Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour mars, 2023

Le Parfum vert – de Nicolas Pariser – 2022

Posté : 31 mars, 2023 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2020-2029, PARISER Nicolas | Pas de commentaires »

Le Parfum vert

Une comédie policière un peu rétro… Voilà le genre de plaisir qui ne se boude pas. Nicolas Pariser flirte ouvertement du côté d’Hitchcock. Une petite chose gentiment désuète qui pourrait suffire à mon bonheur, si le réalisateur avait su proposer autre chose qu’une compilation de clins d’œil et de citations plus ou moins évidentes.

Beaucoup d’Hitchcock, donc, des 39 marches à La Mort aux trousses en passant par Sueurs froides et beaucoup d’autres, mais aussi du Tintin (avez-vous remarqué la statuette de l’Oreille cassée), et quelques autres références. Ce catalogue de citations a deux effets : premièrement, il conduit assez vite à un sentiment de profonde lassitude ; deuxièmement, il permet de tenir jusqu’à la fin du film sans trop s’ennuyer, en s’amusant à reconnaître tel ou tel film.

On en sort quand même avec une vraie frustration. On pouvait attendre un peu plus d’originalité et d’audace de cette histoire de course poursuite à travers l’Europe, avec un duo mal assorti incarné par Sandrine Kiberlain et Vincent Lacoste. Elle, illustratrice lasse et prête à se lancer dans toutes les aventures. Lui, comédien très rive gauche dont un camarade est mort sur scène après lui avoir murmuré d’étranges paroles à l’oreille. Et ça, oui, c’est L’Homme qui en savait trop.

Le Bossu – de Philippe de Broca – 1997

Posté : 30 mars, 2023 @ 8:00 dans 1990-1999, DE BROCA Philippe | Pas de commentaires »

Le Bossu

Dans les années 1990, on n’attendait plus grand-chose de De Broca, dont la grâce de l’époque de Cartouche ou L’Homme de Rio semblait irrémédiablement appartenir au passé. Et puis est arrivée cette nouvelle version du Bossu, et avec elle un cinéma d’aventure au souffle épique et généreux, d’une grande efficacité.

Beaux paysages, combats à l’épée dynamiques et inventifs, personnages hauts en couleurs… Ce Bossu-là réussit la prouesse, plus encore que La Fille de D’Artagnan de Tavernier, de trouver un rythme et un ton bien dans l’air du temps, sans moderniser le propos à l’excès.

Le roman de Paul Féval (déjà porté à l’écran par André Hunnebelle, dans une version ringardisée par celle-ci) est donc respecté. Lagardère, aventurier errant que prend sous son aile le duc de Nevers, disparaît avec la fillette de ce dernier après que le duc a été tué par les hommes de Gonzague, intriguant qui convoitait ses propriétés. Des années plus tard, Lagardère réapparaît, décidé à accomplir sa vengeance.

« Si tu ne viens pas à Lagardère, Largardère ira à toi ! » Elle a de la gueule cette réplique, dans la bouche d’un Daniel Auteuil formidable en héros d’aventure digne des plus grandes incarnations du genre. Le film repose en partie sur son dynamisme, sur sa faconde, sur son aisance dans les combats comme dans les joutes verbales, ou sur sa crédibilité en « bossu » difforme.

Le casting est absolument parfait : Marie Gillain en fillette devenue grande et troublante (y aurait à redire côté morale), Fabrice Luchini en traître formidablement odieux (et tout en sobriété), Vincent Pérez en virevoltant duc de Nevers, ou encore Philippe Noiret, irrésistiblement fat dans une nouvelle incarnation de Philippe d’Orléans (vingt ans après Que la fête commence). Un pur plaisir.

Maternité éternelle (Chibusa yo eien nare) – de Kinuyo Tanaka – 1955

Posté : 29 mars, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, TANAKA Kinuyo | Pas de commentaires »

Maternité éternelle

Les deux premiers films de Kinuyo Tanaka (Lettre d’amour et La Lune s’est levée) étaient magnifiques. Celui-ci est sans doute le plus personnel de tous ceux qu’elle a réalisés. Celui qui véhicule aussi la plus grande urgence, jusque dans l’histoire de sa production. Le film s’inspire de l’histoire de la poétesse Fumiko Nakajo, morte en 1954 à 31 ans, quelques mois seulement avant le tournage. Sa mort, la biographie que lui consacre le journaliste qui fut son amant, le scénario qu’en tire Sumie Tanaka (aucun lien), et le film de Kinuyo Tanaka… Tout ça s’enchaîne en l’espace d’un an.

