vie de fermier, et qui guide une caravane de colons à travers le pays. Après une pause à Portland, ville calme et accueillante où ils commandent des vivres pour l’hiver, ils continuent leur route et s’installent. Mais l’hiver arrive, et pas les vivres. Stewart retourne à Portland réclamer son dû, et trouve une ville au visage radicalement transformé par la découverte d’or dans la région.

Des portraits d’hommes et de femmes passionnants, des relations humaines complexes et sans concession… Bend of the River est un film d’une richesse assez rare. En moins d’une heure et demi, Mann nous fait passer d’une bluette légère et charmante à un film d’une noirceur abyssale. En fil conducteur : l’amitié de Stewart et Arthur Kennedy, deux êtres qui partagent le même passé, et qui se comprennent sans un mot (la manière dont chacun réagit à l’évocation du nom de l’autre, lors de leur rencontre, en dit plus que tous les dialogues qui suivent sur le passé de ces deux-là), qui partagent les mêmes idéaux, les mêmes façons de faire, mais qui ne feront pas les mêmes choix.

Pas la moindre baisse de rythme dans ce chef d’œuvre qui fait le lien entre tous les westerns de Mann.

La Femme au Gardenia (The Blue Gardenia) – de Fritz Lang – 1953

Posté : 26 février, 2013 @ 2:06 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, LANG Fritz | Pas de commentaires »

La Femme au Gardenia (The Blue Gardenia) – de Fritz Lang – 1953 dans * Films noirs (1935-1959) la-femme-au-gardenia

Lang a mis une nouvelle fois toutes ses obsessions dans ce petit film noir passionnant, qui évoque deux paires de films jumeaux : La Rue Rouge et La Femme au portrait d’un côté, pour la manière dont la personne la plus innocente du monde peut être amenée à commettre un crime ; La Cinquième Victime et L’Invraisemblable Vérité de l’autre, pour le cynisme avec lequel il évoque le monde de la presse américaine… Dans La Femme au Gardenia, le cinéaste semble faire un résumé de tout ce qui est au cœur de tant de ses films.

Celui-ci est clairement divisé en deux parties, à peu près égales. La première concerne le long processus qui conduit au crime : une jeune femme romantique sans problème qui, parce qu’elle a eu une grande déception amoureuse, accepte l’invitation d’un séducteur très entreprenant (Raymond Burr, excellent dans un rôle plus nuancé que ses éternels gros durs)… qui se révèlera trop entreprenant. On imagine la suite : on l’a vue des centaines de fois. En faisant du séducteur un artiste peintre, Lang dresse (volontairement ?) un nouveau pont avec l’œuvre d’Hitchcock : difficile de ne pas penser à la même scène dans Chantage.

La seconde partie est plus cruelle, plus cynique. Le personnage principal devient alors un journaliste (Richard Conte) qui tend la main à la mystérieuse meurtrière, prêt à lui sortir n’importe quel boniment et à la livrer à la police pour s’assurer un gros titre. Pas plus que dans ses deux derniers films américains, qu’il tournera avec Dana Andrews, Lang ne se fait d’illusion sur les grands devoirs de la presse.

Il y a une rupture de ton marquante entre ces deux parties, qui forment pourtant un tout d’une remarquable cohérence. L’évolution du personnage d’Anne Baxter, le cauchemar dans lequel elle se jette presque délibérément avant de s’y débattre désespérément, correspondent exactement avec l’état d’esprit dans lequel nous plonge le film.

Le rebondissement final, sans doute une concession faite au studio, fait cependant perdre de sa force au film. Lang, cette fois, donne l’impression d’avoir eu peur de son sujet, qui méritait sans doute une approche plus extrême. Celle qu’il adoptera dans Beyond a reasonable doubt et While the City sleeps le sera bien davantage. Reste que ce Blue Gardenia est une œuvre noire prenante et intelligente, comme on les aime.

