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Archive pour la catégorie 'PAYNE Alexander'

Winter Break (The Holdovers) – d’Alexander Payne – 2023

Posté : 21 janvier, 2024 @ 8:00 dans 2020-2029, PAYNE Alexander | Pas de commentaires »

Winter Break

La période des fêtes est terminée. Si vous n’avez pas vu Winter Break, vous avez donc loupé le meilleur moment de l’année pour voir ce qui restera le plus beau film de Noël 2023. Cela dit, même si vous lisez ces lignes en juillet, le film reste très, très recommandable.

Winter Break n’invente rien : il réunit trois êtres solitaires que tout oppose dans un même lieu au moment des fêtes, et se livre à une sorte de thérapie collective dont on sort non pas euphorique, mais plein de confiances en l’être humain. Ce qui, en ces temps troublés, est déjà une sacré gageure.

Pour être précis, disons qu’Alexander Payne nous amène à ouvrir les yeux sur les autres, ceux qui ne nous ressemblent pas et qu’on a tôt fait de cataloguer : parce qu’ils sont austères, parce qu’ils ne sourient pas, parce que ce sont des gosses de riches… Et si, derrière tout ça, il y avait des souffrances, des cœurs qui battent, et même de belles âmes ?

Dit comme ça, Winter Break ressemble sans doute à un condensé de bons vieux clichés. Mais Alexander Payne a un regard, une délicatesse et une élégance, une manière de transformer ça en un merveilleux conte de la rédemption qui vous provoque deux, trois larmes, vous nouent le ventre, et dans le même mouvement vous tire de larges sourires de bien-être.

Et puis il y a la manière dont Payne signe un authentique film de 1970… C’est l’époque où l’histoire se passe : durant les vacances d’hiver, lorsqu’un professeur très dur (génial Paul Giamatti) est désigné pour rester sur le campus seul avec les pensionnaires qui ne passent pas les fêtes en famille. En l’occurrence un pensionnaire, brillant mais forte tête (Dominic Sessa, une révélation). Ajoutez à ça l’inamovible cuisinière (bouleversante Da’vine Joy Randolph), et voilà notre trio.

Payne signe un authentique film de 1970, disais-je. Pas seulement parce que la reconstitution est brillante, et que l’esprit de cette époque est parfaitement restitué. Mais aussi par tous ses choix esthétiques, jusqu’au grain de l’image… et au faux copyright dans le générique de début. Pourtant, jamais il ne donne l’impression de faire le malin : son film est d’une justesse absolue. L’esprit de Noël, sans mièvrerie. Pur bonheur.

Nebraska (id.) – d’Alexander Payne – 2013

Posté : 27 juin, 2014 @ 5:15 dans 2010-2019, PAYNE Alexander | Pas de commentaires »

Nebraska

Une Amérique dénuée de tout charme, pourrie par une crise qui paraît ne pas avoir d’âge. Des paysages nus et plats, loin de l’image habituelle des grands espaces, d’où ne ressort qu’une brève visite au Mont Rushmore, icône décevante qui semble n’être là que pour faire un clin d’œil à Hitchcock, dont Bruce Dern fut le dernier acteur récurrent. Des hommes qui n’ont rien d’autre à faire que de tuer le temps devant des émissions idiotes à la télé en buvant des bières et en parlant voitures, seuls repères d’une existence sans but.

C’est le portrait de l’un de ces hommes que signe Alexander Payne avec ce très beau film : un taiseux apparemment au bord de la démence, qui arrive dans la dernière ligne droite d’une vie qu’on devine vaine et vide, et qui se raccroche à un but grotesque : le soi-disant « gros lot » de l’une de ces tombolas qui ne sont en fait que des publicités mal déguisées. Un piège à gogo qui sera finalement l’occasion d’un voyage inattendu de ce vieil homme avec l’un de ces fils, aussi paumé que lui dans une existence où s’accumulent les ratages.

Qu’importe le but, bien sûr. Ce qui compte, c’est le voyage, et ce qu’il révèle sur les deux hommes, sur leurs rapports, sur leurs envies, et les douleurs dont ils ne disent rien. Bruce Dern, qui a obtenu le prix d’interprétation à Cannes l’an dernier pour ce rôle, est magnifique dans ce registre. Silencieux, voire absent la plupart du temps, capable de soudaines explosions, et laissant transparaître une souffrance sourde à travers son regard perdu. La scène du cimetière, totalement irrévérencieuse et quasi-comique, est aussi bouleversante. Le numéro grotesque de sa femme souligne paradoxalement le poids de ce que le vieil homme ne dit pas…

Avec ce road movie en noir et blanc, Alexander Payne signe un film simple et sincère, et profondément émouvant. Dans cette Amérique sans avenir et sans espoir, c’est aussi, malgré tout, une ode à la famille. Pas aux seuls liens du sang, qui n’excluent pas les pires mesquineries, mais au cocon familial. Le personnage de Bruce Dern a beau avoir eu une enfance difficile auprès d’un père qui le battait, il revient dans la maison de son enfance avec une émotion palpable. La famille qu’il a fondée a beau ne ressembler à rien, elle trouvera dans ce voyage absurde une occasion de se rapprocher.

Même si, au fond, rien ne changera sans doute vraiment dans la vie des personnages, eux ne seront sans doute plus tout à fait les mêmes.

 

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