Triste destin que celui de Fumiko, femme trompée, divorcée, séparée de son fils, amputée de ses seins suite à un cancer qui finit par gagner les poumons… Le genre de destin qui inspire les pires mélodrames hollywoodiens. Kinuyo Tanaka en tire un film évidemment bouleversant (que celui qui ne pleure pas dans les dernières scènes quitte ce blog immédiatement), mais avant tout sensible et délicat.

Humble et audacieux, aussi. Tanaka filme cette histoire sans fioriture, avec une extrême simplicité, et un sens aigu du détail. C’est cette simplicité qui domine, parce que tout ce que filme l’actrice (qui s’attribue le petit rôle de la voisine) et réalisatrice est strictement au service du personnage, de sa douleur et de sa dignité. Mais le film est aussi très audacieux donc, dans sa manière d’aborder le cancer et le corps des femmes, frontalement, sans voyeurisme ni misérabilisme.

Dans le cinéma des années 50 (et pas uniquement le cinéma japonais), aborder un sujet comme celui-ci avec cette approche là, directe, est exceptionnel. A vrai dire, dans les décennies qui suivront aussi. Tanaka filme la mort qui rode, le corps qui trahit. Elle filme une mère hantée par l’idée de perdre ses enfants, mais aussi une femme dont le corps, amputé, réclame cet amour que pourrait lui offrir le journaliste, qui est venu pour un sujet voyeuriste (une jeune poétesse aux portes de la mort juste après la publication de son premier ouvrage), et qui est resté par amour.

L’étreinte qui unit ces deux êtres inspire à Tanaka ses deux plans les plus audacieux, et peut-être les plus beaux. L’un, étrange caméra subjective adoptant le point de vue… du lit. L’autre, délicat et déchirant, captant la main de l’une, et le regard de l’autre. C’est beau, comme le regard de M. Hori comprenant les sentiments de celle dont il admire tant les poèmes. Ou le regard des enfants se raccrochant à leurs espoirs. Tiens… M’en va retourner verser quelques larmes, moi.

The Black Watch (id.) – de John Ford – 1929

Posté : 28 mars, 2023 @ 8:00 dans 1920-1929, FORD John | Pas de commentaires »

The Black Watch

Pour le moins inégal, ce Ford des premiers temps du parlant. The Black Watch aborde de nombreux thèmes, ébauche de multiples pistes. Parfois avec beaucoup de bonheur, parfois avec un résultat nettement moins convaincant.

Les scènes dialoguées sont ainsi lourdes et figées, franchement peu convaincantes. Cela s’explique : quelques mois seulement après l’apparition du parlant, Hollywood tâtonne encore dans ce domaine. Le moins qu’on puisse dire ici, c’est que ces dialogues pèsent sur le rythme et la cohérence du film. Il faut dire aussi que ces scènes dialoguées ont été confiées à Lumsdal Hare, l’acteur qui joue l’officier en chef de la Black Watch et qui était aussi metteur en scène de théâtre. Une fausse bonne idée.

C’est dans les scènes plus vivantes que l’on retrouve le talent de Ford. Ce moment, notamment, où le personnage joué par l’incontournable Victor McLaglen s’éloigne dans la nuit, laissant derrière lui les chants de ses camarades de régiment qu’une mission secrète l’oblige à abandonner, les laissant croire qu’il est un lâche fuyant la violence des combats.

L’histoire se déroule durant la Grande Guerre, alors que son régiment d’Ecossais, la Black Watch, s’apprête à embarquer pour le front de France. L’occasion pour Ford de filmer des scènes de camaraderie comme il les aime tant, et de nous plonger dans la culture écossaise comme il l’a tant fait avec l’Irlande. L’occasion aussi de filmer une séquence mémorable sur un champ de bataille des Flandres, images plongées dans l’obscurité et réduites à quelques plans percutants et dramatiques.