Blade 2 (id.) – de Guillermo Del Toro – 2002

Posté : 26 février, 2013 @ 11:52 dans 2000-2009, DEL TORO Guillermo, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Blade 2 (id.) – de Guillermo Del Toro – 2002 dans 2000-2009 blade-2

Le premier Blade était plutôt sympathique. Con et bourré de clichés, mais sympathique. Guillermo Del Toro, réalisateur autrement plus inspiré que Stephen Norrington, donne clairement une autre dimension à cette première séquelle, qui n’est pas beaucoup plus intelligente que l’original, mais qui est visuellement autrement plus ambitieuse.

L’univers du cinéaste, mélange de bande dessinée et de film noir, donne une autre dimension à cette guerre des vampires. Son film alterne sans temps mort les moments de bravoure, avec un sens du cadre et de la couleur qui manque trop souvent dans le grand cinéma d’action hollywoodien.

Wesley Snipes, comédien vraiment impossible, n’a pas le beau rôle. Incapable de nuancer son jeu autrement que par des coups de tatane¸ il est souvent délaissé par le cinéaste au profit de seconds rôles plus charismatiques. A commencer par Ron Perlman, l’acteur fétiche de Del Toro, gueule improbable qui a droit aux plus beaux plans du film. Impressionnant, drôle et grotesque à la fois.

Dès la toute première scène du film, la marque du cinéaste est clairement visible : sa banque du sang évoque furieusement l’imagerie nazie qui revient dans la plupart de ses films, du cartoonesque Hellboy au sublime L’Echine du Diable.

Blade 2, tout de même, n’est pas au niveau de ces deux références. La faute à un scénar toujours aussi con (Blade fait désormais équipe avec les vampires pour lutter contre un être encore plus dangereux ; Kris Kristofferson, tué dans le premier volet, ressuscite mystérieusement…) et à quelques choix de mise en scène plutôt discutables : une poignée de bastons qui semblent tout droit sortis d’un jeu vidéo des années 90.

Del Toro est nettement plus inspiré lorsqu’il filme des personnages en attente, où des atmosphères nocturnes inquiétantes. De toute façon, comparée au précédent, cette suite est une merveille.

L’Etrange Incident (The Ox-Bow Incident) – de William A. Wellman – 1943

Posté : 25 février, 2013 @ 6:49 dans 1940-1949, WELLMAN William A., WESTERNS | Pas de commentaires »

L'Etrange incident

Sept ans plus tôt, Fritz Lang avait fait ses débuts à Hollywood avec Furie, chef d’œuvre absolu qui dépeignait avec réalisme et cynisme les comportements les plus extrêmes d’une foule, jusqu’au lynchage. Une référence instantanée, difficilement égalable. Et pourtant, avec une économie de moyen impressionnante, Wellman signe lui aussi un immense chef d’œuvre, plus fort encore, peut-être, que le film de Lang.

Le parti-pris est, en tout cas, plus jusqu’au-boutiste : Wellman parle de la foule ? Il n’en sortira jamais, tout son film se déroule à hauteur d’homme, à l’intérieur de ce groupe qui se forme pour rattraper et pendre ceux que la communauté soupçonne d’avoir tué l’un des leurs.

Wellman ne choisit pas la facilité : son western, passées les premières apparences, ne possède aucune des caractéristiques habituelles du genre. Ni héros, ni vrai méchant. Ni grande chevauchée sauvage (la seule cavalcade se solde par un accident stupide et une rencontre inattendue et sans conséquence entre deux anciens amants), ni menace extérieure.

Non, le film ne sort jamais de ce groupe d’homme, dont il observe au plus près les réactions, les doutes, les passions, les colères. Celui qui ressemble le plus à un héros, joué par Henry Fonda, est un type brut de décoffrage au passé un peu trouble, qui ne se fait aucune illusion sur la culpabilité des types qu’ils vont lyncher, ou sur son propre héroïsme : s’il suit le mouvement, c’est par peur d’avoir l’air suspect et de se retrouver à la place de ceux qui vont se balancer au bout d’une corde.

