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Archive pour la catégorie 'MIZOGUCHI Kenji'

Les Contes de la lune vague après la pluie (Ugetsu monogatari) – de Kenji Mizoguchi – 1953

Posté : 18 mars, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, FANTASTIQUE/SF, MIZOGUCHI Kenji | Pas de commentaires »

Les Contes de la lune vague après la pluie

Mizoguchi s’inspire de vieux contes traditionnels japonais, et construit à partir de plusieurs histoires sans rapport les unes avec les autres le destin tragique et fascinant de deux couples emportés par la violence de ce Japon du 16e siècle.

L’histoire commence dans un petit village de montagne, où un potier vit avec sa femme, son fils, sa sœur et son beau-frère. Vie simple et heureuse que plusieurs éléments vont venir bouleverser. La « guerre » d’abord, ou plutôt des hordes de soldats pillards qui sèment la terreur et la désolation. Et puis, et surtout, ces obsessions masculines qui ne cessent de semer le chaos : l’appât du gain, et la soif de gloire.

Le potier est grisé par l’argent qu’il a gagné, et ne pense plus qu’à en amasser davantage. Son beau-frère ne rêve que de vêtir l’armure d’un samouraï… Tous deux oublient les femmes qu’ils laissent derrière eux, seules dans un monde d’hommes qui n’est plus qu’hostilité. Le premier fera un étrange voyage, où la frontière entre les vivants et les morts sera abolie. Le second comprendra trop tard le prix de sa gloire si chichement gagnée…

Les Contes de la lune vague après la pluie (quel titre, quand même!) est un film magique, dans tous les sens du terme. Un film qui se moque de toutes les frontières, où les fantômes côtoient la réalité la plus âpre, où on passe d’une terre hostile à des eaux coupées de tout.

Mizoguchi passe d’un conte à l’autre, successivement ou par allers-retours, varie les tons et les styles, mais son film est une sorte de miracle narratif, qui semble couler comme le temps, avec une légèreté inouïe et quelques à-coups terribles.

Il y a dans ce film une telle liberté, et une telle fluidité… Mizoguchi nous plonge dans ce Japon ancestral, mais capte les tiraillement des hommes (et des femmes), avec une acuité toute moderne. Les Contes de la lune vague après la pluie (quel titre ! Mais quel titre!) est une merveille, intemporelle.

La Cigogne en papier (Orizuru Osen) – de Kenji Mizoguchi – 1934

Posté : 6 octobre, 2011 @ 1:54 dans 1930-1939, FILMS MUETS, MIZOGUCHI Kenji | Pas de commentaires »

La Cigogne en papier

Le dernier film muet de Mizoguchi est paradoxalement l’un de ses plus bavards ! Entrecoupés de (trop) nombreux cartons, l’histoire tragique de la pauvre Osen, jeune femme sacrifiée par ses bourreaux, puis sacrifiée volontaire, est un peu plombée par ses dialogues trop nombreux qui la plupart du temps n’apportent pas grand-chose à la compréhension, et ne permettent pas d’apprécier la force des images.

Des dialogues qui apparaissent sur des cartons, comme dans n’importe quel film muet, mais qui sont dits en voix off par un « benshi ». Le benshi, c’est en quelque sore l’équivalent monolithique du pansori coréen, le chant et le côté fascinant en moins. Ce narrateur était indispensable dans le Japon rural du début du XXème siècle, où beaucoup de spectateurs étaient incapables de lire les cartons. Planté au pied de l’écran, il jouait les dialogues en direct. Une véritable institution qui explique en partie pourquoi le cinéma japonais a mis autant de temps à passer au parlant (nous sommes en 1934, là). La Cigogne en papier est un film de transition pour Mizoguchi, qui inclut le benshi dans la bande sonore du film.

Peut-être est-ce pour le mettre en valeur qu’il a multiplié à ce point les cartons. Mais décidément, cela n’apporte rien, bien au contraire. Dans la première partie, en tout cas, confuse et basée sur les activités illicites d’une bande de malfaiteurs qui utilisent la jeune femme comme appât pour monter des arnaques. Difficile à suivre précisément, cette intrigue policière est maladroite et ennuyeuse. Mais il faut passer le cap de cette première partie : dans la seconde moitié, le film devient beaucoup plus passionnant, lorsqu’il se concentre exclusivement sur les rapports entre Osen et son « petit frère » Sokichi.

On a franchement envie de le baffer, ce Sokichi, étudiant en médecine sans envergure et complètement soumis, qui passe la première partie du film à pleurnicher (incapable de se rebeller ou de se prendre en main pour débarrasser sa « grande sœur » de l’emprise de ses maîtres), et la seconde à se voiler la face avec hypocrisie : mais d’où vient l’argent que la petite Osen récolte pour financer ses études à lui ? Mieux vaut pas se demander, il sera toujours temps d’avoir l’air surpris lorsque la jeune femme sera arrêtée pour avoir fait la putain… Osen, d’abord victime malgré elle, se transforme en victime consentante, sacrifiant sa vie, son honneur, et finalement sa santé mentale, pour permettre à ce p’tit con à peine reconnaissant de vivre la vie qu’il doit vivre.

