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Archive pour la catégorie 'LEE Spike'

Nola Darling n’en fait qu’à sa tête (She’s gotta have it) – de Spike Lee – 1986

Posté : 22 septembre, 2023 @ 8:00 dans 1980-1989, LEE Spike | Pas de commentaires »

Nola Darling n'en fait qu'à sa tête

Le premier long métrage de Spike Lee n’est ni le plus abouti, ni le plus emblématique de sa carrière, loin de là. Mais le cinéaste y affirme déjà un ton, une certaine liberté, et ce sens de la rupture qui caractériseront beaucoup de ses films. Un mélange d’ironie mordante et de bien-pensance aussi, qui fait que même quand il secoue l’ordre établi, Lee reste un citoyen bien élevé.

Le personnage de Nola Darling ressemble en fait beaucoup à son cinéma : une jeune femme noire ivre de liberté, qui multiplie les amants tous différents les uns des autres, comme un refus de se plier à la norme, mais qui se révèle incapable de choisir entre une facette ou l’autre de l’homo erectus. Ou une fausse nympho qui finit par opter pour la chasteté.

Bref, Nola Darling n’est pas telle qu’elle semble être au premier abord, pas plus que le cinéma de Spike Lee, qui est finalement moins politique que… cinématographique. C’est sur la forme, plus que sur le fond, que Lee est grand. On ne peut pas dire que ce constat soit évident dès ce premier film, encore un peu brouillon, plus bouillonnant que maîtrisé. Mais quand même…

Si Nola Darling… tranche avec de nombreux (premiers) films de cette époque, ce n’est pas tant par la liberté affichée de son héroïne. Sur ce plan, Lee n’invente pas grand-chose : son cinéma évoque même celui d’un Cassavetes des premiers temps, en plus sage et moins subversif. Mais dans la forme, il impose déjà une marque très personnelle, par quelques détails qui lui sont propres.

Sa manière de filmer le visage et le corps de Tracy Camilla Johns (pas une grande actrice, mais une grande présence… qu’on ne reverra quasiment plus par la suite), son utilisation des travelling et des gros plans, sa construction qui évoque un journal intime, ou l’irruption soudaine de la couleur dans un film au noir et blanc granuleux. Des petites choses qui assoient déjà le regard singulier de Spike Lee.

Clockers (id.) – de Spike Lee – 1995

Posté : 22 février, 2021 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, LEE Spike | Pas de commentaires »

Clockers

Un quartier noir de New York, drogue, violence, destin… Spike Lee en terrain connu ? Oui, mais avec ce film en forme de polar, le cinéaste surprend et séduit malgré tout, avec une sorte de mélancolie désespérée qui dépasse la colère et la morgue, et qu’on ne lui connaissait pas.

Le film s’ouvre sur des photos de cadavres dans les rues, clichés pris sur des scènes de crimes, froids et bruts. Mais la musique que l’on entend est totalement décalée : une chanson soft presque lounge. Le genre de musique que l’on entend presque constamment au cours du film, malgré la violence ambiante latente.

Dans ce quartier où les destins semblent tout tracés, deux personnages tranchent par leurs regards un peu paumés. Strike, un jeune noir dont on sent bien qu’il aurait pu être un type bien dans une autre vie. Un dealer, avec du cœur, mais qui a le don de prendre les mauvaises décisions et de concentrer les rancœurs. l’autre, c’est un flic, le verbe raciste (« no offence ! »), mais l’acte généreux, et l’envie que son travail fasse la différence.

Le premier, c’est Mekhi Phifer, révélation du film, regard dur et brisé à la fois. Le second, c’est Harvey Keitel, l’intensité du flic qui en a trop encaissé. Spike Lee installe autour d’eux la sensation d’une spirale infernale, sans issue. Clockers n’est pas un film sur le racisme, qui n’est qu’une toile de fond, mais sur la prédestination, sur la difficulté de s’arracher à son destin.

Strike s’accroche à ses modèles réduits de train pour s’extirper de cette réalité insupportable, et c’est une idée à la fois naïve et très belle. Idée qui débouche sur une fin inattendue et superbe, d’une douceur presque irréelle.

Inside Man : l’homme de l’intérieur (Inside Man) – de Spike Lee – 2006

Posté : 21 février, 2021 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, LEE Spike | Pas de commentaires »

Inside Man

Skipe Lee signe un vrai film de braquage, brillamment retors et franchement réjouissant, en distillant le mystère et le suspense. Une vraie récréation dans l’œuvre souvent sombre et engagée du cinéaste, qui délaisse pour une fois le thème du communautarisme, à peine évoqué ici. Le racisme si présent dans son œuvre n’est abordé que par quelques détails, des remarques lancées par des policiers qui en disent long sur la vision qu’à Lee des institutions américaines.