C’est son point de vue que Wellman adopte : celui d’un type foncièrement bon, mais vaguement lâche, qui n’élève la voix, par intermittence, que pour se donner bonne conscience. La surprise, l’hébétement, les peurs des « victimes » (Dana Andrews, Anthony Quinn et Francis Ford), observées de l’extérieur, n’en sont que plus troublantes, et plus effrayantes. C’est aussi ce qui rend le film aussi bouleversant : l’approche terriblement humaine et « normale » de ce lynchage terrifiant. Et le fait que personne, et surtout pas les plus véhéments des lyncheurs, n’en sortira indemne.

The Ox-Bow Incident est presque une aberration dans la production hollywoodienne : son sujet, cruel et insupportable, est traité sans que rien ne vienne adoucir le propos. C’est un chef d’œuvre absolu, qui n’a rien perdu de sa puissance…

Total Recall, Mémoire programmée (Total Recall) – de Len Wiseman – 2012

Posté : 25 février, 2013 @ 6:45 dans 2010-2019, FANTASTIQUE/SF, WISEMAN Len | Pas de commentaires »

Total Recall, Mémoire programmée (Total Recall) – de Len Wiseman – 2012 dans 2010-2019 total-recall

Le film de Paul Verhoeven, tout en restant un chef d’œuvre de la SF, a comme beaucoup de classiques du genre, pris un sérieux coup de vieux, avec ses trouvailles futuristes qui paraissent aujourd’hui bien ringardes. L’idée d’en faire un remake était donc loin d’être une aberration.

Len Wiseman, l’excellent réalisateur de Die Hard 4, fait le travail de fort belle manière. Dans la première moitié, surtout, où le cinéaste nous offre une vision du futur qui n’est pas sans rappeler Blade Runner. A vrai dire, la comparaison est même incontournable, tant le film reprend une grande partie de l’imagerie du film de Scott. La mégalopole avec ses rues grouillantes et baignées de pluie, où l’Asiatique semble le type dominant : on s’attendrait presque à y croiser Harrison Ford mangeant des pâtes chinoises… Quelques plans sont même des copiés-collés de Blade Runner ? Pas si étonnant : le film était, comme Total Recall, adapté de l’œuvre de Philip K. Dick.

Le principal problème, cela dit, c’est que le film de Wiseman est trop plein de références. La poursuite en voiture ressemble étrangement à celle de Minority Report (d’après Dick, également), les extérieurs rappellent le film de Ridley Scott, certains intérieurs citent Star Wars (la trilogie originale), tandis que l’armée de robots évoque les Sith de la deuxième trilogie. Surtout, tout en se démarquant nettement du film de Verhoeven, Wiseman, en homme peu avisé  (jeu de mot bilingue), multiplie les références à son modèle. C’est sympathique une fois (« si je ne suis pas moi, bordel, qui je suis »), deux fois (l’apparition de la femme, sosie du déguisement de Schwarzenegger, à la douane), mais à partir de trois fois (le bras coupé dans l’ascenseur), la comparaison devient trop systématique, à tel point qu’on attend tous les grands moments du film original, dont certains (« considère ça comme un divorce ») ne viennent pas.

Il y a pourtant de très belles choses dans le film, en particulier une utilisation exceptionnelle de décors exceptionnels. Dans la première grande confrontation entre Doug Quaid et sa « femme » surtout, morceau de bravoure ahurissant, où le plus petit élément du gigantesque décor semble avoir son utilité. Wiseman règle en maître une séquence d’action en trois dimensions (sans la 3D), ainsi que dans la scène de la poursuite en voiture, et celle plus impressionnante encore des ascenseurs. L’utilisation de l’espace y est magistrale.

