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Gravity (id.) – d’Alfonso Cuaron – 2013

Posté : 27 novembre, 2013 @ 1:05 dans 2010-2019, CUARON Alfonso | Pas de commentaires »

Gravity

Bon, alors ? ça donne quoi, le film événement de cette fin d’année, celui devant lequel se pâme toute la critique américaine ? Sur le fond, pas grand-chose : le film est un survival assez classique dans sa manière d’enchaîner les rebondissements et de faire se succéder des étapes bien définies. Grosso modo : les passages successifs d’une station spatiale à l’autre… Remplacez l’espace par une jungle ou tout autre environnement hostile, et vous aurez une histoire déjà vu des tas de fois au cinéma.

Egalement scénariste, Cuaron ajoute aussi une réflexion sur le deuil pas très convaincante, mais aussi sur la volonté de vivre plus forte que tout. L’évocation de cette fille disparue n’apporte pas grand-chose d’autre qu’un supplément de larmes faciles.

Mais la forme, elle, est à tomber par terre. La virtuosité de Cuaron, qui avait déjà fait de ses Fils de l’homme le meilleur film de science-fiction de la décennie précédente, est ici le sujet-même de Gravity : sa raison d’être et son principal enjeu. Cuaron a d’ailleurs consacré plus de quatre ans à la préparation de ce film, pour trouver de nouvelles manières de filmer l’espace et l’apesanteur.

Le résultat est bluffant et inédit, et pas seulement en 3D (j’ai vu le film en 2D). La sensation d’être soi-même en apesanteur est totale, grâce aux mouvements d’une caméra qui semble elle-même n’être tributaire d’aucun effet de pesanteur.

Les images sont absolument sublimes, et le rythme parfait : pas une seconde de baisse de régime ne vient apporter une quelconque trêve au spectateur, qui vit une expérience de cinéma totale et sans précédent, perdant ses repères, retenant son souffle, se lançant dans une valse désespérée avec George Clooney (très bien) et Sandra Bullock, qui trouve, sans mal, son rôle le plus fort à ce jour.

Les Fils de l’Homme (Children of Men) – d’Alfonso Cuaron – 2007

Posté : 9 août, 2011 @ 12:45 dans 2000-2009, CUARON Alfonso, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Les Fils de l'homme

Difficile de se mettre à la place de la postérité (elle a sa logique parfois incompréhensible, parfois franchement injuste), mais je ne serais pas étonné si ce film passé plutôt inaperçu devenait, dans quelques décennies, un classique de la science fiction… Sur le fond, le film s’inscrit dans la grande tradition du genre : on se retrouve dans un futur relativement proche (2027), alors que le monde a sombré dans le chaos. Seule l’Angleterre parvient tant bien que mal à conserver un semblant de société ordonnée.

L’originalité de l’histoire, c’est que le chaos ne vient pas d’un conflit nucléaire, mais… de la stérilité du genre humain : pas une naissance depuis 18 ans. Le monde que nous montre Cuaron ressemble à première vue beaucoup à celui que l’on connaît : pas de voitures volantes, ni d’écrans interactifs à tous les coins de rue. Mais l’absence d’avenir de cette humanité promise à l’extinction plane non comme une menace, mais comme une promesse. Il y a dans ce film un désespoir, un manque d’innocence, qu’on a l’impression de pouvoir toucher du doigt. Clive Owen, intense et bouleversant, symbolise à lui seul cette humanité sans rêve, dans cette société où tout projet d’avenir est devenu inutile. Ancien militant activiste des droits de l’homme, il traverse Londres comme un fantôme, à peine secoué lorsqu’il échappe de peu à un attentat à la bombe, ne retrouvant une étincelle de vie que lorsqu’il retrouve la mère de son fils, mort des années plus tôt (Julianne Moore) ; ou lorsqu’il se retrouve chez son ami hippie (Michael Caine, touchant), qui a choisi un illusoire retour à la nature en vivant au milieu des bois…

Cette atmosphère désespérée est palpable dès les premières images. La gueule fatiguée de Clive Owen n’y est pas pour rien. Mais le film doit surtout à Cuaron, le gars qui a quand même donné un nouveau souffle à la saga Harry Potter (pas sûr qu’on trouve rapidement un texte sur ce film dans ces pages, remarquez…). Sa mise en scène étonne par son économie apparente de moyens, par l’absence (ou la discrétion, en tous cas) des effets spéciaux, et par la longueur de ses plans, y compris et même surtout dans les moments les plus spectaculaires. Dès le début du film, un long plan séquence plante le décor : debout dans une rue londonienne, Owen boit un café lorsque, en arrière plan, une explosion dévaste le coffee shop dont il vient de sortir. Tout ça dans une même image d’une force exceptionnelle. Et le film est parsemé de ces plans-séquences d’anthologie, qui plongent le spectateur au cœur de ce monde qui n’a pas entendu un rire d’enfant depuis plus de quinze ans…

Dans sa narration, le film est d’une simplicité extrême : le personnage de Owen est recruté par son ex pour escorter une jeune femme noire vers une base de rebelles. Une mission qu’il prendra à cœur lorsqu’il découvrira que la jeune femme est enceinte… Même si cette découverte se fait au milieu d’une étable, dans une image qui semble sortie du plus naïf des tableaux pastoraux, l’émotion est là, immense. Et ne retombe jamais : même dans les moments qui frôlent le ridicule (les soldats qui baissent leurs armes en entendant un pleurs de bébé), le film est d’une beauté troublante. Même quand il tombe dans le grand-guignol (avec le personnage haut en couleurs interprété par Peter Mullan), il émeut. Même dans ses moments discutables, Children of men paraît juste… C’est peut-être aussi ça la marque des grands films.

 

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