Inside Man n’est pas le film le plus personnel de Spike Lee, c’est une évidence. Mais c’est un divertissement de luxe, qui porte tout de même la griffe d’un grand réalisateur, dès la scène d’introduction, avec Clive Owen face caméra. Spike Lee est d’ailleurs, il faut le dire, un grand directeur d’acteur.

Denzel Washington fait ici un grand numéro en flic trouble, acteur génial qui est quand même rarement aussi bien que quand il est dirigé par Lee. Quant à Jodie Foster, elle est formidablement cynique dans un rôle plus en retrait mais marquant. Ajoutez Willem Dafoe en flic mauvais coucheur, Christopher Plummer en banquier au passé bien embarrassant, ou Chiwetel Ejiofor en partenaire enthousiaste de Denzel… Inside Man est un film de genre franchement classe.

Si le film est si séduisant, ce n’est pas vraiment pour le scénario, gentiment retors, mais pour le décalage constant que choisit Spike Lee à force de petits détails. La musique, loin des notes dramatiques habituelles. Le fait de dissimuler le visage de Clive Owen dans la plupart de ses scènes. Le plan typique de Spike Lee où Denzel Washington, sous le choc, avance face caméra comme en lévitation. Ou encore cet autre plan tout simple d’un coin de rue quasi désert, filmé en plongé, où apparaissent deux silhouettes dont les ombres s’allongent longuement devant eux… Trois fois rien, une image sans réelle importance, mais qui rend soudain palpable le crépuscule, l’attente, cette espèce d’entre-deux incertain.

Jungle Fever (id.) – de Spike Lee – 1991

Posté : 26 juin, 2020 @ 8:00 dans 1990-1999, LEE Spike | Pas de commentaires »

Jungle Fever

Un noir à qui tout réussi: belle femme, chouette gosse, grande maison, et un boulot d’architecte dans un cabinet de blancs. Où il a, un soir, une aventure avec sa nouvelle assistante, une blanche, italienne, qui vit dans un milieu oppressant et très communautaire…

Le communautarisme, comme une traduction des préjugés et du sectarisme… Spike Lee ne se montre guère optimiste sur un destin commun possible entre noirs et blancs. Mais son film évite soigneusement tout parti-pris communautariste justement. Les noirs, les blancs, les catholiques, les juifs, les Italiens… A tous, la même défiance, le même pré-supposé raciste, à un niveau ou à un autre.

Spike Lee peut être un cinéaste très en colère. Avec Jungle Fever, c’est moins de la colère qu’une profonde tristesse qui se dégage, comme un sentiment de gâchis: histoire d’amour ratée, couple gâché, vie de famille sacrifiée… Chaque rapport humain semble basé sur un échec. L’échec d’un père (ces pères, quand même…), l’échec d’un fiancé, l’échec d’un frère, d’un fils, d’une mère, et même d’un ami qui n’a pas si tenir sa langue…

Le casting est beau autour de Wesley Snipes: Annabella Sciorra, John Turturro, Spike Lee lui-même, Samuel L. Jackson, Tim Robbins, Brad Dourif, Helle Berry et Anthony Quinn… Belle mise en scène aussi, avec quelques effets purement cinématographiques, comme des parenthèses: un rond qui se referme sur un détail, des gros plans sur deux personnes qui marchent et parlent face caméra, comme s’ils planaient…

BlacKkKlansman (id.) – de Spike Lee – 2018

Posté : 29 octobre, 2018 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, LEE Spike | Pas de commentaires »

BlacKkKlansman

Spike Lee fait une (presque) entrée bien tardive sur ce blog. Après huit ans d’activité intense, à voir et commenter quelques centaines de films (c’est pour vous que je m’astreins à un tel labeur), il n’y figurait jusqu’à présent que pour un documentaire consacré aux 25 ans de l’album Bad de Michael Jackson. Excellent docu, d’ailleurs. Mais c’est dire à quel point je suis passé à côté de ses derniers films, moi qui avait tellement aimé Summer of Sam, et surtout La 25e heure, pour n’en citer que deux.

Eh bien nos retrouvailles sont particulièrement chaleureuses, et c’est avec beaucoup de plaisir que je me suis replongé dans l’univers du Spike. Toujours en colère, toujours cynique, toujours engagé, bien sûr. Avec la même volonté de bousculer et de confronter l’Amérique à ses travers. Les dernières minutes du film, images d’actualité montrant les dramatiques événements de Charlottesville, avec un montage particulièrement incisif.