Hélas, dans la seconde moitié, le film se transforme en un blockbuster explosif assez boursouflé et sans grand intérêt. A tel point qu’on finit par se moquer de la course en avant d’un Colin Farrel pourtant très à l’aise dans l’univers de Philip K. Dick (il avait trouvé l’un de ses premiers rôles marquants dans Minority Report) et dans son emploi d’action hero.

A trop vouloir marquer son respect pour les précédentes adaptations de Dick, et à trop vouloir respecter les codes de la surenchère hollywoodienne, Wiseman manque sa cible. Dommage, parce qu’il y a dans certaines scènes une ambition et une maîtrise qui étaient pleines de promesses.

Jason Bourne : l’héritage (The Bourne Legacy) – de Tony Gilroy – 2012

Posté : 25 février, 2013 @ 6:35 dans 2010-2019, GILROY Tony | Pas de commentaires »

Jason Bourne : l’héritage (The Bourne Legacy) – de Tony Gilroy – 2012 dans 2010-2019 jason-bourne-lheritage

On ne prend pas tout à fait les mêmes, mais on continue bel et bien. Ce quatrième « Bourne » n’a peut-être pas Jason Bourne pour héros (il est toujours porté disparu, depuis la fin du troisième film), mais son ombre plane indubitablement sur ce faux reboot. L’intrigue commence même au milieu de celle du troisième film : peu avant l’assassinat du journaliste dans la gare de Waterloo, étonnant choix de scénariste qui fait se chevaucher les deux films, plaçant l’histoire d’Aaron Cross, le super-espion interprété ici par Jeremy Renner, en parallèle avec celle de Bourne.

C’est d’ailleurs l’une des rares originalités du scénario. Passé derrière la caméra, Tony Gilroy, qui avait déjà écrit les précédents films de la saga, semble cette fois s’être entièrement concentré sur la mise en scène, au détriment d’un scénario jamais vraiment crédible, qui se résume à un simple survival, et se contente de revisiter les grands moments de la première trilogie.

L’apogée du film, une poursuite sur les toits d’un quartier populaire des Philippines, ressemble ainsi étrangement à celle de La Vengeance…, où Matt Damon sautait de toit en toit dans une séquence à couper le souffle. Portée par l’intense Jeremy Renner, cette nouvelle scène n’a pas à rougir de la comparaison. Le seul problème, c’est justement que la comparaison est incontournable.

L’autre faiblesse du film, par rapport aux trois précédents, c’est l’absence de Jason Bourne. Aaron Cross a beau être interprété par un Jeremy Renner absolument parfait (l’acteur a ce mélange d’humanité et de menace nécessaire au personnage), il n’est rien de plus qu’un espion poursuivi par ses anciens employeurs qui veulent sa mort. Il n’a pas les fêlures et la culpabilité de Bourne.

Mais on ne s’ennuie pas un instant… En tout cas pas après la première demi-heure. Si on se moque un peu de la conspiration, cette fois (Edward Norton, en cynique nettoyeur, n’a pas grand-chose à jouer), la course en avant d’Aaron Cross réserve son lot de plaisirs virils (et de beaux paysages).

Et puis il y a Rachel Weisz, actrice magnifique, qui interprète une scientifique en cavale avec Cross. Bourne était seul. Lui doit composer avec la sensibilité, la fragilité, et la détermination de cette femme plongée du jour au lendemain au cœur d’une violence qu’elle ne connaît pas. Grâce à elle, grâce au couple totalement mal assortis que ces deux-là forment, je replongerais bien pour un Bourne de plus…

• Voir aussi La Mémoire dans la peau, La Mort dans la PeauLa Vengeance dans la Peau et Jason Bourne.

Casablanca (id.) – de Michael Curtiz – 1942

Posté : 13 février, 2013 @ 2:52 dans 1940-1949, BOGART Humphrey, CURTIZ Michael | Pas de commentaires »

Casablanca (id.) – de Michael Curtiz – 1942 dans 1940-1949 casablanca-wore-grey

I remember every detail. The Germans wore grey, you wore blue.

