Un trou dans la tête (A hole in the head) – de Frank Capra – 1959

C’est difficile à imaginer aujourd’hui, mais La Vie est belle a été un échec à sa sortie, précipitant la chute de Liberty Bells, la société de production de Frank Capra, et par la même occasion l’indépendance du cinéaste multi-oscarisé. Quelques films en demi-teinte plus tard, Capra est même resté absent des plateaux de tournage pendant plusieurs années. Avant de faire un retour (bref) avec Un trou dans la tête.
L’incomparable rythme des comédies de Capra est toujours au rendez-vous. Mais d’une certaine manière, on a le sentiment que le cœur n’y est plus vraiment. En tout cas jusqu’au dernier quart d’heure, bouleversant et euphorisant comme… ben oui, comme La Vie est belle, Monsieur Smith au Sénat et tous les grands chefs d’œuvre de Capra.
Cette conclusion capraesque en diable ferait presque oublier la première heure et demie en demi-teinte, qui oscille entre la comédie très sympathique et l’impression de redite maladroite. Techniquement, pourtant, Capra innove : Un trou dans la tête est à la fois son premier film en couleurs, et son premier film en Cinemascope, deux nouveautés qu’il maîtrise d’emblée parfaitement. Dans l’air du temps, il dirige aussi l’une des grandes stars du moment : Frank Sinatra, qu’il fait chanter à plusieurs reprises (notamment High Hopes, qui deviendra un tube oscarisé, et l’hymne de la campagne de JFK).
Sinatra dans un rôle taillé sur mesure pour lui : un séducteur, flambeur, père de famille immature. A ses côtés, la vieille garde incarnée par Edward G. Robinson et Thelma Ritter, vieux couple irrésistible, et quelques réjouissants seconds rôles. Parce que le plaisir est là, sans aucun doute, mais constamment restreint par ce sentiment que Capra n’a plus cette magie qui faisait de ses meilleurs films des classiques instantanés (ou en tout cas éternels).
Mais bon, je ne fais la fine bouche que parce que c’est un film de Capra. Signé par un autre, Un trou dans la tête serait avant tout une charmante comédie entraînante et émouvante. Mais c’est signé Capra, et ce constat n’en fait qu’une charmante comédie. Entraînante et émouvante, mais très mineure dans la filmographie du grand homme.








