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Archive pour la catégorie 'DOUGLAS Kirk'

LIVRE : I am Spartacus (id.) – de Kirk Douglas – 2013

Posté : 27 octobre, 2024 @ 8:00 dans CURTIS Tony, DOUGLAS Kirk, KUBRICK Stanley, LIVRES, MANN Anthony | Pas de commentaires »

LIVRE I am Spartacus

Avec Le Fils du chiffonnier, Kirk Douglas avait déjà signé l’une des autobiographies d’acteur les plus stimulantes, les plus honnêtes, et accessoirement l’une des mieux écrites aussi, révélant à un âge relativement avancé un vrai talent d’écrivain.

Il confirme largement ce latent avec I am Spartacus !, écrit à… 95 ans. Loin d’être une redite de son précédent livre, celui-ci se concentre exclusivement sur une période bien précise : la préparation et le tournage de Spartacus, dont le grand Kirk semble se souvenir du moindre détail.

A-t-il une mémoire phénoménale ? Se base-t-il sur des notes conservées quelque part ? Qu’importe : la narration est précise, le style emballant, et l’honnêteté totale. Douglas lui-même s’en amuse, s’autorisant parfois des « pauses » dans le récit pour commenter sa propre arrogance d’autrefois, ses manières parfois brutales, avec la gêne de celui qui appris tardivement le plaisir d’observer les roses (c’est lui qui le dit).

Si le livre est si passionnant, c’est aussi parce qu’il y est question, tout à la fois, d’un tournage chaotique (Anthony Mann viré, Kubrick ingérable, Jean Simmons remplaçant la pauvre Sabina Bethmann, un budget explosé), d’une aventure épique (plus d’un an de tournage), et d’une Chasse aux sorcières qui vit encore de belles heures, et que Spartacus contribuera à balayer.

Kirk Douglas est évidemment le personnage principal du récit : il en est le narrateur, et le pivot du film. Mais la figure de Dalton Trumbo, scénariste blacklisté et œuvrant incognito sur le film jusqu’à ce que Douglas impose son nom au générique, est une figure passionnante, et édifiante dans ce qu’elle dit de l’Amérique d’alors, et d’Hollywood.

Ah ! Et en plus, le livre est aussi une magnifique déclaration d’amour à Anna, la seconde femme de Kirk, avec qui venait d’avoir deux fils, et qui était encore en 2013 à ses côtés.

Les Ensorcelés (The Bad and the Beautiful) – de Vincente Minnelli – 1952

Posté : 19 novembre, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, MINNELLI Vincente | Pas de commentaires »

Les Ensorcelés

Un passage, dans The Bad and the Beautiful (à tout prendre, le titre original est quand même plus beau et mystérieux que sa traduction française), a toujours été pour moi une sorte de symbole de la cruauté, du cynisme et du chacun pour soi. Celle où le producteur joué par Kirk Douglas sort d’une réunion avec les décideurs du studio en affichant un large sourire soulagé, expliquant à son ami réalisateur (Barry Sullivan) qu’il a obtenu les fonds pour tourner le film dont ce dernier rêvait depuis longtemps (sourire enthousiaste du réalisateur), que la grande star du moment acceptait le rôle (re-sourire enthousiaste)… tout comme un grand réalisateur habitué des grosses productions (sourire figé).

Ce passage cruel et bouleversant marque un tournant dans le récit : celui où la passion de ses hommes et femmes qui fabriquent le rêve hollywoodien se teinte irrémédiablement de cruauté. Et ce personnage de Douglas, le producteur Jonathan Shields, est sans doute l’incarnation la plus troublante et authentique de ce qu’incarne Hollywood, ou plutôt de ce qu’il incarnait dans son âge d’or : une sorte d’île entièrement tournée vers le cinéma, où l’argent coule à flots, mais où la soif créatrice reste le centre de tout.

