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Archive pour la catégorie 'CUKOR George'

Une heure près de toi (One hour with you) – d’Ernst Lubitsch (et George Cukor) – 1932

Posté : 10 novembre, 2023 @ 8:00 dans * Pre-code, 1930-1939, CUKOR George, LUBITSCH Ernst | Pas de commentaires »

Une heure près de toi

Mineur et réjouissant : un Lubitsch parfait pour terminer une longue journée un peu difficile. Il y a dans ce film, loin tout de même des grands chefs d’œuvre à venir, ce petit quelque chose qu’on doit appeler la Lubitsch touch, une manière si joyeuse d’être léger et gentiment amoral.

A ce propos, il y a fort à parier que le film serait passé sous les fourches caudines du Code Hays, un an plus tard : il y est question des joies du mariage, mais surtout de celles du marivaudage, de l’adultère, et de ce désir sexuel qui, à l’écran, s’illustre par des images aussi hot qu’un nœud papillon qu’on défait…

One hour with you est le remake d’un petit bijou (muet) de Lubitsch : Comédiennes. Pourtant, ce n’est pas lui qui devait le réaliser mais Cukor. Ce dernier en a semble-t-il filmé une grande partie, avant d’être remplacé par son producteur (Lubitsch, donc), qui a retourné une grande partie du métrage.

C’est donc bien un Lubitsch, sans doute pas son plus personnel, et pas le plus enthousiasmant (il l’est moins que Comédiennes). Mais un Lubitsch tout de même, plein de vivacité et d’une liberté de ton qui fait mouche. Et qu’importe l’accent français surjoué de Maurice Chevalier, qui semble s’appliquer à chaque réplique pour ne pas adopter le moindre accent américain : le film est joyeux, tout simplement.

L’action se passe à Paris, mais on y parle anglais. On y parle aussi en rimes, voire en chansons : comme dans une opérette, les comédiens poussent régulièrement la chansonnette, pour des airs qui ne révolutionnent pas le genre mais qui tirent quelques sourires bienveillants. Chevalier y parle aussi au spectateur, face caméra, renforçant le côté opérette très appuyé.

Tout ça n’est pas très sérieux. Maurice Chevalier joue de son image de séducteur pour incarner cet homme « victime » de la cour répétée de la meilleure amie de sa femme, et de sa propre faiblesse. Son épouse (Jeanette MacDonald), constamment à côté de la plaque, pousse sans le savoir son mari dans les bras de son amie. Charles Ruggles, en meilleur ami de Chevalier amoureux de sa femme, est irrésistible…

C’est léger, mineur et même assez vain. Mais c’est aussi un Lubitsch qui donne la pêche, et qu’on regarde avec un sourire qui ne s’efface jamais. Décidément, parfait pour terminer une journée un peu difficile…

Comment l’esprit vient aux femmes (Born yesterday) – de George Cukor – 1950

Posté : 21 septembre, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, CUKOR George | Pas de commentaires »

Comment l'esprit vient aux femmes

Hasard de la programmation (oui, enfin, de mes choix personnels et parfois mystérieux) : après La Leçon de piano, voici un autre chef d’œuvre farouchement féministe, autre portrait d’une femme bafouée qui apprend à affirmer sa liberté et son indépendance. Derrière la caméra, George Cukor, au sommet. Forcément, l’ambiance n’est pas la même que chez Jane Campion. Tourné quatre décennies plus tôt, cette adaptation d’une pièce à succès garde pourtant la même force, la même acuité de regard sur la domination et ses effets.

Et un Oscar amplement mérité pour Judy Holliday, irrésistible dans le rôle d’une ravissante idiote qui se complaît dans l’opulence d’une vie facile au côté de son truand milliardaire de fiancé (le grand Broderick Crawford), jusqu’à ce qu’un « coach de vie » (William Holden, rigolard et parfait) lui ouvre les yeux et l’esprit grâce à des livres et aux grands sites historiques de Washington. Grand plaidoyer pour la liberté telle que les pères fondateurs de l’Amérique l’ont rêvée.

Le film ne verse toutefois jamais dans l’Américanisme claironnant. Maître de la comédie de mœurs, Cukor signe une ode au libre-arbitre et à l’ouverture d’esprit par la culture, pas un plaidoyer idéologique ou politique. Il le fait en filmant l’évolution de Billie, le personnage joué par Judy Holliday, voix haut perchée, blondeur aveuglante et regard pas si vide. Il le fait aussi en faisant de William Holden une sorte de personnification du public…

Son personnage s’amuse comme nous, se révolte comme nous, tombe sous le charme de Billie comme noue… Plus qu’un acteur de l’intrigue, il est un observateur, souvent en retrait comme lorsqu’ils visitent le Capitole, lui se contentant d’assister un sourire aux lèvres aux révélations de la jeune femme. A sa lente et profonde transformation. Pas un changement radical d’ailleurs, mais une sorte d’éclosion à la manière d’un papillon qui apprendrait à voler de ses propres ailes.

