Titanic (id.) – de Herbert Selpin (et Werner Klinger) – 1943
Cette version de la tragédie du Titanic est sans la doute la plus étonnante de toutes : un pur produit de propagande de l’Allemagne nazie commandé par Goebbels. Ce dernier a vu dans le naufrage l’occasion de donner des Anglais une image désastreuse.
Parce que le seul coupable de ce naufrage, c’est évidemment la cupidité d’un Anglais, le patron de la White Line, qui a imposé au capitaine de maintenir cap et vitesse malgré les icebergs annoncés. Et pas question d’y mettre une nuance : le type est aussi arrogant dans sa détermination que pathétique lorsque le danger approche…
Donner des Anglais une image minable ne suffisait pas : encore fallait-il magnifier la grandeur de l’esprit allemand. Voilà donc Petersen, l’un des officiers de bord, un Allemand donc, le seul à prendre conscience du danger, et à s’inquiéter du sort des 3000 passagers. Un grand homme, oui : Titanic est un vrai, un pur film de propagande.
C’est aussi, malgré tout, une réussite qui nous offre absolument tout ce qu’on peut attendre d’un film qui s’appelle Titanic : des tas de personnages attachants (ou pas), des enjeux personnels, des destins qui se nouent et se dénouent, puis des scènes de panique, le naufrage lui-même, spectaculaire. Pas de grande surprise, mais une vraie efficacité, et pas mal d’émotion lorsque l’heure des déchirements arrive.
Il y a un aspect simplement humain qu’on n’attendait pas dans ce contexte. D’ailleurs, Goebbels interdira finalement la projection du film (comme les Anglais après la guerre) lorsqu’il devait sortir en salles. Auparavant, il avait fait enfermer le réalisateur Herbert Selpin, trop critique à l’égard du régime, Selpin se suicidant dans sa cellule (et Klinger terminant le tournage). Funeste destin…