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Archive pour la catégorie 'CARPENTER John'

Los Angeles 2013 (Escape from L.A.) – de John Carpenter – 1996

Posté : 10 août, 2021 @ 8:00 dans 1990-1999, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | 2 commentaires »

Los Angeles 2013

Suite ? Remake ? John Carpenter et Kurt Russell (co-scénariste du film) revisitent leur classique New York 1997. On retrouve bien sûr le mythique Snake Plissken, personnage devenu icône en un unique film. On retrouve aussi les mêmes motifs dramatiques, la même construction, les mêmes enjeux, la même intro presque, et un décor qui ressemble à un étrange copié-collé. L’île de New York était transformée en île-prison dans le classique de 1981… Los Angeles est transformée en île et en prison ici.

Doit-on prendre cette suite vraiment au sérieux. That is the real question. Le doute est longtemps permis. La réponse intervient tardivement, et prend (réellement) l’allure d’une vague. Là, le doute n’est plus permis. Los Angeles 2013 peut être vu comme une suite, un remake, un reboot ou quel que soit le terme, mais aussi comme une parodie, et comme une manière de dresser un fier doigt d’honneur à l’industrie hollywoodienne.

OK, on me saoule depuis des années pour que je surfe sur le succès de New York 1997, avec une suite qui serait forcément plus spectaculaire, plus dense, plus riche en effets spéciaux, plus tout… eh bien je vais vous en donner, du surf, et il n’y aura pas de limite à la surenchère. Un doigt d’honneur, vraiment, qui flirte avec le grand n’importe quoi, et qui séduit malgré tout par cette liberté jusqu’au-boutiste.

La plus grande séquence de suspense ? Un défi de basket totalement improbable. La plus grande scène d’action ? L’attaque d’un stade bondé par une poignée d’assaillants en deltaplane. Carpenter se délecte du mauvais goût ambiant, et fait de cette pure commande mercantile un film ouvertement brouillon qui se libère de toute obligation en terme de réalisme, de crédibilité, ou même d’efficacité.

Plus que jamais, Kurt Russell / Snake Plissken est l’alter ego de Carpenter : un électron libre fatigué d’être aux ordres, de faire ce qu’on attend de lui. A l’époque, le cinéaste rappelait dès qu’il avait l’occasion qu’il était devenu un spécialiste du fantastique un peu par hasard, et que son truc à lui c’était le western, ce western qu’il ne réalisera jamais mais vers lequel il n’a cessé de tendre. C’est finalement tout le sujet de Los Angeles 2013.

Plissken, ou Carpenter, suffoque dans cette Amérique aseptisée. La scène finale, qu’on soupçonne être l’unique raison pour laquelle Carpenter a accepté le projet, est une baffe radicale et définitive donnée aux tenants du bon goût, un cri de rage et un doigt d’honneur à l’ordre et à la modernité. Une main tendue vers une forme de liberté liée au western, dans une sorte de superbe« rien à foutre ».

Les Aventures d’un homme invisible (Memoirs of an invisible man) – de John Carpenter – 1992

Posté : 12 juillet, 2020 @ 8:00 dans 1990-1999, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Les Aventures d'un homme invisible

John Carpenter a souvent été tiraillé entre son désir d’indépendance et une attirance pour les studios… Sa filmographie oscille ainsi de l’un à l’autre. Après avoir retrouvé la folle inspiration de ses débuts avec les très libres Prince des ténèbres et Invasion Los Angeles, il faut pourtant attendre quatre ans avant de voir Carpenter retrouver sa place derrière la caméra, cette fois pour une pure commande de studio.

Et celui-ci est le plus « film de studio » de tous les films de studios de Carpenter. Pas un « John Carpenter’s Memoirs… » d’ailleurs, ce qui n’est pas un hasard. Bref. Carpenter, le brillant artisan de Fog, s’essaye une nouvelle fois à un cinéma de commande en bon soldat. Et le résultat laisse dubitatif.

