Play it again, Sam

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Archive pour la catégorie '2010-2019'

Halloween (id.) – de David Gorden Green – 2018

Posté : 20 janvier, 2024 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, FANTASTIQUE/SF, GREENE David Gordon | Pas de commentaires »

Halloween

Difficile de suivre la saga Halloween. Dès le deuxième film, on sent bien qu’il y a eu un énorme conflit d’envies autour de cet univers. John Carpenter lui-même aurait voulu en faire une série anthologique : impliqué un peu malgré lui dans la première suite de son chef d’œuvre originel de 1978, il s’est passionné pour le numéro 3 en espérant (en vain) en faire autre chose que ce qu’il était condamné à devenir : une déclinaison sans conclusion possible autour de la figure de Michael Myers, l’increvable « Shape », ou croquemitaine.

Depuis, plusieurs suites directes, un remake officiel et sa suite, des suites-reboots, deux décès pour Laurie Strode/Jamie Lee Curtis. Autant dire que, disons depuis à peu près trente-cinq ans, on n’attendait plus grand-chose de Halloween. Rien d’autre en tout cas qu’un vague plaisir coupable qui s’était nettement émoussé depuis que Donald Pleasance est mort, nous privant de cette figure hautement caricaturale mais si familière du Docteur Loomis.

Et puis voilà qu’est arrivé un nouvel Halloween, onzième film officiel, et troisième à porter ce simple titre (après le film de Carpenter et son remake de Rob Zombie). Un film signé David Gordon Green, ce qui est une bonne nouvelle : réalisateur du très beau Joe, le gars n’est pas un spécialiste de l’horreur, mais c’est un authentique (bon) cinéaste. Et non pas un remake, un reboot, ou quel que soit le terme à la mode du moment. Non : une suite, une vraie.

Et à la question épineuse de « comment faire une énième suite après tant de suites qui remettaient systématiquement en question les précédents films », Green apporte une réponse simple, qui se résume dans son film à une unique réplique : les suites que l’on connaît ne sont que l’illustration des fantasmes générés par le traumatisme du premier film. En gros : tout ce qui suit le générique de fin du film originel de 1978 n’a jamais existé.

Le procédé est un peu facile, et particulièrement en vogue dans le cinéma américain d’aujourd’hui, totalement gangrené par la logique étouffante des « franchises » jusqu’au-boutistes. On s’est planté en tirant sur la ficelle ? Faisons comme si de rien n’était… Ça peut ressembler à du foutage de gueule (si, si). Ou ça peut être salvateur. Et c’est précisément l’impression que donne le film de Green, qui est, et de loin, ce que la série a fait de plus enthousiasmant depuis le film de Carpenter.

Parce que oui, David Gordon Green est un excellent réalisateur, qui sait créer une atmosphère et donner du sens à ses images. La manière dont il filme Michael Myers se réappropriant ce masque devenu si mythique en quarante ans est assez impressionnante. Visuellement très beau, en tout cas. On peut saluer aussi la facilité avec laquelle il impose sa propre patte esthétique, tout en multipliant les clins d’œil, parfois très explicites, au film de Carpenter.

Et puis le plaisir de retrouver Jamie Lee Curtis quarante ans plus tard, dans la meilleure réinvention de son personnage que l’on ait eu l’occasion de voir. Une femme âgée et traumatisée, hantée par les souvenirs de ce film et de cette nuit. C’est à elle qu’on s’identifie bien sûr, ne serait-ce que pour une raison précise : comme elle, c’est le souvenir du Halloween de 1978 qui nous hante, et qui rend si efficace cette suite tardive.

Parce qu’au-delà de ses qualités évidentes, ce Halloween version 2018 ne dépasse jamais son modèle, auquel il se réfère constamment jusqu’à citer ouvertement plusieurs scènes (des travellings dans les rues d’Haddonfield, le drap de fantôme, des plans à travers les fenêtres, le corps qui disparaît au pied du balcon… la liste est presque sans fin).

