Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour août, 2022

Le Pays de la violence (I walk the line) – de John Frankenheimer – 1970

Posté : 27 août, 2022 @ 8:00 dans 1970-1979, FRANKENHEIMER John | Pas de commentaires »

Le Pays de la violence

Voilà un film mal aimé (et méconnu) qui mérite d’être redécouvert. Une curiosité, même, dans l’œuvre de Frankenheimer, qui nous plonge au cœur de l’Amérique la plus profonde, celle d’un Sud poussiéreux et morne, que les jeunes ont à peu près tous déserté pour ne laisser que des vieux qui ne font plus même semblant d’essayer de trouver des occupations pour tuer le temps.

Le générique de début porte clairement les ambitions de Frankenheimer : une succession de gros plans sur des gueules burinées, abîmées par le temps et l’ennui, d’hommes et de femmes assis le regard dans le vide, dans un décor rural anti-poétique au possible, où les paysages potentiels disparaissent sous des amas d’épaves de voitures ou d’appareil ménagers.

Au milieu de ces gueules, celle de Gregory Peck, shérif que l’on découvre au bord de la rupture. Lui aussi a le regard vide de celui qui se sait dans une impasse, et qui étouffe. Shérif de ploucland, où il ne se passe jamais rien, marié à une femme qu’il a peut-être aimé mais qu’il ne supporte plus vraiment, père d’une fillette qu’il n’écoute même plus, il n’attend rien. Et c’est justement là qu’apparaît cette porte de sortie qu’il n’attendait plus, et à laquelle il va se raccrocher avec la force du désespoir : une très jeune femme, fille d’une famille qui survit en distillant illégalement du whisky.

Frankenheimer voulait Gene Hackman pour ce rôle de shérif. Il a eu Gregory Peck, imposé par les producteurs, et qui révèle une fragilité, et même une douleur, qu’on lui connaissait peu. Il est assez magnifiquement pathétique dans ce rôle d’homme perdu, qui dérape et tente désespérément de se raccrocher à quelque chose. En l’occurrence à cette jeune femme « fatale » à laquelle Tuesday Weld apporte une étonnante innocence. Beau rôle aussi : celui du père, joué par Ralph Meeker, qui déjoue tous les préjugés attendus.

Le Pays de la violence (titre français discutable) est un film âpre, pas aimable, dont le titre original est une manière de mettre en valeur l’implication de Johnny Cash, crédité pour la bande originale. Peu de musique, en fait, dans ce film, si ce n’est quelques chansons (dont certaines créées pour l’occasion) pour lesquelles la voix de Cash est utilisée à la manière d’un chœur antique.

La Défense Lincoln (The Lincoln Lawyer) – de Brad Furman – 2011

Posté : 26 août, 2022 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, FURMAN Brad | Pas de commentaires »

La Défense Lincoln

Presque dix ans après l’adaptation très libre de Créance de sang par Clint Eastwood, Michael Connelly a de nouveau droit aux honneurs d’Hollywood avec ce polar judiciaire basé sur l’un de ses personnages récurrents, l’avocat Mickey Haller.

L’intrigue est retorse comme il se doit : l’avocat est choisi pour défendre un homme accusé de violences sur une femme, dont il découvre bientôt qu’il est effectivement coupable, mais aussi qu’il est responsable d’un meurtre pour lequel un autre client de Haller a été condamné. L’avocat, tenu par le secret professionnel, se retrouve pris au piège.

C’est brillamment retors. Mais ce qui fonctionne le mieux dans cette adaptation, c’est le personnage lui-même, avocat cynique et calculateur que ses restes d’humanité rendent à peine plus sympathique. Le scénario, en tout cas, ne fait rien pour gommer les aspérités du gars, regard carnassier et suffisance affichée, véritable renaissance pour Matthew McConaughey.

L’acteur, après des débuts brillants au milieu des années 1990, végétait depuis une décennie dans des comédies romantiques d’avantage taillées pour son torse glabre et musclé que pour ses talents d’acteur. La Défense Lincoln permettait de remettre les pendules à l’heure, et d’ouvrir une période autrement plus passionnante, de Killer Joe à Interstellar en passant par Mud.