Pas désagréable, ni ennuyeux, non. Il y a même un vrai souffle dans ce film, pas mal d’idées rigolotes, et une volonté de rendre hommage au Hitchcock de La Mort aux trousses : Kaplan et George sont des indices qui introduisent à cette histoire d’un homme ordinaire, plongé par hasard dans un thriller d’espionnage.

On peut aussi souligner la beauté de quelques travellings, forcément très « carpenteriens », ou évoquer la théorie de l’homme qui serait invisible pour la société (déjà au cœur de They live !, notamment). Bref, tenter de retrouver la patte du maître Carpenter. Et on trouverait bien quelques signes par ci, par là, bien sûr.

Mais quand même : le film vaut surtout pour le côté bricolo et inventif des trucages (l’homme invisible sous la pluie, très beau ; l’homme invisible faisant son jogging ou fumant une clope… bien foutu mais vain).

C’est en fait avant tout un véhicule pour Chevy Chase, acteur pas emballant, dont Carpenter semble ne pas savoir quoi faire. Sam Neill est pas mal en méchant très méchant. Mais son grand moment carpenterien est à venir : ce sera pour In the mouth of madness, autrement plus enthousiasmant.

Prince des ténèbres (Prince of Darkness) – de John Carpenter – 1987

Posté : 6 mai, 2018 @ 8:00 dans 1980-1989, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Prince des ténèbres

Après une série de déceptions au box-office, John Carpenter était revenu au sommet avec ce film radical, l’un de ses meilleurs, peut-être le plus angoissant, le plus terrifiant et le plus viscéral de ses films.

Très différent de Halloween, film plus classique dans sa forme, Prince of Darkness en prolonge pourtant l’esprit d’une certaine manière, dans sa manière d’aborder le Mal comme une entité qui menacerait directement et physiquement les hommes. « Le croque-mitaine est à notre porte » peut-on d’ailleurs entendre, comme un clin d’œil au premier classique de Carpenter. Autre clin d’œil : les allées typiques des banlieues bourgeoises américaines, filmées par ces grands travellings qui sont la superbe signature de Carpenter.

Le contexte, cependant, est radicalement différent. Le scénario, signé par un certain Martin Quatermass (pseudo de Carpenter, grand fan de la série des Quatermass), joue habilement sur la frontière entre la science et la foi. Un thème qui permet au cinéaste de dire déjà ce qu’il pense de la religion (il ne s’en privera pas non plus dans Vampires), sans prendre de gants ; Donald Pleasance est un prêtre que l’on voit débarquer en limousine, snobant les SDF et remettant toute sa foi en cause en 10 secondes.

Ce réceptacle mystérieux sur lequel enquêtent étudiants et scientifiques dans une église isolée est surtout l’occasion d’un pur exercice de style, qui ne répond qu’à une ambition : comment utiliser le cinéma pour créer une pure atmosphère de terreur. C’est ainsi une véritable leçon de cinéma que livre Carpenter, enchaînant les moments de pure trouille.

Au-delà des quelques effets un peu faciles, c’est la capacité qu’il a d’instaurer en quelques instants une atmosphère totalement angoissante qui force le respect. Quelques notes de cette musique binaire entêtante et troublante (signée Carpenter itou), quelques gros plans sur des insectes ou le vent dans les arbres, un travelling bien placé… Et on se fout bien de l’histoire, qui n’est qu’un prétexte : Carpenter joue avec nos nerfs. Il en fait ce qu’il veut, et on en redemande.

Le Village des damnés (Village of the damned) – de John Carpenter – 1995

Posté : 16 novembre, 2017 @ 8:00 dans 1990-1999, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Le Village des damnés 1995

Carpenter s’est approprié pas mal de thèmes bien connus du cinéma fantastique. Il a aussi signé un remake officieux de Rio Bravo (Assaut) et un autre, bien assumé celui-ci, de La Chose d’un autre monde (The Thing). Mais ce remake-ci, d’un petit classique du cinéma fantastique british des années 60, a quelque chose d’unique dans sa filmographie.

