Play it again, Sam

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Archive pour la catégorie '2020-2029'

Ambulance (id.) – de Michael Bay – 2022

Posté : 26 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, ACTION US (1980-…), BAY Michael | Pas de commentaires »

Ambulance

Un film à montrer à tous les apprentis cinéaste. Enfin, pas tout : 2h16, c’est long, surtout les deux heures du milieu. Disons l’interminable scène de braquage de banque, à montrer en écho à celle de Heat, dont elle est une énième resucée.

Ces deux scènes côte à côte, imaginons chacun des deux films réalisé par le réalisateur de l’autre : Mann aux commandes d’Ambulance, Bay aux commandes de Heat. Vous avez l’image ?

Bon… Imaginerait-on Mann balader sa caméra au sommet d’une tour et la redescendre aussi sec vers l’action, comme s’il filmait un grand huit en caméra subjective ? Un plan sorti de nulle part et sans aucune justification, parce que non : il ne se passe rien au sommet de cette tour.

Imaginerait-on aussi Mann filmer des types tirant à l’arme lourde sans contrechamps, comme s’il filmait l’intérieur d’un stand de tir ? Le choc de Heat aurait alors un effet proche du néant.

Voilà un peu l’effet que procure Ambulance, film interminable et creux, où Bay fait à ce point du Bay qu’il ne cesse de s’autociter explicitement, évoquant (dans les dialogues) The Rock ou Bad Boys comme des socles fondateurs dont il n’est jamais sorti. Tant mieux pour ses fans. Qui existent.

Misanthrope (To catch a killer) – de Damián Szifrón – 2023

Posté : 24 septembre, 2023 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2020-2029, SZIFRON Damian | Pas de commentaires »

Misanthrope

Il est souvent passionnant de voir des réalisateurs étrangers s’emparer des codes du thriller américain. Parce que le genre semble marquer le pas depuis quelques années (il faut dire que les franchises ne laissent guère de place), et parce qu’un regard biberonné à une autre culture permet souvent de réinventer ces codes, tout en en respectant leur importance.

De Robert Siodmak à Barbet Schroeder, les exemples ne manquent. Cette fois, c’est un réalisateur argentin qui s’y colle, et ça ne saute pas aux yeux : Misanthrope a plutôt les allures d’un thriller nordique, et pas seulement parce que l’action se déroule en plein hiver, avec de grandes scènes enneigées. Il y a aussi un aspect rugueux et austère chez les personnages, qui sont plutôt des caractéristiques du Grand Nord.

Ce qu’on pourrait dire aussi, d’une certaine manière, d’un grand classique du film de tueurs en série, auquel on pense immanquablement beaucoup : Le Silence des Agneaux, que cite ouvertement Damián Szifrón. Faire de l’héroïne une jeune novice tourmentée confrontée dès sa première affaire à un tueur méthodique est insaisissable n’est pas un hasard.

Il y a du Clarice Sterling dans le personnage joué par Shailene Woodley, aux antipodes du tout-venant des héroïnes hollywoodiennes : une policière effacée, pas même charismatique, mais obsessionnelle et pleine d’empathie. Une qualité centrale dans ce film, dont la principale originalité repose peut-être sur l’importance qu’il accorde à l’humanité de ses personnages, du super-enquêteur joué par l’intense Ben Mendelsohn au du tueur aussi glaçant… que touchant.

C’est aussi, et surtout, un vrai thriller, d’une efficacité redoutable, admirablement tendu, qui rappelle les meilleurs aspects d’un cinéma de genre en voix de disparition avec l’omniprésence des super-héros. La mise en scène est précise et inspirée (on pardonnera à Szifrón les quelques plans « à l’envers » gratuits et tape-à-l’œil), le scénario intelligent, les personnages attachants… Que du bon dans ce thriller épatant.