Il est assez formidable ici, imposant un personnage qui ne ressemble véritablement à aucun autre, et dominant une distribution qui donne la part belle aux seconds rôles de prestiges, de William H. Macy à Marisa Tomei en passant par Ryan Philippe, Bryan Cranston, Michael Pena, John Leguizamo ou Frances Fisher.

Manquerait plus qu’un vrai grand metteur en scène pour emballer tout ça. Ce n’est pas vraiment le cas. Brad Furman fait le job avec application, et une efficacité indéniable, mais en glissant quelques effets de caméra très dispensables, qui nuisent aux quelques scènes de pur suspense. Pas de quoi gâcher le plaisir.

Quant à Mickey Haller, outre les autres romans dans lesquels il est régulièrement apparu sous la plume de Connelly, il est désormais (comme l’autre personnage récurrent du romancier, Harry Bosch) le héros d’une série elle aussi intitulée La Défense Lincoln.

Waldo, détective privé (Last Looks) – de Tim Kirkby – 2021

Posté : 25 août, 2022 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2020-2029, KIRKBY Tim | Pas de commentaires »

Waldo détective privé

Les bonnes intentions ne font pas forcément de grands films. Il y en a des tas dans ce Waldo, qui tente de renouveler le genre très emprunté du film de détective privé, versant rigolard. Mais beaucoup de ces bonnes intentions semblent bien réchauffées. Prenons les dialogues décalés, et cette manière qu’a le privé d’engager la conversation sur un ton badin avec ceux qui passent leur temps à lui démonter le portrait… Ce pourrait être réjouissant et innovant, si ce n’était un parti-pris à ce point à la mode (The Nice Guys, pour n’en citer qu’un).

Soyons honnête : c’est tout de même assez réjouissant. Suffisamment, en tout cas, pour qu’on ne s’ennuie pas et qu’on prenne même un certain plaisir à voir ce détective privé qui a choisi de quitter Los Angeles pour adopter un mode de vie minimaliste (avec un credo : ne posséder que 100 objets, pas 1 de plus) au milieu de nulle part. Un certain plaisir, en même temps qu’un sentiment franchement dubitatif.

On a quand même bien du mal à prendre au sérieux, et à croire vraiment en ces personnages juste un peu trop excessifs : le dealer qui s’achète une conduite, le flic qui se laisse corrompre, le producteur aux dents trop longues, l’institutrice trop sexy, et surtout la star imbibée d’alcool et accusée de meurtre… un rôle central mais secondaire tout en autoréférences pour Mel Gibson, à la moustache elle aussi excessive.

On n’y croit pas une seconde, mais il y a Charlie Hunnam, qui prend un plaisir communicatif à jouer le privé qui s’est trouvé une conscience, et qui surjoue avec une nonchalance gourmande (oui, c’est possible) le pacifiste écolo, qui semble revivre lorsqu’il sort son flingue ou se met au volant d’un gigantesque hummer. Joyeusement incorrect…

Incroyable mais vrai – de Quentin Dupieux – 2022

Posté : 24 août, 2022 @ 8:00 dans 2020-2029, DUPIEUX Quentin, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Incroyable mais vrai

Il était grand temps que je plonge dans l’univers de Quentin Dupieux, à côté duquel j’étais jusqu’à présent totalement passé. Incroyable mais vrai, c’est en premier lieu un grand succès marketing. Parce que la bande annonce (omniprésente au moment de la sortie) intrigue et enthousiasme à la fois. On pressent qu’il y a là une authentique gourmandise de cinéma : à la fois dans la volonté de surprendre et dans le plaisir du jeu d’acteurs.

