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Archive pour janvier, 2021

Maman, j’ai raté l’avion (Home alone) – de Chris Columbus – 1990

Posté : 31 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1990-1999, COLUMBUS Chris | Pas de commentaires »

Maman, j'ai raté l'avion

Incroyable de voir comment l’image de ce film a changé au fil du temps. Ce gentil nanar d’il y a trente ans a acquis récemment un petit statut de film culte de Noël. Et, surprise, c’est assez mérité.

Non, Chris Columbus n’a pas signé un chef d’œuvre. N’exagérons pas. La première moitié du film n’est à peu près basée que sur la présence si mignonne du tout jeune Macaulay Culkin, et elle est aussi sympathique que vaine. On peut quand même souligner une remarquable propension au cynisme, avec le portrait d’une famille a priori modèle (beaucoup d’enfants, beaucoup de vie, une maison luxueuse) particulièrement gratinée.

C’est d’ailleurs le moteur du film : la famille qui part en voyage en France a quand même oublié le petit dernier, Kevin, 8 ans, un peu chiant certes. Pire : le père s’en fout largement, et la mère ne se prend la tête que parce qu’elle prend conscience de la mauvaise mère qu’elle est. Cette méchanceté en arrière plan reste toutefois très sage.

En revanche, Columbus lâche totalement la bride quand il confronte le petit Kevin à deux cambrioleurs bas du front, bien décidés à profiter de l’absence de la famille pour cambrioler la maison. Là, le film se rapproche du cartoon le plus fou, transformant la maison en champ de bataille réjouissant et hilarant, ou en jeu de massacre d’où toute notion de réalisme est bannie.

Cette partie du film, tardive, est d’une liberté folle. Si le film reste aussi réjouissant, ce n’est pas pour Macaulay Culkin, mais pour la folie de ce moment de bravoure, et pour le duo de cambrioleurs totalement idiots joués par Daniel Stern et Joe Pesci, gros durs qui ne cessent de se prendre des coups et d’être humiliés par un gamin de 8 ans, dignes héritiers du chat Tom ou d’autres personnages de cartoon.

It’s your America (id.) – de John Ford – 1946

Posté : 30 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1940-1949, COURTS MÉTRAGES, FORD John | Pas de commentaires »

It's your America

De 1942 à 1945, John Ford a consacré toute son énergie à l’effort de guerre de l’armée américaine, s’engageant physiquement dans le conflit et signant quelques documentaires marquant. Son retour à la fiction sera d’ailleurs une sorte d’aboutissement de cette période : Les Sacrifiés, le meilleur de ses films de guerre.

It’s your America est un film plus obscur, dont la paternité n’est pas absolument certaine. Le générique ne fait mention d’aucun réalisateur, le film n’est pas évoqué dans la précieuse biographie que consacre Joseph McBride à Ford… Mais ce court métrage est souvent attribué au cinéaste, ce qui paraît très raisonnable.

On retrouve le style du Ford de ces années là, sa manière de plonger ses personnages à moitié dans l’ombre, et de filmer les hommes entre eux, avec ce sens immédiat de la camaraderie. On retrouve aussi Preston Foster, que Ford avait dirigé dans Le Mouchard ou Révolte à Dublin.

Le film fait partie de ces œuvres qu’Hollywood enchaînait pendant et juste après la guerre, pour encourager le patriotisme des Américains. Une fiction, certes, mais avant tout une leçon de citoyenneté, très didactique, et très américaine.

Narrateur et personnage principal, Arthur Kennedy apparaît en soldat américain sur le point de rentrer chez lui après plusieurs années sur le front européen. Il raconte : comment il était un Américain comme tant d’autres, et comment la guerre l’a transformé.

Les séquences de flash-back s’enchaînent, c’est un peu grandiloquent, mais c’est aussi un modèle de construction : chaque étape évoque l’un des détails figurant sur une pièce d’un penny. Et à chaque fois, c’est une révélation pour le personnage de Kennedy, qui comprend peu à peu ce que c’est que l’Amérique, et la démocratie.

