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Archive pour la catégorie 'BELVAUX Lucas'

Rapt – de Lucas Belvaux – 2009

Posté : 4 juin, 2016 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2000-2009, BELVAUX Lucas | Pas de commentaires »

Rapt

Il a un vrai ton, le cinéma de Belvaux. Mine de rien, avec un style visuel qui n’a rien de tape-à-l’œil, le réalisateur construit une œuvre d’une cohérence rare. Rapt rompt pourtant totalement avec le monde ouvrier qui lui avait si bien réussi dans La Raison du plus faible, ou même avec la classe très moyenne de l’excellent 38 témoins. Mais il y a dans tous ces films une même manière de filmer les êtres frontalement et simplement pour mieux démonter leurs travers.

Belvaux adopte les bases du film de genre. Mais c’est bien un cinéma de caractère qu’il fait. En s’inspirant de la célèbre affaire du baron Empain, enlevé en 1978 par des kidnappeurs qui lui ont coupé un doigt avant de réclamer une lourde rançon, ce n’est pas l’intrigue criminelle qui intéresse Belvaux, même s’il n’élude pas les moments de pur suspense comme ce moment où le baron de l’industrie attend de savoir s’il va être libéré ou exécuté.

Ce qu’il raconte, c’est l’effet révélateur de cet enlèvement. Le comportement de tous les proches de cet homme richissime et respecté, dont les réactions rapprochent plus que jamais le cinéma de Belvaux à celui de Chabrol (chez qui on l’a découvert acteur, dans le rôle du postier indélicat de Poulet au vinaigre) : même critique acerbe et sans concession de la grande bourgeoisie, l’ironie en moins. Dans le rôle de l’épouse effacée, éplorée et autocentrée, Anne Consigny est formidable, mélange de froideur absolue et d’extrême fragilité.

Et puis il y a la prestation de Yvan Attal, assez exceptionnelle. Son rôle n’est pas facile, contraint la plupart du temps au silence et à rester dans l’ombre, dissimulé derrière une épaisse barbe et un bandeau qui lui cache le visage. Pourtant, il incarne formidablement cet être tout puissant qui se retrouve coupé de la société, et qui retrouve une douloureuse humanité au fur et à mesure que son comportement se met à ressembler à celui d’un animal : une espèce d’ours enchaîné qui découvre peu à peu la solitude de sa captivité… et celle, pire encore, qui l’attend.

38 témoins – de Lucas Belvaux – 2012

Posté : 5 janvier, 2016 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 2010-2019, BELVAUX Lucas | Pas de commentaires »

38 témoins

En 1964, à New York, une jeune femme de 29 ans était assassinée entre le bar où elle travaillait et son appartement du Queens. Un faits divers tristement banal, mais l’enquête démontrera que, dans les immeubles qui entourent le lieu du crime, 38 personnes ont été témoin du meurtre. 38 hommes et femmes qui ont vu la jeune femme aux prises avec son agresseur, et ont entendu ses cris pendant près d’une demi-heure, et qui n’ont rien fait. Pas même pris leur téléphone pour appeler la police.

De ce faits divers sordide, glaçant et authentique, Didier Decoin a tiré un (excellent) roman, Est-ce ainsi que les femmes meurent ?, publié en 2009. C’est ce roman qu’adapte librement Lucas Belvaux, transposant l’action (ou plutôt le manque d’action) dans un quartier du Havre. Ni huppé, ni laissé pour compte : un quartier « normal » peuplé de gens « normaux ».

Decoin s’intéressait aussi au destin de la jeune femme (Kitty Genovese, dans la vraie vie), et à sa rencontre avec son tueur. Belvaux, lui, débarrasse son film de tout ce qui n’est pas le vrai sujet, la véritable interrogation : pourquoi autant de personnes sont-elles restées, chacune dans leur coin, silencieuse et immobile face à l’horreur, alors qu’un simple coup de téléphone aurait pu changer une vie…

Dans son livre, Decoin avançait une hypothèse : seul, il est facile de faire l’autruche ; dans un groupe, chacun compte sur l’autre… Belvaux, lui, n’apporte pas le début d’une réponse, préférant se concentrer sur la culpabilité, l’incompréhension, le dégoût de soi… Les 38 témoins ne sont pas des monstres : c’est monsieur et madame tout le monde, qui doivent se confronter à leur propre lâcheté, d’autant plus difficile à assumer qu’ils ne la comprennent pas…

Le film de Lucas Belvaux est formidable à plusieurs titres. D’abord, le réalisateur révèle plus que jamais sa patte de cinéaste, qui ne se contente pas d’un sujet fort : dès la séquence générique, troublant ballet des porte-containers dans le port du Havre, une atmosphère se dégage du film, rare et fascinante, à peine troublée par des dialogues un peu trop écrits qui ne sonnent pas toujours très justes.

Et en éludant soigneusement toute dimension romanesque ou polaresque, Belvaux fait le bon choix. Son sujet, ce sont les troubles intérieurs qui naissent de ce manque de réaction. Yvan Attal, témoin brisé par son propre silence, qui décide de tout raconter parce qu’il à besoin d’être jugé, pas d’être compris. Sa fiancée Sophie Quinton, jeune femme quasi-parfaite qui se réfugie dans un déni coupable, prête à tout non pas pour sauver son grand amour, mais leur bonheur confortable. Et la journaliste Nicole Garcia, soudain plus tout à fait persuadée qu’exposer l’inhumanité passagère de ces témoins soit la chose la plus humaine qui soit…

Le film de Lucas Belvaux n’apporte pas de réponse. Il se contente de montrer l’individu le plus normal dans ce qu’il peut avoir de plus abject. A la fois compréhensif et glaçant, 38 témoins est un film fort. Mais sombre.

 

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