Ce qui frappe en premier dans le film de Dupieux, c’est décalage discret mais constant entre la modernité et un côté ouvertement rétro. Incroyable mais vrai a ainsi une esthétique très années 80 au premier coup d’œil. Mais il est question de nouvelles technologies très avancées, flirtant même avec la science-fiction. L’histoire se passe de nos jours, mais les détails semblent sortir d’un passé relativement proche, celui de la jeunesse des personnages peut-être. Chabat joue à un jeu vidéo première génération sur un écran d’ordinateur bien d’aujourd’hui… Petit décalage qui crée mine de rien une atmosphère un peu irréelle.

La narration se joue ouvertement de la temporalité. C’est même le sujet principal du film, à de multiples échelles. Difficile d’ailleurs d’en dire trop sans déflorer les surprises du film. Disons simplement que l’histoire, absurde et énorme, repose sur deux couples, deux secrets improbables, et deux manières d’évoquer la vanité et le mythe de la jeunesse éternelle.

Par l’absurde, par le fantastique, et grâce à des acteurs formidables (Alain Chabat, Léa Drucker, Benoît Magimel, Anaïs Demoustier), Dupieux évoque une humanité qui fait face comme elle le peut au poids du temps qui passe, au regard des autres. Il souligne aussi l’absurdité de la modernité à tout prix, que Dupieux oppose in fine à un retour à la nature tendre et émouvant, mais pas non plus débordant d’enthousiasme. C’est tantôt drôle, tantôt touchant, tantôt lourdingue. Toujours étonnant en tout cas, et franchement séduisant.

Mort subite (Sudden Death) – de Peter Hyams – 1995

Posté : 23 août, 2022 @ 8:00 dans 1990-1999, ACTION US (1980-…), HYAMS Peter | Pas de commentaires »

Mort subite

Ces films d’action hyper calibrés des années 90 ont gagné un petit charme qui relève sans doute d’un sentiment de nostalgie pour l’ado que j’étais alors, mais indéniable. Et comment ne pas avoir une certaine tendresse pour un film où Jean-Claude Van Damme se bat dans une cuisine contre un poulet géant…

Oui, en fait un méchant qui a revêtu le costume de la mascotte d’une équipe de hockey. Mais cette image confirme que Peter Hyams, cinéaste qui fut un peu plus ambitieux à une époque de sa carrière (Capricorn One, Outland), ne prend pas son affaire trop au sérieux. On lui en sait gré, et Van Damme aussi visiblement, très à l’aise dans le rôle de ce super-vigile confronté à l’irruption d’une bande de méchants dans un stade bondé.

Il est alors au sommet de sa popularité, Van Damme, qui venait de tourner TimeCop avec le même Peter Hyams. The Mussles from Bruxelles était même un potentiel concurrent sérieux pour Stallone ou Bruce Willis. Potentiel seulement, quand même : Mort subite, malgré ses gros moyens, reste un énième ersatz de Die Hard, dont il reprend les grandes lignes. Un représentant de l’ordre qui affronte seul une armée de tueurs dans un lieu clos, où il doit sauver plein d’innocents, et sa propre famille.

Rien de neuf sous le soleil donc, si ce n’est un poulet tueur, de vrais joueurs de hockey-sur-glace, des scènes d’actions qui tiennent la route. Suffisamment pour faire de Mort subite l’un des sous-Die Hard les plus recommandables de cette époque. Un petit plaisir régressif et nostalgique, avec un Van Damme sans surprise, mais parfait en action hero dont on sait d’emblée qu’il va dégommer tous les méchants à lui seul. Finalement, on n’attend pas grand-chose de plus…

Non-coupable – de Henri Decoin – 1947

Posté : 22 août, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1940-1949, DECOIN Henri | Pas de commentaires »

Non-coupable

Henri Decoin est décidément un cinéaste doué, et éclectique. Non-coupable, à mi-chemin entre le film noir et la chronique psychologique, est tourné la même année que Les Amoureux sont seuls au monde, l’une des plus belles histoires d’amour du cinéma français. L’amour, dans Non-coupable, revêt un visage nettement moins avenant…

Celui de Michel Simon en l’occurrence, et il fallait un acteur de sa trempe pour donner toute la mesure de ce personnage si complexe, médecin d’une petite ville qui a sombré dans l’alcool et l’auto-apitoiement, rabâchant une haine de lui-même renforcée par la présence d’une épouse qu’il juge trop belle, trop douce.