Johnny roi des gangsters (Johnny Eager) – de Mervyn LeRoy – 1942

Posté : 29 janvier, 2021 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, LeROY Mervyn | Pas de commentaires »

Johnny roi des gangsters

Après le sublime mélo La Valse dans l’ombre, Mervyn LeRoy change de registre, s’attaque au film noir, et offre un nouveau rôle en or à Robert Taylor : celui de Johnny Eager, ancien gangster qui s’est rangé des affaires depuis sa sortie de prison, menant désormais une tranquille vie de chauffeur de taxi.

C’est en tout cas ce qu’il fait croire : ce brave repenti n’a en fait rien renié de ce qu’il est. Dans l’ombre, il gère un vaste racket et règle ses problèmes de manière radicale. Sans sentiment. LeRoy a l’art de réussir de grands films sans y paraître. Johnny Eager commence un peu banalement, avant une brusque révélation. Mais ce n’est pas cette seule révélation qui fait basculer le film : plutôt la radicalité du changement de ton.

Robert Taylor, acteur souvent sous-estimé tant il semble ne pas faire grand-chose, est formidable dans ce rôle complexe. Parce qu’il lui faut peu pour incarner ces changements de ton, passer de la douceur du repenti au froid cynisme du « vrai » personnage. La violence est rare et sèche. Elle est surtout psychologique : Eager se livre à un jeu de massacre d’une cruauté rare, dont sont victimes aussi bien l’amoureuse jouée par une toute jeune Lana Turner que l’ami fidèle, Van Heflin, superbement pathétique en saoulard résigné.

Jeu de massacre autour du flamboyant Robert Taylor, qui ne perdra sa superbe qu’en découvrant tardivement l’humanité tapie au fond de lui. Pour la rédemption, on repassera. Dans ce monde, tout mène à la violence, et la dernière séquence claque d’une manière forte et brutale, comme s’il fallait expier toutes ses fautes en un même lieu. Percutant et intense, comme le sont les meilleurs films de LeRoy. Celui-ci en fait clairement partie.

Firewall (id.) – de Richard Loncraine – 2006

Posté : 28 janvier, 2021 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, FORD Harrison, LONCRAINE Richard | Pas de commentaires »

Firewall

En 2006, Harrison Ford a 64 ans, et n’a plus connu de gros succès personnel depuis pas mal de temps. Son dernier film, Hollywood Homicide, a été tourné trois ans plus tôt et n’a pas laissé de grands souvenirs, et il ne tournera plus avant de renfiler le Fedora d’Indiana Jones, deux ans plus tard. Bref, Harrison Ford est au creux de la vague, et semble ne plus vraiment savoir quoi faire de sa carrière.

Alors il cherche à retourner dix ou quinze ans en arrière, à une époque où chacun de ses films rencontrait son public. A une époque aussi où on attendait le Harrison Ford de l’année avec enthousiasme, et en sachant qu’on y retrouverait sa patte à lui, cette capacité qu’il a d’incarner des maris sans histoire embarqués dans des histoires qui le dépassent.

Firewall est un thriller qui fleure bon les années 90. Autrement dit : le film ne révolutionne pas le genre, et offre un suspense sans surprise, confortable, et plutôt efficace. Ou : Harrison Ford est en terrain connu, et ne surprend pas. Mais il convainc, comme toujours, et c’est sur les détails que ça se joue.

Lui qui incarne mieux que quiconque l’image de l’aventurier intrépide et audacieux quand il joue les archéologues réussit à être crédible en informaticien dépassé. Et incapable de sauter d’un mur de deux mètres sans se vautrer lamentablement.

Firewall ne vaut d’ailleurs que pour lui. Entre de bons acteurs qui n’ont pas grand-chose à jouer (Virginia Madsen, Alan Arkin, Robert Forster, Robert Patrick) et un scénario qui n’évite pas les énormes ficelles (le coup du collier du chien… sérieusement?!), Richard Loncraine mène sa barque sans génie, mais sans provoquer l’ennui. Voilà.

Le Ciel peut attendre (Heaven can wait) – d’Ernst Lubitsch – 1943

Posté : 27 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1940-1949, FANTASTIQUE/SF, LUBITSCH Ernst, TIERNEY Gene | 2 commentaires »

Le Ciel peut attendre

Un homme arrive aux portes de l’enfer, où il est sûr d’être admis après une vie qu’il estime avoir été pleine d’écarts. Il raconte quelques grandes étapes de cette vie au Diable, qui écoute avec un regard plein d’une tendresse amusée ce qui, au bout du compte, ressemble quand même beaucoup à une grande et belle histoire d’amour.