Même titre, même histoire, même ville, mêmes personnages en grande partie… Pas d’erreur sur les intentions. Le scénario du film de Wolf Rilla est d’ailleurs crédité au générique, au même titre que le roman original. Mais ce Village des damnés-là est tellement un remake qu’il n’existe réellement que comme tel, par rapport au film de 1960.

Ce qui explique les « trous » que l’on peut regretter dans la narration, les ellipses douteuses et une manière parfois hasardeuse d’avancer dans l’histoire. Avec ce film, c’est comme si John Carpenter avait voulu rendre hommage aux aspects les plus réussis du film de Rilla, et surtout rattraper ce qui l’était moins. On a donc des passages qui sont des copiés-collés du premier film, des dialogues entiers repris tels quels. Ces moments là sont d’ailleurs les moins intéressants, comme si Carpenter s’en désintéressait : si c’était bien chez Wolf Rilla, pourquoi s’embêter à vouloir le refaire ?

Dans les différences, en revanche, le film est passionnant. Le film original se concentrait essentiellement sur son couple vedette, reléguant les seconds rôles aux arrières-plans ? Carpenter commence son film en soulignant l’importance de la communauté, et en multipliant les personnages. Celui de George Sanders, d’ailleurs, est « coupé » en deux, repris à la fois par le médecin du village (Christopher Reeve, dans l’un de ses derniers rôles avant l’accident) et par une scientifique d’une agence gouvernementale (Kirsty Alley).

Les pouvoirs des gamins maléfiques avaient des effets trop modestes? Carpenter appuie sur le gore avec un cuisinier qui se transforme en grillade, ou un médecin qui pratique l’auto-opération… Les liens entre ces enfants et leurs « parents » était vite rompus? C’est peut-être là que se situe la plus grande différence, avec des ébauches d’humanisation chez l’un des enfants, et l’envie d’une mère d’aimer son fils malgré tout.

Et puis il y a l’élégance de Carpenter, entièrement au service de l’efficacité du récit, qui s’amuse aussi à s’auto-citer à travers quelques plans typiquement carpenteriens : l’ombre au début du film qui évoque le brouillard de Fog, un travelling sur une haie qui renvoie aux plans inoubliables de Halloween, ou un visage monstrueux en surimpression qui rappelle curieusement Invasion Los Angeles. Tourné après l’un des sommets de sa filmographie (L’Antre de la folie), et avant une ultime série de films sans doute moins originaux, Le Village des damnés a déjà des allures de bilan.

Starman (id.) – de John Carpenter – 1984

Posté : 4 novembre, 2017 @ 8:00 dans 1980-1989, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Starman

John Carpenter qui marche sur les traces de E.T. ? OK, ses films précédents ont été des échecs commerciaux, mais on n’a quand même un peu de mal à y croire. Pourtant, c’est bien ça : Starman est bel et bien une version « adulte » du triomphe de Spielberg. Vous remplacez les enfants qui découvrent un extraterrestre perdu loin de chez lui par une jeune veuve qui découvre un extraterrestre perdu loin de chez lui, et vous obtenez à peu près la même histoire.

Pour être tout à fait précis, notons quand même que Starman n’est pas uniquement un film opportuniste : son scénario et celui de E.T. circulaient en même temps. Et si celui-ci débarque sur les écrans deux ans plus tard, cela relève presque du hasard. Il n’empêche : les deux films sont étonnamment semblables, jusqu’à la manière, cynique, d’évoquer le fameux sens de l’hospitalité de la race humaine.