McLaglen, lui, a dû quitter ses frères d’arme pour mener à bien une mission top secret en Inde, où il doit éviter une guerre civile. Cette partie, centrale, est plombée par plusieurs handicaps. D’abord, cette manie hollywoodienne de confier des rôles d’indigènes à des acteurs très blancs (Roy d’Arcy et Myrna Loy, qui surjouent lourdement l’accent indien, sans avoir grand-chose de pertinent à jouer). Et puis un exotisme à la limite de la caricature.

Quelques belles idées surnagent dans cette Inde de carte-postale : Victor McLaglen en séducteur patriotique (un emploi pour le moins inattendu), une évocation très d’actualité de la violence extrême au nom de la religion, ou encore une scène de massacre assez glaçante, qui vient mettre un sacré coup à la notion de bien ou de mal, et que Ford filme en laissant planer le doute sur ses intentions. Il sera en tout cas plus ouvertement critique lorsqu’il filmera une autre scène de massacre assez similaire, dans le sous-estimé Quatre hommes et une prière.

Deux durs à cuir (What Price Glory) – de John Ford – 1952

Posté : 27 mars, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, CAGNEY James, FORD John | Pas de commentaires »

What Price Glory Ford

Vu il y a une quinzaine d’années, What Price Glory m’avait laissé dubitatif : Ford me semblait hésiter constamment sur le ton à adopter, finissant par lasser, et conduisant tout droit à un franc désintérêt. L’un de ses films démissionnaires, concluais-je, estimant que le grand Ford avait une tendance, surtout à cette période de sa carrière, d’abdiquer sur des projets qui ne le passionnaient pas. 1952 était donc l’année d’un film de cœur (L’Homme tranquille, effectivement magnifique), et d’un film de commande inabouti.

Le revoir me permet d’évaluer l’étendue de mon erreur d’alors. What Price Glory est un film très fordien, dont les ruptures de ton permettent au cinéaste d’aborder avec une légèreté feinte des thèmes particulièrement sombres : cette guerre qui tue les gamins, et où toute forme d’héroïsme est traitée avec une ironie bien cruelle.

What Price Glory est le remake d’un film muet de Walsh, auquel Ford a semble-t-il participé, lui-même adapté d’une pièce de théâtre. De la pièce initiale, il reste de longues séquences dans des décors très léchés et chaudement éclairés, qui figurent une vision très hollywoodienne de la France et des champs de bataille de la première guerre mondiale.

On voit bien ce qui a pu attirer Ford dans ce projet, qu’il connaissait donc de longue date : l’opposition vacharde mais pleine de tendresse entre deux officiers qui passent leur temps à s’engueuler et à se battre. Un rôle qu’en d’autres temps, il aurait sans aucun doute confier à Victor McLaglen. Qui d’ailleurs était le capitaine Flagg de Walsh. En 1952, John Wayne était le choix logique de Ford, mais la production préférait James Cagney.

James Cagney ce sera, donc, que Ford oppose à Dan Dailey, que Ford avait déjà dirigé dans When Willie comes marching home. Et ce double choix de casting est une idée de génie. Parce que Cagney et Dailey viennent du music-hall, et ont une expérience de danseurs. Et parce qu’ils apportent leur sens de la chorégraphie à leur opposition, une incarnation savamment excessive qui donne au film ce ton si proche de la pure comédie.

On sourit, et on rit même franchement devant ce duo qui se dispute inlassablement les faveurs de la belle Française Corinne Calvet. Mais ce marivaudage se heurte constamment aux ordres impitoyables des officiers supérieurs, qui ne cessent de les envoyer au front. Alors la comédie se heurte aux réalités de la guerre, à sa cruauté. Cela donne des scènes déchirantes : cette marche à travers les hautes herbes, où tombent un à un les jeunes recrues ; le face-à-face de Flagg avec la jeune fiancée qui attend vainement son homme…

Le rire devient jaune. L’ironie mordante de Cagney se teinte d’amertume, puis d’écœurement. Ford ne désarme pas, mais finit par resserrer son monde sur l’essentiel : la camaraderie, le sentiment d’appartenance. On en sort avec un sourire bien amer pour le coup, mais assez emballé.