Et puis au fil d’un dialogue, on nous rappelle que le film de Carpenter se terminait avec un décompte de cinq morts. Cinq morts « seulement », pourrions-nous ajouter, tant la surenchère est devenue la norme. Et cette surenchère, Green ne l’évite pas, comblant avec la loi de la masse sa principale limite : bon réalisateur, il n’a pas le génie de Carpenter pour, à partir de pas grand-chose, créer un profond sentiment d’angoisse. Les petits moments de tension que l’on ressent ici, si sympathiques soient-ils, n’ont rien à voir avec la peur profonde que l’on ressent toujours devant ce classique fondateur.

Les Délices de Tokyo (An) – de Naomi Kawase – 2015

Posté : 17 janvier, 2024 @ 8:00 dans 2010-2019, KAWASE Naomi | Pas de commentaires »

Les Délices de Tokyo

En cherchant la recette des dorayakis, on tombe facilement sur des sites qui nous indiquent une vingtaine de minutes de préparation seulement. Avec ça, il ne faut sans doute pas s’attendre à ressentir les mêmes émotions que les personnages de ce beau film de Naomi Kawase. Parce qu’avec Tokue, la vieille dame qui convainc Sen de l’embaucher pour l’aider dans sa petite boutique des restauration rapide, confectionner le dorayaki dépasse largement le simple cadre gastronomique.

Un état d’esprit, une communion avec ce qui nous entoure, une manière d’accepter son destin et d’aller de l’avant, pas moins : voilà ce que représentent les dorayakis. Et si vous ne savez pas ce que c’est (en gros, deux pancakes enserrant des haricots rouges confits et sucrés), c’est que vous n’avez pas vu Les Délices de Tokyo. C’était mon cas. J’en sors avec le cœur empli d’émotions, ce genre d’émotions où la tristesse et la joie se mélangent dans un même mouvement…

Nous sommes donc à Tokyo, dans un quartier sans grand charme, si ce n’est cet imposant cerisier qui, à la belle saison, se pare de superbes fleurs blanches. C’est à cette période que débarque Tokue, 76 ans et les doigts déformés par la lèpre, qui tente de convaincre le gérant d’une bicoque de dorayamis qu’il fait tourner sans passion, de l’embaucher. Il finit par accepter, séduit par ses haricots…

Et c’est une belle histoire d’amitié qui s’installe peu à peu, à travers ces longs mouvements mille fois répétés pour préparer ces fameux haricots… en écoutant ce qu’ils ont à dire. La beauté, immense, de ce film repose sur une culture qu’un occidental n’a à peu près aucune chance de connaître, mais qu’importe. Naomi Kawase filme les gestes, les silences, les regards, et c’est d’une beauté renversante.

A travers ces dorayakis, la cinéaste filme en fait les efforts de trois solitudes pour se raccrocher à la vie : Tokue donc (magnifique Kirin Kiki), Sen, qui trimballe un sombre passé qui le hante, mais aussi la jeune Wakana, collégienne un peu en marge, vivant seule avec une mère qui semble avoir bien du mal à accepter ce rôle de mère… Trois solitudes, trois générations, qui finissent par créer une sorte de cocon presque familial.

Beaucoup de fans de la première heure de Naomi Kawase ont fait la fine bouche dans ce film tendre et délicieusement sucré, qui rompait visiblement assez radicalement avec ses précédentes réalisations. Etant très ignorant de la filmographie de la dame, pas de comparaison possible. Je me contente donc de fondre et de me déclarer officiellement amoureux de son cinéma. En tout cas de ce film.

Prédestination (Predestination) – de Michael et Peter Spierig – 2014

Posté : 13 janvier, 2024 @ 8:00 dans 2010-2019, FANTASTIQUE/SF, SPIERIG Michael, SPIERIG Peter | Pas de commentaires »

Prédestination

Une blague éculée dite par un barman à un client : « Qui est arrivé en premier ? La poule ou l’œuf ? ». « Le coq », répond le client. Voilà peut-être la meilleure façon de résumer ce film passé à peu près inaperçu (en tout cas par moi), presque dix ans après que deux frères australiens passés à peu près inaperçus (en tout cas par moi) l’on réalisé.