De cette introduction rigolarde et ironique, qui sert aussi de fil rouge au récit, Lubitsch retient moins la dimension fantastique qu’une occasion d’égratigner, comme il l’a souvent fait, le moralisme et le puritanisme tellement installés dans l’Amérique qui l’a adopté et dont il est devenu l’un des cinéastes les plus importants.

Il s’en sert aussi pour raconter cette histoire d’amour avec des ellipses audacieuses, qui lui donnent une dimension rarement vu : une histoire à l’échelle d’une vie. Il y a des drames, des grands événements, qui rythment cette vie, mais on n’en voit le plus souvent rien, ou si peu. En retrouvant les personnages systématiquement plusieurs années après, c’est l’effet du temps passé que l’on découvre.

Entre Gene Tierney et Don Ameche, Lubitsch saisit l’infinie tendresse, sous le regard bienveillant et roublard de Charles Coburn. Il n’est pas parfait, Don Ameche, tellement attaché à son idée de l’anticonformisme. Mais elle est si belle, Gene Tierney, avec ce regard si plein de liberté. D’ailleurs, a-t-elle été filmée aussi bien (en couleurs, en tout cas) ? On comprend que ce nigaud de Don Ameche soit prêt à se damner pour elle, et on comprend que ce bon bougre de Diable (Laird Cregar) soit si compréhensif…

Lubitsch a fait des films plus élégants, d’autres plus drôles, certains même plus inventifs. Mais il y a dans ce Heaven can wait une simplicité, une tendresse et une pureté qui vous emportent, toujours et encore.

Le Seigneur des Anneaux : les deux tours (The Lord of the Rings : the two towers) – de Peter Jackson – 2002

Posté : 26 janvier, 2021 @ 8:00 dans 2000-2009, FANTASTIQUE/SF, JACKSON Peter | Pas de commentaires »

Le Seigneur des Anneaux les deux tours

Cet opus 2 a les mêmes qualités que le premier. Normal, et logique : il ne s’agit pas à proprement parler d’une séquelle, mais de la suite d’un même film. Peter Jackson a pensé et tourné sa trilogie comme une œuvre unique et cohérente, coupée en trois parties, histoire de ne pas proposer un film de dix heures…

Les Deux Tours se distingue quand même de La Communauté de l’Anneau par plusieurs aspects. D’abord, les personnages sont bien identifiés, et on entre directement dans le vif du sujet. Ensuite, l’action est désormais aussi éclatée que la communauté qui donnait son titre au premier film.

Pippin et Merry enlevés par des orques. Aragorn, Legolas et Gimli à leur poursuite. Frodon et Sam qui se dirigent vers le Mordor. Gandalf disparu… Plutôt que d’aller de l’un à l’autre dans d’incessants allers-retours, Jackson choisit, comme dans le premier film, de prendre le temps, consacrant de longs épisodes à un groupe ou à un autre, évitant ainsi de rajouter de l’effervescence inutile à une histoire déjà bien riche.

Les enjeux dramatiques sont nombreux, les moments de bravoure aussi. Le film se termine même par deux longues et hyper spectaculaires batailles menées parallèlement. Pourtant, jamais les effets numériques, omniprésents, ni le maquillage qui rendent certains comédiens méconnaissables, ne recouvrent la dimension humaine de l’épopée.

Au fracas des combats, on sent que Jackson préfère l’angoisse des préparatifs. Dans le Gouffre de Helm, décor anxiogène qui évoque furieusement une forteresse médiévale, Jackson prend le temps de filmer les personnages, ne sacrifiant jamais l’individu à la masse, en tout cas du côté des assiégés.

Du grand spectacle, parfois presque intime, marqué par quelques visions vraiment belles : la traversée des marais filmés comme un cimetière géant, le conciliabule des arbres, ou le regard tendre et énamouré de Miranda Otto, un poème en soi…

Voir aussi La Communauté de l’Anneau et Le Retour du Roi.

Scaramouche (id.) – de George Sidney – 1952

Posté : 25 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, SIDNEY George | Pas de commentaires »

Scaramouche 1952

Un écran large, des couleurs flamboyantes, des duels exceptionnels, du romanesque, de l’action, de l’amour, de l’humour, de l’émotion… Scaramouche, c’est un peu la quintessence du cinéma d’aventure des années 1950, le sommet du film de cape et d’épée de l’époque.