Les lecteurs de ce blog l’auront compris facilement : j’ai pour Casablanca une passion totale, qui ne se dément pas. A tel point qu’écrire quelques lignes sur le sujet me paraît bien difficile. Je pourrais juste dire ceci : Casablanca est le plus beau film du monde, une merveille absolue où tous les talents ayant collaboré à sa réussite semblent en état de grâce.

Il s’est passé une sorte de miracle avec ce film, dont le tournage n’a pourtant pas été simple, le scénario étant le plus souvent écrit au jour le jour, avec une fin incertaine jusqu’au dernier moment : Ingrid Bergman allait-elle, oui ou non, prendre ce fichu avion et planter le pauvre Humphrey Bogart… ?

Malgré cette quasi-improvisation, il y a une sorte d’évidence qui se dégage du film, une fluidité de l’action, et un souffle romantique qui emporte tout sur son passage. Michael Curtiz n’a sans doute jamais été aussi inspiré qu’ici. Dans la première séquence, il lui suffit de quelques plans extraordinaires pour planter le décor : le Casablanca de décembre 1941, territoire de la France libre où se retrouvent tous ceux qui fuient le nazisme, attendant désespérément l’autorisation d’embarquer sur un vol pour l’Amérique. Des citoyens du monde désespérés, ou des résistants dont la tête est mise à prix… En une série de plans parfaitement enchaînés, Curtiz dit plus sur l’état du monde, et sur l’ambiance de cette ville, à ce moment-là, qu’avec n’importe quel discours.

casablanca-as-time dans BOGART Humphrey

Play it Sam, play « As time goes by »

Et puis il y a l’introduction des personnages, elle aussi sublime, les retrouvailles bouleversantes d’Ilsa et Rick, amants d’un autre temps (celui de la paix), dont la passion toujours vivante est contrariée par un enjeu qui les dépasse de loin : l’avenir du monde libre, symbolisé par le mari d’Ilsa, Victor Laszlo… l’homme de trop des habituels triangles amoureux. Mais cet homme de trop-là est un grand homme, un mari aimant et compréhensif, un chef de la Résistance particulièrement important, et un type bien. Le personnage le plus pur, le plus honnête, le plus courageux que l’on croisera dans ce film.

Autour de lui, le cynisme est omniprésent : le capitaine Renault (Claude Rains) échange ses visas de sortie contre les faveurs sexuelles des jeunes femmes ; l’intriguant Urgate (Peter Lorre) n’aide les migrants que pour son profit personnel ; le gros Ferrari (Sydney Greenstreet) profite de cet afflux du monde entier pour faire fortune… Même Rick Blaine (Bogie), patron du « Café americain » Rick’s, affiche un cynisme désabusé… qui ne trompe pas grand monde.

casablanca-gin-joints dans CURTIZ Michael

Of all the gin joints, in all the towns, in all the world… she walks into mine.

Les acteurs sont fabuleux, portés par la mise en scène pas loin de les transformer en mythes, et par des dialogues inoubliables (« The German wore grey, you wore blue »).

Et puis il y a l’ambiance du film, son atmosphère, particulièrement à l’intérieur du café, portée par une bande son magnifique, les chansons parmi les plus belles de l’histoire du cinéma (« As time goes by »)… Et puis a-t-on entendu Marseillaise plus bouleversante ?

Casablanca est un film miraculeux. Si on ne devait en voir et revoir qu’un, c’est bien celui-là que je conseillerais…

casablanca-friendship

Louis, I think this is the beginning of a beautiful friendship.

