L’Avocat – de Cédric Anger – 2010
Avec Le Tueur, Cédric Anger avait signé un film de genre et d’atmosphère très séduisant. Avec L’Avocat, le réalisateur persévère dans le thriller à influences. Le résultat n’a rien de honteux, mais les influences trop marquées, trop évidentes, du cinéaste, finissent par aliéner le projet. Dommage, on ne demandait qu’à se laisser aller à un petit plaisir sans arrière pensée, devant cette histoire d’un jeune avocat qui, fraîchement sorti de l’école, est engagé par un puissant homme d’affaires spécialisé dans le recyclage des déchets, et qui dissimule des liens très serrés avec le Milieu (l’affaire Guérini n’est pas loin)…
D’autant plus que le rôle principal est interprété par Benoît Magimel, un acteur assez passionnant, que l’industriel mafieux est joué par l’excellent Gilbert Melki, et que Barbet Schroeder joue un petit rôle, comme s’il parrainait ce film de genre « à l’américaine » (lui-même a signé quelques bijoux dans ce registre, comme L’Enjeu ou Inju, justement avec Magimel). Mais la déception est grande. Melki est bien, à défaut d’être surprenant ; mais Magimel est franchement décevant…
Ce n’est d’ailleurs pas totalement la faute de l’acteur : à force de le filmer « à la manière de », Anger rend incontournable la comparaison avec quelques grands numéros d’acteur des années 90, dans une poignée de chef d’œuvre absolus et incontournables, qu’il a visiblement revus en boucle avant de commencer son tournage. Avec Al Pacino, puisque le réalisateur cite lourdement l’ouverture de L’Impasse de De Palma ; avec Tom Cruise, L’Avocat s’inscrivant clairement dans la lignée de La Firme de Pollack (histoire très similaire, mais résultat bien plus convaincant) ; ou encore avec Ray Liotta, la dernière partie de L’Avocat étant nettement mais maladroitement inspirée par Les Affranchis, jusqu’au dernier gros plan sur Magimel, qui parachève la comparaison, peu flatteuse.
L’Avocat, c’est l’exemple typique d’un réalisateur cinéphile qui n’a pas su digérer ses influences. Le film n’est toutefois pas désagréable : le suspense fonctionne bien ; et si ce n’était cette impression constante d’avoir déjà vu la même chose, en mieux (et pour cause), on y prendrait un vrai plaisir. J’irais même jusqu’à le conseiller, ne serait-ce que pour Samir Guesmi, d’une grande justesse dans un second rôle de tueur étrangement sympathique… A condition, bien sûr, de n’avoir encore jamais vu ni La Firme, ni L’Impasse, ni Les Affranchis.