Dit comme ça, ça paraît bien mystérieux. Et le problème est que raconter beaucoup plus de l’histoire aurait pour fâcheuse conséquence de gâcher la découverte d’une intrigue qui pousse très, très loin la notion de paradoxe temporelle. Prenons Looper par exemple, sur le même thème. Ou même L’Armée des 12 singes. Ce genre de paradoxe, mais à l’extrême, du genre à s’inspirer de la Sainte-Trinité.

Et là je me rends compte que si un internaute indulgent a commencé à lire ce troisième paragraphe, c’est qu’il est un minimum intrigué par ce début de chronique. Le fait est que Prédestination mérite le voyage. Oui, les frangins Spierig poussent un peu loin le bouchon de la bouche temporelle, et donnent franchement le sentiment de faire les malins. Mais ils le sont (malins), et réussissent à surprendre le spectateur qui croyait l’être (malin) en voyant venir la grosse surprise finale.

Sur le papier, c’est donc assez brillant. Gratuitement brillant, mais brillant tout de même. Et à l’écran, c’est d’une sobriété et d’une simplicité qui force le respect. Après une remarquable première séquence où les angles de prise de vue destinés à cacher le visage du personnage évoquent l’esthétique des comic books, le film prend un parti pris franchement étonnant vu le sujet (il est question de crimes et de voyages dans le temps, donc).

A savoir : une grande partie du film se résume à un face à face entre deux personnages, dans un bar. Dispositif on ne peut plus économe, dont la réussite doit beaucoup à la présence d’Ethan Hawke dans le rôle du barman, ou du voyageur, ou… Ethan Hawke, acteur à la fois sobre et dense, dont la présence magnétique transcende chacune de ses scènes.

The Bookshop (id.) – d’Isabel Coixet – 2017

Posté : 24 novembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, COIXET Isabel | Pas de commentaires »

The Bookshop

Il y avait la promesse d’une bluette charmante à la Chocolat de Lasse Halström, dans cette histoire d’une jeune femme décidée à ouvrir une librairie dans un petit village anglais dominé par une riche femme acariâtre. Las… Tout est cliché, tout est laid, et rien ne marche.

On aimerait aimer cette histoire. On aimerait aimer ce personnage interprété par Emily Mortimer. On aimerait être surpris par la « méchante » jouée par Patricia Clarkson. On aimerait être charmé par les décors et emporté par l’atmosphère. Mais non. On regarde ça avec un simple désintérêt.

Seul Bill Nighy réussit à attirer l’œil. Trop brièvement : son personnage d’amoureux des livres vivant en reclus n’est mystérieux qu’un temps, et disparaît plus vite encore qu’il n’était apparu. Cette adaptation d’un roman à succès de Penelope Fitzgerald manque décidément cruellement d’âme.

Alceste à bicyclette – de Philippe Le Guay – 2013

Posté : 19 octobre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, LE GUAY Philippe | Pas de commentaires »

Alceste à bicyclette

Un acteur en vogue (il est le héros d’une série médicale sur TF1, c’est dire) se rend sur l’île de Ré pour tenter de convaincre un autre acteur, retiré du monde depuis des années, de remonter sur scène pour une adaptation du Misanthrope qu’il s’apprête à monter. Plaisirs des deux amis de se retrouver, répétitions qui n’en finissent plus, séduction et manipulation… Le retraité va-t-il faire son retour ? Ou se contente-t-il de profiter de cette parenthèse avant de la refermer ?

On pourrait presque dire la même chose d’Alceste à bicyclette que de Un coup de maître. Les deux films prennent pour cadre un microcosme artistique. Les deux films mettent en scène un duo d’amis dont l’un a pris le parti de jouer le jeu, tandis que l’autre est incapable de faire le moindre compromis. Et dans les deux films, le plaisir vient avant tout des comédiens : Lambert Wilson et Fabrice Luchini en l’occurrence.