C’est souvent très drôle (l’extraordinaire partie de carte, filmée en longs plans fixes et en temps réel), parfois franchement cruel, voire pathétique, à l’image du personnage de Broderick Crawford, un homme d’un autre temps, archaïque et volontiers violent, brute plus « anti-sociale » (pour reprendre l’un des termes appris par Billie) que franchement machiavélique. Sur un thème de la métamorphose qui annonce celui de My fair Lady, Cukor signe une merveille de la comédie féministe. Pas sa première, et pas la moindre.

Indiscrétions (The Philadelphia Story) – de George Cukor – 1940

Posté : 8 septembre, 2021 @ 8:00 dans 1940-1949, CUKOR George, STEWART James | Pas de commentaires »

Indiscrétions

Magique. Tout simplement magique, le mouvement que donne Cukor à cette merveilleuse comédie du remariage. Sommet de la comédie de l’âge d’or, chef d’œuvre, un film à peu près parfait. Que peut-on même ajouter à ça ?

D’où, quand même, vient que Indiscrétions est à ce point une réussite exceptionnelle. Après tout, Cukor aborde un genre qu’il connaît très bien, celui de la comédie sophistiqué. Katharine Hepburn incarne une héritière un rien hystérique qui rappelle sa collaboration avec Howard Hawks. Cary Grant à ce mélange de raffinement et de faux détachement qui lui va si bien. James Stewart trouve l’un de ces rôles qu’il connaît par cœur, où il met maladroitement le pied dans un monde qui n’est pas le sien… Bref : un film presque routinier, sur le papier.

Alors peut-être est-ce la convergence de tous ces talents au sommet de leur talent, chacun atteignant l’apogée de ce qui le caractérise le mieux. Mais Indiscrétions est un chef d’œuvre qui domine ce genre alors très en vogue. Un film qui atteint un équilibre parfait de la première à la dernière image, dans un mouvement totalement irrésistible.

Hepburn, donc, riche héritière sur le point de se remarier avec un parvenu guère séduisant (Cukor semble quand même très attaché à une certaine forme de noblesse, gentiment patriarcale). Son ex Cary Grant qui débarque dans la fête pour réveiller les consciences, embarquant avec lui un grand benêt de journaliste à scandale (Stewart) et sa photographe qui n’a de lieu que pour lui.

Ces personnages se croisent, avec une légèreté qui n’est finalement qu’apparence. Il y a de la cruauté, un peu. Il y a surtout une douleur sourde : celle qui accompagne la prise de conscience des personnages, tirés de la tour d’ivoire qu’ils se sont créés pour se protéger des déceptions du monde. Le rythme du film évoque Lubitsch. L’humour rappelle Hawks. Mais Cukor est un vrai, grand romantique, qui au fond ne filme que l’amour qui se reconstruit.

Une double histoire d’amour, même, qui se trompe, prend des chemins de traverse, des impasses même, avant que les deux couples que l’on attend depuis les premières minutes ne se forment enfin, ou presque, lors d’un mariage qui n’était pas fait pour eux. Une merveille, vraiment.

Rockabye (id.) – de George Cukor – 1932

Posté : 4 octobre, 2017 @ 8:00 dans * Pre-code, 1930-1939, CUKOR George | Pas de commentaires »

Rockabye

Un Cukor première période, séduisant mais sans surprise : l’un de ces films pre-code qui racontent l’histoire tragique d’une jeune femme que le destin et la société n’épargnent pas. On a vu ça souvent (y compris cette même année, avec le très beau Amour défendu de Capra), et celui-ci n’est pas le plus inoubliable de tous. Pas le pire non plus d’ailleurs : Constance Bennett y est très bien en jeune comédienne dont la liberté affichée lui attire les foudres des bien-pensants, en l’occurrence des responsables d’un orphelinat qui lui retirent la garde d’une fillette qu’elle voulait adopter.

C’est le début de nombreux malheurs, tous basés sur l’illusion du bonheur à portée de main (notamment avec le toujours sympathique Joel McCrea), mais qui manquent d’un lien. Le film fonctionne bien, grâce à ce beau personnage de femme sacrificielle, mais le scénario échoue à trouver un vrai fil conducteur autre que ses malheurs qui s’accumulent.

Restent de très beaux moments indépendants les uns des autres, comme ce craquant « I like you » avec les jolis yeux de biche de Constance qui dévorent l’écran. Ou ce réjouissant personnage de mère alcoolique et faussement indigne (joué par Jobyna Holland, grande dame du théâtre) typique de cette période d’avant l’application du code Hayes. Des petits moments épars qui suffisent à assurer le plaisir.

Haute société (Our betters) – de George Cukor – 1933

Posté : 1 avril, 2014 @ 3:12 dans 1930-1939, CUKOR George | 1 commentaire »

Haute société

Un an après What price Hollywood ?, Cukor retrouve l’une de ses comédiennes de prédilection, Constance Bennett, pour un sommet de la comédie américaine de ce début des années 30. Tourné quelques mois avant l’entrée en vigueur du fameux Code Hayes, le film est d’une cruauté et d’une liberté de ton qui appartiennent définitivement à cette parenthèse hollywoodienne.