Et puis un soir, alors qu’il a pris le volant ivre-mort, il renverse un motard qui meurt sur le cou. Ce pourrait être la fin de l’histoire, ce n’est que le début. Car face au drame, le gentil toubib imbibé révèle une face de lui-même dont il n’avait pas idée. En quelques instants, le regard acéré et l’esprit soudain plus vif que jamais, il maquille la scène du drame pour éviter d’être suspecté de quoi que ce soit.

Et ça fonctionne si bien que le voilà galvanisé par le sentiment d’avoir commis un crime parfait. De quoi lui donner des idées pour faire du ménage autour de lui. L’homme sans histoire et complètement paumé s’est transformé par hasard en génie du crime. Qu’importe d’ailleurs que ce soit le crime : s’il avait été un génie de la musique, l’effet aurait sans doute été le même. Mais cet homme insipide s’est révélé à lui-même, et il a bien l’intention de ne pas laisser passer cette opportunité unique d’exister vraiment.

Le scénario, signé par le dramaturge Marc-Gilbert Sauvajon, est formidable, parfaitement machiavélique. La mise en scène de Decoin est superbe, donnant vie aux zones d’ombres de Michel Simon qui ne cessent de prendre de l’ampleur. De la même manière que la sensation d’oppression prend de l’ampleur au fur et à mesure que le personnage principal prend de l’assurance, narguant la police incarnée par Jean Debucourt, et perdant peu à peu toute barrière morale.

Non-coupable est un film passionnant, chef d’œuvre méconnu d’une richesse étonnante. Decoin réussit dans le même mouvement à rendre son personnage attachant et glaçant, émouvant et machiavélique, superbe et pathétique. Il conclut son film avec une ultime séquence assez géniale, chef d’intelligence narrative : une lettre, une cheminée, un chat, et un rebondissement final qui enfonce le clou avec force.

Police – d’Anne Fontaine – 2020

Posté : 10 août, 2022 @ 8:00 dans 2020-2029, EFIRA Virginie, FONTAINE Anne | Pas de commentaires »

Police Anne Fontaine

Premier constat : j’aime Virginie Efira d’un amour cinéphilique qui n’a plus beaucoup de borne. Film après film, l’actrice ne cesse de surprendre et de bouleverser avec son jeu, à la fois extraordinairement précis et d’une intensité bouleversante. Pas un rôle dont on peut simplement dire qu’elle est très bien. Non, elle est toujours au-delà, vraie, profonde, humaine… L’une des plus grandes actrices du monde, disons la Vivien Leigh d’aujourd’hui.

Voilà qui est dit. Deuxième constat : Anne Fontaine est une grande réalisatrice, qui a un regard, et un vrai talent pour filmer les états d’âme. Ce n’est pas si courant, et c’est ce qui fait le poids de Police, beau film dont les moments les plus intenses sont ceux où il ne se passe rien en apparence. Ceux où l’esprit des personnages vagabonde, tiraillé entre l’intégrité et l’humanité, en quelque sorte.

Grande réalisatrice, et grande directrice d’acteurs. Virginie Efira est sublime, donc. Mais Omar Sy et Grégory Gadebois sont également magnifiques dans les deux autres rôles centraux. Trois flics parisiens en uniforme, chargés d’amener un immigré à qui l’asile a été refusé vers l’aéroport où un avion doit le ramener dans son pays, où une mort probable l’attend. Un paumé, dont on ne sait pas grand-chose, et qui ne parle ni ne comprend un mot de français…

Mais les policiers qui l’escortent, eux, sont des paumés dont on sait beaucoup. Parce qu’une série de flash-backs nous les présente dans leur intimité un peu minable. Mal mariés, au bord de la rupture. Virginie (Efira) et Aristide (Omar Sy) ont eu une liaison extra-conjugale, et la première est enceinte du second. Erik (Gadebois) est marié à une femme qui ne le supporte plus. Aucun d’eux ne compte ses heures, mais est-ce par sens du devoir ou par désir de fuir le quotidien ?