La version muette était formidable. Celle-ci l’est aussi. George Sidney signe une mise en scène aussi généreuse que celle des Trois Mousquetaires, mais plus ample encore, plus intime aussi, et plus ambitieuse surtout. Cette histoire de vengeance embrasse tous les poncifs du genre, pour les détourner et nous surprendre constamment.

Prenons le grand duel final par exemple, justement considéré comme le sommet du genre. Sidney le filme comme un extraordinaire numéro d’équilibre entre le monde du théâtre et la réalité, dans une salle de spectacle où les duettistes s’affrontent en défiant la gravité, sous le regard des spectateurs. Du jamais vu, à la conclusion totalement inattendue.

Tout le film est comme ça, jouant avec la frontière ténue entre la réalité et ce que l’on croit l’être. Trouble histoire d’amour aussi, entre le héros joué par Stewart Granger et celle qu’il croit être sa sœur, Janet Leigh. Et superbe personnage pour la maîtresse sacrificielle, jouée par Eleanor Parker.

Scaramouche est aussi une grande réussite formelle, avec de spectaculaires ruptures de tons visuelles entre les ors froides de la noblesse, et la chaude fraternité des modestes (le camps des comédiens, magnifiquement photographié). Un film généreux, vraiment, la grandeur du cinéma hollywoodien.

L’Auberge rouge – de Claude Autant-Lara – 1951

Posté : 24 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1950-1959, AUTANT-LARA Claude | Pas de commentaires »

L'Auberge rouge

L’Auberge rouge est inspiré d’un authentique fait divers : un couple d’aubergistes ardéchois qui, selon la rumeur, aurait assassiné plus de cinquante de leurs clients pour les dépouiller de leurs richesses, vers 1830. Rumeur sans doute exagérée, que le film de Claude Autant-Lara gonfle encore, avec une centaine de victimes.

Cette exagération fait partie intégrante du plaisir que procure le film. Son parti-pris n’est pas documentaire bien sûr, la présence de Fernandel au générique est un indice fort, mais la tradition orale, voire la chanson de geste comme l’annonce le superbe générique.

Sur un paysage de montagnes enneigées, tandis que le générique défile, la voix d’un jeune Yves Montand entonne une complainte qui raconte le terrible fait divers, évoquant un nombre de victimes inconnu… mille, peut-être. Superbe entrée en matière signée Jean Aurenche et Pierre Bost, fidèles scénaristes d’Autant-Lara.

Cette introduction annonce aussi une esthétique proche du réalisme poétique, belles images dramatiques en noir et blanc, qui tranchent avec le ton ironique, plein d’humour, d’excès, et d’irrévérence. Le personnage de Fernandel, déjà, moine obnubilé par la bonne chair, et un peu lâche.

La scène de la confession de l’aubergiste jouée par Françoise Rosay (son mari étant campé par Carette), derrière une grille à marrons, est sans doute la scène la plus célèbre du film. Elle est effectivement très drôle, mais le film est surtout marquant par sa manière d’égratigner tout ce qui ressemble à une institution : l’église bien sûr, mais aussi le mariage avec un prêche jubilatoire sur le couple, et la justice.

Entre la farce et la chronique sombre et grinçante, Autant-Lara trouve le ton juste, et offre à Fernandel l’un de ses meilleurs rôles, dans un film aussi drôle qu’inquiétant.

Un chien qui rapporte – de Jean Choux – 1931

Posté : 23 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1930-1939, CHOUX Jean | Pas de commentaires »

Un chien qui rapporte

Le chien qui rapporte du titre a été dressé par un maître désireux de se faire de l’argent facile pour rapporter de riches célibataires à des jeunes femmes libres… En l’occurrence à Arletty, quasi-débutante au look très daté années folles, et à la sensualité affolante, laissant plus que découvrir les formes de son corps…

L’histoire, adaptée d’une pièce de théâtre, a l’air un peu con comme ça. Elle l’est, franchement et sans réserve. On a autant de mal à croire à cette histoire de chien dressée qu’aux personnages eux-mêmes, pas franchement dégrossis. Mais le film de Jean Choux a d’autres intérêts.

