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Archive pour la catégorie 'BONG Joon-ho'

Parasite (Gisaengchung) – de Bong Joon-ho – 2019

Posté : 19 juillet, 2019 @ 8:00 dans * Polars asiatiques, 2010-2019, BONG Joon-ho, Palmes d'Or | Pas de commentaires »

Parasite

Chez Bong Joon-ho, le rire est souvent proche du cri d’effroi. C’était le cas dans The Host ou dans Memories of Murder. Ca l’est tout autant dans ce Parasite, superbe Palme d’Or, qui procure à la fois un extraordinaire plaisir, et un profond malaise. Le genre de films dont on sort emballé et assommé, les deux. Et certainement pas indifférent.

Un an après Une affaire de famille, Cannes confirme en tout cas son goût pour les familles en marge. Ici : le père, la mère, la fille et le fils, qui vivent ensemble dans une certaine harmonie, mais dans des conditions très modestes, dans un entresol où l’unique fenêtre donne sur un coin où les soûlards viennent pisser leur alcool.

Le fils se fait embaucher comme professeur d’anglais particulier par une riche famille (qui elle vit dans une superbe maison d’architecture tout en hauteur, surplombant la ville) en falsifiant un diplôme. Puis s’arrange pour que sa sœur (qu’il présente comme une vague connaissance) soit à son tour embauchée comme art thérapeute. Qui elle-même fait virer le chauffeur de la famille pour que son père soit embauché à sa place. Celui-là réservant le même sort à la fidèle gouvernante pour que sa femme prenne sa place…

Lorsque la famille se retrouve seul dans cette superbe maison, profitant d’un voyage de leurs patrons, se saoulant dans le salon si confortable, on sent bien que tout ça finir très mal, et le suspense est difficilement soutenable, tant Bong Joon-ho sait jouer avec la tension. Parasite est un vrai film de genre : un thriller, ou un film noir aux rouages infernaux. Et ce qui est très fort, c’est qu’il n’y a là pas l’ombre d’un méchant, pas même un personnage antipathique.

C’est l’une des raisons pour lesquelles Parasite est si supérieur à Burning : Bong Joon-ho signe un grand film sur la lutte des classes, sans la facilité de la condescendance. Les riches patrons ont leurs failles, leurs côtés malades ou ridicules : cette obsession de la propreté, ce mal-être dissimulé derrière une apparence si lisse. Mais ils sont aussi bons et attentifs aux autres. Quant aux arnaqueurs, ils affichent une candeur qui fait passer toutes les cruautés.

Il y a pourtant un immense sentiment d’injustice qui se dégage de ce film. Une injustice de fait, qui n’est basée sur aucun mérite trop évident : les « héros » sont pauvres, mais on ne les voit jamais traverser la rue, comme dirait l’autre. La seule solution qu’ils trouvent pour sortir de leur entre-sol, c’est l’arnaque, quitte à marcher sur la tête de ceux dont ils veulent la place. « Bien sûr qu’il a retrouvé une place » assure le père en évoquant le sort du pauvre chauffeur.

Naïfs, candides, grotesques… Les personnages portent souvent à rire, et on rit effectivement souvent. Mais la gravité n’est jamais bien loin, et Bong Joon-ho multiplie les petits signes, de plus en plus prégnants, pour souligner ce sentiment sourd d’humiliation quotidienne. Rien de bien méchant, non, mais un malaise qui ne cesse d’augmenter. Fidèle du cinéaste depuis Memories of Murder, Song Kang-ho confirme une fois de plus qu’il est incontournable. Grand acteur, pour grand film.

Snowpiercer, le transperceneige (Snowpiercer) – de Bong Joon-ho – 2013

Posté : 12 septembre, 2017 @ 8:00 dans 2010-2019, BONG Joon-ho, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Snowpiercer

Première production internationale pour le Sud-Coréen Bong Joon-ho, après une série de grands films qui ont connu d’immenses succès, dans des genres différents, du polar Memories of Murder au mélo Mother en passant par le film de monstre The Host. Loin de perdre son âme en prenant les rênes de cette co-production américano-franco-etc, le réalisateur signe une nouvelle grande réussite, et impose sa marque atypique.

Dans ses précédents films de genre, Bong avait distillé une dose d’humour et de dérision dans des thèmes très sombres. La présence de son acteur fétiche Song Kang-ho y était pour quelque chose, et on le retrouve à l’affiche de ce film post-apocalyptique, dominé par une distribution essentiellement anglophone : Chris Evans, Tilda Swinton, John Hurt, Jamie Bell ou Ed Harris.

A l’origine du film, il y a une bande dessinée française, signée Jean-Marc Rochette et Jacques Lob, dont Bong Joon-ho respecte scrupuleusement l’univers. Lorsque la production est lancée, trois albums sont déjà sortis. Le quatrième qui suivra inclura d’ailleurs les événements imaginés spécifiquement pour le film dans l’intrigue générale.