Luchini surtout, dont je découvre décidément un peu tardivement à quel point il est un grand acteur. Il est formidable ici, jouant avec ses propres tics d’acteurs lorsqu’il interprète le comédien retiré du monde renouant avec la comédie. Formidable et touchant. Un peu troublant aussi, dans sa manière de se jouer de son entourage, authentique misanthrope qui ne voit personne d’autre que lui pour jouer Alceste, mais qui se refuse à s’y abaisser.

Le film n’est pas totalement convaincant en revanche lorsqu’il sort de cette amitié qui semble d’abord si pure. Philippe Le Guay nous laisse un peu en chemin en complexifiant cette relation, flirtant avec quelque chose de nettement plus toxique. Mais Luchini est grand, Wilson est très bien, et Maya Sansa (la belle actrice de Nos meilleures années) est parfaite en divorcée à la croisée des chemins. Pour les acteurs.

Dans la maison – de François Ozon – 2012

Posté : 14 octobre, 2023 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2010-2019, OZON François | Pas de commentaires »

Dans la maison

C’est marrant comment on a systématiquement envie de dire que Luchini est sobre, dans un film où il est formidable. C’est marrant, parce que ça a un côté un peu, même franchement, injuste. Comme si l’acteur, si exubérant en promo, n’était pas l’un des très très grands, et ce depuis des années, comme si ses excès et sa pause de beau parleur vampaient son jeu si fin.

Dans Dans la maison, il est donc sobre. Comme Jouvet l’était : avec ce débit qui lui est si caractéristique, et cette intelligence du jeu qui le place toujours là où on ne l’attend pas vraiment. Semblable, et différent à chaque film, Luchini explore ici une zone particulièrement inconfortable, dans un rôle qu’on dirait pourtant sur mesure.

Pensez donc : un prof de lettres vieillissant qui mène une vie de bobo, parle littérature avec passion, et jeunesse avec méfiance. Mais ce prof, marié à une Kristin Scott-Thomas parfaite en contrepoint bousculé dans ses habitudes, se prend de passion pour le talent caché d’un étudiant taciturne, qui lui donne l’inspiration qui lui manquait depuis longtemps pour écrire son propre livre.

Les écrits que lui livre cet adolescent le fascinent : il y raconte ses rapports troubles avec une famille parfaite en tous points en apparence (avec des parents joués par Emmanuelle Seigner et Denis Ménochet), dans des compositions écrites qui sont en fait des récits intimes, dont lui-même (Luchini) s’inspire pour son grand roman… quitte à pousser le jeune homme à aller toujours plus loin.

Dans la maison, sous ses faux airs de thriller hitchcockien, est un film qui crée un malaise persistant, tant le personnage de Lucchini s’y enfonce dans une relation toxique, pour le moins troublante. Il est question de création, d’emprise morale, de manipulation, de désir et des limites qu’il ne faudrait pas franchir. Ozon signe l’une de ses grandes réussites, et échappe totalement à toute velléité moralisatrice. On lui en sait gré.

La French – de Cédric Jimenez – 2014

Posté : 11 octobre, 2023 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2010-2019, JIMENEZ Cédric | Pas de commentaires »

La French

Il faut au moins reconnaître à Cédric Jimenez son ambition : ils ne sont pas si nombreux, les cinéastes français, à vouloir à ce point tirer le film de genre vers le haut. Ou disons vers ses modèles américains les plus glorieux. Et c’est bien ce qu’il fait avec ce film, pourtant très français et inspiré d’une histoire vraie : la french connection et l’assassinat du juge Michel.

Sa principale limite, sans doute, est d’hésiter constamment entre une reconstitution précise et rigoureuse, et une dramatisation de l’intrigue pour rendre le film plus… plus quoi ? fun ? efficace ? américain ?

C’est clairement une limite, parce que cette histoire n’en avait pas besoin : pas besoin de cette rencontre improbable entre le juge et le parrain qui semble n’avoir été écrite que pour aménager une scène commune à Jean Dujardin et Gilles Lellouche, et pour citer en passant une autre rencontre au sommet, dans le Heat de Michael Mann.