Et les premières scènes laissent un peu dubitatif. Carpenter, qui sort quand même d’une décennie de sans-faute, signerait une bluette à tendance psychédélique ? L’idée centrale du film est séduisante : l’extraterrestre qui débarque, parce que nous autres Terriens avons envoyé de chaleureuses invitations dans l’espace, prend l’apparence d’un homme mort depuis peu, et entraîne dans sa fuite la femme qui pleure ce dernier. Mais les premiers pas (au premier degré, « les premiers pas » de l’E.T.), et les moues enfantines de Jeff Bridges font craindre le pire.

Mais il se passe quelque chose d’assez inexplicable : le processus mental du spectateur suit remarquablement celui de la jeune veuve, jouée par Karen Allen. Forcément effrayée, voire hostile dans un premier temps, la jeune femme finit par s’attacher à cet étrange étranger à l’air si familier. Et c’est exactement ce qui se passe ici : il se dégage du film, et de chaque personnage, une telle sincérité, une telle empathie, que Starman commence à séduire.

Et Carpenter emporte définitivement le morceau lors de la belle scène du « diner », la nuit. Est-ce ce cerf qui reprend vie ? Le regard si bienveillant de cette serveuse à l’embonpoint généreux ? Ou justement les moues enfantines de Jeff Bridges ? A ce moment-là en tout cas, on plonge totalement dans les grands yeux de Karen Allen, et on les suit avec passion ces deux-là, dans leur improbable cavale vers… Vers quoi ? Une histoire d’amour impossible ? Une seconde chance ? Contre toute attente, Starman se révèle très beau. Une réussite inattendue…

Vampires (id.) – de John Carpenter – 1998

Posté : 3 novembre, 2017 @ 8:00 dans 1990-1999, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Vampires

Monstres, homme invisible, croque-mitaine, voiture tueuse, diable, extra-terrestres… Le cinéma de John Carpenter est tellement rempli des grandes figures du cinéma fantastique qu’il est presque incroyable qu’il ait attendu si longtemps pour se confronter aux vampires. Il en avait d’ailleurs été questions quelques années plus tôt : il avait été question que ce soit lui qui réalise le Dracula, finalement signé Coppola.

On l’imagine sans mal : le film réalisé par Carpenter aurait sans doute été aux antipodes de la sophistication fascinante du film tel qu’il existe. Plus proche d’un pur film de genre, comme l’est ce Vampires au titre d’une sobriété exemplaire. C’est qu’il ne ment pas sur la marchandise : pas question pour lui de révolutionner le genre du film de vampires. Carpenter aime le cinéma de genre, il s’y glisse avec délectation, et c’est avant tout par l’élégance et l’efficacité de sa mise en scène qu’il impose sa marque.

On peut toujours essayer d’y voir des messages ou des thèmes forts : l’église y est ainsi présentée une nouvelle fois (après Prince des Ténèbres) comme une institution hypocrite et inquiétante. Mais le fait est que Vampires est avant tout, et peut-être même exclusivement, un pur film d’horreur, très premier degré, très efficace, très fun, très bien mis en scène, et très mineur dans ses ambitions.

Carpenter y fait un pas de plus vers le western, ce genre qui l’accompagne depuis Assaut et qui n’a jamais abordé frontalement. Visuellement, c’est dans Vampires qu’il s’en rapproche le plus, avec ses grandes étendues désertes, ses paysages poussiéreux, et ses personnages filmés comme une horde de justiciers. Et c’est assez beau : même dans un film mineur comme celui-ci, Carpenter reste un grand formaliste, qui sait composer des images superbes, qui contribuent (au même titre que la musique entêtante de Carpenter himself) à créer le sentiment de peur.

Peu de nuances en revance à attendre du côté des personnages : Thomas Ian Griffith est une personnification du mal assez extrême, et James Woods est un héros bad-ass très dur et très droit. Mais le film révèle quelques surprises du côté des seconds rôles. Quant à Sheryl Lee, la postérité se souviendra d’elle pour avoir jouer une morte dans Twin Peaks… et une moribonde dans Vampires : la pauvre passe la quasi-totalité du film à râler et à trembler, avant de cracher des hectolitres de sang.