Choux, surtout connu pour Jean de la Lune avec Michel Simon, est plus un formaliste qu’un raconteur d’histoires. Dans Un chien qui rapporte, il se permet des tas de petites audaces formelles plus ou moins convaincantes, mais dont on ne peut que saluer l’ambition.

Dès le générique, un détail annonce l’approche de Choux : outre la réalisation du film, Choux assure aussi le montage sonore. Et ce n’est finalement pas tant un détail que ça : ils ne sont pas si nombreux, les cinéastes de l’époque, à voir le cinéma comme un art global, où le son est aussi important que l’image. Choux expérimente, donne le sentiment de vouloir tout essayer, avec succès par moment, en vain à d’autres.

Il joue sur le son, donc, faisant résonner une sonnette de porte avec les images d’un rêve, avec le bruit d’un moulin à café qui n’en finit pas de tourner, ou des pas à l’étage du dessus… Il joue avec les cadres, se permettant d’étranges plans à l’envers, ou couchés. Il joue avec la vitesse, accélérant ou ralentissant le mouvement, et avec le montage, parfois syncopé, souvent audacieux.

Ou comment faire d’une histoire sans le moindre intérêt un terrain d’expérimentation assez excitant…

La Route au Tabac (Tobacco Road) – de John Ford – 1941

Posté : 22 janvier, 2021 @ 8:00 dans 1940-1949, BOND Ward, FORD John, TIERNEY Gene | Pas de commentaires »

La Route au tabac

Sur le papier, Tobacco Road est une sorte de film jumeau des Raisins de la colère, un an après le succès de ce dernier. C’est l’histoire d’une famille miséreuse qui se débat pour garder sa terre sur « Tobacco Road », ancienne route fertile à la grande époque du Sud producteur de coton, où survivent dans des taudis ou dans les ruines des grandes propriétés les descendants de vieilles familles jadis prospères.

Mais le film est adapté d’une pièce de théâtre, elle-même tirée d’un roman. L’origine théâtrale se fait étrangement sentir dans les premières scènes, avec un jeu outré et des dialogues qui semblent ne pas tenir compte des grands espaces qu’offre le cinéma. « Faisons comme si on ne l’avait pas vu, soyons naturels », crient les personnages à portée de voix du nouveau venu…

Surtout, il y a un humour décalé qui vient probablement de la pièce, en tout cas en partie, et qui donne au film un ton étrange, déroutant. Ford filme ça avec une certaine légèreté, voire avec une franche dérision. Pourtant, la misère qu’il décrit est par certains aspects plus terrible encore que dans son adaptation de Steinbeck, qui au moins révélait une superbe humanité collective.

Il n’en est rien ici. Derrière la farce, Ford met en scène de vrais dégénérés qui passent leur vie à hurler, mentir, se voler, se tromper, s’humilier. Quelle famille ! Le père et la mère se cachent pour ne pas partager leur nourriture avec les enfants. La fille, jouée par Gene Tierney, est une sorte de nympho attardée. Le fils, lui, est un gamin demeuré et odieux, que veut épouser une veuve bigote, et qui hurle des horreurs au nez de ses parents… On est loin de la famille Joad !

S’il faut résumer, Tobacco Road est plutôt un ratage pour Ford, miné par quelques moments gênants : Gene Tierney et Ward Bond rampant dans la poussière l’un vers l’autre, dans une sorte de danse de pré-accouplement motivée par des navets… Un moment qu’on découvre avec des yeux ronds d’étonnement, disons.

Mais il faut aussi rendre au film une certaine justice. Il y a dans Tobacco Road quelques très belles scènes. Les larmes dans les yeux de Charley Grapewin (déjà Grandpa Joad dans Les Raisins…, et formidable dans un rôle typique du cinéma de Ford), le face-à-face silencieux avec sa femme (jouée par Elizabeth Patterson), le regard bienveillant de « l’ange gardien » (court rôle pour Dana Andrews)…

Esthétiquement, c’est même une réussite éclatante. Les images sont superbes, Ford filmant ces taudis comme les symboles d’un paradis perdu. La scène où le couple Lester quitte la maison et se dirige, le pas lourd, vers l’hospice, longeant en ombres chinoises des clôtures tellement fordiennes, est une image belle et déchirante.

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