C’est toute la force et toute la beauté du film de Minnelli, qui dresse le portrait amoureux d’un homme odieux et souvent inhumain. Filmer Hollywood dans ce qu’elle a de plus rude, et en faire un chant d’amour au cinéma américain… Equation impossible qui fait de The Bad and the Beautiful le plus beau film consacré à Hollywood, le plus complexe, le plus audacieux, le plus romanesque, le plus enthousiaste et le plus critique. Tout ça dans le même mouvement.

Jonathan Shiels/Kirk Douglas, producteur ambitieux et mégalo, passionné et impitoyable, est aussi et avant tout un grand amoureux du cinéma, totalement habité par son art. Une sorte de synthèse des grands producteurs de l’époque (comme Selznick) qui n’hésite jamais vraiment à écraser ceux qui l’entourent pour le bien d’un film. Un homme monstrueux et d’une sincérité totale qui finit par se retrouver isolé.

Le film commence d’ailleurs comme ça : le réalisateur susmentionné (Barry Sullivan), un scénariste joué par Dick Powell, et une star interprétée par Lana Turner, tous d’anciens proches de Shields, refusent catégoriquement d’entendre même parler d’un projet porté par leur ancien ami. Et puis tous se retrouvent devant le seul à être resté fidèle au producteur (Walter Pidgeon), chacun racontant l’un après l’autre ce qui l’a amené à détester Shields…

La narration en longs flash-backs successifs n’est pas nouvelle bien sûr : Citizen Kane en est l’exemple le plus célèbre), et elle est particulièrement à la mode à cette époque (Mankiewicz s’en fera une spécialité, notamment avec La Comtesse aux pieds nus, autre très grand film, beau et cruel, sur Hollywood). Elle trouve quand même ici une sorte de perfection, une manière de relancer constamment le récit, et de complexifier les personnages, inoubliables.

Kirk Douglas trouve là l’un de ses plus grands rôles (il les enchaîne, c’est vrai, ces années-là), devenant l’incarnation idéale de la fièvre créatrice, dans une scène où le mégalo inspiré de Selznick cède la place à l’inventif visiblement inspiré de Val Lewton, précieux producteur de quelques classiques fauchés de l’épouvante comme La Féline, film auquel Minnelli fait un clin d’œil réjouissant.

Grand film sur Hollywood, grand film tout court… The Bad and the Beautiful fait partie de ces classiques qui semblent se bonifier avec l’âge, et qui interdit tout jugement définitif sur Hollywood, machine à rêver ou machine à briser. Quand le film et son sujet ne font plus qu’un… Un chef d’œuvre, pour l’éternité, qu’on aurait envie de montrer aux producteurs hollywoodiens actuels. C’est une idée, ça, tiens : et si on leur imposait un permis avec maîtrise obligatoire de Minnelli ?

20 000 lieues sous les mers (20.000 leagues under the sea) – de Richard Fleischer – 1954

Posté : 9 octobre, 2023 @ 8:00 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, FLEISCHER Richard | Pas de commentaires »

20 000 lieues sous les mers

Il y a des classiques qui ne prennent pas une ride, même 70 ans après, et même chez Disney. Cette grosse production familiale reste même la plus enthousiasmante de toutes les adaptations de l’œuvre de Jules Verne. Et dans ces années 50, elles sont nombreuses.

Mes souvenirs du roman ne sont pas suffisamment frais pour trancher la question de la fidélité. Le fait est que Ned Lang a pour l’éternité le dynamisme insolent de Kirk Douglas, et le capitaine Nemo le flegme désabusé de James Mason. Et le Nautilus ce design-là, très inspiré des constructions d’Eiffel.

Revoir le film trente ans après a quelque chose de rare, parce que les scènes clés sont à la hauteur des souvenirs qui en étaient restés. Le combat avec le poulpe géant bien sûr, qui reste spectaculaire et admirablement tendu malgré le côté artisanal et carton-pâte (ou plutôt caoutchouc-pâte) des effets spéciaux. Ou encore le fameux « duo » chanté/dansé entre Kirk Douglas et sa compagne otarie, assez irrésistible.