Ce drame (une jeune fille écrasée par un militant d’extrême droite lors d’une manifestation) s’est produit après le tournage du film. La décision de Lee d’en inclure des images à la fin de son film, avec l’accord de la famille de la victime, donne une résonance particulière à cette histoire, tirée du récit autobiographique d’un jeune policier noir ayant infiltré le Ku Klux Klan dans les années 70. Parce que si l’intrigue se déroule avant la réélection de Nixon, dont on voit des affiches de campagne, Lee ne parle en fait que de l’Amérique de Trump.

Le réalisateur revient presque inchangé, mais à quelques nuances près quand même. L’humour qu’il insuffle n’est pas nouveau : c’était même l’une des marques de fabrique de ses premiers films. Mais la colère que l’on retrouve est nettement plus nuancée que par le passé. Et l’ironie se fait plus mordante. Bien sûr, les néonazis sont des salauds irrécupérables. Mais Lee ose faire des graduations dans l’abject, et rendre le responsable local du KKK presque sympathique par moment, en regard en tout cas de son bras droit totalement malade.

D’ailleurs, le KKK est aussi grotesque que dangereux, devant la caméra de Lee. Et la plus grande victoire de ces flics noir et blanc, interprétés par John David Washington et Adam Driver, n’est pas tant d’avoir déjoué un attentat que d’avoir ridiculisé le grand manitou du Klan. Et les salauds sont des clowns morbides destinés à l’implosion (au sens propre comme au sens figuré).

Derrière le polar, derrière la comédie aussi, le film tente de répondre à une question simple : comment en est-on arrivé là ? Qui est responsable ? Les racistes bien sûr, mais pas seulement : blancs, noirs… tout le monde a laissé pourrir la situation. « Si on continue comme ça, ils finiront par prendre le pouvoir », prédit même un (bon) flic blanc au héros noir incrédule, annonçant l’élection de Trump.

Pas manichéen pour deux sous, pour le coup, Spike Lee n’épargne vraiment personne quant à la responsabilité de cette Amérique si fractionnée de 2018. Avec un raccourci peut-être un peu rapide, mais surtout fulgurant et cinglant, il en attribue le germe au développement de la culture de masse, et plus précisément à Naissance d’une Nation, premier blockbuster de l’histoire, dont la vision héroïque et romantique du KKK a permis au Klan de connaître une nouvelle vigueur. Et au racisme de prendre une nouvelle forme, latente, et durable.

Malin, bien vu et terriblement désenchanté. Ah oui, en plus c’est un film de genre assez formidable, mené à un rythme d’enfer. Et avec deux acteurs au top : l’excellent Adam Driver, et John David Washington. Le fils de Denzel, qui fut Malcolm X pour Spike Lee, est la révélation du film. Et c’est tout un symbole.

Bad 25 (id.) – de Spike Lee – 2012

Posté : 3 novembre, 2015 @ 2:49 dans 2010-2019, DOCUMENTAIRE, LEE Spike, TÉLÉVISION | Pas de commentaires »

Bad 25

Depuis une vingtaine d’années, Spike Lee alterne films de fiction et documentaires, tout en gardant une vraie cohérence dans le choix de ses sujets: un portrait du footballeur Jim Brown, une série de films sur les effets de l’ouragan Katrina… Lee reste l’étendard de la population noire américaine. Le voir s’intéresser au King of the Pop Michael Jackson n’est donc pas exactement une surprise…

Commandé à Lee à l’occasion des 25 ans de l’album Bad, Bad 25 est un film de montage, constitué essentiellement d’images d’archives, souvent rares, et d’interviews d’époque. L’unique bémol vient d’ailleurs des images tournées pour le film : des entretiens avec des proches de Michael, qui tendent tous vers cette apogée détestable, une longue série de gros plans interminables sur ces proches qui tentent de retenir leurs larmes à l’évocation de la mort de Michael. Totalement impudique et outrancier.

Vraiment dommage, parce que ce docu a par ailleurs de la gueule. Même si les images ne sont pas de lui, Spike Lee transforme ce film de commande en une œuvre finalement très personnelle, grâce à un montage original et totalement subjectif.

Portrait d’une mégastar au sommet et forcément en plein doute (comment faire mieux après le triomphe historiqie de Thriller, son précédent album), Bad 25 plonge au cœur du processus créatif de l’artiste, les images d’archives et les interviews évoquant à tout de rôle toutes les chansons de l’album : les dessous de leur écriture, leur enregistrement, la manière dont elles ont été accueillies…

Pas besoin d’être un immense admirateur de Michael Jackson (bon… mieux vaut quand même ne pas y être allergique): ce docu habité et passionnant apporte un regard neuf et sur la gestation d’un monument de la musique pop.

 

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