L’histoire est racontée à grand renforts de flash-backs (et de flash-backs dans les flash-backs). Une construction audacieuse et complexe, rare chez Mizoguchi, qui ne fait que renforcer le sentiment de tragédie inéluctable. Le film commence par une scène de nuit, sur le quai de gare d’une ville privée d’électricité. Dans l’anonymat de la foule, deux silhouettes ressortent : celle d’un notable visiblement hermétique à l’impatience du petit peuple ; et celle d’une femme aux épaules tombantes, qui semble attendre avec résignation son dernier souffle… Ce sont ces deux êtres qui semblent ne pas se connaître, mais qui évoquent intérieurement leur jeunesse commune. Lui se souvient qu’il se serait suicidé, s’il n’avait pas été sauvé par Osen, et qu’il se serait sans doute laissé entraîner dans une vie de misère. Elle se souvient qu’elle a tout sacrifié pour le bien de Sokichi, en secret et sans rien attendre en retour. Et « rien », c’est justement ce qu’elle a eu…

Les Coquelicots (Gubijinsô) – de Kenji Mizoguchi – 1935

Posté : 6 décembre, 2010 @ 2:48 dans 1930-1939, MIZOGUCHI Kenji | Pas de commentaires »

Les Coquelicots

Difficile de juger honnêtement de ce Mizoguchi méconnu des années 30, dont l’unique copie existante est d’une qualité déplorable : malgré le soin qu’apporte généralement l’éditeur Carlotta à ses DVD, l’image est polluée par d’innombrables rayures, et le son est parfois totalement inaudibles.

Malgré tout, Les Coquelicots est un film profondément émouvant, sur un thème hyper classique du cinéma japonais : la confrontation entre la tradition et la modernité. Le personnage de Ono illustre parfaitement ce tiraillement d’un monde qui change : ce jeune étudiant prometteur doit-il épouser Sayoko, la jeune femme douce et réservée qui lui est destinée depuis des années, ou doit-il succomber à la tentatrice Fujio, figure même de la jeune femme émancipée ?

C’est tout le sujet du film, mais Mizoguchi enchevêtre d’autres amours contrariés, d’autres personnages qui finissent par former un panorama étonnant d’une génération qui ne sait sur quel pied danser. Mizoguchi, lui, ne juge personne ni ne donne de réponses claires à ce dilemme : traditions ou modernités. L’important, au final, est de rester fidèle à ses propres principes.

Le film a été tourné quelques années seulement après le début du parlant au Japon. Pourtant, il est d’une étonnante modernité et, trois quarts de siècles plus tard, reste une œuvre déchirante.

Cinq femmes autour d’Utamaro (Utamaro o meguru gonin no onna) – de Kenji Mizoguchi – 1946

Posté : 26 août, 2010 @ 1:30 dans 1940-1949, MIZOGUCHI Kenji | Pas de commentaires »

Cinq femmes autour d'Utamaro (Utamaro o meguru gonin no onna) - de Kenji Mizoguchi - 1946 dans 1940-1949 cinq-femmes-autour-dutamaro

Curieux film que livre là le grand Mizoguchi. Le cinéaste nous plonge littéralement au cœur d’un quartier populaire d’une ville japonaise, en plein XVIIIème siècle, et ne sort quasiment jamais du dédale des rues, et des formes géométriques un peu oppressantes des habitations. Seules quelques plans bucoliques, comme en apesanteur, viennent nous sortir de cette sensation d’enfermement constant. Pourtant, les personnages que Mizoguchi filme ici sont libres. Ils le répètent même à la moindre occasion : sortir du carcan des conventions et des vieilles traditions semble être l’ambition principale de ces personnages qui rompent avec la « haute lignée » de leurs aïeuls.

Autour d’Utamaro, le personnage central du film, personne pourtant ne trouve vraiment le bonheur. Les couples se font et se défont, la jalousie se propage et se mue en colère… jusqu’à l’explosion finale, sans doute inéluctable. Au milieu de cette agitation, Utamaro apparaît comme un observateur, servant au mieux de pivot et de facilitateur à l’action, mais n’intervenant jamais dans les sentiments des uns et des autres. Quel que soit le drame qui se noue autour de lui, Utamaro garde une patience et un flegme qui semblent à toute épreuve… Un vernis qui ne craque que lorsqu’il est condamné à avoir les mains liés pendant cinquante jours, devenant alors incapable de se vouer à son art. Un observateur et un passeur : serait-ce là le rôle d’un artiste ?

C’est sans doute le plus autobiographique des films de Mizoguchi, qui semble voir dans le personnage principal, Utamaro, son alter-ego. Pour ceux qui l’ignorent, Utamaro fut l’un des peintres les plus renommés de la fin du XVIIIème siècle au Japon, spécialiste de l’Ukiyo-e, genre qui trancha avec l’approche élitiste de la peinture, et mit l’estampe à la portée de tous. Les parallèles entre les deux artistes ne manquent pas. On passera sur le fait que les deux hommes avaient une passion avouée pour les filles de joie, même si cet aspect est important dans l’œuvre entière de Mizoguchi, et même s’il joue un rôle tout aussi important dans le film. Comme Mizoguchi, surtout, Utamaro plaçait son art avant toute chose, et ne vivait que pour lui. Comme le cinéaste, le peintre se faisait une haute idée de son œuvre, qu’il plaçait au-dessus de la production contemporaine. Au début du film, l’action est mise en place par une phrase écrite par le peintre sur l’une de ses estampes, dans laquelle il affirme que seuls ses dessins parviennent à retranscrire la vie. De son côté, Mizoguchi en a agacé plus d’un dans les années 50 au festival de Berlin, en affirmant après avoir découvert des films occidentaux : « décidément, c’est moi le meilleur »… Pourtant, l’un comme l’autre étaient des artistes dénués d’égaux, qui ne recherchaient ni la gloire, ni la reconnaissance, mais simplement à aller au bout de leur art.

 

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