Il fallait un réalisateur de l’envergure de Richard Fleischer pour transcender ce genre de morceaux de bravoure. Ou pour se sortir avec les honneurs de séquences aussi casse-gueule que l’île aux cannibales, ou la chasse sous-marine. Fleischer qui, après s’être imposé comme un grand maître du film noir (à budgets modestes), à l’instar d’Anthony Mann, prouvait qu’il était également à l’aise à la tête d’une production aussi prestigieuse.

Grand film d’aventure familial, 20 000 lieues sous les mers est aussi un film dans l’air du temps, qui porte les angoisses et les grandes questions liées à l’atome, dans une décennie ou l’ombre d’un conflit nucléaire plane sur une grande partie du cinéma américain. Je dois bien avouer que cette dimension m’avait totalement échappé enfant. Elle est pourtant centrale dans ce film qui passe du drame le plus sombre à la comédie la plus légère avec une belle aisance.

Les Héros de Télémark (The Heroes of Telemark) – de Anthony Mann – 1965

Posté : 15 novembre, 2020 @ 8:00 dans 1960-1969, DOUGLAS Kirk, MANN Anthony | Pas de commentaires »

Les Héros de Télémark

En fin de carrière, Mann en a encore sous le pied. Cette troisième partie de son œuvre (les grosses productions des années 60, après les polars des années 40 et les westerns des années 50, pour faire simple) n’est pas la plus réputée, mais ce film de guerre qui remplit son cahier des charges d’un genre alors prolifique, rappelle constamment qu’il y a un grand cinéaste derrière la caméra.

Un film de commando, dont l’enjeu est l’issue de la seconde guerre mondiale, il y en a eu des tonnes cette décennie-là. Des grosses productions, où les explosions s’enchaînaient et où les Nazis tombaient comme des mouches. Celui-ci s’inscrit dans cette logique et donne au spectateur tout ce qu’il attend : de l’action, foudroyante ; des explosions, spectaculaires ; des drames… dramatiques.

Pourtant, il y a d’emblée quelque chose d’atypique. Cela tient en grande partie au décor : la Norvège et ses montagnes enneigées, que Mann filme comme il filmait les déserts brûlants dans ses westerns. Ce parallèle est particulièrement frappant lors de la poursuite à ski, où les Nazis qui apparaissent derrière un somment neigeux évoquent des Indiens dans d’autres paysages.

Le film frappe aussi par le silence qui domine une majorité de scènes. C’est d’ailleurs lié à ces décors couverts de neige, mais ce silence marque les esprits, tant le film de guerre est habituellement rempli de bruits et de fureur. Il faut dire aussi que Mann est particulièrement économe côté dialogues, filmant des personnages taiseux définis par leurs actions avant tout.

Peu de personnages, d’ailleurs : Kirk Douglas en scientifique (ah bon ? On a tendance à l’oublier tant c’est sa présence physique qui s’impose) embarqué malgré lui dans la Résistance ; Richard Harris en Norvégien décidé à lutter à tout prix contre le nazisme ; Ulla Jacobsson en ex-femme de Kirk et simple caution féminine ; Michael Redgrave en second rôle de luxe…

Leur mission : détruire une usine où est produite l’eau lourde qui pourrait donner la bombe atomique aux Allemands. Une usine qui domine une petite vallée comme un refuge impossible à atteindre. Le film raconte d’ailleurs non pas une opération commando, mais deux. Non, trois… Riche et original, le scénario réserve des tas de rebondissements inattendus, que Mann filme royalement. Un must, dans le genre.

La Rivière de nos amours (The Indian Fighter) – d’Andre De Toth – 1955

Posté : 22 mars, 2020 @ 8:00 dans 1950-1959, DE TOTH Andre, DOUGLAS Kirk, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Rivière de nos amours

Petit homme à Kirk, le grand Kirk, histoire de se souvenir qu’il y a quelques semaines seulement, on respirait le même air que cet acteur extraordinaire… Me sens d’humeur nostalgique, d’un coup. Le grand Kirk, qui produit ce superbe western très personnel avec sa société Byrna (le prénom de sa môman, c’est beau), presque aussi personnel que Seuls sont les indomptés, avec qui ce film a une vraie filiation.