Ce migrant que l’on renvoie vers une mort probable est le prétexte à une prise de conscience introspective. Et c’est la principale limite du film, qui évite soigneusement tout véritable engagement humanitaire ou politique, pour se focaliser ces trois policiers rongés par leur quotidien et le poids de leur fonction. On peut trouver le propos limité. On peut aussi reconnaître à Anne Fontaine le talent pour tirer de ces situations l’humanité la plus profonde.

Dans Police, l’essentiel de l’action se déroule dans l’habitacle d’une voiture : des regards, des non-dits, une tension. C’est passionnant, c’est bouleversant, c’est beau. Me voilà touché, profondément.

L’Homme de Londres – de Henri Decoin – 1943

Posté : 9 août, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1940-1949, d'après Simenon, DECOIN Henri | Pas de commentaires »

L'Homme de Londres

L’Homme de Londres est un roman assez formidable de Simenon : l’histoire d’un simple aiguilleur dans le port de Dieppe, un homme accablé par son statut d’anonyme, qui assiste une nuit à un crime, et qui se retrouve un peu par hasard avec un magot de plusieurs millions qu’il décide de garder pour lui, sans rien en dire à personne.

C’est un roman de Simenon, du meilleur cru. Et comme la plupart des romans de Simenon, l’aspect policier n’est qu’un prétexte, à la fois pour dresser le portrait d’un homme bourré de névroses et habitué à l’échec, et pour recréer l’atmosphère d’un microcosme comme étanche au monde extérieur, où le temps semble s’étirer à l’envi.

Cinéaste décidément passionnant, Henri Decoin vient alors de connaître un grand succès avec Les Inconnus dans la Maison, déjà une adaptation de Simenon. Pas étonnant, donc, qu’il s’y recolle. Et il le fait une nouvelle fois en digne admirateur du romancier, avec une adaptation globalement très fidèle, qui ne diffère finalement de l’original que par quelques détails, notamment par une fin plus ouverte.

Le ton, quand même, reste sombre. L’atmosphère, surtout, est merveilleusement portée à l’écran : la nuit et la brume du port sont particulièrement cinégénique, jusqu’à frôler le cliché. Mais l’atmosphère est bien là, et c’est un petit milieu très cloisonné que filme Decoin, à grand renfort de brouillards et de silhouettes dramatiques de marins.

Le dilemme intérieur de Malouin, l’aiguilleur dont la chance est aussi le fardeau, est un rien moins convaincant, la faute à une voix off un peu maladroitement utilisée. Mais Fernand Ledoux est formidable dans le rôle de cet homme, mari et père odieux tant il est mal dans son costume. Decoin a aussi l’intelligence de ne pas plier le rôle du tueur traqué à la démesure habituelle du grand Jules Berry. Il reste taiseux et mystérieux, et n’en est que plus humain. Le film aussi. Decoin est décidément passionnant.

Armaguedon – d’Alain Jessua – 1977

Posté : 8 août, 2022 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1970-1979, JESSUA Alain | Pas de commentaires »

Armaguedon

Allez savoir pourquoi : une envie soudaine de voir Delon au faîte de sa gloire, le Delon superstar et tout puissant, dont le nom apparaît trois fois au générique, dominant tous les autres. Il y a des envies comme ça qui viennent d’on ne sait où, et qu’il ne faut pas laisser passer. Parce qu’on le sait bien : Delon n’a jamais vraiment abdiqué sur ses ambitions. En tout cas pas avant de vraiment abdiquer, pour de bon. Il a dérapé, dérivé… En un mot, il a fait de belles merdes. Mais toutes les étapes de sa carrière sont marquées par une poignée de belles réussites.

