Une histoire d’amour – de Guy Lefranc – 1951
C’est le dernier film de Louis Jouvet, qui retrouve son réalisateur de Knock. C’est son dernier film, et c’est déjà très triste en soit : le voir ainsi, jeune encore et formidable dans un rôle de flic qu’il compose comme en opposition à celui de Quai des Orfèvres, est un crève-cœur quand on sait qu’il décédera quelques mois plus tard seulement. Et il se trouve que le film raconte une histoire également très triste…
Ça commence par la découverte d’un drame : un couple de jeunes gens (Dany Robin et Daniel Gélin, très jeunes, très beaux et très émouvants) s’est donné la mort dans un car abandonné dans un cimetière de véhicules. Pourquoi se sont-ils suicidés ? Dans quelle circonstance ? C’est ce que va s’évertuer à comprendre ce flic, qui n’a « jamais fait de zèle », mais qui cette fois refuse de classer le dossier sans comprendre.
Il est beau ce film, qui trouve l’équilibre parfait entre l’enquête du flic, fatigué par la mesquinerie des proches qu’il interroge, et les flah-backs, centrés sur ce couple qui se débat dans un monde où leur amour est impossible parce qu’il franchit les frontières de la bonne société : elle est une fille de grande famille, lui est le fils d’un pseudo artiste sans le sou. Leur point commun : avoir des parents toxiques, qui les conduiront à leur perte.
Il y a une étrange légèreté dans les flash-backs, qui nous poussent à espérer le meilleur, alors que le film s’ouvre sur le pire. C’est ce décalage entre ce que l’on sait et ce que l’on se surprend à espérer qui rend ce film si déchirant, et le regard de Jouvet si bouleversant. Derrière son apparente nonchalance, ce flic est d’une humanité magnifique. Cette humanité doit aussi quelque chose aux dialogues signés par un quasi-débutant nommé Michel Audiard, pas encore gâté par sa propre gloire, digne héritier de Jeanson.