Dans celui-là, Kirk sera un cow-boy attaché à un mode de vie qui n’existe plus. Dans celui-ci, il est l’incarnation de ce mode de vie : un homme amoureux de la vie sauvage (il refuse d’ailleurs les avances d’une colonne pour les beaux yeux d’une native), mais qui sait bien que tout ça est appelé à disparaître. Il y a une scène magnifique où le cow-boy échange avec son ami photographe (Elisha Cook) devant un paysage grandiose. Ce dernier s’enthousiasme d’être celui qui montrera au monde les beautés de l’Ouest, ouvrant ainsi la voie à la civilisation. Kirk, lui, s’en désole, préférant garder jalousement cette nature telle qu’elle est, mais bien conscient que rien n’arrêtera l’histoire.

Ce thème est au cœur du film. Et le couple que forme Kirk et l’Indienne jouée par Elsa Martinelli ressemble à un cri désespéré, ou plutôt à une volonté farouche de refuser la marche de l’histoire, et de s’accrocher à ce paradis pas encore tout à fait perdu. La dernière image, heureuse mais si fragile, dit tout de cette posture superbe.

Andre De Toth filme magnifiquement ces paysages dans un Cinemascope qui n’a rien d’anodin : tout ici est tourné vers cette nature si vaste et encore préservé, sur cette terre de tous les possibles, sur ce mode de vie menacé. Il n’est pas question de savoir si les Indiens sont bons ou méchants, si les blancs sont des victimes ou des bourreaux. La vérité est bien sûr nettement moins tranchée, et le film ne se veut pas une étude réaliste, avec ces Indiens qui parlent un anglais parfait et cette violence si maîtrisée.

D’une histoire somme toute très classique (la paix entre blancs et indiens est mise à mal par les manigances de deux trafiquants joués par Walter Matthau et Lon Chaney Jr), De Toth et Douglas tirent un hommage superbe à cet Ouest d’un autre temps, à la vie sauvage, et à l’amour dans ce qu’il a de plus primal. Du grand De Toth, du grand Kirk…

Première Victoire (In harm’s way) – d’Otto Preminger – 1965

Posté : 16 mars, 2020 @ 8:00 dans 1960-1969, DOUGLAS Kirk, PREMINGER Otto, WAYNE John | Pas de commentaires »

Première victoire

Preminger, période grands sujets… On a le droit de préférer le Preminger première manière, celui des films noirs époustouflants. Mais le gars a quand même un savoir faire indéniable, une manière de mettre en relief la grande histoire en s’attardant sur des drames plus intimes…

Il y a de ça dans Première victoire, sa version de l’entrée en guerre des Etats-Unis, à travers les destins d’une demi-douzaine de personnages. On peut reprocher quelques facilités au scénario, en particulier dans l’évolution de certains de ces personnages. Celui de Kirk Douglas, passionnant dans la première moitié du film, évolue ainsi d’une manière abrupte qui fait avancer le récit mais peine à convaincre. Un « glissement » à peine justifié par une remarque de Patricia Neal, la love interest de John Wayne.

Ah oui ! Parce que comme souvent dans les grands films de guerre de cette époque, la distribution est extraordinaire. Wayne, donc, en pivot du film, Douglas et Neal, mais aussi Burgess Meredith, Henry Fonda, Dana Andrews, George Kennedy, Brandon De Wilde (le gamin de Shane, qui a bien grandi), Tom Truyon, Caroll O’Connor, Franchot Tone… Rien qu’avec ce casting, l’intérêt du film est assuré.