Et quel univers : une sorte de condensé de l’humanité dans ce qu’elle a de plus diversifiée, et de plus effrayants, vivant reclus dans un immense train roulant sans jamais s’arrêter à travers un paysage de glace. Car dans ce futur-là, l’humanité a quasiment disparu, après que des savants géniaux ont décidé de balancer un gaz dans l’air pour stopper le réchauffement climatique. On voit bien ce qui a plus à l’ironique Coréen : car cette arme censée sauver le monde a bel et bien mis un terme au réchauffement, plongeant la Terre dans une nouvelle ère glacière.

Dix-huit ans plus tard, les survivants roulent sans fin, dans un train mis au point par un puissant démiurge, qui a compartimenté les wagons comme des symboles des classes sociales. A la tête, les leaders qui vivent dans l’opulence. A la queue, les pauvres à qui on a tout retiré : les droits, les possessions et la dignité. Jusqu’à ce qu’un homme au passé trouble et douloureux comprenne qu’il est fait pour mener les siens vers la liberté. C’est Chris Evans, qu’on découvre intense et charismatique. Une belle surprise.

La construction du film est fascinante, lente avancée dans le train où chaque passage d’un wagon à l’autre procure une rupture de ton et de rythme. Et Bong Joon-ho a un talent fou pour passer de la dérision à la tragédie, de l’humour décomplexé à la violence gore. Réjouissant et édifiant, Snowpiercer n’est pas totalement dépourvu de lumière, et présente même une petite (mais vraiment toute petite) lueur d’espoir concernant la nature humaine. Mais à quel prix…

Memories of Murder (Salinui Chueok) – de Bong Joon-ho – 2003

Posté : 19 août, 2011 @ 9:02 dans * Polars asiatiques, 2000-2009, BONG Joon-ho | Pas de commentaires »

Memories of Murder (Salinui Chueok) – de Bong Joon-ho – 2003 dans * Polars asiatiques memories-of-murder

C’est un peu le Zodiac sud-coréen. Tourné avant le film de David Fincher, ce petit bijou du futur réalisateur de The Host est lui aussi inspiré d’une enquête bien réelle, restée irrésolue : celle concernant le premier tueur en série de l’histoire de Corée du Sud. C’était au milieu des années 80 : une dizaine de jeunes femmes avaient été assassinées dans une région rurale du pays, et l’assassin n’avait jamais été démasqué…

D’une beauté formelle saisissante, le film ne cherche pas à sublimer la situation. Bong Joon-ho filme une société qui n’a pas encore tout à fait franchi le pas de la démocratie : l’histoire commence en 1986, année au cours de laquelle une révolte étudiante a été réprimée dans le sang. L’image que le film donne de la police locale n’est d’ailleurs guère réjouissante. Visiblement enfermés dans des méthodes en place depuis des décennies, ces policiers d’une intelligence très limitée n’hésitent pas, quand l’enquête patine, à faire appel à la torture, voire à créer de faux indices. Pour remplacer une empreinte de chaussure effacée par un tracteur sur une scène de crime qui n’a pas été sécurisée, le flic n’hésite pas à créer une nouvelle empreinte avec la chaussure du suspect du moment…

Ce flic, interprété par l’excellent Song Kang-ho (qui sera le fils un peu attardé de The Host), n’est pourtant pas un mauvais gars. Sa volonté d’arrêter le tueur est évidente, et il y fait preuve d’une ténacité à toute épreuve. Bong Joon-ho ne juge personne, si ce n’est ce vieux système qui vivait ses dernières heures, et qui donne lieu à une enquête terrible d’absurdité. Les flics du coin doivent faire avec les moyens du bord, avec leur inexpérience dans ce genre d’affaires, avec des méthodes totalement inadaptées… Absurde, aussi, le recours quasi systématique à la violence dans les interrogatoires : battu sauvagement par l’un des flics, un suspect fait ensuite une pause déjeuner avec ses tortionnaires, devant une émission de télévision.

Grand prix largement mérité au festival du film policier de Cognac, Memories of murder est aussi un vrai polar, et un thriller parsemé de séquences franchement terrifiantes, comme cette longue scène de nuit, dans laquelle une femme seule marche sous la pluie, près d’un immense champ de maïs. Un grand moment d’angoisse.

Au fur et à mesure que le film avance, que le temps passe, et que les victimes se suivent, un sentiment de détresse s’ajoute à l’absurdité. Le flic un peu idiot de la campagne, comme l’inspecteur de la ville, posé et réfléchi, cèdent tous les deux à l’obsession qui, ils le pressentent, ne les quittera plus jusqu’à leur dernier souffle. L’ultime plan du film, silencieux, sur le regard de Song Kang-ho, est un terrible cri de détresse…

 

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