La surprise, et c’en est une, vient de Daniel Baldwin. Le frangin d’Alec est un veau, c’est un fait. Mais c’est à lui que revient le plus beau personnage : un chasseur de vampire mordu et promis à un avenir funeste, qui révèle une sensibilité inattendue. Jusqu’à une très belle dernière scène. Petit moment d’émotion dans un film plus franchement porté sur l’action pure et la trouille.

Christine (id.) – de John Carpenter – 1983

Posté : 2 novembre, 2017 @ 8:00 dans 1980-1989, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Christine

On a sans doute toujours tort de dire « il n’y avait que lui pour réussir ce film ». N’empêche : il n’y avait que Carpenter pour réussir ce film qui aurait si facilement pu tomber dans le grand-guignol ou dans le kitsch. Non seulement Carpenter réussit cette adaptation d’un roman de Stephen King, mais il s’en émancipe juste ce qu’il faut pour se l’approprier totalement.

Christine est d’ailleurs une sorte de film-miroir de Halloween, sorti en 1978… l’année où se déroule l’action de Christine. Sans doute pas un hasard. Carpenter fait de la voiture tueuse une incarnation du Mal absolu (alors que l’origine du Mal était plus contrastée dans le roman), à l’image d’un Michael Myers. Et surtout, les deux longs métrages sont, peut-être même avant d’être des horror-movies, des peintures édifiantes de l’adolescence.

Dans Christine, Carpenter se montre même encore plus sombre, encore plus cynique, quant à cet « âge d’or » de la jeunesse. Le « héros », Arnie, est un ado rejeté de tous (à l’exception de son ami sympa, beau, bon et courageux… bref, une sorte d’extra-terrestre), ni très beau, ni très courageux, ni très malin, qui se coupe peu à peu des autres et de toute humanité au contact de la Plymouth rouge toute pourrie qu’il a retapée avec amour, voiture maléfique qui le hante et le transforme.

Le film parle du mal de vivre, de la difficulté de s’accepter, dans cette période de l’adolescence si pleine de changements. Il parle de narcissisme bien sûrs, mais aussi et surtout de frustration. Il y a ainsi un joli personnage, quasiment muet, qui se contente d’apparaître dans quelques plans : une belle blonde, visiblement énamourée de Dennis, l’ami d’Arnie, le genre de fille à qui tout réussit, mais qui devient terriblement touchante à force d’être à ce point ignorée par celui qu’elle convoite. Ce personnage semble n’avoir aucune véritable importance, et apparaît constamment en contrepoint de l’action. Mais sa présence a quelque chose de très émouvant.

Carpenter ne fait pourtant pas de Christine un film à thème ou à thèses. Avec ce beau classicisme et son habituelle élégance, il signe un pur film de genre aux effets spéciaux discrets mais impressionnants, prenant le temps d’installer l’angoisse, dans un long mouvement lent et imparable, comme dans tous ses meilleurs films. Avec au passage quelques images inoubliables. La plus marquante : la folle course de la Plymouth en flammes dans la nuit, qui avance en « recrachant » sa victime sur le bitume…

New York 1997 (Escape from New York) – de John Carpenter – 1981

Posté : 30 juin, 2017 @ 8:00 dans 1980-1989, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

New York 1997

Décidément au sommet, le Carpenter de cette époque. Bricoleur de génie, véritable auteur de ses films, il réalise, écrit, monte et met en musique cette petite merveille de série B, visiblement tournée sans grands moyens mais avec un sens de l’image assez impressionnant. Ça saute aux yeux dès les premières minutes, lorsqu’une simple contre-plongée transforme la silhouette lourde en symboles de la Statue de la Liberté en inquiétante tour de garde…

Bref, la liberté en a pris un coup dans cette vision quasi-post-apocalyptique de l’Amérique. De ce futur, on ne verra d’ailleurs rien d’autre que cette île de Manhattan transformée en gigantesque prison à ciel ouvert, idée géniale qui prend une nouvelle dimension depuis 2001. Car l’image la plus saisissante, c’est peut-être celle de ces Twin Towers autour desquelles toute l’action tourne, et qui pèsent étrangement sur l’atmosphère lourde du film. Et puis la fameuse scène du crash résonne différemment aujourd’hui, avec cet avion présidentiel qui se dirige droit vers les tours de Manhattan.