Armaguedon n’est pas un jalon majeur dans sa carrière, c’est un fait. Alain Jessua n’est ni Visconti, ni même Jacques Deray. L’histoire est assez intéressante, mais le scénario frôle la caricature avec des dialogues que des acteurs aussi talentueux que Michel Duchaussoy ou Delon lui-même ont souvent bien du mal à sortir avec naturel. Bref, le film n’est qu’en partie réussi. Il est en tout cas original et surprenant, et c’est déjà beaucoup.

Surprenant dès le générique, alors que le nom de Delon apparaît au même niveau que celui de Jean Yanne. Ni plus gros, ni au-dessus, non : au même niveau. Et quand le nom du réalisateur apparaît, celui de Delon producteur l’accompagne, mais bien plus petit. Delon aurait-il un sursaut de modestie ? Au service du film, la star-producteur se met en tout cas ouvertement en retrait pour laisser la lumière à Jean Yanne, qui incarne le personnage central du film.

Un type seul, mal dans sa peau et dans son époque, qui profite d’un héritage inattendu pour tout plaquer et enfin exister. En se transformant en une espèce d’ange de l’apocalypse qui veut prouver sa toute puissance aux yeux du monde entier, avant de commettre un crime dont tout le monde devra se souvenir. Jean Yanne en petit anonyme pas même antipathique, est formidable, tout en douleur ravalée.

Delon, lui, se contente du rôle du psychiatre qu’on lance sur sa piste, d’avantage observateur qu’acteur du drame : l’un des maillons d’une enquête ouvertement internationale. C’est l’autre aspect original du film : la volonté d’ancrer cette histoire dans un contexte très européen, avec des polices de tous les pays qui travaillent main dans la main, de nombreux voyages, des accents et des langues étrangères…

L’ambition est belle, mais cette dimension européenne a quelque chose de forcé, assez peu convaincant. Moins en tout cas que le portrait finalement très triste de ce monstre en puissance, flippante et pathétique. Ce pur produit des années 70, visuellement guère enthousiasmant, est finalement une bonne surprise.

Aux yeux de tous (Secret in their eyes) – de Billy Ray – 2015

Posté : 7 août, 2022 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, RAY Billy | Pas de commentaires »

Au yeux de tous

Remake d’un thriller argentin à l’excellente réputation, Dans ses yeux (pas vu), Aux yeux de sombre est un film sombre. Très sombre. Un thriller qui navigue assez habilement entre l’action présente et une succession de flash-backs qui se répondent constamment et éclaircissent ou obscurcissent l’intrigue, c’est selon.

Treize ans après le meurtre dont a été victime la fille de sa collègue et amie, un ancien agent du FBI est persuadé d’avoir retrouvé la trace du tueur. Une histoire d’obsession comme on en a beaucoup vu dans le thriller. L’histoire d’un deuil impossible, aussi, et même de plusieurs deuils : celui de la mère bien sûr, mais aussi celui de l’ami incapable de faire taire son sentiment de culpabilité, et celui de la belle et ambitieuse district attorney, qui elle peine à faire le deuil de ses passions de jeune femme.

Bref, on rit assez peu dans Aux yeux de tous. A vrai dire, on n’a de brèves occasions de sourire que dans le début du premier flash-back, avant la découverte du corps, moment assez traumatisant porté par l’interprétation intense de Chiwetel Ejiofor et la douleur oppressante de Julia Roberts, physiquement transformée par ce rôle de mère déchirée. Dans celui plus nuancé de la district attorney, Nicole Kidman est formidable.

Grand casting, donc, pour une intrigue qui nous plonge dans le traumatisme de l’Amérique de l’immédiat après-11 septembre, avec tout ce que cela implique de paranoïa et de cynisme. Ce n’est certes pas le film le plus délicat et le plus nuancé de l’histoire du thriller délicat et nuancé, et la charge peut être un peu lourde sur certains aspects. Mais la simplicité d’une intrigue qui ne cherche pas l’esbroufe et le coup facile est assez remarquable.

Quant au rebondissement final, que l’on pressent sans deviner sa nature exacte, il surprend et séduit également par son refus du sensationnalisme, refermant le film sur une note profondément humaine et émouvante. Eprouvant, oui, mais aussi plein d’humanité.

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