Cette critique acerbe et sans la moindre concession de la haute société anglo-américaine (les personnages, d’origine américaine pour la plupart, vivent à Londres, signe de l’universalité de ces codes), le film met en scène une héroïne qui est une manipulatrice entourée d’hypocrites. Déçue après un mariage qu’elle croyait d’amour, elle est devenue le symbole de cette société cynique. Une femme entretenue par un riche homme d’affaires dont elle profite, et qui pousse son innocente jeune sœur (Anita Louise, seule comédienne peu crédible, qui déclame étrangement son texte) à privilégier un mariage de raison. Une femme, aussi, que l’on voit céder à des désirs purement sexuels, avec le jeune amant de sa « meilleure amie ».

Le genre de scènes que l’on ne verra plus dans le cinéma américain pendant des décennies… Et ce n’est pas tout : outre l’adultère, la passion charnelle (et sans sentiment), les relations entre une « dame » et un jeune homme qui pourrait être son fils… Cukor filme également un danseur fardé et maniéreux, et évoque même une possible homosexualité féminine.

Mais surtout, Cukor met en scène la mesquinerie et l’incroyable hypocrisie de cette société pour laquelle ne comptent que l’apparence et la légèreté. Une scène, glaçante, résume parfaitement cet état d’esprit : un aveu lancé par Constance Bennett comme une boutade, qui touche au cœur la moitié des protagonistes qui n’en montrent rien, préférant se lancer tous ensemble dans un grand éclat de rire qui ne trompe personne. Mais les apparences sont sauves.

Adapté d’une nouvelle de Somerset Maugham, le film n’édulcore rien. Son héroïne, loin de se racheter (malgré un bref moment de pureté retrouvée), joue jusqu’au bout son impitoyable partition. Mais Cukor filme Constance Bennett comme il sait filmer les femmes : mieux que personne, en magnifiant ses qualités comme ses défauts, soulignant ses contradictions, sa détermination et ses regrets.

Sa manière de prononcer « perhaps » au téléphone à celui qui veut devenir son amant, une cigarette se consumant à la main, la pose glamour, le regard plein de promesses… Dans ce plan magnifique, Cukor semble tout dire de son héroïne : manipulatrice, enfantine, déterminée et surtout libre. Une femme passionnée, pleine d’envies et de vie.

• Collection RKO chez les Editions Montparnasse, avec une présentation par Serge Bromberg.

What price Hollywood ? (id.) – de George Cukor – 1932

Posté : 10 octobre, 2012 @ 12:50 dans 1930-1939, CUKOR George | Pas de commentaires »

What price Hollywood

Une star d’Hollywood donne sa chance à une petite serveuse, qui devient en quelques films l’une des plus grandes stars, pendant que la carrière de son pygmalion périclite… Plus le nom de sa protégée monte au fronton des cinémas, plus il s’enfonce dans la dépression et l’alcoolisme. Il finit par tout perdre. L’histoire vous dit quelque chose ? Normal, le film de Cukor a inspiré A Star is born (dont Cukor lui-même réalisera la deuxième version, en 1954), et il est l’une des inspirations revendiquées pour The Artist. Tout le début du film de Cukor a été repris fidèlement par Michel Hazanavicus dans son film muet.

Le réalisateur français s’est consacré uniquement au destin croisé de ses deux stars. Le film de Cukor, lui, est plus foisonnant, ou plus brouillon, c’est selon. What Price Hollywood ? semble plus spontané, moins construit. Surtout, on sent que Cukor, grand filmeurs de femmes, est bien plus intéressé par la petite serveuse qui devient une grande star que par le personnage du réalisateur Max Carey. C’est dommage, parce que le personnage interprété par Lowell Sherman est passionnant, et l’alchimie avec Constance Bennett, dans le rôle principal, est de celles qui forgent les légendes. Mais au fil du film, la relation entre ces deux-là devient secondaire, Cukor lui préférant celle nettement plus convenue et moins intéressante de la jeune star avec son mari (Neil Hamilton, charmant mais un peu transparent). Le destin tragique de Max n’est alors pas aussi bouleversant qu’il devrait l’être…

Constance Bennett, elle, trouve un rôle en or : à la fois belle et émouvante, légère et grave, drôle et tragique… Un rôle complexe et d’une extrême richesse, qu’elle assume avec talent. Me souviens pas l’avoir vue aussi juste et pleine de nuances que dans ce rôle.

Le film est aussi, et surtout, l’une des visions les plus passionnantes du Hollywood de l’âge d’or. La manière dont Cukor filme les studios évite les clichés, et nous fait réellement pénétrer au cœur de la machine à rêve. On empreinte les portes dérobées, on déambule dans les larges allées ou entre les câbles et les cordes des décors, et on a l’impression d’être de la famille. Et si le côté « machine » est bien perceptible, l’aspect « rêve » l’est tout autant. Alors que la plupart des films sur le cinéma dénonce le cynisme et la cruauté d’Hollywood, Cukor, lui, filme son milieu de travail avec amour et tendresse, sinon avec bienveillance. Visiblement pas blasé par l’usine à rêve, il n’élude pas le côté autodestructeur de certaines idoles. Mais il aime Hollywood, et ça se sent.

 

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