Le plus grand cirque du monde (Circus World) – de Henry Hathaway – 1964
Douze ans après Cecil B. De Mille et son Sous le plus grand chapiteau du monde, le film d’Hathaway relève de la même ambition. Et la réussite est à peu près aussi éclatante. Il y a le savoir-faire d’Hathaway d’abord, imparable aussi bien dans les passages intimes (il y en a beaucoup) que dans les morceaux de bravoure (il y en a tout autant).
Il y a aussi la présence de John Wayne, dont on ne dira jamais à quel point elle peut suffire à donner du liant à un film, à sauver un nanar. Et ce n’est pas un nanar, ici. Il y a encore le duo mère-fille le plus séduisant de l’histoire des duos mères-filles. Jugez plutôt : Rita Hayworth, toujours splendide, et Claudia Cardinale, déjà splendide.
Il y a enfin le scénario, riche et généreux, pour lequel on retrouve les noms de Ben Hecht, James Edward Grand, Philip Yordan et même Nicholas Ray… Du beau monde, pour une histoire qui respecte à la lettre les codes de ce qui est une sorte de sous-genre, le film de cirque, tout en visant plus haut. Résultat : un film de pur divertissement qui utilise très intelligemment ses gros moyens, mais aussi le portrait d’une époque.
Le « plus grand cirque du monde », que dirige le personnage de John Wayne, est une institution aux Etats-Unis, où existe une vraie tradition circassienne. Mais l’homme rêve d’autre chose, d’ailleurs, d’Europe : cette Europe tournée vers des divertissements moins « ambiance Far West ». C’est un peu le choc des cultures, la conquête d’un vieux monde. Et c’est passionnant, notamment parce que ce vieux monde prend les allures d’un vieil amour, et qu’il y a dans le film une belle volonté de dresser des ponts, de réparer ce qui est cassé…
Hathaway ne fait pas pour autant dans l’introspection. Tout est exacerbé dans son film : les joies, les peurs, les enthousiasmes, les catastrophes aussi. L’épopée européenne du grand cirque sera ainsi confrontée à un naufrage aussi spectaculaire que grotesque, et à un gigantesque incendie qui donne lieu à des images assez incroyables à vingt mètres du sol…
Tourné en 1964, Le plus grand cirque du monde a déjà des allures de dinosaure dans la production hollywoodienne de l’époque. Mais la tradition a encore, et toujours, du bon. Hathaway signe un sommet du genre, aussi enthousiasmant qu’un spectacle de cirque vu par les yeux d’un enfant.