Quelques fumigènes, des épaves de voitures, des papiers qui volent… Il n’en faut pas beaucoup plus à Carpenter pour transformer des décors familiers en lieu de désolation, et mettre en scène un futur qui semble radicalement différent du présent. Pour une fois (mais la SF n’est pas un genre auquel il est habitué), il utilise même, et plutôt très bien, des maquettes et des matte-paintings, rappelant d’autres temps du cinéma de genre. L’art de bidouiller avec les moyens du bord pour réussir un petit classique instantané de la science fiction.

Carpenter réussit autour un vrai tour de force avec son personnage principal : en quelques plans seulement, Kurt Russell fait entrer Snake Plissken dans la légende, sorte de version à peine modernisée de l’homme sans nom de Clint Eastwood, la fatigue en plus. Désabusé et las (magnifique plan où, ne sachant que faire, il saisit une chaise renversée et s’asseoit dans la nuit), il fait figure d’anomalie dans cette Amérique déshumanisée, dernier survivant d’une espèce révolue. « Je te croyais mort », s’entend-il dire à chaque rencontre !

Et quelles rencontres : Harry Dean Stanton, Ernest Borgnine, Isaac Hayes, Donald Pleasence, Lee Van Cleef… Une formidable collection de gueules pour un film culte qui donnera lieu à une suite-remake-parodie réjouissante.

Halloween, la nuit des masques (Halloween) – de John Carpenter – 1978

Posté : 21 janvier, 2017 @ 8:00 dans 1970-1979, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Halloween

Le film qui pose les bases du slasher, sous-genre qui continue aujourd’hui encore à donner des avatars souvent tout pourris. Mais avec ce petit classique de l’angoisse, Carpenter frappe fort. Parce qu’il assume totalement le côté enfantin de cette peur qui ne repose que sur des fantasmes de gosses. Dans le genre, le cinéaste fera au moins aussi bien avec Fog, grand hommage aux histoires pour faire peur de son enfance. Avec Halloween, il signe déjà un modèle du genre, à la mise en scène d’une élégance folle.

Effrayant à l’extrême, le film repose pourtant sur une recette répétée à l’envi : Carpenter joue avec l’espace pour créer la peur. Il filme un ou deux personnages derrière lesquels le tueur apparaît soudain en arrière-plan à de multiples occasions, toujours sur le même mode. Mais même lorsque l’effet de surprise est passé, l’efficacité reste extrême.

Mais le meilleur dans ce film, c’est la manière dont Carpenter filme ces interminables allées de quartiers résidentiels. Ces paysages urbains, on les a vus des centaines de fois dans le cinéma américain, décor habituel et sans surprise d’une certaine classe moyenne. Mais jamais filmée comme ça, avec ces sublimes travellings à la fois extrêmement élégants, et qui créent une angoisse lancinante.

Le jeu n’est ouvertement pas naturaliste. Donald Pleasance, dans le rôle du « lanceur d’alerte », en fait des tonnes, mais fascine par cette outrance. Et les personnages de jeunes, victimes potentielles du tueur, ne sont que des stéréotypes que Carpenter ne semble pas vraiment prendre au sérieux. Pas plus les rôles secondaires que celui, central, joué par Jamie Lee Curtis, qui dans l’affrontement final multiplie les conneries, lâchant systématiquement le poignard à côté du « corps » du tueur, ou lui tournant le dos !!