Pas besoin non plus de faire du juge un authentique cowboy qui finit par se mêler physiquement à l’action, comme si son courage n’était pas si flagrant. Des moments censés être immersifs qui ont l’effet totalement inverse sur le spectateur, qui aimerait que le réalisateur lui fasse un peu plus confiance…

Ces réserves faites, il faut reconnaître une belle efficacité, une reconstitution assez bluffante, un vrai sens du rythme, et surtout une belle idée, qui doit beaucoup au chef d’œuvre de Michael Mann d’ailleurs : mettre en scène les deux antagonistes dans leur vie familiale, gommant les différences dans leurs rapports à leurs femmes. Avec pour effet de rendre ce sinistre fait divers humain, et l’affrontement, pour le coup, vraiment dramatique.

Mann n’est pas la seule influence de Jimenez, qui flirte aussi beaucoup du côté de Scorsese, dans cette longue séquence qui permet de planter le décor et de présenter les différents personnages, séquence qui serait brillante si elle ne souffrait de la comparaison avec son modèle évident, Les Affranchis. Disons que c’est le retour de bâton que risque tout cinéaste cinéphile : gare à la comparaison.

The Lost City of Z (id.) – de James Gray – 2016

Posté : 2 octobre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, GRAY James | Pas de commentaires »

The Lost City of Z

En quittant la jungle urbaine qui était le décor de ses cinq premiers films, James Gray allait-il rester ce cinéaste passionnant que l’on aime tant ? Non, il fait mieux que ça : il se réinvente, et signe tout simplement son chef d’œuvre, ce film dont on se dit qu’il est le signe de tous les possibles. Gray peut s’emparer d’un univers qui a priori lui est étranger, et en faire une œuvre profondément personnelle, et d’une intensité folle. Bref, il peut tout faire : ses deux films à suivre (le SF Ad Astra et le très intime Armageddon Time) le confirmeront.

N’anticipons pas… The Lost City of Z est d’abord une histoire vraie : celle de Percy Fawcett, officier britannique du début du XXe siècle, qui est envoyé au cœur de l’Amazonie avec la mission d’établir une carte détaillée de ces contrées encore sauvages, alors que lui ne rêve que d’exploits héroïques pour effacer la tâche familiale que représente le comportement d’un père alcoolique et joueur.

La figure du père… Omniprésente depuis Little Odessa dans l’œuvre de Gray, elle est ici doublement centrale : d’abord dans ce poids que représente le souvenir du père disparu, puis dans les relations que fuit Fawcett avec son propre fils, dont la naissance correspond à son premier voyage, et qui finira par partir avec lui pour son ultime aventure amazonienne vingt ans plus tard.

Et ce n’est pas spoiler que d’évoquer « l’ultime » voyage : le poids du destin pèse constamment sur le film, la conscience que cette plongée dans une aventure qui tourne à l’obsession finira mal, et mystérieusement. L’obsession : le fil conducteur du film, qui donne le sentiment de creuser de plus en plus profondément le même sillon, au fil des voyages successifs.

Charlie Hunnam est exceptionnel dans ce rôle d’une intensité dingue, personnage douloureux et tourmenté, habité par une soif absolue de s’accomplir, et qui ne trouvera un semblant d’apaisement qu’en flirtant avec les limites de l’humanité. Et on notera aussi au passage la prestation d’un Robert Pattinson méconnaissable en compagnon de voyage, magnifique contrepoint au personnage de Fawcett.

On pense bien plus à Aguirre d’Herzog qu’aux Aventuriers de l’Arche perdue de Spielberg. Mais The Lost City of Z est sur un autre registre, plus intime, étrangement plus apaisé aussi. Un film qui, au fond, échappe à toute comparaison possible pour s’imposer comme un grand James Gray. Un film visuellement splendide, dont la beauté formelle nous plonge dans les méandres mentaux de son héros. Un chef d’œuvre.