The Wastetown (Shahre Khamoush) – d’Ahmad Bahrami – 2022

Posté : 18 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, BAHRAMI Ahmad | Pas de commentaires »

The Wastetown

Un lieu unique : une casse automobile au milieu de nulle part. Une poignée de personnages seulement (sept, pas un de plus à l’écran). Peu de dialogues, encore moins d’effets faciles, de longs plans fixes dans un noir et blanc sans fioriture… Ce film iranien fait le choix de la simplicité et de la modestie, et le résultat est fascinant autant que glaçant. Parce que cette simplicité ne nuit en rien à la gravité du sujet, et à la grande force esthétique du film.

Au contraire, même. Le réalisateur iranien Ahmad Bahrami, dont c’est le troisième long métrage (et le premier à sortir en France) affiche une maîtrise exceptionnelle du langage visuel, avec ce sens du rythme assez parfait, et ces longs plans fixes qui se prolongent lorsque les personnages sont sortis du cadre, juste le temps qu’il faut pour laisser l’imagination du spectateur boucher les trous… Serait-ce l’influence du cinéma d’Ozu ?

Le sujet est fort. Une jeune femme qui vient de sortir de prison où elle a passé dix ans pour le meurtre de son mari, arrive dans cette casse où elle espère retrouver la trace du fils qui lui a été enlevé des années plus tôt. Dans cette casse, elle rencontre trois hommes, qui tous savent ce qu’est devenu l’enfant, mais qui vont chacun à leur manière utiliser leur position de mâle dominant pour profiter de la situation.

Trois hommes, trois rencontres, trois journées, et le même motif qui se répète inlassablement. Un visage fermé, une porte qui se referme, puis le broyeur de la casse qui se met en marche, et un drap blanc qui recouvre tout, comme s’il pouvait purifier la triste héroïne… Si le film a surmonté les obstacles de la censure, c’est sans doute qu’il suggère plutôt qu’il ne montre. Mais ce qu’il ne montre pas est bien là, glaçant et révoltant.

Et ce qui reste, au-delà de la beauté des images, c’est aussi le regard de Baran Kosari, bouleversante dans le rôle de cette femme abîmée, dépouillée de ses droits de mère et livrée à la volonté des hommes, qui refuse de subir. Et ce n’est rien dire de la dernière séquence, d’une force extraordinaire, qui vous remue jusqu’au plus profond. Impossible d’en dire quoi que ce soit de plus précis, mais c’est un moment qui ne laisse pas indemne.

Hokusai (id.) – de Hajime Hashimoto – 2020

Posté : 16 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, HASHIMOTO Hajime | Pas de commentaires »

Hokusai

Fait n°1 : les biopics me gavent. Fait n°2 : il y a une exception au fait n°1, les biopics de peintre. Fait n°3 : Hokusai fait partie de l’exception au fait n°1 énoncée dans le fait n°2. Et il part avec une belle ambition, celle-là même qui fait la réussite des meilleurs films du genre : mettre en image la fièvre créatrice, nous plonger dans l’âme de l’artiste.

C’est ambitieux, ça donne lieu à pas mal de très belles images, mais ce n’est qu’en partie réussi. La vie d’Hokusai, grand maître de l’estampe japonaise au XVIIIe siècle (c’est à lui qu’on doit la fameuse série de vues sur le Mont Fuji), est assez passionnante : jeune chien fou à une époque où le geste artistique est un acte politique et dangereux, qui découvre la sagesse sur le tard, et se lance à un âge déjà avancé dans un voyage solitaire à travers le Japon, d’où il tirera ses œuvres les plus célèbres.

Sa vie est passionnante, mais l’ambition de Hajime Hashimoto est donc ailleurs : dans cette volonté de donner corps à l’acte de création, qui échappe donc à toute logique purement narrative. La volonté est belle, le scénario est intelligent, l’interprétation intense, les images souvent magnifiques. Mais le réalisateur ne frôle la pure réussite qu’à deux reprises.

D’abord, lors d’une scène de tempête. Alors que les éléments se déchaînent sur le ville, balayant la poussière et les feuilles de papier, Hokusai semble sortir de la réalité du moment. Il s’installe au milieu de la rue, sort son matériel, et se met à dessiner le vent, avec avidité, comme fermé au danger qui l’entoure.

