Secret défense – de Philippe Haïm – 2008
Un film d’espionnage qui respecte toutes les règles modernes du genre, et dont le principal défaut est d’avoir été suivi par les excellents Zero Dark Thirty et Möbius, deux films qui, chacun à leur manière, explorent les méandres du renseignement post-11 septembre. Le film de Philippe Haïm est par moment une sorte d’ébauche de ces deux films, avec une même vision sombre et sans concession de l’humanité (mais c’est inhérent au genre depuis toujours).
Il y a une idée forte au cœur de ce film : montrer les destins parallèles de deux jeunes Français complètement paumés qui vont être happés chacun à leur manière par cette guerre qui ne dit pas son nom. D’un côté, Nicolas Duvauchelle, petit dealer sans avenir, qui croise l’islamisme radical en prison, et croit y trouver un sens à sa vie. De l’autre, Vahina Giocante, étudiante et pute à ses heures, qui croit trouver l’amour mais se retrouve recrutée malgré elle par la DGSE (sous les traits de Gérard Lanvin).
Deux gamins qui ne cherchaient qu’une seconde chance, et qui se raccrochent à ce qu’ils trouvent. C’est à la fois la plus belle idée du film, et sa limite. Parce qu’en faisant de ses deux personnages principaux des paumés un rien candides, Haïm n’affronte pas frontalement le danger de la radicalisation. Duvauchelle, surtout, est moins converti que manipulé. Sa dernière réplique (« Je ne suis pas Azziz, je m’appelle Pierre ») est éloquente. Quant à Vahina Giocante, son innocence et sa capacité à se faire manipulée jusqu’au bout est assez édifiante.
Pour le coup, c’est son scénario que Haïm aurait dû radicaliser. Mais ses deux jeunes acteurs sont formidables, et constamment convaincants. Et puis, quand il ramène son film au pur plaisir du thriller, le film est une grande réussite. La séquence finale de l’aéroport, en particulier, est un modèle de suspense comme on en voit rarement dans le cinéma français.
Ambitieux, imparfait, et séduisant.