Mais il y a bien d’autres raisons d’aimer Première victoire. Et, surprise dans une telle grosse production, ce sont les ellipses, nombreuses et spectaculaires, qui donnent un particulier à ce film fleuve, qui n’hésite pas à faire des sauts en avant de plusieurs mois, et à éviter de montrer des moments clés de l’histoire, en particulier « la » grande bataille tant attendue.

On a quand même droit à quelques spectaculaires scènes de batailles sur l’eau. Trois, au moins, avec des parti-pris chaque fois différents et des résultats plutôt variables. Parfaitement tendue pour l’attaque de la flotte japonaise par les petits croiseurs, un peu fouillie pour le carnage final, et franchement cheap pour la scène quasi-inaugurale : celle de l’attaque de Pearl Harbor.

Ce moment-clé de l’histoire (et de la guerre) arrive après une première partie magnifiquement mise en scène, avec une économie de moyens et et une montée en puissance dramatique imparable. Les quelques ploufs dans l’eau et les maquettes qui font pfout ne gâchent pas vraiment l’ensemble, mais entraînent quelques petits sourires narquois, au mieux. Gênant.

Mais cette réserve n’est qu’u détail. Malgré ses quelques faiblesses, Première Victoire fait partie des réussites du genre. Et Preminger sait lui donner un ton très particulier et très intime. Ce bel hommage à la navy est à la fois vibrant et enthousiasmant, mais pas bêtement énamouré. Devant la caméra de Preminger, la frontière entre la victoire et la défaite est bien fragile. Et la violence a toujours un goût amer…

La Vie passionnée de Vincent Van Gogh (Lust for life) – de Vincente Minnelli – 1956

Posté : 22 janvier, 2020 @ 8:00 dans 1950-1959, DOUGLAS Kirk, MINNELLI Vincente | Pas de commentaires »

La Vie passionnée de Vincent Van Gogh

Les grandes fresques biographiques ont souvent eu un côté grandiloquent et hyper respectueux. Celle-ci n’échappe pas toujours à la règle, et c’est avec une grande application que le film de Minnelli raconte chaque chapitre de la vie tourmentée de Van Gogh.

De son passage dans les mines flamandes à sa mort à Auvers-sur-Oise en passant par sa courte vie de famille, ses rapports avec son frère Théo, sa cohabitation difficile avec Gaughin, ou son internement à Saint-Rémy-de-Provence… Une construction hyper-classique, sans doute trop, qui finit par avoir un côté catalogue.

Mais, et malgré un final trop hollywoodien et franchement raté, Minnelli réussit plutôt son pari. Non seulement le film utilise habilement les (vraies) toiles de Van Gogh, les mettant en scène comme autant de jalons dans le parcours intérieur tourmenté du peintre, mais les scènes les plus belles donnent le sentiment au spectateur d’entrer dans ces toiles.

La reconstitution est à peu près parfaite, mais c’est surtout la lumière qui impressionne. Ça et, bien sûr, la prestation de Kirk Douglas, intense et totalement habité, toujours juste, superbe et bouleversant.

Dans ce canevas très hollywoodien, c’est à la fois la manière dont Minnelli donne vie à l’imagerie van-goghienne, et à la douleur du maître, que l’on retient.

L’Emprise du crime (The Strange Love of Martha Ivers) – de Lewis Milestone – 1946

Posté : 10 juin, 2019 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, DOUGLAS Kirk, MILESTONE Lewis, STANWYCK Barbara | Pas de commentaires »

L'Emprise du crime

« Don’t look back… Don’t ever look back. » La dernière réplique résume assez bien ce très beau film noir, dans lequel la nostalgie est quelque chose de franchement cruel.