Ensuite, plus tardivement, une étonnante séquence de création met en scène, physiquement, le jeune Hokusai et le vieux Hokusai. L’acteur qui interprète le jeune chien fou et celui qui joue le vieux maître sage sont côte à côte, laissant aller leurs mains comme envoûtées par l’acte de création, aboutissement d’un parcours qui permet à l’artiste d’être enfin complet

Dans les deux cas, l’idée est belle, et les images aussi. Mais la sincérité ne suffit pas à créer ce moment de pure magie cinématographique, cette intensité irréelle qu’on attend et qui ne vient jamais vraiment. On reste à la surface de l’œuvre. Elle est belle, cette surface. Mais comme devant un tableau, on attend autre chose : qu’il/elle nous transporte, et nous bouleverse.

Burning days (Kurak Günler) – d’Emin Alper – 2022

Posté : 15 septembre, 2023 @ 8:00 dans * Polars européens, 2020-2029, ALPER Emin | Pas de commentaires »

Burning Days

Il n’y a pas que Nuri Bilge Ceylan dans le cinéma turc. L’importance du plus grand cinéaste vivant ne doit pas faire oublier d’autres noms eux aussi passionnants, comme Emin Alper qui, neuf ans et deux films après un premier long métrage très remarqué (Derrière la colline), revient avec ce thriller politique sous tension, qui réussit un premier pari assez fou sous « l’ère Ceylan » : filmer les grands espaces de l’Anatolie en échappant constamment à l’influence du réalisateur de Winter Sleep.

Ils sont pourtant importants, les paysages. Mais comme une présence envoûtante et inquiétante qui, dès les premières images, commencent à peser sur le personnage principal, tout jeune procureur venu de la ville, qui vient d’arriver dans cette petite localité perdue au milieu de nulle part, où tout semble archaïque. Tellement intègre qu’il en apparaît rigide, il est confronté à une corruption galopante, et côtoie des notables dont les principaux amusements consistent à traverser la ville en tirant vers le ciel à coups de fusils, tout en tirant derrière leur pick-up la dépouille sanglante d’un sanglier abattu.

Il y a des allures de western dans Burning Days. De film noir aussi, avec cette histoire d’eau lourde qui ne peut pas ne pas faire penser à Chinatown, d’autant plus que le même sentiment de paranoïa généralisée ne cesse de se développer. Quelque chose de bestial aussi, qui fait un peu penser au récent et puissant Serment de Pamfir, dans une séquence alcoolisée qui fait basculer le récit vers une dimension plus cauchemardesque. Et même quelque chose du cinéma de Carpenter dans un final étouffant au suspense hallucinant.

Ce personnage de procureur est en tout cas fascinant. Trop droit, trois jeune, trop lisse, trop pâle même, et trop différent pour ne pas se heurter frontalement à une population autochtone dont on ne sait si elle est composée d’idiots ou de monstres. Ce doute est constant, oppressant, jusqu’à donner lieu à un final quasi irréel, et inoubliable.

En tant que film de genre, Burning Days est déjà très, très intense. Mais Emin Alper signe par ailleurs un film éminemment politique, beaucoup plus que le cinéma de Ceylan par exemple. Il met en scène un pays tiraillé entre l’Est et l’Ouest, gangrené par la corruption, ancré dans des traditions d’un autre temps, profondément et dangereusement homophobe… Glaçant.

Les Herbes sèches (Kuru Otlar Üstüne) – de Nuri Bilge Ceylan – 2023

Posté : 12 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, CEYLAN Nuri Bilge | Pas de commentaires »

Les Herbes sèches

Enchaîner deux chefs d’œuvre absolus, c’est déjà rarissime dans l’histoire du cinéma. Mais trois, quatre, voire plus ? Je serais assez tenté d’en conclure que Nuri Bilge Ceylan est le plus grand cinéaste vivant. D’abord parce que je le pense profondément. Ensuite parce que c’est encore une fois dans un état indescriptible que je sors de son nouveau film. Comme pour Le Poirier sauvage. Comme pour Winter Sleep.