Complot de famille (Family Plot) – d’Alfred Hitchcock – 1976

Posté : 13 février, 2013 @ 1:07 dans * Polars US (1960-1979), 1970-1979, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Complot de famille (Family Plot) – d’Alfred Hitchcock – 1976 dans * Polars US (1960-1979) complot-de-famille

Dernier film d’Hitchcock, qui clôt, quatre ans après l’excellent Frenzy, l’une des plus belles filmographies du monde. Vieillissant et diminué, le cinéaste ne livre pas pour autant une œuvre mortifère : après avoir renoué avec les rues de son enfance dans son précédent film, c’est l’humour et la légèreté de sa période anglaise qu’il ressuscite ici, concluant même par un clin d’œil face caméra malicieux et rigolard.

La légèreté du film, son apparente nonchalance, et l’intrigue pour le moins improbable, font souvent passer Family Plot pour un Hitchcock mineur. A tort : il y a au contraire dans ce film une énergie et une audace qui sont celles d’un jeune cinéaste, et qui évoque celle du Coppola de ces dernières années (est-ce un hasard si Coppola a fait appel à Bruce Dern, le héros de Family Plot, pour Twixt ?).

La construction est étonnante : les trajectoires de deux couples hors du commun, qui sont amenés à se rencontrer, sont racontés en parallèle. D’un côté, une pseudo psycho et son fiancé, qui tentent de retrouver l’héritier disparu d’une famille fortunée. De l’autre, l’héritier devenu kidnappeur de haut vol avec sa femme et complice.

Le scénario de Ernest Lehman renoue avec l’esprit feuilletonesque et les rebondissements de North by Northwest, que Lehman avait également écrit. Comme si le scénario n’avait pour objectif que d’aller d’une séquence à une autre. Mais la mise en scène d’Hitchcock fait le reste. Les transitions, d’un couple à l’autre, sont constamment inventives (la première surtout, qui nous fait passer brusquement et dans un long mouvement continu, d’une discussion à l’intérieur d’une voiture, à l’épilogue d’un kidnapping), tout comme les scènes de voyance.

La voyance semble être l’une des raisons d’être du film, mais n’a que peu d’importance : le thème permet juste quelques beaux moments de comédie.

Le film est aussi réussi dans le thriller que dans la comédie. Grâce aussi aux comédiens, parfaits : William Devane (qui remplace Roy Thinnes, engagé par dépit et renvoyé après plusieurs semaines de tournage lorsque Devane a été disponible), Karen Black et Bruce Dern, surtout, livrent de belles prestations, à la limite parfois du cabotinage. Leur jeu décomplexé et inspiré colle bien à la fraîcheur de ce film qui n’a rien d’une œuvre-testament.

Créance de sang (Blood Work) – de Clint Eastwood – 2002

Posté : 13 février, 2013 @ 12:57 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, ACTION US (1980-…), EASTWOOD Clint (acteur), EASTWOOD Clint (réal.) | Pas de commentaires »

Créance de sang (Blood Work) – de Clint Eastwood – 2002 dans * Thrillers US (1980-…) creance-de-sang

Il y a tout juste dix ans, Eastwood offrait à ses fans de la première heure un ultime polar pur et dur. Un beau cadeau qui ne s’apparente pas aux combats de trop d’un Charles Bronson. Depuis le début des années 90, Eastwood prend un malin plaisir à souligner son âge, jouant avec délectation de ses rides et des limites de son corps.

Pour ce retour à un genre qu’il connaît par cœur (les premières images, plans nocturnes d’une grande ville filmée d’hélicoptère, rappellent le début de Dirty Harry et ses suites, et d’autres polars comme La Corde raide), Eastwood trouve le matériau idéal  dans l’excellent roman de Michael Connelly. Le personnage de Terry McCaleb est vieilli d’une trentaine d’années (Clint a 72 ans), mais le film reste globalement fidèle au roman.