Tout commence en 1928. Martha Ivers, jeune nièce de la toute puissante maîtresse d’Iverstown (jouée par la grande Judith Anderson), ne rêve que de fuir sa prison dorée avec Sam, fils de personne. Rattrapée alors qu’elle embarquait dans un train, elle finit par tuer sa tante devant un autre ami, Walter, alors que Sam s’est enfuie. Dix-huit ans plus tard, ce dernier revient à Iverstown…

En revenant (par hasard) dans la ville de son enfance, Sam pensait simplement renouer avec des souvenirs de jeunesse. Il retrouve les amis avec lesquels il a grandi mariés, riches et puissants, mais misérablement malheureux. Elle, autoritaire et froide comme l’était sa tante. Lui, pathétique avec ses faux airs de gamins pleurnichard qui se noie dans l’alcool du matin au soir pour oublier qu’il n’est qu’une poupée entre les mains de sa femme.

Et c’est un magnifique trio d’acteurs que filme Lewis Milestone. Barbara Stanwyck, immense comme elle l’a souvent été. Van Heflin (Sam), parfait dans le rôle du brave gars, droit et intègre. Et Kirk Douglas, dans son tout premier rôle, et déjà formidable en sale type tellement pathétique qu’il en devient touchant. Plus Lizabeth Scott, également quasi-débutante, très bien en ex-taularde qui croit enfin saisir une chance d’être heureuse.

C’est avant tout un film de personnages prisonniers de leur passé. Pas Van Heflin, le seul à avoir su partir à temps. Mais ses amis d’enfance, qui vivent depuis toujours dans le décor d’un drame, prisonniers de leurs crimes et de leurs souvenirs. Lewis Milestone filme parfaitement le sentiment de gâchis de ces vies basées sur des mensonges.

Et s’il utilise les codes du film noir, s’il crée un vrai suspense et quelques moments de grande tension, son film est avant tout l’histoire d’un homme qui ne se retourne pas et qui apprend à une jeune femme paumée à en faire de même, et d’un autre couple condamné à constamment se retourner, et donc sans avenir.

Il y a là des tas de grands moments de cinéma. La rencontre entre Van Heflin et Lizabeth Scott, sur les perrons d’une maison qui l’a vu naître (lui) et qui l’a mise à la porte (elle) : c’était l’époque où les couples se formaient autour d’une cigarette, et c’était visuellement magique. Les retrouvailles entre Van Heflin et Kirk Douglas, sommet de faux-cuterie. La froideur glaçante de Barbara Stanwyck au sommet de l’escalier…

Rien à jeter en fait, dans ce film cruel et lumineux à la fois, superbe confrontation de deux couples que tout oppose, l’un des sommets de la carrière de Milestone, sans aucun doute.

La Brigade du Texas (Posse) – de Kirk Douglas – 1975

Posté : 22 avril, 2019 @ 8:00 dans 1970-1979, DOUGLAS Kirk, DOUGLAS Kirk, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Brigade du Texas

Malgré l’échec de Scalawag, Kirk Douglas repasse derrière la caméra pour la seconde fois, et signe ce qui est sans doute son meilleur film depuis Le Reptile, cinq ans plus tôt : un western qui transforme une histoire simple en une passionnante étude de caractères, originale et souvent très surprenante.

L’histoire est tellement simple que le personnage d’homme de loi qu’interprète Douglas lui-même réussit à la résumer en une phrase, après quelques minutes d’action : « Si je ne l’arrête pas, je ne serai pas élu au Sénat ». Tout est dit sur l’intrigue et l’enjeu du film : Douglas, marshall entouré d’une brigade de choc, doit mettre la main sur le chef de gang joué par Bruce Dern, dont l’arrestation fera de lui un vainqueur assuré aux prochaines élections.

Drôle de western, donc, où on se surprend à avoir plus de sympathie pour le braqueur et tueur que pour le justicier, politicard en devenir que Douglas s’attache à ne pas rendre sympathique : il en fait un faux patriarche calculateur, qui fait graver sur une croix le nom d’un de ses hommes avant même la mort de ce dernier, et qu’on devine se désintéresser du sort de ceux qui l’ont accompagnés si longtemps et qu’en bon politicien il évoque régulièrement comme étant « the best posse ».