Avec cette sensation d’avoir touché du doigt la beauté formelle la plus pure, en même temps que d’avoir été plongé au plus intime de l’âme humaine. Sublime, profond, et d’une intensité absolue… Voilà que je dis des Herbes sèches ce que je disais des précédents films de Ceylan, comme si son cinéma empruntait toujours les mêmes chemins. C’est à la fois vrai (il y a des thématiques récurrentes bien sûr), et injuste : chacun de ses films est une expérience inédite, toujours plus complexe, plus vraie, et plus rude…

Dans la salle de ma toute petite ville de province, une quinzaine de spectateurs, ce qui est plutôt très bien pour un film turc de 3h17. A la sortie, j’entends l’un d’eux glisser au directeur « c’est très beau mais un peu trop long ». Je me contente d’un regard complice avec ledit directeur, incapable de dire un mot encore… Mais non : Les Herbes sèches n’est pas trop long. Ces 3h17 d’émerveillement et de malaise paraissent même a posteriori d’une grande intensité.

Il ne s’y passe pourtant objectivement pas grand-chose. Mais la vérité, l’intensité, la profondeur sont telles que le film paraît touffu, voire étouffant. Parce que le personnage principal, comme souvent chez Ceylan, n’est pas très aimable. Et qu’il évoque chez nous (chez moi) des échos très personnel, et très dérangeant.

Le « héros » de Winter Sleep était arrogant, mais séduisant. Celui du Poirier sauvage était attachant, mais arrogant. Cette fois, difficile d’aimer cet homme quasi-omniprésent à l’écran, enseignant dans le collège d’un bled très paumé du fin-fond de l’Anatolie, dont le comportement invoque rapidement un terme psychanalytique : pervers narcissique.

Ceylan n’est pas homme à juger. En tout cas, il n’est pas homme à s’arrêter à une simple catégorie (une longue conversation au cœur du film est en cela fascinante). Pervers narcissique ? Oui, notre « héros » met mal à l’aise, et agit avec ses élèves comme avec ses amis d’une manière objectivement assez répugnante. Mais si ce personnage, aussi excessif soit-il, éveillait chez le spectateur des réminiscences qu’il ne pouvait nier… ?

On découvre Samet, le personnage principal, à son retour de vacances entre deux semestres. C’est l’hiver, un hiver intense et interminable qui recouvre tout, et Samet retrouve (vaguement) ses collègues et (intensément) l’une de ses élèves, avec qui il entretient une relation troublante, dont la nature précise reste mystérieuse. Mais il y a cette lettre d’amour qu’elle écrit, qui lui est confisquée, qu’il récupère, et dont il pense avec une sorte de fierté malvenue qu’elle lui est destinée.

A raison ? A tort ? Ceylan ne tranche pas franchement, et il est assez fascinant de voir que, en lisant les différentes critiques, le ressenti du spectateur peut être différent. Qu’importe à vrai dire. Avec cette adolescente, comme avec le magnifique personnage d’une professeur amputée jouée par Merve Dizdar (Prix d’interprétation à Cannes), Samet ne cherche en fait qu’à exister, qu’à plaire, qu’à retrouver cet état d’innocence qui n’appartient qu’à sa jeunesse évaporée.

Il est odieux souvent, brimant et manipulant ceux qui se dressent entre lui et les regards qu’il cherche à capter, méprisable oui, mais pathétique surtout. Tellement pathétique que conforter son narcissisme désespérée par un passage à l’acte charnel semble inadapté, incongru… Et c’est là que Ceylan s’autorise la scène la plus inattendue de tout son cinéma : le personnage, littéralement, sort de son rôle et quitte la scène pour se réfugier sur le plateau… Parenthèse étonnante qui, loin de briser la vérité du moment, la renforce d’une manière hallucinante.