La Mascotte du régiment (Wee Willie Winkie) – de John Ford – 1937

Posté : 26 mars, 2023 @ 8:00 dans 1930-1939, FORD John | Pas de commentaires »

La mascotte du régiment

Un film de commande, très librement adapté de Kipling ; un véhicule pour la toute mimi Shirley Temple, 9 ans à l’époque ; une comédie de régiment dans l’Inde coloniséeVoilà qui sent à plein nez le ratage, et pourtant, Ford fait de ce Wee Willie Winkie un très joli film, effectivement très mignon, mais aussi bien plus que ça.

Shirley Temple débarque dans l’Inde de la fin du XIXe siècle avec sa maman, devenue veuve et criblée de dettes en Amérique. Les voilà donc commençant une nouvelle vie dans le régiment dirigé par le grand-père paternel de la fillette, qu’elles n’ont jamais rencontré : un officier britannique raide et sévère qui a bien du mal à se comporter autrement que comme un officier raide et sévère. Tandis que la mère et la fille trouvent leurs marques, la révolte des Indiens gronde contre l’administration anglaise.

Rien ne devrait marcher dans ce film taillé pour Shirley Temple, où aucune occasion n’est ratée pour mettre en valeur sa bouille irrésistible. On a ainsi droit à une longue séquence de manœuvres avec la fillette marchant au pas au côté des soldats. Rien ne devrait marcher dans ce film qui oscille (ou hésite) constamment entre différents tons : comédie ou drame, avec une touche de romance et de suspense. Rien ne devrait marcher dans cette histoire où Ford a dû imaginer un personnage à confier à Victor McLaglen, alors que le scénario ne le prévoyait pas.

Rien ne devrait marcher, et pourtant tout fonctionne parfaitement. Peut-être parce que Ford glisse par ci par là de belles scènes intenses et sensibles comme il sait les faire. Celle de la mort de l’un des personnages notamment, moment bouleversant qui met en perspective l’innocence de la fillette et les regards d’adultes qui l’entourent. Ou, plus anodine mais également très belle, celle du bal derrière ce rideau de persiennes. Belle scène aussi où le vieil officier joué par C. Aubrey Smith baisse la garde face à sa petite-fille, révélant une humanité inédite.

L’histoire d’amour entre la mère (June Lang) et le jeune soldat (Michael Whalen) reste en second plan : c’est le point de vue de l’enfant qui prime. C’est son regard qu’adopte Ford : un regard innocent et pur, qui se garde bien de prendre parti ou de juger. Et qui conduit à une conclusion que seul un esprit enfantin pouvait imaginer.

Le Temps du châtiment (The Young Savages) – de John Frankenheimer – 1961

Posté : 25 mars, 2023 @ 8:00 dans * Polars US (1960-1979), 1960-1969, FRANKENHEIMER John, LANCASTER Burt | Pas de commentaires »

Le Temps du châtiment

Deuxième long métrage pour Frankenheimer, et première collaboration avec Burt Lancaster, qu’il retrouvera à plusieurs reprises (toutes marquantes) tout au long de cette glorieuse décennies 1960. Dès Le Temps du châtiment, la vision sombre du cinéaste est flagrante, cette manière si personnelle d’appréhender frontalement les problèmes sociaux les plus complexes et les plus brûlants, par le prisme du film de genre.

Le film commence en quelque sorte là où se termine West Side Story, dans un quartier de New York en plein chantier de rénovation, où se déchirent blousons noirs et Porto-Ricains. Que le film de Robert Wise soit sorti cette même année 1961 ne peut pas être un hasard, tant la première séquence du film de Frankenheimer semble familière, dans l’esprit si ce n’est dans le ton.

Cette première séquence, servant de générique, est particulièrement forte : Frankenheimer y filme la marche décidée, au pas cadencé que rien ne semble pouvoir arrêter, de trois gamins aux blousons de cuir. Une musique entêtante, inquiétante, des gros plans et un montage au cordeau… On le sent : la mort est au bout de cette séquence, qui s’achève effectivement avec un jeune homme sur le sol, mort poignardé.

Lancaster ne tarde pas à entrer en scène, assistant du procureur chargé de faire condamner les trois jeunes à la chaise électrique, lors d’un procès qui pourrait bien ouvrir les portes de la politique à son patron. Lancaster, impérial, minéral, formidable dans le rôle de cet homme qui a eu la même jeunesse que ceux qu’il doit faire condamner, mais qui lui s’en est sorti. Ce serait déjà un cas de conscience pour l’ancien loubard. C’est pire : l’un des accusés est le fils de celle qu’il a bien failli épouser des années plus tôt (Shelley Winters, toujours parfaite).

