Duo à trois (Bull Durham) – de Ron Shelton – 1988
A quoi ça tient, parfois, l’envie de revoir un film, même un film qui m’avait laissé de marbre quand je l’avais vu il y a une vingtaine d’années : une image, furtive, en revoyant le très beau Un monde parfait que tournerait Costner cinq ans (et un statut de mégastar) plus tard. Dans le film d’Eastwood, la caméra passe rapidement sur une affiche placardée sur un mur. Les mots « Bull Durham » s’y lisent clairement : le nom d’une équipe de base-ball, et le titre d’un film porté par Costner, que les Américains adorent paraît-il.
Et voilà comment l’envie de ressortir le DVD est venue. Et de revoir ce film, totalement culte aux Etats-Unis, totalement oublié chez nous. Ce qui n’est pas étonnant : Bull Durham est un film exclusivement à la gloire de ce sport national et inexportable qu’est le base-ball. Une véritable religion pour le personnage-clé du film : une jeune fan (Susan Sarandon), mascotte hyper-sexuée qui, chaque saison, jette son dévolu sur l’un des joueurs de l’équipe.
Cette saison-là, ils sont deux : le jeune talent en devenir, Tim Robbins, irrésistible en gentil demeuré ; et Kevin Costner, d’un charisme dingue en vieux briscard (déjà : il a 33 ans) chargé de dégrossir le jeune chien fou.
Tout ça n’est pas d’une délicatesse folle. Et les nuances du base-ball échappent dans les grandes largeurs à la perspicacité d’un Français de base (moi, par exemple). Mais on prend un petit plaisir indéniable devant cette chose sans grande envergure, menée avec savoir faire et sans génie par un spécialiste du film de sports (que Costner retrouvera pour Tin Cup, autour… du golf).
Surtout, Kevin Costner commence à imposer son personnage : une sorte d’incarnation idéale et absolue de l’Amérique comme elle n’existe plus guère en dehors de lui. Un personnage qu’il n’a cessé d’approfondir depuis (et dès son deuxième film autour du base-ball, le magnifique Field of Dreams), et qui fait de lui un acteur hors du temps et, oui, précieux.