Ce n’est pas la seule audace esthétique de Ceylan, dont le travail sur le regard trouve une autre apogée ici, en mettant en scène à trois ou quatre reprises les photos d’Anatolie et de ses habitants que prend le personnage principal (sublimes photos de Nuri Bilge lui-même et de son épouse Ebre), dont l’utilisation provoque une émotion que je serais bien incapable de traduire en mots.

C’est d’ailleurs la seule limite au cinéma de Nuri Bilge Ceylan : le sentiment d’impuissance qu’il procure à celui qui tente d’exprimer l’émotion et les bouleversements que son cinéma lui a procuré. Là encore, je serais bien tenté d’abdiquer, de simplement clamer que Les Herbes sèches est un film immense, et de m’y replonger immédiatement…

Zhodi et Téhu, frères du désert – d’Eric Barbier – 2023

Posté : 26 août, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, BARBIER Eric | Pas de commentaires »

Zhodi et Téhu frères du désert

Après Le Nid du Tigre, nouvelle sortie familiale au cinéma, avec un film au thème assez similaire : l’escapade à travers des paysages spectaculaires d’un gamin qui se lie d’amitié avec un animal. Ici, un dromadaire, et le Sahara. Et trois ou quatre crans au-dessus, côté réussite.

Là encore, le film se complaît un peu trop dans les grands sentiments et les rebondissements faciles. Là encore, mais dans une moindre mesure, le méchant flirte avec la caricature. Et le personnage de la bonne samaritaine jouée par Alexandra Lamy n’apporte pas grand-chose (si ce n’est un nom populaire au générique). Bref, c’est du cinoche familial classique et pas franchement inventif.

Mais le film est réalisé par Eric Barbier, cinéaste plutôt sombre habituellement qui fait ses débuts dans la comédie d’aventure, raconteur d’histoire qui connaît son métier, et sait manipuler une caméra. Les images sont belles, et rendent justice à la grandeur envoûtante du désert. Le rythme est impeccable. Le film joue plutôt efficacement avec l’humour, l’émotion et (un peu) le suspense. Manque juste un peu de surprises…

Le Nid du Tigre (Ta’igara : an adventure in the himalayas) – de Brando Quilici – 2022

Posté : 25 août, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, QUILICI Brando | Pas de commentaires »

Le Nid du tigre

J’aimerais trouver du positif. Souligner les bons sentiments, ou au moins la beauté des paysages himalayens. Mais il faut bien se rendre à l’évidence, et le fait de s’adresser à un public autour de 10 ans n’excuse rien : il n’y a pas grand-chose à sauver dans Le Nid du Tigre.

Ce film familial accumule à peu près tous les pires travers des productions télévisuelles au rabais des années 1980 ou 1990 : mal joué, mal filmé (non, même les paysages ne rattrapent rien), mal écrit… Cette histoire d’amitié entre un orphelin et un tigre est plombée par… à peu près tout, jusqu’à un méchant caricatural comme on n’en fait plus depuis Highlander 3 (j’avais envie de tacler ce fleuron des 90s au passage, si on peut plus être méchant gratuitement…).

Indiana Jones et le cadran de la destiné (Indiana Jones and the dial of destiny) – de James Mangold – 2023

Posté : 14 juillet, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, ACTION US (1980-…), FANTASTIQUE/SF, FORD Harrison, MANGOLD James | Pas de commentaires »

Indiana Jones et le cadran de la destinée

Quinze ans déjà qu’on avait quitté notre aventurier préféré, vieillissant mais encore fringuant, à l’issue d’un épisode pour le moins faiblard malgré quelques beaux moments. Quinze ans d’annonces et de rendez-vous manqués, et voilà qu’il revient à l’aube du grand âge, et sans le regard d’un Spielberg qu’on croyait immuable. Sans Lucas aussi, ce qui pour le coup est plutôt rassurant.