Le film, sans dévoiler la fin, ne plonge pas totalement dans la noirceur absolue, s’autorisant quelques ressors dramatiques qui paraissent un peu factice. Mais à la marge, seulement. Au fond, c’est surtout la complexité des situations qui frappe, la manière dont Frankenheimer évite soigneusement tout angélisme, et tout jugement facile. Il nous plonge au contraire dans le difficile cheminement de son héros, à la recherche de la vérité, mais tiraillé entre deux mauvaises directions, entre la certitude d’être accusé au choix de racisme ou de clientélisme.

Par cette complexité, par ses scènes de rue criantes de vérité (plus que par sa dernière partie durant le procès), Le Temps du Châtiment annonce avec fracas les réussites majeures de Frankenheimer, cinéaste dont la redécouverte est décidément pleine de belles et puissantes surprises.

Thelma et Louise (Thelma & Louise) – de Ridey Scott – 1991

Posté : 24 mars, 2023 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, SCOTT Ridley | Pas de commentaires »

Thelma et Louise

Cinq minutes, max. C’est ce qu’il faut à Ridley Scott pour faire ressentir au spectateur ce qu’est le quotidien d’une femme bridée, brimée, privée de sa liberté et de son libre-arbitre. On a beaucoup parlé du souffle de Thelma et Louise, de la dernière image inoubliable, ou de l’apparition d’un Brad Pitt tout minot et capable de faire virer sa cuti au plus macho des hétérosMais tout ça ne rend pas forcément justice à la première qualité de ce film : celle d’être profondément féministe, dans ce que ce terme a de plus révolté.

Louise, Susan Sarandon, serveuse aimée par un loubard un peu frimeur et maladroit, mais désespérément sincère (Michael Madsen, cabot très cinégénique), définitivement abîmée par un vieux traumatisme dont on ne peut que deviner (sans guère de doute) la nature destructrice. Thelma, Geena Davis, épouse docile et aliénée d’un sale con castrateur, qui ne voit en elle que la brave domestique qui va lui préparer les petits plats qu’il mangera ou pas, selon son bon-vouloir…

Ces deux-là décident de s’évader le temps d’un week-end, qui ne tardera pas à virer à la débandade, ou à la rédemption, c’est selon. Après tout, l’une comme l’autre est foutue, marquée par le destin, par les hommes. Ridley Scott a plutôt l’image d’un cinéaste couillu et très masculin. Ce qui ne l’a jamais empêché d’offrir des rôles très forts, très émancipés, à des femmes : Sigourney Weaver dans Alien, Demi Moore dans A armes égaleset bien sûr Geena Davis et Susan Sarandon, qui trouvent là les rôles de leur vie.

Autour d’elles, les hommes sont pour la plupart des ordures, ou au mieux des parasites. Les rares exceptions ne peuvent que rêver d’un rôle qu’ils pourraient jouer dans ce drame, dont ils ne sont au fond que des spectateurs tristement passifs : Madsen, donc, et Harvey Keitel, flic compréhensif dont le regard est une sorte de synthèse de celui du spectateur devant l’écran. Son humanité ne peut que se liquéfier face au drame qui se noue

Il y a le fond, et il y a la forme. Elle est belle et discrète, la forme. Sans grandiloquence franchement marquée, Scott souligne mine de rien le passage psychologique de ses deux héroïnes, cette bascule vers un sentiment de profonde liberté, de délivrance, qui prend les attraits mythiques car très cinématographiques des grands espaces américains, du Grand Canyon, de Monument Valley, des couchers de soleils spectaculaires.

C’est l’imagerie de l’Ouest sauvage, d’avant les frontières, que Scott invoque, comme représentation du refus tardif de Thelma et Louise de subir l’asservissement des hommes. Et c’est une splendeur visuelle, en plus d’être bouleversant. Ridley Scott a fait plus spectaculaire (Blade Runner avant, Seul sur Mars après), rarement plus humain et universel que cette ode sensible et désenchantée à la liberté, à la fin tout de même inoubliable.