Le Retour du héros – de Laurent Tirard – 2018

Posté : 29 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, TIRARD Laurent | Pas de commentaires »

Le Retour du héros

Pendant les guerres napoléoniennes, le capitaine Neuville est appelé sur le front à la veille de son mariage avec Pauline, jeune femme de la petite noblesse provinciale, qui reste désespérée en attendant désespérément des nouvelles de son fiancé, et se laissant bientôt dépérir. Pour la stimuler, sa sœur Elisabeth écrit elle-même des lettres qu’elle dit être de Neuville, lui inventant des exploits militaires, et finalement une mort héroïque. Mais le « capitaine » réapparaît trois ans plus tard, et Elisabeth le découvre crève-la-faim, lâche, déserteur… Il décide alors de se faire passer pour le héros que toute la ville pense qu’il est.

L’histoire est plutôt séduisante, et aurait pu donner un film d’aventure à l’ancienne assez sombre, ou une comédie réjouissante. Laurent Tirard fait le choix de la comédie. Pourquoi pas, donc. Mais tout sonne faux, constamment, dans ce film visuellement très propre (réalisation soignée, rien qui dépasse, pas même de poussière sur les meubles), et écrit comme… en fait non, pas écrit du tout.

On ne croit ni aux rebondissements, ni aux personnages, et encore moins aux dialogues dignes d’un atelier d’écriture pour élèves de primaire. Les acteurs sont en roue libre, mal dirigés et impuissants face à des personnages si mal définis. Alors Jean Dujardin ressort sa panoplie (et ses mimiques) d’Hubert Bonisseur de la Bath. Et Mélanie Laurent passe son temps à observer la scène avec un petit sourire amusé ou agacé, c’est selon.

Rien à sauver, hélas.

1917 (id.) – de Sam Mendes – 2019

Posté : 17 septembre, 2023 @ 8:00 dans 2010-2019, MENDES Sam | Pas de commentaires »

1917

Après une longue parenthèse consacrée à James Bond (Skyfall et Spectre, deux films qui font référence, et qui l’ont occupé pendant pas mal d’années), Sam Mendes revenait en 2019 avec une nouvelle grosse production, qui était aussi un film très personnel pour lui, le premier qu’il écrit lui-même, inspiré des récits de guerre de son propre grand-père, à qui le film est d’ailleurs dédié.

Film personnel, auquel il tenait visiblement beaucoup, 1917 est pourtant assez anecdotique sur le fond : on pourrait assez facilement le résumer à un simple survival sur le front Ouest de la Grande Guerre, en France, en 1917 donc. Deux soldats sont chargés de traverser les lignes pour délivrer un message important qui pourrait sauver 1600 vies.

La simplicité du scénario est un parti-pris finalement fort. Le fait de tourner le film comme un unique plan-séquence de près de deux heures, donc sans montage apparent, en un autre. Pas novateur, ni même totalement convaincant dans la première partie, l’artificialité du procédé suscitant plutôt la curiosité, mais finalement très immersif.

1917 serait même le pendant « Grande Guerre » d’Il faut sauver le soldat Ryan, dans cette volonté du réalisateur de transcender une histoire simple et humaine en une immersion radicale et inédite dans les horreurs et la sinistre banalité de la guerre. Et sans doute le fait qu’une histoire de famille déchirée vienne se greffer au récit n’est pas un hasard.

Mendes ne tombe pas dans le piège de la surenchère. Même la course-poursuite dantesque dans les ruines fumantes d’un village, ou l’assaut final, ne sont filmés que du point de vue du personnage principal, soldat britannique dont on ignore tout de la vie, et qu’on n’apprend à connaître qu’à travers son visage blême et son regard dévasté, le rôle d’une vie pour George MacKay.

Brillant et passionnant, 1917 est un film impressionnant, mais surtout humain. Mendes pourrait faire le choix de l’hyperréalisme avec ce procédé de long plan-séquence. Mais le réalisme n’est que d’apparence, ne serait-ce que parce qu’il ne fait que donner le sentiment du temps réel. Il condense en fait en deux heures toute l’humanité sacrifiée, la peur, le courage, le désespoir, dans un vaste mouvement qui n’est peut-être pas totalement réaliste, mais qui est à coup sûr celui de la vie.

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