Et curieusement, ce grand âge et ce regard neuf sont sans doute les meilleures nouvelles de ce cinquième opus tardif (42 ans depuis le premier film quand même) et enthousiasmant, qui nous cueille d’emblée avec une longue séquence introductive qui nous ramène à la grande période de la trilogie originelle. Même époque ou presque (la fin de la guerre en l’occurrence), mêmes ennemis (les Nazis), même rythme effréné, même nonchalance rigolarde d’un Harrison Ford rajeuni numériquement.

L’illusion est presque parfaite. Presque, parce qu’on n’échappe pas tout à fait à une espèce de lissage numérique, qui dresse une petite distance entre l’action et le spectateur. Plutôt bluffant quand même, et mené à un rythme d’enfer par un James Mangold dont on attendait le meilleur, et qui ne nous offre rien d’autre, bien plus qu’un disciple appliqué : un cinéaste enthousiasmant qui garde son identité tout en s’inscrivant ouvertement dans la lignée de Spielberg.

Après ces vingt premières minutes de pure nostalgie, la transition est brutale, et rude. Vingt-cinq ans ont passé. L’archéologue aventurier est désormais un universitaire vieillissant sur le point de sa retraite. Et c’est dans un appartement sans charme de New York qu’on le retrouve, émergeant difficilement d’une nuit trop courte. Corps fatigué, visage accusant ses 80 printemps, voix un peu plus éraillée, regard lessivé par les années et les drames récents de sa vie.

Et là, la claque : qu’un héros aussi mythique, incarné par une aussi grande star, dans une saga aussi importante, assume à ce point son âge, sans tricher, sans même rien en cacher (jamais Harrison Ford n’avait encore dévoilé aussi frontalement les effets de l’âge sur son corps), voilà qui tranche pour le moins radicalement avec le tout venant des grosses productions hollywoodiennes. Et le fait de retrouver d’abord Harrison Ford comme revenu d’une autre époque ne fait que renforcer la brutalité de ce vieillissement, qui sera constamment l’un des thèmes forts du film, si ce n’est son axe central.

Le film de Mangold séduit aussi par son refus de céder à peu près à toutes les tendances mortifères du cinéma hollywoodien actuel : il évite la surenchère gratuite, ne cède pas au fan service jusqu’au-boutiste, et ne tire pas un trait sur les événements du quatrième volet, ce que bien d’autres sagas (de Terminator à Halloween) ne se sont pas gênés de faire. Au contraire : ce qui pouvait sembler être des boulets tout pourris fournissent les éléments les plus émouvants de ce film. Et non, on ne peut pas en dire sans gâcher quelques surprises, et une conclusion magnifique qui remuera les fans de la première heure.

Il y a, quand même, tout ce qu’on attend d’un Indiana Jones : des escales dans plusieurs continents, quelques réminiscences des premiers épisodes (le retour de Sallah notamment, dans un rôle modeste mais truculent et nostalgique), des courses-poursuites dans les modes de transport les plus inattendus (séquence géniale dans un tuk tuk à Tanger, séquence rigolote à cheval dans la fameuse parade des héros de la lune à New York), et un artefact aux pouvoirs mystérieux, en l’occurrence un cadran imaginé par Archimède il y a 2000 ans, censé permettre le voyage dans le temps.

C’est généreux et inventif, avec ce petit plus qui change tout : Indiana Jones est vieux. Et il le sait. « Those days are come and gone », lance-t-il à son vieil ami avant de s’envoler pour une aventure qui ressemble furieusement à un ultime baroud d’honneur pour un homme qui se sait en bout de course. Mais il a de beaux restes, pour le moins, et tiens largement sa place dans les nombreux morceaux de bravoure.

Et puis Mangold réussit haut la main là où Spielberg et Lucas avaient échoué en 2008 : avec le sidekick d’Indy, et avec le grand méchant. Oublié l’agaçant personnage de Shia LaBeouf. Dans le rôle de la filleule d’Indiana Jones, Phoebe Waller-Bridge apporte une fraîcheur et une fausse légèreté assez parfaites. Dans celui du Nazi de service, Mads Mikkelsen est formidable, évitant les clichés faciles, et s’imposant comme le méchant le plus fascinant de la saga.