Ce qui a attiré l’acteur de Dans la ligne de mire dans cette histoire est évidente : McCaleb est un super flic à la Dirty Harry, mais dont le cœur lâche alors qu’il est sur la piste d’un tueur en série. On le retrouve deux ans plus tard, fraîchement transplanté, et reprendre du service quand il apprend que celle qui lui a donné son cœur a été assassinée.

Eastwood joue avec son âge, son corps abîmé, qu’il exhibe avec pudeur, dans de très belles séquences nocturnes, où sa longue cicatrice semble sortir de la pénombre.

Mais son film est aussi un vrai polar, qui porte clairement la marque d’Eastwood : le rythme, volontiers lent, est à l’opposée de la norme hollywoodienne. Il ne prend par l’enquête policière à la légère, comme il l’avait fait avec Jugé coupable, mais il la mène à son rythme, à l’image de la force tranquille du personnage. S’autorisant même une improbable pause beignets dans une salle d’interrogatoire, l’action et les dialogues s’arrêtant durant de longues secondes. Typiquement eastwoodien.

Créance de sang n’est pas un chef d’œuvre. Le scénario de Brian Helgeland est efficace, mais assez convenu, et les dialogues parfois stéréotypés. Mais ce polar hors du temps est une gourmandise indispensable pour les amoureux du grand Clint : ses adieux à un genre dont il est indissociable.

Le Passé ne meurt pas (Easy Virtue) – d’Alfred Hitchcock – 1928

Posté : 10 février, 2013 @ 5:30 dans 1920-1929, FILMS MUETS, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Le Passé ne meurt pas (Easy Virtue) – d’Alfred Hitchcock – 1928 dans 1920-1929 easy-virtue

Le jeune Hitchcock fait des merveilles avec ce muet méconnu et pourtant très hitchcockien, dans lequel on peut s’amuser à reconnaître les embryons de nombreux motifs de ses grands films à venir : l’atelier du peintre qui évoque celui de Chantage ; le cercle familial hostile que le cinéaste reprendra plusieurs fois, et notamment dans Les Enchaînés ; les routes sinueuses surplombant la Méditerranée de La Main au collet ; même la belle-mère haineuse et manipulatrice de l’héroïne est une sorte de Mrs Danvers (de Rebecca) avant l’heure.

Les premières vingt minutes, qui posent les bases, sont formidables : c’est l’une des nombreuses séquences de tribunal de l’œuvre d’Hitchcock. Et comme toujours, celle-ci ne ressemble à aucune autre. Encore tout jeune cinéaste, Hitchcok signe avec cette longue séquence un petit chef d’œuvre en soi, un constant va-et-vient entre le tribunal où est jugée une demande de divorce et des flash-backs qui racontent le drame qui s’est joué pour une jeune femme interprétée par Isabel Jean.

Mariée à un mari alcoolique et violent, aimée par un artiste qui se donnera la mort, Isabel Jean se retrouvera seule à l’issue du procès, bientôt courtisée par de nombreux jeunes hommes. Elle en épouse un autre, mais son passé scandaleux ne tarde pas à la rattraper.

Après le procès s’ouvre un autre film, moins vertigineux sans doute, mais émaillé de belles trouvailles visuelles : une discussion téléphonique qu’on suit uniquement en voyant les réactions de l’opératrice qui l’écoute ; quelques métaphores animalières amusantes (deux chevaux qui se frottent le museau, tandis que notre jeune couple s’embrasse ; une chienne délicate sur les bagages de madame, et un bouledogue sur ceux de monsieur)… Hitchcock s’amuse et souligne avec sa caméra les sentiments de ses amoureux.

Easy Virtue entre dans la veine des drames bourgeois muets du maître, avec Downhill (la demeure familiale de l’un rappelle étrangement celle de l’autre) et Champagne (avec deux plans très semblables : le juge qui regarde à travers son lorgnon au début de Easy Virtue, l’homme qui voit à travers son verre dans l’autre). Heureusement, Hitchcock est plus proche de la réussite de Downhill que de l’agaçant Champagne.

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