Chasse à l’homme (Hard Target) – de John Woo – 1993
Il fut un temps où Jean-Claude Van Damme était le passage obligé pour tous les cinéastes hong-kongais s’attaquant à Hollywood. Tsui Hark s’y est cassé les dents (Double Team), Ringo Lam a tiré son épingle du jeu (Risque Maximum, et surtout Réplicant). John Woo, qui fut le premier, s’en sort honorablement, sans forcer son talent.
Enième variation sur le thème des Chasses du Comte Zaroff, le film est assez con, et bourré de clichés énormes. Ce qui n’est pas forcément rédhibitoire : Woo n’est pas réputé pour faire toujours dans la dentelle, loin s’en faut. Ce qui compte avant tout dans son cinéma, c’est le style, qui magnifie souvent des situations épurées à l’extrême.
Le style est bien là, mais un peu emprunté dans la première partie, comme si Woo se débattait avec un système qu’il ne maîtrise pas, et dont il essaye de faire émerger sa personnalité. Il faut attendre la dernière partie du film pour que ce style si personnel éclate vraiment : lors de ce très long gunfight, tout en excès, véritable massacre à la sauce Woo. Le cinéaste semble alors se libérer en se débarrassant de toute contrainte scénaristique.
Mais même là, le style de John Woo est mâtiné d’une touche de Van Damme. Curieux mélange, face auquel il est difficile de ne pas sourire : après avec vidé un chargeur (de 15 ? 20 balles ?) dans le buffet d’un méchant, Van Damme ajoute l’un de ses fameux coups de pied retourné pour le finir. Grand moment WTF…
Ce gunfight est hyper maîtrisé, et spectaculaire. Mais Van Damme y bondit, virevolte, et se livre même à des saltos vrillés (si si) assez surprenant… Et comme le scénario est décidément très con, les seconds rôles se pointent au milieu de l’action au gré des visions esthétiques de Woo, et au détriment de toute vraisemblance (la fille qui n’a aucune expérience de la violence et qui se précipite dans le gunfight pour aider le héros, Chance Boudreaux).
Côté méchant, on n’est pas d’avantage dans la mesure. Lance Henricksen est un bad guy vraiment très très méchant. Pas le film le plus fin de la saison, c’est sûr. Mais on trouve quand même un moment assez beau. Non, pas celui où Van Damme se met debout sur sa moto pour… pour… parce que c’est comme ça. Non : lorsqu’un vétéran du VietNam, traqué par des tueurs, se retrouve dans une rue bondée de La Nouvelle Orléans, et réalise que tout le monde se contrefout de son sort, et qu’il n’est qu’un invisible. Sonné, il finit par se résigner, acceptant son sort. Le moment le plus politique et le plus beau du film.