Et cette dernière scène, dont on ne peut rien dire, mais qui assure au personnage une sortie digne de lui. Le film offre deux heures trente de pur plaisir nostalgique. Mais même s’il n’y avait que cette dernière scène, elle justifierait que Harrison Ford renfile son Fedora pour cette cinquième et ultime fois. Et puis, qu’une saga basée sur une idée presque cartoonesque de l’action se conclue sur un épisode abordant frontalement le vieillissement, ça a quand même pas mal de gueule…

* Voir aussi : Les Aventuriers de l’Arche perdueIndiana Jones et le Temple maudit, Indiana Jones et la Dernière Croisade et Indiana Jones et le Royaume du Crâne de cristal.

Showing up (id.) – de Kelly Reichardt – 2022

Posté : 13 juillet, 2023 @ 8:00 dans 2020-2029, REICHARDT Kelly | Pas de commentaires »

Showing up

First Cow, son dernier film en date, avait été une sorte d’apogée pour Kelly Reichardt, qui nous plongeait au cœur de l’Amérique des pionniers comme peu de cinéastes avant elle. Après ce western fascinant et sublime, on ne s’attendait pas à ce qu’elle creuse le même sillon. De fait, elle emprunte un chemin apparemment radicalement différent, aux antipodes cette fois de la notion même du cinéma de genre.

On pourrait résumer (comme certains critiques ne se sont pas privés de le faire) Showing up comme un film où il ne se passe rien. Ce n’est pas tout à fait faux, mais c’est encore moins vrai : il se passe énormément de choses dans ce film, mais des petits riens physiques, ou de grandes tempêtes intérieures. Bref, rien de spectaculaire, et pas de grand travail de reconstitution : le film suit le quotidien d’une sculptrice bien d’aujourd’hui, dans les derniers jours qui précèdent son exposition.

Rien de spectaculaire, et rien de séduisant non plus : Michelle Williams, aux antipodes de son rôle incandescent de The Fabelmans, incarne une artiste de l’ombre, qui mène une vie morne et plutôt solitaire, pas très sympathique et franchement pas aimable. Pas même un génie : ses sculptures séduisent, mais provoquent davantage de réactions polies que de réels enthousiasmes…

Son quotidien, dans ces derniers jours avant sa grande expo, ce sont ses longues séances de travail dans son garage sans charme, à la porte à moitié ouverte sur la route et les poubelles. Ses relations taiseuses avec ses parents divorcés et son frère à moitié frappé. Les liens qu’elle ne cherche jamais à tisser avec les autres artistes qui fréquentent la même école d’art qu’elle, ou sa voisine et collègue qui lui ouvre son cœur mais qu’elle ne cesse d’envoyer chier…

Derrière cette froideur, on sent pourtant quelque chose de douloureux, une incapacité à s’ouvrir à l’autre, et une frustration sourde qui semble parfois sur le point d’exploser. Une scène, surtout, contient toute cette douleur qui ne demande qu’à sortir : celle où, seule dans son appartement alors que sa voisine reçoit des amis, elle manipule et observe les sculptures qu’elle vient de terminer. Là, Kelly Reichardt capte une tension dont on sent qu’elle peut se transformer en violence explosive…

Il y a la frustration, il y a aussi le dégoût que le personnage semble éprouver pour elle-même, et qui se cristallise autour de ce pigeon, personnage central du film, que notre héroïne retrouve à moitié bouffé par son chat, et dont elle se débarrasse en lançant un cruel « va mourir ailleurs », alors que sa voisine le recueille et le soigne. Ce pigeon sera mine de rien un révélateur, un guide, et un lien avec la société, et même avec la vie…

Le film est fait de petits riens, de minuscules accidents. Il est lent, très. Mais cette lenteur, qui mène à la frontière de l’ennui sans jamais vraiment y verser, finit par nous mener dans un étrange état second, où les émotions affleurent sans jamais s’imposer. Un film peu aimable, mais beau et douloureux, comme son personnage principal.

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