Didier – d’Alain Chabat – 1997

Posté : 23 mars, 2023 @ 8:00 dans 1990-1999, CHABAT Alain, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Didier

Oui c’est con : un chien, laissé en garde à un type un peu largué, se réveille dans le corps d’un homme sans qu’on sache pourquoi. C’est con, et c’est voué à l’échec. Et oui, ça a un intérêt purement cinématographique assez limité. Mais la magie n’opère pas uniquement dans cette transformation.

Et si le film est si réjouissant, c’est parce qu’Alain Chabat est aux manettes, qu’il ose et qu’il y croit pour son premier film derrière la caméra. Et surtout, parce que personne d’autre que lui n’aurait pu être si… ne disons pas réaliste, non, mais crédible, en chien. Et parce que face à lui, il y a Jean-Pierre Bacri, acteur génial en toutes circonstances, y compris en quadra largué qui réalise que le type à poil qu’il découvre au petit déj dans le panier du chien… c’est le chien.

Didier n’est pas un grand film, pas même un film totalement réussi : on sait gré à Chabat de ne pas avoir chercher une quelconque explication à son miracle, mais ce faux suspense dans les coulisses (pourries) du football paraît franchement superflu. D’ailleurs, si on met de côté les prestations exceptionnelles de Chabat et Bacri, le film est une comédie sympa mais lambda, embarrassée par une quantité de seconds rôles sympas mais lambdas, qui n’apportent pas grand-chose.

Mais il y a ces deux-là, sans qui le film aurait été un fiasco garanti, mais grâce à qui il est devenu (instantanément) l’une des comédies cultes du cinéma français des années 90, et l’une de celles qui a le mieux vieilli. Grâce soit rendu à Chabat et à son regard de labrador. Grâce soit rendu à Bacri et à son sens de la réplique. « Qu’est-ce que je disais, moi?… Ah oui : on ne sent le cul de personne ! »

Le Shérif aux mains rouges (The Gunfight at Dodge City) – de Joseph M. Newman – 1959

Posté : 22 mars, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, NEWMAN Joseph M., WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Shérif aux mains rouges

The Gunflight at Dodge City : voilà un titre qui claque, plus en tout cas que l’étonnante « traduction » française. Un règlement de compte dans l’une des villes les plus mythiques de l’Ouest, point d’orgue annoncé d’un western qui coche scrupuleusement toutes les cases incontournables du genre. Sans le transcender, sans surprendre, sans même entraîner un enthousiasme démesuré.

Le film est de ces westerns qui se veulent biographiques, mais qui prennent d’énormes libertés avec la réalité. Le héros en l’occurrence, c’est Bat Masterson, le genre de noms que l’on connaît sans trop savoir ce qu’ils nous évoquent. Une figure (authentique) de l’Ouest, donc, un nom dont on sait parfaitement qu’on l’a déjà croisée dans plus d’un western. Mais où ?… réponse : dans beaucoup de films évoquant la figure de Wyatt Earp, dont Masterson fut l’un des adjoints.

De Wyatt Earp, on n’entendra parler ici qu’au détour d’un bref dialogue. Le film revient, en 1h20 et avec beaucoup de libertés, sur les épisodes les plus marquants du parcours de Masterson, ancien chasseur de bison, ancien éclaireur, reconverti en propriétaire de saloon et en homme de loi par le hasard des rencontres et de la vie. C’est Joel McCrea, toujours très bien, même avec deux décennies de trop au compteur pour le rôle.

L’acteur retrouve là son réalisateur de l’excellent Fort Massacre, pour un western radicalement différent, faux biopic assez paradoxal. Parce que, d’une part, il s’autorise absolument toutes les libertés par rapport au vrai destin de son personnage. Et parce que, malgré cette liberté, le film semble engoncé par les limites de la réalité historique. Il y a bien un vague fil rouge, mais le film est pour l’essentiel une succession de moments, sans énorme enjeu suivi.

Le film est ainsi parsemé de moments de bravoure (la première fusillade notamment, impromptue et radicale), mais manque de liants. L’interprétation d’un McCrea toujours parfait, et la présence d’un comparse campé par l’indispensable John McIntire, suffisent à assurer l’intérêt, et presque à faire oublier un ultime gunfight, qui gâche un peu la bonne impression qu’avait laissé la toute première scène du film, dialogue particulièrement fort sur les effets de la violence, qui laissait espérer un drame nettement plus nuancé.

  • Dans la collection Westerns de Légende de Sidonis/Calysta
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