Kirk Douglas réalisateur filme un Ouest plus si sauvage, rattrapé par une modernité dont on sent bien qu’il n’a pas une grande passion pour elle. Le personnage le plus recommandable est d’ailleurs un journaliste attaché à dénoncer les dérives du tout puissant chemin de fer, symbole de cette modernité en marche. Ce journaliste, unijambiste et manchot, est joué par James Stacy, acteur qui faisait son grand retour sur les écrans, deux ans après un tragique accident qui lui a coûté son bras et sa jambe gauches, et que Douglas filme sans misérabilisme.

Le film oppose en fait deux hommes pas si différents : deux chefs que Douglas prend le temps de filmer avant l’action, dans la réflexion et les préparatifs. Deux chefs qui s’affrontent autour d’une même bande et dont le rapport de force finit par basculer sans qu’on s’en rende vraiment compte. Jusqu’à un retournement de situation aussi inattendu que réjouissant.

Cynique et ironique, Kirk Douglas réussit son coup. De quoi regretter amèrement que le public n’ait pas suivi, condamnant ainsi la carrière de cinéaste qui s’ouvrait à lui. Sa carrière d’acteur, elle, continuait son inexorable déclin.

Le Reptile (There was a crooked man) – de Joseph L. Mankiewicz – 1970

Posté : 21 septembre, 2018 @ 8:00 dans 1970-1979, DOUGLAS Kirk, MANKIEWICZ Joseph L., WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Reptile

Tout cinéphile qui se respecte doit se souvenir de son premier émoi sensuel devant un écran. Le mien, c’était devant un western dont, longtemps, je n’ai pas su le titre, ni le nom des acteurs, encore moins celui du réalisateur. Bref, le seul souvenir que j’en avais, c’était celui d’un couple de jeunes gens qui s’étreignaient sur une table de billard. La jeune femme dans sa robe collée par la moiteur de l’atmosphère, et la fin tragique (le jeune homme tuait un agresseur en lui lançant une boule de billard) m’avaient profondément marqués.

Mais ce n’est que bien des années plus tard (n’allez pas croire que je suis un vieillard, quand même) que je suis retombé dessus : il s’agissait donc du Reptile, de Mankiewicz. Inutile de dire dans quel état je me suis trouvé en réalisant que mon premier émoi était dû à un cinéaste aussi important que Mankiewicz. Je devais avoir moins de 10 ans à l’époque, et déjà le sens du beau. Oui, c’est émouvant…

Cela étant dit, voir Mankiewicz s’attaquer au western à un âge avancé (c’est son avant-dernier film) est pour le moins inattendu. Evidemment, c’est un western bien atypique qu’il signe, et qui commence avec une série de gros plans sur des sabots de chevaux engoncés dans des « chaussons ». D’emblée, Mankiewicz rompt avec absolument tous les cinéastes qui ont fréquenté le genre avant lui.

Porté par une musique joyeuse et décalée, le film a des allures de comédie, impression confirmée par l’étonnant duo d’homosexuels qui passent leur temps à se chamailler, ou par un ton pince-sans-rire. Mais le fond est sombre, très sombre. Et les personnages sont, selon, des salauds ou des idiots. La palme revient à Kirk Douglas, le « héros » manipulateur qui pousse les prisonniers d’un pénitencier à se révolter pour pouvoir mettre les voiles, et qui donne son ton au film : souriant, ironique, et surtout très cynique.

Face à lui, Henry Fonda, symbole de la droiture dans le cinéma américain, dont la foi en l’être humain lui vaut quelques désagréments… De quoi lui faire voir la vie sous un autre angle. Ajoutons Warren Oates, Hume Cronyn ou Burgess Meredith, dans un très beau rôle de vieux taulard… Ce western unique de Joseph L. Mankiewicz a décidément bien de la gueule.

On en oublierait presque l’histoire, assez convenue, d’évasion. Le film vaut avant tout pour sa galerie de personnages. Et la scène de billard dans tout ça ? Anecdotique et rapidement évacuée. La prime adolescence se nourrit de peu…

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