Il y a un second degré réjouissant dans cette manière de jouer avec la peur. Ou plutôt un regard enfantin, comme celui qui ouvre le film, nous glissant dans la peau d’un Michael Myers enfant et déjà furieusement dérangé, le temps d’une séquence en caméra subjective. Carpenter se moque du réalisme. Son art est entièrement tourné vers le plaisir de la peur. Pas un hasard si l’action se déroule le jour et la nuit d’Halloween, lorsque la peur devient un divertissement national.

Au passage, Carpenter s’autorise un clin d’œil à The Thing, la production de Hawks que les personnages regardent à la télévision, et dont il signera lui-même un remake mémorable quelques années plus tard.

L’Antre de la folie (In the mouth of madness) – de John Carpenter – 1995

Posté : 2 février, 2016 @ 8:00 dans 1990-1999, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

L'Antre de la folie

Le détective d’une agence d’assurance enquête sur la disparition d’un auteur très populaire de romans d’épouvante… De cette vague trame de départ, et d’un scénario écrit par Michael De Luca qu’il avait refusé à plusieurs reprises, Carpenter tire une œuvre totalement déroutante et fascinante, un pur film de terreur qui s’inscrit dans une longue tradition du genre : celle de la frontière qui disparaît entre le cauchemar et la réalité…

D’où vient alors cette impression de n’avoir jamais rien vu de comparable ? Le film est pourtant, sans doute, le plus ouvertement cinéphile de son réalisateur, qui multiplie les citations plus ou moins évidentes : le Kubrick de Shining (pour la manière de faire émerger la folie), le Dario Argento de Suspiria (pour l’antre de Sutter Cane), et même le Polanski de Chinatown pour la scène d’interrogatoire dans laquelle on découvre le personnage de Sam Neill, trop cinématographique pour être anodine. Sans doute l’une des clés de ce film à tiroirs qui ne se dévoile pas si facilement.

Carpenter ne cache pas ses multiples influences cinématographiques, mais c’est surtout du côté de la littérature d’horreur qu’il puise son inspiration : du côté de Stephen King qu’il cite à plusieurs reprises, et surtout du côté de Lovecraft, dont il illustre mieux que quiconque l’atmosphère apocalyptique. D’ailleurs, le réalisateur cite son film comme étant le troisième élément d’une espèce de « trilogie de l’apocalypse » commencée par The Thing et poursuivie avec Prince des ténèbres.

La filiation avec cette dernière merveille de l’horreur est évidente, et pas uniquement pour la place centrale tenue par l’église, d’où jaillie l’essence la plus « pure » du Mal. Avec L’Antre de la folie, Carpenter prolonge les mêmes thématiques, le même esprit paranoïaque et la même approche de l’horreur qui fait irruption dans le quotidien. Mais il va plus loin, y mêlant une réflexion sur la création, sur la responsabilité de l’artiste, et sur la frontière parfois ténue entre la fiction et la réalité.

On pourrait théoriser à l’infinie sur ce que Carpenter a ou n’a pas voulu dire avec ce film. On aurait sans doute tort : L’Antre de la folie, aussi retors et riche soit-il, est avant tout l’une des formes les plus ultimes du cinéma d’épouvante. En gommant la frontière entre cauchemars et réalité, en laissant planer le doute sur la folie de son personnage (il fallait le talent de Sam Neill pour rendre ce doute si perturbant), Carpenter s’autorise toutes les audaces, toutes les folies, toutes les représentations de l’angoisse et de la peur.

Son film parle de littérature ? C’est pourtant l’œuvre la plus purement cinématographique de Carpenter qui, après une série d’échecs et de revers critiques (Les Aventures d’un homme invisible et son remake du Village des damnés), signe avec ce film dont il ne voulait pas son oeuvre la plus personnelle et la plus terrifiante au premier comme au second degré. Son chef d’œuvre.

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