Mesures exceptionnelles (Extraordinary Measures) – de Tom Vaughan – 2008
Généralement, il suffit qu’un film américain soit estampillé « inspiré d’une histoire vraie » pour que ça me donne envie de tourner le dos : c’est la promesse presque assurée d’un film bourré de bons sentiments, qui vaudra à son acteur principal l’Oscar tant attendu depuis le début de sa carrière, et au spectateur une petite nausée pour cause de niaiseries un peu trop sucrées… Mais là, la présence de Harrison Ford (dans son premier rôle depuis Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal) m’a poussé à me vautrer devant ce qui s’annonçait comme un mélo larmoyant. Et de fait, les premières séquences sont à la hauteur de l’attente : à faire pleurer le cœur le plus dur. Pas difficile d’ailleurs, de faire pleurer autour de l’histoire (vraie, donc) d’une famille marquée par la maladie, puisque deux des enfants sont atteints d’un syndrome rare et incurable : leur espérance de vie ne dépasse par les 9 ans…
Alors évidemment, on pleure, mais pas autant qu’on l’aurait cru/craint : le réalisateur Tom Vaughan aborde même les scènes les plus dures avec une pudeur rare. La scène où la petite Megan passe à deux doigts de la mort était particulièrement casse-gueule, mais Vaughan la filme avec une sobriété exemplaire, qui force le respect. Surtout que la gamine n’est pas l’actrice tête-à-claques que l’on voit souvent dans les films hollywoodiens.
Lorsque le personnage d’Harrison Ford entre réellement en scène, le film devient même assez passionnant : la personnalité de ce chercheur plus intéressé par les recherches elles-mêmes que par leurs débouchées, plus intéressé par sa liberté de scientifique que par l’idée de sauver des enfants, apporte une touche de cynisme aussi inattendue que bienvenue. Et Ford est épatant. Sur le papier, on avait pourtant un peu de mal à l’imaginer crédible en génie de la science. Mais il est simplement parfait, n’en faisant jamais trop dans son personnage de vieil ours mal léché.
Bon… Fraser, par contre, n’est pas exactement le meilleur acteur du monde, mais il fait son possible, franchement. Et puis son personnage de père de famille qui lâche son boulot pour s’associer avec le scientifique, et déjouer tous les pronostics quant à la survie de ses enfants, est très joliment écrit. Là encore, le cynisme ne tarde pas à transpirer de cet homme héroïque, certes, mais prêt à marcher sur le seul homme qui ait cru en lui pour obtenir ce qu’il veut. Ses relations avec l’industrie pharmaceutique au cœur du film sont également très complexes : lorsque Fraser reproche à l’un des responsables que sa seule ambition est de faire de l’argent, et pas de sauver des gens, son interlocuteur, moins salaud que son faciès ne le laisse imaginer, lui rétorque que ses grandes idées ne l’empêchent pas d’accepter tous les compromis pour que ses enfants soient prioritaires sur tous les autres. Il aurait pu ajouter que la première conséquence du combat de ce père de famille a été de l’enrichir considérablement…
Bref, on est ici dans un pur mélo, mais dans un mélo bien foutu, et plus intelligent qu’il n’y paraît…